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Critiques de Constantin Cavafis (18)
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Choix de poèmes

« En dehors de sa poésie, Cavafis n’existe pas. » Georges Séferis. Presque inconnu de son vivant, Constantin Cavafis fut un être double. Fonctionnaire pour le jour, et poésie pour la vie.



Doubles, ces poèmes le sont encore.



« Ithaque t’as offert ce beau voyage.

Tu n’aurais pas sans elle pris la route.

Elle n’a plus rien à t’offrir. »



Le grec d’Alexandrie, aux poèmes helléniques d’une grâce aérienne, d’un académisme fluide et d’une érudition accessible - le lecteur est invité à gravir les marches immaculées d’un palais d’Ithaque, surplombant l’horizon azur de la mer Ionnienne, le soleil orangé caressant les blanches colonnes corinthiennes, au loin les éparses pinèdes et l’écho des oiseaux.



Tout cela transpire dans sa poésie, sans jamais être décrit. Paradoxe. C’est au lecteur de répondre à ces suggestions et de planter le décor en y associant sa propre culture et son imaginaire. C’est « la poésie la plus antipoétique » note Michel Volkovitch dans sa Préface.

Cavafis va chercher au plus profond de la Mythologie, des paysages, mais n’en ressort que l’écume, quelques strophes épurées, perdues dans l’interligne de la vaste page.



Et puis, les voluptés clandestines. Le poète se fait chair, ses yeux déshabillent les corps des amants de sa mémoire. A nouveau, Cavafis suggère - la sensualité des réminiscences. La peau se souvient et dicte au poète qui traduit ses parfums oubliés.



« Plaisirs de la chair venus

des vêtements entrouverts ;

chair brièvement mise à nu – dont l’image

a parcouru vingt-six années, pour venir à présent

demeurer dans cette poésie. »



Ces deux poètes se réconcilient dans la forme : une tension dramatique, la même lorsque deux jeunes hommes se désirent ou qu’Aristobule est assassiné dans son Palais.



Sa pudeur est presque avare, ses vers sont pareils aux images du passé qui se brouillent dans notre mémoire, ne laissant qu’une impression floue… mais avec quelle force de certitude nous nous accrochons à elle… C’est tout ce qu’il nous reste.



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En attendant les barbares et autres poèmes

Alexandrie, Antioche, Athènes, Sparte, Rome...

C'est en défenseur de la culture classique, de cette histoire de l'Antiquité qui a baigné son peuple, en défenseur de la langue aussi, que Cavafis conçoit la poésie. Ni romantiques, ni truffés de métaphores, d'assonances, ni lyriques, encore moins élégiaques, ses poèmes se veulent factuels et dans la grande tradition de la Grèce antique, à valeur philosophique.

Voyons-le d'abord comme un redresseur de piliers effondrés de notre passé mais aussi comme un témoin des grands mouvements de l'histoire : l'antiquité n'est pas monolithique. La Grèce classique, le siècle d'Alexandre, l'Égypte ptolémaïque et Rome enfin... ont brassé des peuplades, des langues, des religions et des cultures étendues sur trois continents que lui, Grec de la communauté alexandrine du début XXe, tente de raviver.

Manuel d'histoire en quelque sorte, sa poésie est aussi un plaidoyer pour ancrer ses racines et partager la profondeur de la langue et l'étendue de la culture grecques. Une volonté d'épiphanie en quelque sorte.

Mais c'est enfin quand il évoque sa modeste vie personnelle, ses rencontres amoureuses cachées, que Cavafis parvient à nous émouvoir. C'est ce même geste d'épiphanie qui cette fois s'attarde à son vécu, à sa vie de bohème, à ses souvenirs, ses espoirs déçus ou ses désirs réprimés par la société. Évoquant la splendeur de la Grèce oubliée ou de la jeunesse en allée, Cavafis parvient à nous émouvoir avec ce même style descriptif, précis, factuel. L'émotion est toujours tacite, en surplus, laissée à la bonne volonté du lecteur qui, n'en doutons pas, se trouve pris au jeu.



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Poèmes

La lecture des poèmes de Cavafy est à première vue déroutante. J'ai commencé par ne pas trouver cela très poétique. Et puis, petit à petit, je suis entré dans les subtilités et l'infinie délicatesse de cet auteur. Cavafy se cache et ne se dévoile que par petites touches, de plus en plus explicites au fil du temps. Cela tient à son homosexualité, vécue dans la clandestinité, comme toujours à son époque.

De nombreux poèmes sont inspirés de récits antiques, réels ou imaginaires. L'art de Cavafy est d'investir ces très courts récits de toute sa sensibilité. C'est aussi l'attachement à l'identité grecque à travers les lieux et les époques qui s'exprime. L'auteur vivait dans la diaspora grecque d'Alexandrie d'Égypte. Il faut dire que les notes et la magistrale étude de Marguerite Yourcenar aident à enrichir notre lecture de textes dont les références nous seraient inconnues autrement.

