Citations de Evelyne Lever (71)
Depuis son élévation au rang de maîtresse déclarée, Jeanne-Antoinette se faisait un devoir de protéger les gens de lettres. Mais comment exercer un mécénat littéraire avec un roi qui s'intéressait peu aux livres et se méfiait des écrivains ?
Marie-Antoinette continuait de mener sa vie comme elle l'entendait, consacrant le minimum de temps à ses obligations de représentation. Revendiquant pour une reine le droit à une existence privée, elle entendait se comporter aussi librement que les premiers de ses sujets dont la société fait ses délices. Considérant l'Etiquette comme le symbole d'un temps barbare, elle ne pouvait admettre qu'elle ne s'appartenait pas mais qu'elle appartenait tout entière au royaume de France ; que, placée au dessus des mortels dans une société hiérarchisée à l'extrême, le moindre de ses gestes avait valeur d'acte public.
Toute-puissante à Versailles, Mme de Pompadour avait la nostalgie de Paris. Elle voulait pouvoir s'y promener incognito, faire ses achats dans les magasins de luxe comme toute grande dame de son temps, et aller voir Alexandrine au couvent de l'Assomption. L'appartement que le roi mettait à sa disposition à l'hôtel des Ambassadeurs ne lui suffisait plus.
Pour Marie-Antoinette, qui ne s'intéressait à la politique que par le seul biais des personnes, la défense d'un prétendant aux plus hautes charges prenait l'allure d'un jeu dans lequel elle mettait tout son amour-propre à gagner. Peu lui importait les compétences réelles des candidats, du moment qu'elle faisait triompher le sien. Au reste, elle pouvait ensuite s'en désintéresser totalement.
Le peuple murmure, mais les difficultés de la vie quotidienne l’emportent sur l’indignation.
Mon mal avait besoin d'un plus grand remède que le dépit.
Adieu, le plus aimé des hommes. Calmez-vous si vous pouvez, ménagez-vous pour moi. Je ne pourrai plus vous écrire, mais rien dans le monde ne peut m’empêcher de vous adorer.
La nature reprend ses droits et la femme-chef d’Etat n’a qu’à attendre stoïquement sa délivrance. Mais comme Marie-Thérèse déteste perdre son temps, elle tire parti de l’incommodité du moment pour se faire arracher une dent gâtée.
..le mariage morganatique ,le plus étonnant , le plus surprenant , le plus incroyable , le plus extravagant , le plus contraire à l'esprit de celui qui l'avait voulu fut celui de Louis XIV avec Mme de Maintenon.En 1683, le descendant de St Louis épousait en secret la fille d'un petit gentilhomme de mauvaise vie , voleur et assassin, un certain constant d'Aubigné qui laissa une veuve et une fille sans ressources.
« Belle, l’œil doit l’admirer, / Reine, l’Europe la révère,Mais le Français doit l’adorer, / Elle est sa reine, elle est sa mère. »
Romance en l’honneur de Marie-Antoinette, chanson (1774)
Le dauphin et la dauphine ne filent pas le parfait amour.le prince timide et sauvage est cependant tombé sous le charme de son épouse. Il a confié à ses tantes qu'il la trouve aimable ,mais leur mariage n'est toujours pas consommé. "Vous êtes mon homme , quand serez-vous mon mari ?" a osé demander Marie-Antoinette à son mari , en présence de Mesdames.
Je regarde cette époque comme la plus glorieuse de mes jours, et si l'on me force à me marier, j'en transmettrai la mémoire à ma petite postérité. Mais le seul mot de postérité épouvante ma douce philosophie, méprisant trop la vie pour la procurer à un autre.
À la Cour, la reine n'était pas au-dessus de tout soupçon. Ses légèretés accumulées depuis des années parlaient contre elle. Les libertés qu'elle avait prises depuis son arrivée à Versailles et que la vieille Cour avait tant critiquées plaidaient en faveur du cardinal.
À ce moment, le baron appelle un jeune exempt des gardes du corps : « Je vous ordonne, monsieur, de la part du roi, d'arrêter M. le cardinal et d'en répondre », lui dit-il à haute et intelligible voix. Stupeur et frémissement. La nouvelle éclate comme une bombe. Un prince de Rohan, cardinal de surcroît, arrêté au milieu de la Cour, en habits pontificaux, avant de célébrer la sainte messe, la situation défie l’imagination : il ne peut s'agir que d'un crime d'État trop grave pour souffrir le moindre délai.
Le prince de Rohan croyait si fort aux pouvoirs thaumaturgiques de Cagliostro qu'il jugea opportun de l'emmener avec lui au chevet du prince de Soubise, très malade, à Paris. Ce dernier refusa de le recevoir et recouvra la santé sans le secours de ses mystérieux remèdes.
Comment pourrais-je obéir à un mari qui ne remplit pas ses devoirs les plus sacrés et surtout qui ne me demande rien ? Aujourd’hui, maman prétend qu’un heureux mariage est le seul vrai bonheur en ce monde. Encore faut-il être deux pour le vouloir et que l’union soit consommée. Et pour comble, elle ajoute que tout dépend de la femme si elle est complaisante, douce et amusante. Monsieur le dauphin ne se soucie guère de savoir si je serai complaisante (ce que je ne serai jamais). Quant à ma douceur, qui a ses limites, encore faut-il être capable de l’éprouver. Enfin, sur le chapitre de l’amusement, je le surpasse sans grand effort. De cela personne ne peut douter. Lui excepté, naturellement. C’est un homme de bois. Depuis notre première rencontre, il ne m’a pas donné la plus légère marque de goût ou d’empressement, ni en public ni lorsque nous sommes seuls.
Toute la cour sait que notre mariage n’est pas consommé. Quelle humiliation ! Le roi s’est pourtant montré très affectueux avec moi. Il a baisé mes mains. « Mon petit-fils n’est guère caressant », m’a-t-il dit en riant, comme pour excuser la conduite de Monsieur le dauphin. J’ai soupiré et je lui ai souri. Heureusement, pendant neuf jours, festins, bals, opéras se sont succédé à un rythme épuisant, ce qui m’a empêchée de penser à cette incroyable situation, surtout lors de la fête où le peuple était convié dans les jardins illuminés.
Le roi m’a relevée et m’a regardée en souriant. Il est encore très beau et je suis sûre de lui plaire. Mais quelle déception lorsqu’il m’a présenté son petit-fils ! Il ne lui ressemble pas du tout. C’est un grand garçon embarrassé, au visage ingrat. Il a posé sur ma joue un léger baiser, ne m’a rien dit et n’a pas même osé me regarder pendant le voyage qui nous menait au château de Compiègne.
Marie-Antoinette n’a aucune prétention littéraire, elle n’écrit pas pour la postérité, mais pour elle-même, sans se relire ni se soucier de plaire. La reine se raconte au fil des jours, notant ses joies, ses espoirs, ses angoisses et jusqu’aux détails de sa vie quotidienne qui demeure indissolublement liée à celle du royaume.
Seules les souveraines régnantes parvinrent à mener leur vie amoureuse comme elles le souhaitaient. Malgré la légende de reine vierge qu’elle tissa de son vivant, Élisabeth Ire eut sans doute des amants sans causer de scandale. Rien de tel avec les tsarines du XVIIIe siècle. Parvenues chacune au pouvoir après un coup d’État , elles affichèrent leurs liaisons avec une ostentation souvent surprenante pour les ambassadeurs des autres puissances en poste à Saint-Pétersbourg. Veuve de Pierre le Grand, Catherine Ire, qui ne régna que deux ans, était une ancienne servante livonienne que le tsar avait fini par épouser.