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Citations de Elsa Fottorino (78)


Souvent, j’entends des femmes témoigner dans les médias. Sur internet. Afficher leur colère sur les murs. J’ai retenu certains messages. Les prénoms surtout. Ça, j’admire. Pouvoir parler librement. Dire les choses au fil de la pensée. Ne pas retenir ses émotions, les laisser filer comme un missile à travers l’écran.
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C’est ça, le silence. Le pourrissement des familles. C’est ainsi que ceux qui parlent ont continué de parler, et ceux qui se taisent continuent de le faire. J’ai participé à cette grande messe sonore, moi aussi, c’était ma stratégie de repli. Cette parole-là précisément était frappée d’interdiction parce qu’elle ne pouvait être entendue. On m’a dit : « Ce n’est pas le moment. » On m’a dit : « Tu as eu de la chance, tu l’as échappé belle. » De la chance, oui, c’est sûrement ça. Là, j’ai compris. Il faudrait me faire discrète. Ça je savais faire. Je m’étais entraînée depuis l’enfance.
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J’avais été désignée pour porter la honte. Pas eux. Ceux qui ont honte se cachent et se taisent. Ils m’ont regardée me cacher et me taire et ils ont approuvé, chacun à leur manière. Je leur avais montré la voie.
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Fini les grandes chevauchées, aujourd’hui, mes doigts retrouvent sous la forme de réminiscences mécaniques – comme si la main était reliée à une intelligence autonome avec sa mémoire propre – certains parcours de notes, Chopin ou Schumann et même quelques ragtimes joués dans mon extrême jeunesse, réapparus par miracle au bout des doigts comme le relief d’un paysage qui se révèle peu à peu avant de s’estomper en esquisse imprécise.
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Je ne comprenais rien au langage de l’analyse littéraire. Je me rappelle des mots barbares. La narratologie, les niveaux métadiégétiques, intradiégétiques, les citations de Roland Barthes et de Mallarmé, auteurs que j’ai appris à aimer une fois le souvenir de ces mois d’hypokhâgne suffisamment distancés, au point de croire que je les avais chéris cette année-là.
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Au fond, tout le monde avait envie de partir, tout le monde s’en arrangeait. Il y avait des pianos sur lesquels jouer, un parc, une bibliothèque. Tout près, les jardins du Ranelagh, le square Henry-Bataille, le lac du bois de Boulogne, les barques, les coureurs, quelle idée d’aller s’enfoncer dans la forêt de Saint-Germain-en-Laye.
Il m’arrive de frôler le secteur comme on revient sur une scène de crime. Par exemple au chalet des îles.
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Au lieu de freiner, j’accélère de plus belle et il s’écarte pour me laisser passer. Au lieu de l’hiver, c’est l’été et les sentiers sont peuplés de promeneurs. Au lieu d’avoir dix-neuf ans, j’en ai trente et un, personne ne s’attaquerait à une mère de famille de trente et un ans. Au lieu d’être à vélo, je suis à pied et je peux jouer à cache-cache derrière les arbres.
M’enfuir, bien sûr, si seulement j’en avais eu le cran.
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Un manifeste de l’art moderne, couloirs en coursive, hublots, balcons arrondis, grands espaces géométriques, à la mesure des ambitions de ces jeunes femmes, que l’avenir dirait polytechniciennes, normaliennes, énarques, politiciennes, élites intellectuelles, à la mesure de celles que j’avais perdues, entre un dédale de couloirs et de hauts murs fuselés. Il restait la vie dans son objectivité. Dépourvue de charme, de poésie, de ce regard que je croyais avoir conquis sur elle de haute lutte, qui retrouvait le régime de l’habitude, de l’usuel, sans plus d’éclat.
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Passé un certain seuil, la douleur, rien ne peut vous en distraire. Vous y êtes subordonné. Vous lui parlez ou quand vous parlez aux autres, c’est pour la duper. Lui faire croire qu’elle ne vous atteint pas. Qu’elle n’est que de passage, qu’elle ne va pas rester. Je me vois glisser lentement vers la communauté de ceux qui ont mal, ceux qui ont la vision déformée par ce mal. Ils se reconnaissent entre eux, cherchent parfois des solidarités impuissantes à produire un soulagement.
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« On retrouve les coupables le plus souvent par hasard », m’avait-il confié. Parfois, sur un quai de gare. Il m’avait raconté la résolution d’une affaire sur celui du RER A. Chatou, Rueil ou Le Vésinet. Toujours le même coin. Une fille avait reconnu un homme. La police était arrivée et l’avait arrêté. « Sans cela, on n’avait aucune chance. »
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On peut tout imaginer derrière un visage. Même l’impensable. Dans leur métier, ils savent ça. Il faut pouvoir le supporter
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Ces endroits ont pour moi rejoint l’univers de la fiction. Il doit exister sur le seuil un protocole de déformation invisible qui affecte les gestes, les êtres, les raisonnements et les objets. Tout ce que je peux dire, faire, penser dans ces lieux me paraît toujours irréel.
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Il est surtout question d’éliminer tous les gestes superflus. Comme me tenir debout devant un miroir. Adieu les miroirs et les yeux cernés. J’ai entendu : « Ça ira mieux quand le bébé sera sorti. » Il faudrait que les gens arrêtent de donner leur avis. Pouvoir leur dire « ce que vous pensez ne m’intéresse pas ». Oui, ça c’est bien. Ce n’est pas pour les filles dociles comme moi. Trop bien élevée. Tout ce qu’on imagine d’une fille docile. Tout sauf cette phrase dans sa bouche.
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Avec mon ventre j’ai besoin de place pour circuler. Un enfant est sur le point d’apparaître. C’est un garçon. Quand on m’a annoncé son sexe, j’ai songé « un garçon, c’est bien. Il sera en sécurité», c’est venu tout seul, je n’ai pas pu l’empêcher. Il paraît que ce n’est pas bien d’avoir ce genre de pensées, il faudrait ne pas se préoccuper du sexe, un garçon, une fille, cela ne fait pas de différence, exit le rose d’un côté, le bleu de l’autre, il n’est pas né, j’ai déjà tout faux.
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À un certain stade, les maladies de l’esprit sont impossibles à défaire. J’y avais échappé.
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Je vais vous parler de l’horreur. L’horreur banale, anonyme, qui nous cueille sur le sentier de l’ordinaire et nous rend à lui sans laisser de traces. Parfois elle ne rend rien. Je fais partie de celles qui ont eu de la chance, celles qui ont été remises à leur place initiale sans que personne ne constate l’effraction. Sinon peut-être un léger décalage par rapport à la position d’origine, un déséquilibre tout juste perceptible provoqué par ce déplacement. Mais rien qui indiquerait de rupture avec une version précédente de soi.
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Marie Dangerais avait renoncé très tôt au bonheur en épousant Jacques, un pianiste qui aurait sûrement fait une grande carrière s'il ne l'avait pas rencontrée.
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Hélène serait laide un jour. Marie Dangerais le savait. Il suffisait d'attendre.
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