C'est une très belle découverte, à faire patiemment: la poésie, le lyrisme discret, l'histoire, et le peuple grec dispersé.
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Poèmes anciens ou retrouvés

Où me mène ma curiosité, parfois ...

Dans ce recueil la première thématique forte qui émerge, est l'histoire et la mythologie grecque, on parle ici de la « Grande Grèce », ancienne et/ou rêvée, celle de Syrie, de Constantinople, la Grèce italique, celle d'Alexandrie où Cafavis vécu la plus grande partie de sa vie ... À travers des figures historiques ou mythiques, le poète montre, au plus près, l'humanité avec ses faiblesses, ses caractères, ses forces. Il y a aussi une forme de philosophie dans certains de ces textes ; p.231, dans Les Ennemis : « Nos ennemis d'à présent ne nous feront jamais de tort. C'est plus tard que viendront nos ennemis, les nouveaux sophistes ».

La seconde thématique se fait jour dans des poèmes plus intimes ; L'amour charnel, les désirs assouvis ou non, les émotions du temps de sa jeunesse. Cavafis était homosexuel mais la plupart de ses poèmes, qui ont quelque chose d'universelle, ne le laissent pas entendre. P. 103 « ... même s'il en est peu qui se laissent capturer, les visions de ton amour sensuel. Glisse-les à moitié cachées, dans tes phrases. Efforce-toi de les conserver, poète... »

Sans doute que dans la traduction, aussi belle et précise soit elle, certaines nuances, certaines clés nous échappent, à nous lecteurs franchouillards, il en reste néanmoins une lecture plaisante et qui satisfait ma curiosité ...

Parce que Cavafis l'alexandrin apparaît dans quelques pages d'Équatoria, le tome 14 des aventures de Corto Maltese ... Allez, salut.

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Eros, Thanatos, Hypnos

Le poète grec alexandrin Constantin Cavafy (1863-1933) est plutôt bien connu en France, où la poésie est peu lue, depuis que Marguerite Yourcenar et Constantin Dimaras firent paraître en 1958 une première traduction de ses oeuvres. Depuis, de nombreux auteurs ont rendu Cavafy en français, comme Dominique Grandmont ("En attendant les barbares et autres poèmes", Poésie Gallimard 1999). Les éditions Riveneuve ont publié en 2010, et réédité en 2020, un livre d'essais et de traductions partielles, écrit par Pierre Jacquemin et préfacé par Nedim Gürsel.



Pierre Jacquemin présente son analyse de la poésie et de l'univers de Cavafy en trois chapitres auxquels il donne le nom des trois dieux Eros, Thanatos et Hypnos, le désir (homo)sexuel, la Mort et le Rêve. Chacun de ses chapitres est suivi d'un choix de poèmes traduits par les soins de l'essayiste.



Il commente l'érotique de Cavafy, son amour de la beauté éphémère des jeunes hommes, les stratégies littéraires qu'il imagine pour échapper au désespoir de la vieillesse. L'essayiste répète en prose, dans une prose logique, ce que les poèmes disent déjà en vers. En d'autres termes, Jacquemin fait des paraphrases de Cavafy, parfois utiles, parfois oiseuses, puisque le poète exprime le même contenu, mieux que lui. Dans une étude sur l'oeuvre d'un tel poète, on aurait pu espérer quelques remarques sur sa versification, sur son style, sur le choix de ses mots, sur les jeux subtils qu'il élabore entre le grec classique ou archaïsant (katharevoussa) et le grec moderne parlé (dimotiki). Écrit depuis vingt-sept siècles, le grec offre à l'écrivain une palette verbale inégalable, que le français ou l'anglais, langues récentes, n'ont pas. Mais non : Jacquemin expose en prose la "pensée" (fuite du temps, perte de la beauté, etc) des poèmes de Cavafy sans tenir compte de leur mode d'expression. On n'aura pas accès au poète Cavafy et à sa façon unique d'accommoder des thèmes poétiques traditionnels.



Dans les éditions normales, les poèmes de Cavafy sont organisés chronologiquement, car l'auteur les avait tous soigneusement datés : ce plan, dès la première édition grecque posthume de ses oeuvres, a été respecté par Yourcenar et Dominique Grandmont. Pierre Jacquemin s'en affranchit, et donne à la fin de ses chapitres une suite désordonnée de poèmes sans aucun souci de chronologie. D'autre part, Cavafy consacre des poèmes à des figures grecques de l'antiquité, du Moyen-âge, et les introduit par des citations en épigraphe, dans le grec ancien de Platon, de Plutarque, de Julien l'Apostat, de l'Anthologie Palatine. Les citations, les dates, l'ordre chronologique, disparaissent dans le livre de Jacquemin.



