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Citations de David Shahar (32)


Levitsky était un avocat connu de la rue Ben-Yehuda à Jérusalem et sa réputation d'homme à femmes ne cédait en rien à sa réputation d'avocat. Il l'emportait même sur Reinhold. Un jour Reinhold l'avait rencontré à Jérusalem en compagnie d'une femme assez laide et ce, très peu de temps après qu'on l'eut vu bras dessus bras dessous avec l'une des beautés notoires de la ville. Une fois seuls, Reinhold étonné lui demanda: "Vous qui avez eu droit à une telle beauté, comment pouvez-vous coucher avec un tel laideron?
- Ecoutez mon jeune ami, lui avait dit l'avocat grisonnant lui mettant la main sur l'épaule en un geste paternel, un taureau digne de ce nom monte n'importe quelle vache. Un taureau qui commence à froncer le nez, à faire le difficile, à renâcler devant l'une ou l'autre, savez-vous ce qui lui arrive?
- Non, dit Reinhold qui, pris au dépourvu, ne voyait pas.
- On le condamne à mort. Il est envoyé à l'abattoir s'écria le célèbre avocat embouchant la trompette de la victoire comme s'il se trouvait non pas en pleine rue Ben-Yehuda, mais à la cour d'assises, proclamant que Levitsky avait encore de la force dans les reins et dans ses muscles et que même s'il commençait à grisonner, le jour était encore loin où on l'enverrait à l'abattoir.
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Le sculpteur Jacques Lipchitz raconte que Modigliani, tout faible et phtisique qu'il fût, se battit seul contre tout un groupe de royalistes pour quelques remarques antisémites faites à voix haute dans un café, et ce après s'être présenté ainsi: "Je suis Modigliani, peintre juif!" Et à l'hôpital, au moment de mourir, il murmura: "Italia! Cara Italia!" Si Modigliani, dont la mère était de la descendance de Spinoza et qui s'était installé à Paris, avait le droit d'aimer l'Italie, sa terre natale, pourquoi toi, Carlo Lévi, né comme lui à Livourne et installé à Jérusalem, pourquoi t'est-il interdit de l'aimer?
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Notre tâche, ici, est d'ouvrir les yeux. De voir la réalité telle qu'elle est. De connaître la vérité. De regarder la frites les yeux ouverts, avec une raison lucide et avec courage. De voir la vérité dans toute sa nudité. De la débarrasser de toutes les couches de plâtre, de tous les mondes à venir qui ont rendu les yeux aveugles à ce monde-ci, à la vérité nue, ici et maintenant. À nous, d'arracher de nos yeux tous les emplâtres puants de vieillesse des nirvanas, des paradis, des mondes à venir et de l'immortalité de l'âme qui ont aveuglé nos yeux pendant des centaines et des milliers d'années, à nous de les ouvrir à la lumière de la vérité!
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Ce mot de «Dieu» n'avait pour moi de signification, je n'éprouvais quelque chose de ce à quoi il fait allusion que lorsque, créature insignifiante et excitée, je me tenais devant les montagnes, les espaces, les déserts ou l'infini des cieux et des étoiles qui disent la gloire de Dieu sans paroles et sans discours.
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Jusqu'au jour d'aujourd'hui, je ne sais exactement à quoi faisait allusion l'auteur du verset : «Le Saint, béni soit-il, fait sortir le soleil de son fourreau», mais en ce temps-là, lorsque sur mon chemin vers la bibliothèque de la Benei Berit, s'ouvrait soudain la porte de fer verte, livrant passage à la fille du docteur, j'éprouvais ce que signifiait le soleil sortant de son fourreau : à la vue de son visage, au son de sa voix, le monde s'emplissait de lumière, il se faisait plus large, plus haut, plus libre, meilleur.
