Il est deux heures. Trouver le sommeil, impossible. Rester éveillée, insupportable. Ecrire, seule solution.
D'habitude pleurer m'épuise, je finis toujours pas m'endormir. Faut dire que ça m'arrive rarement ; je ne pleure jamais, moi, j'arrive toujours à me tenir. La dernière fois que j'ai craqué c'était il y a un an, pour Mamie Dina. Là oui, c'était toutes mes larmes. Je me rappelle de ce week-end à la campagne pour son enterrement : j'ai passé le premier jour à pleurer, le suivant à dormir. Il n'y avait que ça à faire, de toute façon.
Ils étaient vieux maintenant, ou peut-être moins jeunes, et le fait que, des années après, tout semble identique à une époque qui ne reviendrait plus était le contraire de la nostalgie : la promesse d'un futur qui ne manquerait jamais de lumière.
Il regarda par la fenêtre ; l'unique chose qu'il aurait voulu rapporter de cet endroit était la lumière : celle immaculée du matin et celle arrogante de midi, les ombres denses du jardin et les reflets cuivrés de la tapisserie du salon.
Nous cherchons dans les livres ce que nous ne comprenons pas dans la vie, et dans la vie ce que nous lisons dans les livres. La voilà, sans doute, notre condamnation au malheur : chercher des réponses et ne récolter que des émotions.
Que voulons-nous oublier, si nous passons notre vie à nous souvenir ? Qu'est-ce que nous nous obstinons à sauver, si ensuite nous devons tout perdre ?
Ainsi, comme dans bien des histoires médiocres mais inépuisables, là où l'amour avait échoué, la fidélité avait triomphé.