Pour comparer cette traduction aux autres, et retrouver dans l'édition grecque la trace des poèmes qu'il a choisis, il faut donc tâtonner un peu. J'ai quand même fait l'expérience, en utilisant la version de Dominique Grandmont ("En attendant les barbares et autres poèmes", Poésie Gallimard) et le texte original de l'édition Ikaros (Poiemata), avec le peu de grec que je sais. Il me semble que Pierre Jacquemin propose une version française plutôt meilleure que les autres : il a compris le parti-pris de prosaïsme, ou au moins de sobriété littéraire extrême, du poète, et sait s'y tenir sans ajouter de fioritures ou de mots trop littéraires, comme font Grandmont ou Yourcenar. Il se sert du vers libre français, mais je n'ai pas étudié sa façon de le manier.



Jacquemin sélectionne dans l'oeuvre de Cavafy les seuls poèmes à contenu intime, affectif et homosexuel. C'est son droit le plus strict d'anthologiste, à condition de prévenir le lecteur que "son" Cavafy n'est pas tout Cavafy. Sans prévenir le lecteur innocent, il lui donne du poète une image biaisée et déformée. Il laisse de côté la problématique grecque, hellénique, de sa poésie. Il oublie totalement son sens aigu de la continuité grecque, depuis Homère jusqu'à nos jours. Cavafy prend place, très consciemment, très délibérément, par son style, ses sujets (qui embrassent des figures de l'antiquité à l'époque byzantine et moderne), ses épigraphes et citations, dans une "grécité" que Jacquemin néglige. Significativement, il choisit d'ignorer trois des plus célèbres poèmes de l'auteur : "Che fece ... il gran rifiuto", poème au titre emprunté à Dante et qui devint presque le slogan national de la Grèce en 1940, dans sa guerre contre l'Italie ; "Ithaque", adapté et chanté dans toutes les langues, même le catalan de Lluis Llach ; "En attendant les barbares", autre poème très souvent cité et placé en titre d'une version française de Cavafy. Or ces trois poèmes sont emblématiques de la fonction particulière du poète grec du XX°s, à laquelle Georges Séféris a beaucoup réfléchi en lisant Cavafy... Selon Cavafy et Seferis, le poète grec, au-delà du lyrisme personnel et privé, est la voix collective du peuple grec. En réduisant Cavafy à sa poésie intime et homosexuelle, Pierre Jacquemin le mutile sans nous prévenir de la partialité de sa démarche.



Tous mes remerciements à l'opération Masse Critique pour cet ouvrage. Les envois de Masse Critique souffrent d'un mauvais karma, décidément, et semblent condamnés à la médiocrité.

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Eros, Thanatos, Hypnos

Bien souvent, il faut un passeur pour venir à la poésie de Constantin Cavafy qui demeure peu connu du grand public en France. Dans mon cas, j'ai approché l'homme au travers de l'immense admiration que lui vouait Marguerite Yourcenar – qui a traduit ses poèmes – et découvert le personnage dans le Quatuor d'Alexandrie de Lawrence Durrell où il apparaît comme « le vieux poète ». Né à Alexandrie en 1863, de parents grecs originaires de Constantinople, il a mené une terne vie de fonctionnaire après la ruine de sa famille, tout en frayant avec l'élite cosmopolite de la ville.

La poésie de Cavafy surprend à la fois par son apparente simplicité et son ancrage dans une Grèce immémoriale qui épouserait tous les rivages de la Méditerranée. Pierre Jacquemin, spécialiste de Cavafy, offre ici la traduction et le commentaire de ses poèmes érotiques. Plus que d'érotisme, il faudrait parler de désir, le désir assouvi, mais aussi caché, impossible à satisfaire lors de rencontres furtives dans les quartiers mal famés d'Alexandrie. Les amours homosexuelles du poète ne se vivent que dans l'ombre, dans le jeu du secret et la fièvre des initiés. Les silhouettes fugitives qui traversent ses vers ne sont jamais entièrement révélées, comme si les mots ne faisaient que les effleurer pour soulever à peine la brûlure du souvenir. C'est déroutant de banalité jusqu'à ce que surgisse un éclat de mémoire cueillant l'ultime reflet d'un aimé.
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En attendant les barbares et autres poèmes

J'ai découvert Constantin Cavafis lorsque j'étais à la fac. J'avais entendu parler de lui comme ça, j'ai acheté ce recueil de poèmes ; il est resté 15 ans dans ma bibliothèque et je ne m'y suis pas intéressé plus que ça.

Quel dommage ! ! !

J'ai fait une découverte splendide en lisant ses poèmes. Outre le côté grec très présent (les mythes particulièrement), j'ai surtout était ébloui par la beauté des mots, les sentiments et sensations évoqués et la liberté de ton ! Il a écrit il y a plus de 100 ans et il aborde l'amour homosexuel sans aucun problème.

C'est une très belle découverte et beaucoup d'émotions.