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"Les oiseaux, dit Nin-Gal. Chaque oiseau est un miracle qui vole. Comment trouve-t-il le chemin de retour à son nid? Et la cigogne - une fois qu'elle s'est envolée et à traversé des continents entiers, toute l'Europe, toute l'Afrique, une distance de milliers de kilomètres - comment peut-elle retrouver le chemin du retour, non seulement d'Afrique en Europe, mais très exactement jusqu'à son même petit nid, au sommet d'une petite cheminée, sur une petite maison dans quelque petit village d'Alsace. Et moi qui me perds au bout de trois kilomètres. [...]"
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C'est seulement sur le chemin du retour que je lui demandai pourquoi on l'avait enterrée sans même un cercueil. Je ne savais pas encore que je venais d'assister à un rite courant de nos jours et j'étais persuadé que quelque chose d'inhabituel s'était passé sous mes yeux. «Les juifs d'ici, me répondit-il, se hâtent de briser le vase dès l'instant qu'il est vide pour qu'il retourne le plus vite possible à la poussière d'où il vient.»
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Le miracle n'arrive pas toujours d'un seul coup et nous avons vu de ces êtres hors série moisir dans le froid et l'obscurité de longues années durant avant que, soudain, comme un coup de tonnerre dans un jour serein, se produise le miracle. Il y en a pour qui il viendra même si c'est avec retard, mais il viendra!
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La vue de Sroulik l'inondait toujours d'une vague chaleureuse et, depuis l'histoire d'Ortie, il s'y mêlait maintenant une nuance de pitié - une pitié assortie d'un certain scrupule, de quelque remords dus à l'espèce de satisfaction de soi qui prenait racine dans cette pitié même pour son ami : en effet, il ressentait un bien-être, il était vraiment heureux que ce qui était arrivé à Sroulik ne lui soit pas arrivé à lui, qu'il ne soit pas tombé dans le piège, qu'il ne soit pas, de par sa nature même, destiné à être victime de l'amour, de cette maladie qui, comme on sait, est forte comme la mort et entraine toujours sur ses pas un mal plus grave encore, la jalousie, terrible comme l'enfer ; et cette satisfaction le rendait odieux à lui-même car elle était la preuve indéniable de sa bassesse, d'un élément mauvais implanté dans son esprit.
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Et quant à l'existence humaine en soi, c'est là qu'est l'extraordinaire paradoxe. Prenons l'un des plus grands génies Einstein - ce grand cerveau qui explore les fondements de l'existence - le premier vaurien venu peut, d'un seul coup de couteau ou d'une pression sur la détente mettre fin à ses jours ; il est à la merci de n'importe quel accident u tout simplement d'une pierre qui lui tombe sur la tête et c'est là un grand sujet d'étonnement, que cet être complexe, dont la création, le développement et la préservation ont requis tant de soins soit à ce point vulnérable et facile à anéantir. Et pourquoi Einstein? Voici ce chat écrasé qui gît au milieu de la chaussée [...] même dans ce chat s'inscrit, tout au moins du point de vue biologique, un système infiniment plus compliqué, délicat et multiple que dans n'importe quel ordinateur fait de main d'homme et son existence, comme celle de tout corps vivant sur cette terre se trouve exposée à tous les accidents et promise à un anéantissement aisé. Et peut-être y a-t-il là de quoi ouvrir nos yeux à un autre genre d'existence bien plus importante que l'existence périssable et éphémère sur la terre?
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Un garçon qui tourne le dos à tous les plaisirs de ce monde, qui abandonne un bon emploi pour réaliser le rêve de son coeur, on l'appelle de nos jours un idéaliste. Rien à voir avec ces vauriens qui se déclarent idéalistes, ces je-m'en-foutistes qui n'ont d'œil que pour eux-mêmes et sont prêts à faire retourner le monde au chaos pourvu qu'ils accomplissent leurs désirs.
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"Cette maladie s'appelle le jazz", s'écria Gabriel et, sautant de sa chaise, il se mit à danser avec solennité, scandant des pieds, avec une exagération voulue, les rythmes qui montaient du café.
