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Citations de Gavino Ledda (22)


…Leur allégresse n’était plus la mienne, j’étais déjà différent. Une seule année dans les champs, m’avait vieilli d’au moins dix ans par rapport à eux.
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Le mulet avançait vite sur la route poudreuse et caillouteuse, et les sabots évitaient les pierres, s’éloignant rapidement de Siligo : il me transportait comme il avait souvent transporté les provisions pour le chien, la nourriture pour les porcs, la semence que mon père jetait continuellement sur les jachères. Et j’étais moi-même une semence, j’avais à naître et à germer tout seul dans notre terre, à suivre les lois du royaume végétal sur les friches de la solitude ainsi que tous les petits bergers de la Sardaigne.
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Finas in sa campagna amena
Chisco su regiru meu
Fattende votos a Deu
Chi mi che oghed dai bena.

"Jusque dans la campagne amène
Mes soucis me hantent
Bien que je prie fort Dieu
Qui m’arrache à mon chagrin."
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Notre famille se retrouvait dans la condition d’un essaim d’abeilles dont la ruche s’est éboulée, d’une nichée d’oiselets encore déplumés que renverse une bombe. Nos traditions nous montraient le chemin de la rescousse, le long passé des bergers nous enseignait la résignation et le retour aux tristes réalités : recommencer l’ouvrage.
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Avec une volonté rude, animale mais inexorable, mes doigts calleux et tordus par la bêche avaient pour la première fois l’occasion d’exprimer aux chênes séculaires la sensibilité de générations et générations jamais initiés à la musique. A travers mes doigts, l’homme des cavernes, encore intact en moi, mais sensible dans toute son humanité, s’apprivoisait grâce à la musique : il commençait à creuser en lui et à découvrir par - delà ses campagnes, que le monde ne finissait pas au bout de notre horizon...
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Ces patriarches au cours de leur existence, n’ont accompli que deux choses : d’abord obéir, puis commander. Et ils entendent que les choses demeurent toujours comme elles sont. (…) Commander c’est leur poumon, l’obéissance c’est l’air que le poumon respire.
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Notre famille s’était agrandie. Et, d’après la morale courante, mon père avait déjà accompli son devoir social. De même que les bêtes, les bergers doivent former physiquement leur descendance : veiller uniquement à leur entretien et nullement à leurs conquêtes intérieures. Dans un sens c’est juste. A la campagne, seuls l’instinct et la force ont une utilité : des muscles, que ses pères éduquaient avec rigueur pour les adapter à la nature qu’ils auraient à dompter.
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La cuisson achevée, j’assistai à une scène cruelle, désespérée. Le doyen des domestiques ôte la casserole du feu et la pose dans un coin de la cabane : les autres se groupent en rond autour du récipient, qui dégageait une véritable colonne de fumée, on aurait dit un tronc d’arbre s’élevant sous le toit. Ils s’y placent du mieux qu’ils peuvent, attendant que la ratatouille refroidisse et qu’ils puissent attaquer et dévorer ce plat chaud dont ils bénéficiaient rarement.
Puis, tout le monde de se ruer sur les cuillers entreposées dans une fente du mur sec de la cabane : malheureusement il s’avéra qu’il n’ y avait pas autant que de bouches ; l’un des valets ne retrouva pas la sienne.
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Face à mon père, je m’étais toujours vu comme une tête de bétail, tel Pacifico. Constamment bâté et employé par lui comme un quelconque instrument de travail. Pendant cette attente, je me préparais à échapper à sa juridiction, à sa propriété, et je commençais à m’imaginer différent des autres animaux domestiques.

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…le maitre s’installa dans un autre coin afin de se repaître à son tour. Il prit dans sa besace, son propre repas et je remarquai à nouveau que son pain était blanc, spécialement confectionné par les servantes qu’il avait au pays. Il l’accompagnait de morceaux d’agneau rôti. (….) Comme je mangeais, mes yeux perdus dans le vague revoyaient dans une sorte de mirage immobile le pain noir des valets, à tel point que même le pain blanc que je tenais dans ma main gauche me paraissait noir.
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Le ciel de mon existence commençait à s’emplir de nuages et le soleil disparaissait derrière le nuage noir qui s’amassait. On entendait déjà la tonnerre.
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D’ordinaire, cette sorte de chapardeurs étaient des domestique mal nourris (….)en l’absence de leur maître, ils cherchaient à se procurer quelque butin parmi les troupeaux du voisinage….Ces teraccos pastores, - bergers domestiques, - ne pouvait pas se permettre d’être découverts la main dans le sac, car l’affaire aurait risqué de compromettre, aux yeux des gens, l’ honneur de leur maître : ç’aurait été une preuve irréfutable que ce maître les nourrissait mal. Souvent, la conduite irréprochable des domestiques attestait le prestige social du maître …