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En attendant les barbares et autres poèmes

Cavafy, quand il se dégage des mollesses fin-de-siècle de certains de ses poèmes d'amour, atteint le sommet de son inspiration dans la plus grande impersonnalité. Il délaisse alors les garçons alexandrins ou les élégies faciles sur le temps qui passe et la vieillesse qui vient, pour laisser parler d'autres personnes, d'autres voix, venues de tous les temps de la Grèce. Quand Ulysse, Anne Comnène et d'autres prennent la parole à travers le poète medium, un autre lyrisme se fait entendre, au-delà des limites de la personne.
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En attendant les barbares et autres poèmes





Il y a ceux dont les noms sont dans notre mémoire,

Alexandre Jannée, petit- fils de Simon Macchabée, y retrouve sa famille;

Il y a celui que l’on a croisé un jour, il y a bien longtemps, dans les ruines de Mystra, Théophile Paléologue,

le mathématicien lettré, parent du dernier empereur de la ville ;

il y a ceux qui sont presque des familiers, Apollonius de Thyane que l’on priait avec Sévère Alexandre ;

et puis,

il y a tous ceux que l’on ne croise que chez Cavafy,

Jean Cantacuzène, Anne Commène,

Et aussi Oropherne -

lui on s’en souvient,

on le voyait dans les éclairs

au-dessus des ruines du château d’Olipherne,

aider Judith à brandir la tête d’Holopherne.

Je demande l’indulgence pour cette facilité que je m’accorde, juste gâterie après la très raide montée jusqu’aux ruines d’Olipherne.

Ces noms, quelquefois imaginés,

à chaque lecture ils reviennent à nous,

comme des voisins,

dont on connait le visage, le nom,

et rien d’autre,

parce que l’on laisse le mystère - ou l’indifférence…

dissimuler les ruines des vies gâchées,

tandis que nous imaginons ce qui nous attend,

le pesant ennui d’hier;

mais peut-être retrouverons-nous, assis au café

à la table voisine,

le désir qui était le nôtre

dans cet après-midi d’été,

c’était, oui, c’était il y a longtemps,

ce souvenir qu’a gardé notre corps d’avoir été tant aimé,

en ces temps où déjà les poèmes de Constantin

accompagnaient nos mélancolies.







Je lis Cavafy dans la traduction de Marguerite Yourcenar, et je lis Cavafis dans la traduction de Dominique Grandmont (Les deux livres dans la collection Poésie/Gallimard)

Je cite ici des mots des poèmes suivants : La ville, Monotonie, La Table voisine, Rappelle-toi mon corps.



effleurements livresques, épanchements maltés http://holophernes.over-blog.com © Mermed
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Poèmes

N° 1499- Septembre 2020.



Poèmes – Constantin Cavafy – Gallimard.

Traduits du grec par Marguerite Yourcenar et Constantin Dimiras.



Constantin Cavafy est parmi les poètes grecs modernes l’un des plus connus. Pourtant il est né à Alexandrie en 1863 et c’est là qu’il mourut en 1933 . Il n’a publié aucun recueil de son vivant se contentant de distribuer chichement des poèmes à des amis ou à des revues (ce qui était une certaine forme de publication) des poèmes qu’il remaniait sans cesse et même pour certains qu’il rejetait (Une première édition posthume et partielle est parue en 1935 suivie en 1963 de l’édition de ses œuvres complètes puis en 1968 une autre consacrée aux poèmes de jeunesse). Il a été une grande partie de sa vie fonctionnaire au ministère de l’irrigation et courtier à la bourse et pendant longtemps son œuvre a été inconnue du grand public. Il est resté très secret, sauf peut-être vers la fin de sa vie où le succès est enfin venu. Dans son œuvre, bien qu’il parlât anglais, français et un peu italien, il est resté grec et s’exprimait dans cette langue, ne faisant aucune place dans son écriture au monde arabe et musulman qui pourtant était son quotidien. Il était un émigré grec à Alexandrie, un levantin, mais, et peut-être malgré lui, il a considérablement marqué la poésie grecque de son temps . Ce qui frappe c’est une poésie qui n’est pas lyrique, qui ne parle pas de la nature, qui est laconique, évocatrice de la rue parfois inquiétante, malfamée, des quartiers interlopes, des lupanars sordides à la recherche de jeunes garçons, des cafés populaires… Elle évoque aussi la rencontre fortuite et éphémère d’éphèbes qui sont ses amants et de leur départ qu’il déplore tout en notant leur âge ce qui traduit à la fois son obsession du temps qui passe, de la vieillesse et sa fascination pour la jeunesse associée à la beauté. Sa poétique ne s’attache pas à un être en particulier comme chez nombre de poètes mais au contraire Cavafy parle souvent de visions furtives, évoque à mots couverts l’amant d’un soir et parfois même fait appel à ses souvenirs. Chez lui, plus sans doute que chez les autres poètes, la poésie est intimement liée à lui-même, avec cet usage du soliloque et de l’auto-évocation, un peu comme s’il ne s’adressait pas au lecteur. Cela certes donne des poèmes sensuels, voire érotiques, mais aussi sans grand lyrisme et le style est à la fois sec et souple, un peu comme dans le grec ancien. A côté de ce penchant essentiellement homosexuel, son écriture se transforme en pastiche, prend une dimension historique, toujours d’inspiration grecque, avec des références à la mythologie (c’est son côté érudite) et fait appel à la notion de destin, de déclin, de moralité, c’est à dire revêt un côté sentencieux. Elle est parfois distante, peu émotionnelle.

