Itinérance : le titre de ce roman est bien représentatif de ce que nous allons y trouver. Une vie de projets, de rêves et de voyages.
Le roman débute au tout début des années 1900 et nous partirons à la rencontre de Fabio Delmonte, un jeune homme de 30 ans plutôt ambitieux. Après avoir passé plusieurs années à naviguer avec son père sur la goélette familiale, il décide, à la mort de celui-ci, de reprendre ses études de mécanique stoppées quelques temps auparavant . Il veut devenir ingénieur. Pour subvenir à ses besoins d’étudiant, il trouvera un petit boulot de laborantin dans un Musée et nouera des liens importants avec son professeur qui le prendra un peu sous son aile.
Mais à la suite du décès de sa maman, Fabio décide de tout quitter, études comprises, pour aller chercher du saphir dans les grands chantiers de mines sur l’ile de Ceylan. Une fois là-bas et après plusieurs aventures sur le chemin pour se rendre à Colombo, il fera une rencontre fortuite qui lui permettra de décrocher des aides pour forer d’autres terrains. Au retour en France, vers ses 45 ans, il rencontrera celle qui deviendra sa femme. Ils voyageront encore un peu en Indochine et Florence son épouse, lui donnera 4 enfants. Il finira sa vie sur sa petite île de méditerranée, au milieu des vignes et de ses proches.
Un roman riche en description : faune et flore, habitants et habitats, géographie, tout est décrit avec beaucoup de détails.. un peu trop parfois. On sent que l’auteur a, soit voyagé lui même dans ces contrées ou s’est vraiment bien documenté pour fournir ces renseignements. L’écriture est soignée.
Seulement voilà, cela s’arrête ici pour moi. Je n’ai pas été emballée par cette histoire qui manque d’éléments principaux pour en faire un bon roman et « nous tenir ».
Lu d’une traite car il est assez court (184 pages), j’ai eu l’impression d’être à une soirée en compagnie d’une personne qui nous étale sa biographie : j’ai fais, j’ai vu, j’ai réussi (et je suis riche). C’est le genre de personne que j’ai tendance à fuir, de ce fait, il en ressort que je n’ai pas aimé Fabio qui montre – peut être à tors, un côté imbu et m’as-tu-vu, surtout en fin de carrière, au moment où il « cherche une femme ». Il y a pour moi une réelle différence entre la détermination et l’arrogance.
« Itinérance » aurait pu être une vraie odyssée et une belle fresque familiale, mais nous avons là une suite d’évènements de vie et de carrière, avec beaucoup de descriptions sans lien entre elles. On se retrouve parfois avec une liste de détails faisant office de guide touristique mais qui n’amène rien à la vie du protagoniste.
De plus, bien que ce soit une fiction, cela manque de réalisme : Fabio a des rêves et il tombe toujours sur la bonne personne qui lui permet ce nouveau projet de l’instant et en deux phrases, c’est réglé. Le résumé parle de « ténacité à renverser les obstacles de la vie », mais ici, les évènement tombent un peu comme un cheveux sur la soupe, tout est convenu ; il veut aller trouver un petit travail, hop le concierge pose l’affiche à l’instant, il souhaite trouver une mine et rencontre directement quelqu’un qui connaît un terrain, il veut une femme, voilà que son médecin lui présente sa sœur… le facteur chance est trop grossier et enlève cette part d’attente et de suspens qui manquent là aussi pour donner un intérêt.
Mais pour moi, le plus gros point noir du roman est l’absence cruelle d’émotions ! Plusieurs évènements auraient pu être empreints de sentiments qui rythment la lecture, qui donnent du corps et de la profondeur à l’histoire mais surtout qui donnent à s’attacher aux personnages et avoir de l’empathie pour eux. Ici elles sont beaucoup trop survolées, comme par exemple le décès de la maman de Fabio (une page, pas de tristesse), la fuite pour échapper à des brigands (on se sait pas qui sont ils, pas de peur), la rencontre avec Florence et/son mariage (pas de joie..)…
Les évènements et actions s’enchaînent, c’est très vite expédié, on ne s’attache pas, on n’a pas le temps de ressentir. Cela amène aussi des incohérences parfois, sur la temporalité, sur des lieux ou des personnages absents qui se retrouvent soudainement dans un salon on ne sait comment..
C’est le piège avec des personnages aux vies trop chargées dans un court roman, on fait forcément l’impasse sur quelque-chose, à moins de très bien doser tous les éléments primordiaux, comme dans bons nombres de ‘Nouvelles’.
C’est vraiment dommage car il y aurait vraiment matière à « approfondir » le roman et pourquoi pas pousser un peu ces 180 pages (ou pas ! ) Après échange avec l’auteur, il aime les « histoires courtes et intenses » : soit, « Itinérance » l’est. 184 pages et beaucoup d’infos. Mais être concis n’empêche pas de créer un peu de chaleur, un vrai univers, mettre le temps en suspension, alléger certaines descriptions pour appuyer les émotions et les liens qui encore une fois, donnent une réelle consistance et un intérêt.
J’ai bien conscience que c’est un retour de lecture peu positif au regard des autres que j’ai trouvé sur la toile, mais ne faisant pas de chroniques de complaisance, je me dois d’être honnête avec les futurs lecteurs exigeants, de mon entourage en tout cas. Je suis complètement ouverte à échanger avec ceux qui l’auraient lu et qui souhaitent partager leur point de vue.
Je remercie Franck Esposito de m’avoir permis de découvrir son univers par le biais de Simplement Pro.
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