Citations de Emma Green (1654)
– On ne croise pas souvent de gens qui sortent de l’ordinaire par ici.
– Je sais, les privilégiés peuvent être d’un ennui…
– C’est ça de vivre dans une petite ville friquée de bord de mer, plaisante-t-elle. Tellement lisse, tellement léchée, tellement… blanche ! Je crois qu’on fait un peu taches, Hazel et moi.
– Vous n’êtes pas beaucoup plus foncées que ces vieilles peaux qui se font bronzer toute la journée !
– C’est vrai ! rit Seraphina. Je voulais le meilleur pour ma fille en venant m’installer ici. Mais je ne sais pas s’il vaut mieux être pauvre parmi les riches et noir parmi ceux qui se trouvent trop blancs… ou le contraire ?
– Mieux vaut être soi-même et se moquer du regard des autres, je crois…
– Facile à dire quand on est belle et forte comme toi !
– Excuse-moi… Tu as dit « bête et folle », c’est ça ?
« Soupe champagne-basilic ». Mon dessert se révèle prétentieux et bien trop léger à mon goût. Comme une robe bouffante, pleine de promesses, qui retombe à la seconde où vous l’enfilez. Déception cruelle.
Un aboiement joyeux retentit, derrière l’immense corps de mon frère et je reconnais Morue. Leur descendance poilue, qui remue frénétiquement la queue. Elle est particulièrement moche, à la fois osseuse et grasse, avec une oreille cassée et l’autre dressée, des poils noirs hirsutes qui ont l’air de s’engueuler pour savoir dans quel sens pousser.
Masquez les quelques imperfections d’un humain : vous perdez toute son humanité.
"Des poussières de River. Dorées et fugaces. C'est tout ce à quoi j'ai eu droit."
La grande porte couine légèrement en s’ouvrant. Je m’attends à me retrouver face à Imogen – gravure de mode du troisième âge – mais c’est un homme qui apparaît. Un homme d’une virilité et d’un magnétisme tels que j’en perds mon latin. « Good Lord! » – Mon Dieu ! – sort de ma bouche, remplaçant le traditionnel « Good morning
J’ai détesté son air indifférent, son costard griffé hyper élégant, son port de tête un peu snob, son sourire impertinent, ses manières raffinées et sa façon de marcher les mains dans les poches pour avoir l’air décontracté. L’archétype du flegme à la sauce british. Mais je dois l’avouer, j’ai adoré son physique racé, ses traits fins, presque féminins, son corps athlétique, d’une virilité à tomber, ses cheveux mi-longs plaqués en arrière et son regard joueur qui n’a pas hésité une seconde à soutenir le mien. Un dandy comme on n’en fait plus, un type unique sur qui n’importe qui se retournerait – en se demandant si c’est un prince anglais ou une star de cinéma
J’essaie de vivre au jour le jour, ici, même si je sais qu’on ne pourra pas rester indéfiniment. En attendant, c’est vrai que l’ado, la petite bouclée et l’angelot muet forment un joli trio, même s’ils doivent user de stratagèmes assez tordus pour communiquer – entre le « frenglish », la langue des signes et les mimes.
y a quelque chose d’un peu surnaturel, ici, presque miraculeux : des plages de sable fin, blanc ou noir, mais aussi des coulées de lave, des forêts tropicales, des massifs volcaniques où il neige parfois, des récifs de corail, des poissons multicolores, des bêtes sauvages, des marchés aux produits incroyables, des habitants à la peau de toutes les couleurs et aux yeux toujours brillants… Hawaï est une terre de contrastes, un lieu surprenant, dépaysant, magnétique comme je les aime.
Je crois qu’on n’en repart pas indemne.
" Aloha : ne signifie pas seulement « bonjour » et « au revoir » comme tout le monde le croit, me révèle soudain l’aventurier. Ça veut aussi dire « amour », « sympathie », « gentillesse », « affection » et « compassion ».
Impossible de ne pas succomber. Une fois que tu as Hawaï dans le sang, c’est foutu. Ça reste là toute ta vie…
Être père, c’est quelque chose que Jet aurait tellement voulu, lui. Quelque chose que je n’ai jamais envisagé. Tout se mélange dans cette histoire, tout me déstabilise et me fait douter. Je ne sais pas où se trouve la vérité
J’aime les gens, les nouvelles rencontres, je n’ai rien contre les gamins en vacances tant qu’ils restent à distance, et les femmes de passage dans ma vie tant qu’elles ne s’attachent pas. Mais je ne supporte pas les invités surprise, les sangsues, les parasites et les touristes qui se croient tout permis. Par-dessus tout, je déteste partager mon intimité. Et j’ai en horreur qu’on me force la main ou qu’on empiète sur ma liberté.
J’ai beau faire la maligne, nos joutes verbales me ramènent brusquement sept ans en arrière : on avait déjà passé la soirée à faire ça, se chercher, se taquiner, se rembarrer, se détester… jusqu’à ce que fièvre s’ensuive. On n’avait trouvé qu’un seul terrain d’entente, qu’une unique façon de régler ça : transformer le tête-à-tête en corps-à-corps.
Ça me tue qu’il soit si sexy, bouillant dedans et glacial dehors. Ça me tue qu’il campe sur ses positions sans même chercher à comprendre, alors que c’est toujours moi, la plus bornée, normalement. Ça me tue que rien ne se passe comme dans mes plans… alors que je n’avais rien prévu.
C’était dans une autre vie. La vie que j’avais choisie. Une vie où je sautais de continent en continent, de pays en pays, de ville en ville, de petit boulot en petit boulot, de fille en fille. Une vie remplie de voyages, de découvertes et de plaisirs, où tout était encore possible.
Je retrouve ma solitude et ce silence que j’aime tant, interrompu seulement par le clapotis régulier des vagues et les bruits francs du travail de mes mains. Mais je suis seul depuis quelques minutes à peine quand le talkie-walkie rangé dans ma poche arrière se met à grésiller.
Elle se marre tout bas, détourne le regard et passe la main dans son épaisse crinière brune. J’ignore si ce geste lui échappe ou s’il est destiné à me séduire, mais elle sait pertinemment que ça n’arrivera plus. Entre elle et moi, c’est désormais strictement platonique. Ça ne l’a pas toujours été, mais je n’ai pas aimé la voir s’attacher. Je ne compte faire souffrir personne ni m’engager avec qui que ce soit. J’ai été clair dès le départ, c’est mon projet de vie depuis toujours : être et rester un homme libre.
La météo annonçait enfin un peu de pluie cette nuit, mais quand on habite sur une île du Pacifique, prévoir le temps ressemble à une partie de roulette russe. À la place des gouttes, c’est un cyclone qui se pointe à la porte du bungalow que je suis en train de construire.
C’est un autre monde. Comme si la terre s’arrêtait ici. Ou commençait peut-être. C’est assez vertigineux de se retrouver sur une île, au bout du monde, et de s’y sentir bien, en paix comme nulle part ailleurs. En une seule seconde.