Cavafy est un poète chrétien et, avec sa sexualité refoulée, il ne peut que concevoir une culpabilité, et c’est sans doute ce qui a motivé son volontaire maintien dans le secret, refusant la notoriété que son talent aurait pu lui procurer. Il avait en effet peur du scandale que la publication de ses poèmes pourrait provoquer, l’homosexualité était en effet un tabou. Il était l’habitué des tavernes et des bordels et ressentait du désir et de la honte à cause de cela.



Ce que je retiens dans la poésie de Cavafy c’est son aspect éminemment personnel, il explore sa mémoire, la ravive avec des mots et j’y vois un effet cathartique, son écriture ayant aussi une fonction purificatrice pour cet être refoulé, une manière d’y trouver ce que ses amants lui ont refusé, de compenser ce temps perdu pour le plaisir, ce temps enfui que la mémoire fait renaître. Il note aussi le coté transitoire de ses rencontres en parlant de leur départ qui le laisse toujours seul et abandonné, comme une fatalité. C’est une certaine manière de dénoncer le temps perdu, la clandestinité des rencontres, leur côté clandestin, furtif. Il n’empêche, cela fait de lui un être essentiellement solitaire, friand de voluptés mais hanté par la mort, une sorte de danse lente entre Éros, Chronos, Mnémosyne et Thanatos.

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Eros, Thanatos, Hypnos

La vie d'un homme décryptée. La vie d'un homme poétisée.

Ce livre est un véritable cadeau. On oscille entre une analyse très poussée de la vie de Constantin Cavafy et son œuvre. J'admets que je ne connaissais pas du tout ce poète, et l'opération Masse critique aura été, encore une fois, un formidable catalyseur de découvertes !

Les thèmes chers à Cavafy nous touchent tous, l'Amour (et en particulier l'Amour interdit, homosexuel, l'amour qui n'ose dire son nom, pour citer Wilde), la Mort, le Temps qui passe et écrase tout, la Destinée qui se joue bien trop souvent de nous, mais atténuée par Hypnos, le sommeil et ses illusions, car il ne nous reste souvent que cela pour survivre.

« Reviens souvent et saisis-moi la nuit,

Quand les lèvres et la peau se souviennent... »

Merci à Babelio et aux éditions RiveNeuve pour cette merveilleuse traversée dans le monde de Cavafy.

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Poèmes



Il y a ceux dont les noms sont dans notre mémoire,

Alexandre Jannée, petit- fils de Simon Macchabée, y retrouve sa famille;

Il y a celui que l’on a croisé un jour, il y a bien longtemps, dans les ruines de Mystra, Théophile Paléologue,

le mathématicien lettré, parent du dernier empereur de la ville;

il y a ceux qui sont presque des familiers, Apollonius de Thyane que l’on priait avec Sévère Alexandre;

et puis,

il y a tous ceux que l’on ne croise que chez Cavafy,

Jean Cantacuzène, Anne Commène,

et aussi Oropherne -

lui on s’en souvient,

on le voyait dans les éclairs

au-dessus des ruines du château d’Olipherne,

aider Judith à brandir la tête d’Holopherne.

Je demande l’indulgence pour cette facilité que je m’accorde, juste gâterie après la très raide montée jusqu’aux ruines d’Olipherne.

Ces noms, quelquefois imaginés,

à chaque lecture ils reviennent à nous,

comme des voisins,

dont on connaît le visage, le nom,

et rien d’autre,

parce que l’on laisse le mystère - ou l’indifférence…

dissimuler les ruines des vies gâchées,

tandis que nous imaginons ce qui nous attend,

le pesant ennui d’hier;

mais peut-être retrouverons-nous, assis au café

à la table voisine,

le désir qui était le nôtre

dans cet après-midi d’été,

c’était, oui, c’était il y a longtemps,

ce souvenir qu’a gardé notre corps d’avoir été tant aimé,

en ces temps où déjà les poèmes de Constantin

accompagnaient nos mélancolies.



Ce  Grec Égyptien, (1863 – 1933), je le lis chez M. Yourcenar, Présentation critique de Constantin Cavafy suivie d’une traduction des Poèmes (collection poésie/Gallimard) et dans les traductions de Dominique Grandmont, Cavafy, Poèmes (Gallimard, coll. Du Monde Entier) et  En attendant les barbares et autres poèmes (Gallimard)





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En attendant les barbares et autres poèmes

Conseillé par un collègue grec il y a plusieurs années, il était temps que je me plonge dans ce recueil de poèmes de Cavafis. Il semblerait qu'il soit l'un des poètes grecs les plus connus. N'en déplaise à ses admirateurs, je n'ai pas été très émue à travers cette lecture. La poésie n'est déjà pas ma tasse de thé, j'aurais dû encore plus me méfier de la poésie traduite. Seul Décembre 1903 m'a réellement touchée ; c'est bien maigre au regard de la quantité de poèmes rassemblés ici.



