Citations de Emma Green (1675)
J’ai fait de terribles erreurs, je les paye et tu en as pâti aussi. Mais maintenant c’est fini. Les concerts, l’alcool, les excès, la vie au jour le jour. On va ramasser tous ces citrons qui nous sont tombés dessus, on va en tirer tout ce qu’on peut et on va en faire la meilleure citronnade qui soit. OK ?
Lemon est belle. Elle est bien plus que ça. Elle m’éblouit quand elle sourit. Elle me trouble quand elle danse. Elle m’amuse quand elle se met en colère. Elle m’inspire quand sa différence ne l’effraie pas. Elle me plaît quand elle respire, et même quand elle s’interdit de respirer. Elle est touchante quand elle a peur, tellement forte quand elle ose et s’abandonne enfin. Elle m’aguiche quand elle se mord la lèvre, m’attire quand elle remue son joli corps puis se balance, tourne sur elle-même et transpire.
Et je rêve soudain de croiser le regard intense d’un certain hipster, dans ce même miroir. De sentir ses yeux sur moi, sa chaleur, son désir. Mais l’image du gui, du baiser, de cette femme tellement plus femme que moi me ramène violemment la réalité.
Au fond, Roman ne me doit rien. Il ne m’a jamais promis amour, fidélité et tous ces mensonges. Mais le manque de lui n’en est pas moins terrible.
Mais quand Lemon se fait ouvertement draguer par un autre lycéen qui vient s’asseoir à côté d’elle et glisse son bras autour de ses épaules, ma bonne humeur s’évapore. Cette vision me donne envie de soulever mon plateau et la table avec. La rebelle se laisse faire et ça me dérange. Je crois qu’elle sourit presque. Je n’ai aucun droit sur elle et je le sais pertinemment, ce n’est pas la question.
Des citrons jaunes comme le soleil, sucrés comme un baiser, piquants comme la vie. Tu es l’amour de ma vie, ma fille. Je vais sortir d'ici un jour et on rattrapera le temps perdu.
J’ai beau ne plus rien contrôler, me trouver au cœur d’un tourbillon insensé, obsédant, je le sais. D’un regard parfaitement sûr, je lui fais signe que oui. Alors ses doigts plongent et s’aventurent plus bas, écartent ma culotte, découvrent mon intimité. Il me touche et je flanche. C’est inouï à m’en faire frissonner. Je gémis au milieu d’un nouveau baiser, le sens caresser mon clitoris, écarter mes lèvres, s’introduire en moi. Ça me bouleverse de le laisser faire ça, alors qu’il n’a pas le droit. Et d’aimer ça à ce point. Juste un doigt, je soupire. Deux doigts, je crie et m’ouvre à lui pour qu’il n’arrête pas. Jamais. Personne ne m’a fait ça.
Son érection grandit contre ma cuisse, ça me trouble et m’impressionne, mais ça me galvanise aussi. Au rythme effréné de sa respiration, je devine que Roman a follement envie de braver l’interdit avec moi.
Le désir se propage partout en moi, c’est dément, je n’ai jamais connu ça avant.
La rebelle ne cherche plus à jouer les dures, son regard laisse soudain transparaître une faille, une fragilité nouvelle. Je vois rarement la Lemon vulnérable, je sais bien que la fille au caractère tempétueux préfère masquer cette partie d’elle, comme la plupart d’entre nous. Mais cette facette d’elle me remue le bide, me donne envie de la protéger de tout, me fait la vouloir un peu plus encore.
– Mais je suis toujours trop vieux pour toi.
Sa bouche dit ça mais tout son corps crie le contraire, je le vois. Le mien est en feu, malgré le froid qui me saisit. Roman me dévore du regard et je n’ai jamais autant aimé être regardée, désirée, considérée.
J’ai du mal à respirer. Mais rien ne pourrait me faire détacher mes yeux de cet homme interdit. Quelque chose craque en moi. Comme une barrière qui tombe ou une carapace qui se fendille. J’ai follement envie de lui. Peut-être parce que je suis enfin majeure. Peut-être parce que je me sens si seule. Peut-être parce qu’il est l'unique personne ici à me donner la sensation d’exister. Et à me faire réussir à oublier que je déteste ma vie.
Non seulement il faut cacher l’homosexualité des gens, dans ce monde de fous furieux, mais en plus on invente des métiers aux gens qui croupissent en prison et même des rêves à ceux qui n’en ont pas. À quel siècle vivent-ils, sérieusement ? Comment peut-on avoir aussi peu d’empathie, autant de mépris pour les autres ? De honte pour ceux qui sont censés faire partie de votre famille ?
L’interdit m’angoisse… mais pas autant que son intensité me bouscule. Je serais bien incapable de l’arrêter. Soudain, je sens sa dureté contre moi et j’en frissonne : c'est la première fois que j'ai l'impression d'être désirée à ce point. C’est fort, viril, déroutant au point que ça me transcende. J’enfonce ma langue dans sa bouche, soudain prête à tenter tous les extrêmes, à braver tous les interdits pour me sentir vivante, enfin, entre ses bras.
Je l’embrasse sauvagement, comme si ma vie en dépendait. Comme si la bouche de Roman Latimer possédait le seul air qui puisse remplir mes poumons, comme s’il avait le seul cœur capable de supporter les battements déchaînés du mien, comme s’il était le seul être sur cette terre qui comprenne ce que je ressens vraiment.
Je ne suis plus innocente, plus timide, plus prudente.
J’ignore si ce baiser a eu autant d’importance pour lui que pour moi, si Latimer s’en veut d’avoir embrassé l’une de ses élèves, franchi un des plus grands interdits, si le fait que je sois encore mineure le panique, s’il croit que je serais capable de lui nuire… ou si lui aussi rêve de recommencer.
Je vous disais donc que vous n’êtes pas seuls au monde, contrairement à ce que certains d’entre vous semblent croire. Vous êtes tous le résultat de l’Histoire. Et la génération qui est en train de l’écrire. Ce que vous déciderez de faire de vos vies, ce que vous voterez, les lois que vous ferez changer, la société que vous ferez évoluer et les rôles que vous voudrez jouer, tout ça se retrouvera dans les livres d’histoire dans quelques années.
Je suis loin d’être un enfant de chœur, mais ça fait des années que j’essaie d’inculquer à mes classes le respect, de soi et des autres, la morale, le sens de l’honneur, la différence entre les règles que l’on peut enfreindre, par goût de la liberté, et celles immuables, qui permettent de vivre ensemble sans se faire du mal.
Elle a 17 ans. C’est ton élève. Ne fais pas ça.
Mais c’est bien plus fort moi. Je prends juste une seconde pour plonger mon regard dans le sien, comme pour vérifier que c’est bien ce qu’elle veut. Et c’est plus que ça : en fait, elle m’attend. Alors je pose mes lèvres sur sa bouche, sans précipitation, avec délicatesse. C’est doux, chaud. Et tellement puissant. Nos langues se rencontrent, s’enroulent, la sienne est timide, la mienne prudente.
Tu as du potentiel, tu es intelligente, vive, curieuse et tenace, ce milieu ne t’a pas encore transformée, tu as tout pour réussir mais tu te contentes du minimum. Si tu bossais un peu plus, tu pourrais exceller…