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Un jour, le capitaine Federici, qui commandait ma Compagnie, m'ordonne de répandre de la poudre insecticide dans les chambrées et les magasin infestés de fourmis. Je m'empresse de m'exécuter, après quoi je retourne voir mon chef. Raide, au garde-à-vous, comme un tronc d'arbre, je lui dis :
- J'ai mouru toutes les fourmis, mon capitaine.
A quoi, mon supérieur, assis à son bureau, lève la tête, les yeux écarquillés, et me rabroue comme si j'avais outragé la langue italienne :
- Qu'est-ce à dire que tu as mouru toutes les fourmis ? Tu as tué les fourmis ?
- Signorsî.
- Tu n'as pas encore quitté ta caverne, Ledda.
- Signorsî.
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À mon père, j’avais volé toute la sagesse que lui-même avait déjà volé à ses anciens. Et, à vingt ans, j’étais ‘adulte ‘ et ‘sage’ pour ce qui était de mon travail ; mais, au fond de moi, mes ressources étaient comme des bourgeons sur un tronc sec, qui attendent la saison propice pour s’épanouir.
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Nous, en revanche, nous étions entre deux feux : en partant, nous échappions bien au feu de notre condition, qui était tout de même supportable ; mais nous lancions nos sabots contre celui qui était devant nous, et bien plus, nous courions derrière lui…Je ne pouvais pas savoir que les flammes de cette liberté factice étaient celle- là même qui me brûlait et que je ruais absurdement à leur encontre. Je me conduisais en vrai Pacifico.
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Leur allégresse n'était plus la mienne, j'étais déjà différent. Une seule année dans les champs m'avait vieilli d'au moins dix ans par rapport à eux.
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Pour mes quinze ans, nouvelle évolution. Mais cette fois-ci, ce ne fut point un progrès, comme lorsqu'à mes sept ans il m'avait été donné de monter en croupe de Pacifico et de me rendre tout seul à Siligo. Maintenant, à mesure que je grandissais, ma vie devenait plus âpre, plus austère. Et, pour employer encore mieux mes forces, mon père m'acheta des bœufs. Berger désormais la nuit, il me fallut bien devenir cultivateur dans la journée. Possédé par le démon du magot et par son pouvoir patriarcal, mon père, suivant sa nature et sans se rendre compte qu'il en abusait, se permettait de me couper en deux et d'exiger que je sois à la tâche sans discontinuer, livré au temps dans toute sa durée : tel un pendule, en dehors de toute loi biologique, j'avais à balancer d'une acticité à l'autre.
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Ce qui restait dans l'île, c'était un monde déjà bien amoindri. Rien que les vieux et les enfants , avec le déchet physique et psychique produit par la sélection qu'effectuaient aussi bien les services de l'émigration que l'armée : telle était désormais la population de ces campagnes abandonnées par les jeunes en bon état de santé.
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Ainsi nous faisait il vivre dans l’espoir : un jour, on serait riches. Il nous entretenait plus que jamais dans l’angoisse propre aux bergers et aux cultivateurs qui ont du bien. Il nous liait de plus en plus étroitement à cette espérance que nous deviendrions nous aussi des puissants : des lions, comme le Larentu ou don Juanne. Au milieu de la pauvreté la plus calamiteuse, la plus noire, il nous imposait d’ores et déjà le jour de la richesse, et peu importait quand viendrait ce jour
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-Vous vous mettez à élever vos enfants de la même manière que vous faites avec vos bêtes, pour les accoutumer à porter leur faix et à supporter leurs harnais ! Toujours les fouets et les matraques ! Ce n'est pas une petite affaire que d'éduquer un enfant, et ce n'est pas avec un gourdin ou une branche d'arbre qu'on y arrive ; c'est avec la parole !
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