Challenge XXème siècle
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Oeuvres poétiques

N°198 - Mai 1998



CONSTANTIN CAVAFY-Poèmes - Présentation critique par Marguerite YOURCENAR.

Traduction du grec par Marguerite YOURCENAR et Constantin DIMARAS.





Est-ce le hasard du calendrier qui nous a fait découvrir au Petit Palais la statue d'un Ptolémée en Pharaon, ces fondateurs grecs de la dynastie Lagide qui régna sur Alexandrie ou ma curiosité des choses de la littérature du Moyen-Orient? L’œuvre de Constantin Cavafy (1863-1933), poète grec né à Alexandrie et présentée par Marguerite Yourcenar ne pouvait me laisser indifférent.

Cavafy lui aussi fut à la croisée de deux cultures exceptionnelles. Né à Alexandrie, il était d'origine grecque mais c'est dans cette ville qu'il passa la presque totalité de sa vie. Il n'en est pas moins considéré comme le plus grand poète grec contemporain. Cultivé et humaniste, il aurait pu être un aristocrate de l'écriture mais les vicissitudes de l'existence en décidèrent autrement qui firent de lui un courtier à la bourse puis un fonctionnaire au Ministère de l'Irrigation.

La gloire ne viendra que tardivement pour cet auteur qui avait choisi de distribuer ses poèmes sur des feuilles au seul usage de ses amis. Ces cent cinquante-quatre poèmes ne furent publiés qu'en 1935, soit deux ans après sa mort et selon un ordonnancement qu'il avait lui-même préparé. Ce sont eux qui sont traduits et publiés ici. Ils constituent son canon.

Il fallait bien toute la culture et le sens de la poésie de l'académicienne pour faire goûter au lecteur la beauté des poèmes de Cavafy. En bonne pédagogue, elle classe les textes selon trois critères: Les poèmes historiques, gnomiques et érotiques. Dans le commentaire qu'elle fait des poèmes historiques elle a soin, pour le lecteur peu versé dans l'histoire de replacer chaque texte dans son contexte notant au passage la liberté qu'a pu prendre l'auteur avec l'exactitude des faits, ce qui au vrai n'apporte qu'une précision technique.

Elle montre que Cavafy était un lettré, un humaniste qui a fait honneur à la culture grecque même si, sous sa plume elle se teintait un peu d'orientalisme. Elle rappelle à l'occasion le climat levantin qui baigne ses écrits. Le problème du destin ne l'a pas laissé indifférent de même que dans les poèmes de caractères et ceux ayant trait à la politique il se montre sensible à la perfidie, au désordre, à l'inertie qui caractérisent l'histoire grecque qu'elle soit ancienne ou moderne.

Marguerite Youcenar distingue ensuite les textes gnomiques qu'elle caractérise comme des "poèmes de réflexion passionnée" où le destin et la liberté se fondent, où Alexandrie est souvent présentée comme un être humain qu'il a passionnément aimé.

Puis viennent les poèmes érotiques. L'auteur de cette présentation note d'emblée que Cavafy prend le parti de l'inspiration exclusivement pédérastique, ce qui pour le chrétien du XIX° siècle qu'il était a une dimension "actes interdits et désapprouvés" mais où la notion de péché est ignorée. Il y a, certes, l'emploi du "il" plus détaché mais il reste que ses poèmes sont toujours directs et personnels. Une remarque cependant, ces textes mettent toujours en scène des éphèbes jeunes dont il note souvent l'âge avec précision comme pour souligner la fuite du temps, de la jeunesse et des plaisirs que pour souligner peut-être qu'à travers le souvenir qu'il a gardé de ses émotions ces poèmes sont ceux de la maturité. L'auteur de cet essai insiste cependant sur le fait qu'à ses yeux ce ne sont là que des poèmes d'inspiration hédoniste ou érotique où Cavafy est souvent absent un peu comme si l'Alexandrin choisissait de colliger pour lui-même ces moments d'exception ainsi que le ferait l'amateur d'une collection précieuse. Ces poèmes sont autant d'occasion d'exercer une mémoire qui l'obsède. Il y a dans l'écriture de Cavafy une sorte de sagesse, de didactisme qui sont peut-être puisés dans la solitude du poète et de l'homme. L'apparente sérénité qui ressort de ses poèmes tient sans doute autant à la quasi-absence de révolte qu'à l'acceptation de la condition humaine qui est la sienne. L'académicienne a bien raison de noter que l'écriture de Cavafy est celle d'un vieillard avec cette dimension du silence et du secret. Il y a aussi chez lui une délectation de l'écriture qui, nous le savons est un plaisir et quel que soit le thème traité c'est à un exercice littéraire auquel il se livre avec passion pour nous faire approcher la notion de l'humain qui est la sienne. Car c'est bien d'une poésie humaine qu' il s'agit, toute en nuances, en non-dits mais aussi distillée dans un vocabulaire à la fois précis et emprunt d'émotions que la traduction de Marguerite Yourcenar a su admirablement rendre.

