Jorinde se sépare beaucoup de choses elle aussi. Le plus grand avantage des déménagements, c'est qu'ils permettent de corriger les excès antérieurs. (...) Jeter a un effet cathartique qui lui rend le chaos alentour plus supportable.
(p. 296)
Elle occupait ses heures d'attente à faire la cuisine ou à lire, téléphonait ou se mettait à la fenêtre, sans jamais oublier que tout acte n'était qu'un pis-aller. Sa tension ne cessait qu'avec le bruit de la clé dans la serrure, et Paula se demandait si le problème était seulement l'appartement et tout ce vide à l'intérieur. (p. 25)
Face au chagrin il n'y avait pas de stratégie.
Il était incontrôlable, imprévisible, sans limite. Face à tous les autres sentiments de sa vie Paula avait toujours trouvé comment s'y prendre. Mais là, non. La sidération des premières semaines avait encore été le plus supportable. Cette période où la tête savait mais le coeur pas encore, où ça ne faisait pas encore mal, où c'était encore abstrait. (p. 49)
Je suis couchée dans l’herbe derrière la scierie. Les mots du livre dansent et se brouillent.
Voila que le sommeil me prend comme un voleur, il descend du ciel voilé et pèse lourdement sur mon corps saccagé par l’amour. Les mains de Henner sont là de nouveau – rudes, douces, brutales, exigeantes, et j’ai envie d’elles.
Hartmut est assis à côté de Frieda et lui tient les mains. Cet instant leur appartient, à eux seuls. Dans ce geste muet, il y a toute la souffrance d’avoir cru le fils perdu et toute la joie qu’il soit revenu.
- Encore trois jours. Après il n'y aura plus de RDA.
- Maintenant que c'est définitivement du passé, il y a tant de choses qui me reviennent...toutes sortes de choses...par exemple, qu'en éducation physique, au lieu de lançer des balles on lançait des grenades à main. Mais en fait ça ne nous étonnait pas.[...]
- Et alors ? Jusqu'où allait la tienne ?
- Trois ou quatre mètres maximum. J'aurais sauté avec !
Nous rions tous les deux.
( En cuisine...)
Je suis penchée sur une montagne de pâte levée ; elle me montre la consistance qu'elle doit avoir : tendre comme un sein de femme. Pour comprendre, je me palpe d'abord les seins, puis je tâte la pâte ; Frieda éclate de rire. Ça se ressemble un peu, il n'y a pas de doute.