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Elle n'était pas Mme Raban et encore moins Mme Ashtarot ; elle était Mme Himmelsachs. Léa Himmelsachs. Sous ce nom elle était née et sous ce nom elle mourrait le jour venu et toutes ces cérémonies qui couronnent la femme du nom de son mari étaient et demeuraient superflues à ses yeux et exécrables. La femme ne doit pas cesser, sous le prétexte qu'elle est mariée, d'être ce qu'elle est, une personnalité en soi, qui tient debout sur ses jambes et assume la responsabilité de ses faits et gestes.
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D'une manière générale, il partageait les lecteurs - comme les livres - en deux catégories : les vivants et les morts. Les vivants étaient ceux qui lisaient n'importe où, sauf dans la salle de lecture et ceux-là lisaient des livres vivants qui ajoutaient vie à leur vie ; les morts étaient ceux qui passaient leur journée dans la salle de lecture de la Benei Beret et ceux-là, bien entendu, lisaient des livres morts qui ajoutaient mort à leur mort.
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Léa Himmelsachs n'avait pas besoin de l'ignorance où l'on tenait sa contribution pour réaffirmer sa conviction connue que le monde en général ne peut supporter le génie original et moins encore la femme originale.
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Je vis pour la première fois Gabriel Jonathan Louria en un jour mémorable de ma vie, le jour où, de tout près, de l’autre côté de la rue, je contemplai le Roi des Rois, Puissance de la Trinité, Élu de Dieu, Lion de Juda : Haïlé Sélassié, Empereur d’Abyssinie. C’était en 1936 au milieu de l’été – j’avais alors dix ans – et tandis que je montais l’eau puisée à la citerne, sur la large véranda de notre maison qui donnait rue des Prophètes, je vis l’Empereur gagnant d’un pas alerte le consulat éthiopien en face de chez nous. Quand je me retournai, je découvris un homme assis sur la chaise de paille près de la table de la terrasse qui me regardait, moi et le spectacle qui se déroulait devant moi, les yeux souriants. Rentré de Paris ce même jour, M. Louria retrouvait la maison de feu son père, car en vérité, la maison que nous habitions appartenait à son père : Gabriel lui-même y était né, il y avait grandi et le puits qui nous donnait l’eau était le puits de son enfance
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Dans les moments de confidence, il m'avouait avoir du mal à comprendre les illusions du souvenir et les distorsions des impressions et pourquoi c'était précisément la rencontre avec la lumière nue du soleil sillonnant le ciel clair et pur de tout nuage qui avait fait sur lui cette impression d'obscurité, et les espaces du désert ouvert à tous les horizons, l'effet d'une cellule de prison.
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Le Juif, par sa nature même, c'est quelqu'un qui est né dans une terre étrangère où il a grandi, où il a vécu au milieu d'un peuple étranger et qui a besoin d'un gouvernement étranger, d'un État étranger dans lequel il puisse continuer à vivre en tant que minorité, comme un greffon différent plu ou moins haï, plus ou moins toléré.
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L'éclat de joie de vivre et le flot d'amour se transforment en vagues de colère écumantes qui se brisent sur les rochers d'un rivage ennemi comme il était arrivé alors dans le restaurant de la rue Agrippas quand Orita, l'arrêtant d'une tape énergique et décidée, avait coupé court net le jaillissement de désir qui l'attirait vers elle pour lui donner un baiser.
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La concentration émue de son regard dotait chacun de ses mouvements d'un sens mystérieux et, comme un magicien qui fait sortir des lapins frétillants de son chapeau vide, il lui mit dans la main, dans un silence vibrant de tension, l'une après l'autre, les douze épreuves formant les trente-six pages du recueil de poèmes. Ses doigts palpèrent chaque épreuve l'une après l'autre avant que ne s'en s'échappât le charme, comme si elle voulait s'assurer qu'elles existaient bel et bien et soudain, en hâte, elle les roula et les enfouit dans son sac d'un geste décidé de propriétaire, coupant court à toute discussion, comme la petite fille du magasin de jouets qui redoute de voir le vendeur lui arracher des mains le jouet tant désiré.
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