Je dois dire, à titre personnel que, le livre refermé il y certes les poèmes de Cavafy qui n'avaient pas d'emblée accroché mon attention mais aussi le texte de M. Yourcenar, son délicat scalpel, son sens aigu de la distinction et des nuances et sa constante passion de l'explication dans le respect de l'auteur et de ses émotions, son style à la fois simple et pur qui en fait un livre de référence sur le poète alexandrin. On retrouve ici ce qui a bien souvent été sa règle et qu'elle exprimait dans Mémoires d'Adrien "Un pied dans l'érudition...l'autre dans la magie sympathique qui consiste à se transporter en pensée à l'intérieur de quelqu'un".

Au moment ou l’œuvre de Constantin Cavafy, au cinéma comme à la télévision semble susciter un regain d'intérêt, ce livre publié en 1958 et réédité en 1978 mériterait bien quelque publicité.



Notes personnelles de lecture - (c) Hervé GAUTIER
Lien : http://hervegautier.e-monsit..
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Poèmes

Incomplet et dépourvu d’appareil critique, le travail d’Ange Vlachos n’en offre pas moins de belles surprises. Est-ce par ce qu’il est le fait d’un Grec, et même d’un Alexandrin ? Sa traduction a d’inhabituelles et heureuses tournures. Dans le français de Vlachos, point la langue grecque. Typiquement, dans le poème « Ithaque », Vlachos écrit : « Ithaque t’a donné le beau voyage », conservant du grec l’article défini là où Dominique Grandmont écrit « Ithaque t’a donné ce beau voyage ». De même, Vlachos n’hésite pas à recourir à des archaïsmes en français pour rendre les formules en grec ancien, ou en byzantin par exemple comme dans le poème « Anne Dalassène » : « Oncques ne furent dites entre nous les paroles froides mien ou tien ». Chez Grandmont : « Entre nous, ces mots froids, le tien ou le mien, n’ont jamais été prononcés ». Le travail de Vlachos est intéressant pour ses refus de lisser les aspérités du patchwork linguistique cavafien. On y entend un cosmopolitisme bâtard, celui des royaumes hellénistiques ou des ambiances égyptiennes contemporaines peuplant les poèmes de Cavafy.


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En attendant les barbares et autres poèmes

Onde sensuelle, toi qui me donnes des ailes



On doit à Marguerite Yourcenar, en 1958, l’un des premiers recueils de poèmes écrits par Constantin Cavafis, publié à la Nouvelle Revue Française. Le poète et traducteur Dominique Grandmont en fait une nouvelle sélection en 1999 avec En attendant les barbares et autres poèmes, y incluant certains textes inédits car considérés par l’auteur grec d’origine égyptienne comme non publiables. L’existence même de ce poète est comme un roman, qui débute à la fin du XIXe siècle à Alexandrie, et qui épouse les affres temporels de cette région. Ses parents, originaires de Constantinople, sont de riches commerçants, et il n’a que sept ans quand son père meurt. Sa mère décide de s’exiler en Angleterre, et ils retournent en Égypte quand Cavafis est un adolescent. L’ensemble de son existence sera partagée entre son pays natal et la Grèce alors naissante. Tout en poursuivant une carrière au Service de l’irrigation, il acquiert petit à petit une certaine notoriété en tant que poète, croisant sur sa route Edward Morgan Forster, avec qui il a entretenu une longue correspondance.

Le début



Les disparus, nos défunts, ceux que nous avons perdus nous reviennent parfois en rêve ou en souvenirs. Alors se rappellent à notre mémoire ces instants que l’on croyait avoir oubliés et qui pourtant ont participé à construire les êtres que nous sommes aujourd’hui devenus. Il en est de même de nos désirs inassouvis, ces passions intenses qui nous ont consumés, et qui sont désormais enfermés dans des superbes tombeaux. Tous ces moments sont en effet maintenant allumés derrière nous, comme des cierges. Il ne faut pas se retourner, ne pas regarder ce qui est passé et qui pourrait nous faire faillir, mais avancer droit devant, avec de nouvelles flammes à faire jaillir, alimentés par la vie qui s’offre à nous. Certain vieillard se souvient encore de sa jeunesse passé, et rumine sur ce qu’il est devenu, regrettant de ne pas avoir su en profiter. Mais le temps a passé, trop vite, et il se dit qu’il aurait mieux fait de ne pas écouter la voix de la sagesse, qui l’a empêché de saisir ces opportunités.



Analyse



L’écriture de Constantin Cavafis déborde de sensualité, et cela transparaît dans nombre de textes de En attendant les barbares et autres poèmes. Ainsi les personnages qui peuplent ces poèmes croisent-ils des « corps qu’Éros lui-même […] sembl[e] avoir créé[s] », et les textes sont parsemés de « corps […] éperdu[s] », de « lèvres empourprées » ou de « membres voluptueux ». Chacune de ces poésies raconte une histoire, très courte, qui tient sur quelques lignes, et où Cavafis parvient à rassembler la substance d’un moment fugace, la soudaineté d’un souvenir qui revient à la mémoire, et parfois l’essence même d’une vie. Ainsi en est-il de ce vieil homme attablé dans un café, qui se souvient de ses jeunes années, ou de ce garçon qui se promet de cesser sa vie de débauche pour en un instant y replonger. La mémoire, quelquefois la nostalgie, sont des éléments essentiels de ces tranches de vie où passent les émotions, et où la corporalité et l'immanence du désir sont prégnants.



Rendons à Constantin Cavafis le mérite qu’il a pu avoir de publier au début du XXe siècle, certes pour beaucoup en auto-édition et dans des revues, de nombreux poèmes où son orientation sexuelle ne fait aucun doute. Dans En attendant les barbares et autres poèmes, des garçons attendent de jeunes hommes, des amants se souviennent d’étreintes fugaces dans des « tavernes louches », des lupanars ou d’autres endroits interlopes. Ces êtres ont peur de « se trahir », que « la vie qu’il[s] mène[nt] [n']aboutisse au plus désastreux des scandales ». Anticonventionnel plus ou moins assumé, l’auteur met en avant « la beauté singulière » d’un visage, « une beauté qui s’écarte sensiblement des normes », « avec ses membres de rêve, faits pour des lits que la morale courante qualifie de honteux ». Cette fascination pour les corps d’éphèbes, qu’il compare souvent à des statues, fait référence au courant esthétique néoclassique, qui ont mis en avant les canons de la Grèce antique.



À cette fascination pour l’art hellénistique répondent, dans En attendant les barbares et autres poèmes, plusieurs textes qui traitent de cette époque. Ainsi, souvent, Constantin Cavafis se met-il dans la peau de personnages ayant existé, parfois puissants, tels ces illustres figures de la Maison Comnène, ou inconnus. Il les imagine tantôt à des moments charnières de leur existence, tels ces habitants d’Antioche au moment de l’incendie du temple d’Apollon, à Daphné, en 362, tantôt au seuil de leur vie, voire imagine leurs pensées post-mortem tel Iassès, ce personnage inventé qui parle d’outre-tombe. Les déesses et dieux grecs, les personnages mythologiques, où figurent en bonne place, bien entendu, Achille ou Patrocle, se mélangent dans ces odes pleines de lyrisme et de subtilité. Ce n’est pas un hasard si Cavafis s’est trouvé des affinités électives avec E. M. Forster, ou si Marguerite Yourcenar, helléniste chevronnée, s’est retrouvée dans les mots de ce poète trop méconnu en France.
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Eros, Thanatos, Hypnos

Pierre jacquemin, dans cet essai, offre ce prisme original éclairant les trois aspects de la poésie de Cavafy : Eros, Thanatos, Hypnos.

Hypnos, le rêve, l'illusion, la fuite construite vers le passé parfois réveillé, sauvé par la littérature, en est l'ouverture mélancolique. Une belle suite au livre broché qui était épuisé et que voici donc en collection poche. Une bonne idée. La nouveauté est la préface par le grand auteur turc, Nedim Gürsel qui est particulièrement intéressante.
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En attendant les barbares et autres poèmes

La traduction qui a beaucoup fait pour la célébrité en France de Cavafis est celle de Marguerite Yourcenar en 1958, mais Dominique Grandmont en a donné en 1999 une nouvelle version plus fidèle, en particulier quant à la forme des textes. Mentionnons, parmi une kyrielle de textes plus touchants les uns que les autres, Au même endroit, J’ai tant contemplé… ou Je me prends à rêver…, et surtout celui qui nous semble le plus parfait : Loin Je voudrais raconter ce souvenir…/ Mais le voici effacé désormais..

La sincérité fait la beauté d’une œuvre d’art. Cavafis écrit ce poème en 1914, quand il a 51 ans. A l’époque, c’est un âge où l’on se sent très loin des années de jeunesse. La beauté du corps et son déclin marquent l’auteur. L’émotion de la sensation est avivée par la précision du texte. Homme ou femme, chacun se voit concerné par cette nostalgie bouleversante. Qui n’a pas vécu ces moments intenses et fugaces où soudain la rencontre amoureuse entre en conjonction avec le lieu et la saison, créant une fulguration de beauté dont le souvenir reste douloureusement intact durant toute une vie ?

Si Cavafis raconte la liberté juvénile qui naît aux alentours de vingt / vingt-cinq ans, il ne réclame pas le retour impossible de ce bonheur que lui-même prolongea périlleusement après la trentaine. Simplement, il consacre son art à l’évoquer et il nous atteint, d’une façon toute nouvelle, au plus profond de notre intimité.

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