Pot de Colle
- Pourquoi maman a-t-elle toujours
Deux fossettes sur ses joues ?
- Pourquoi les chattes
Courent-elles à quatre pattes ?
- Pourquoi les oiseaux
Ne portent-ils pas de sabots ?
- Pourquoi ma grande soeur, dis,
S'assied-elle pour faire pipi ?
- Pourquoi les grenouilles
Ont-elles le ventre qui gargouille ?
- Pourquoi les bonbons
Ne poussent-ils pas sur les buissons ?
- Parce que ta bouche, mon chou,
N'est pas fermée par un verrou !
Sacha Tchiorny
UN BRAVE HOMME
Un menuisier dans la forêt
Admirait les grands arbres.
Souriant, il se dit :
ça en fera de belles tables !
Un fier chasseur dans la forêt
En six minutes a tué cinq lièvres.
Souriant, il se dit :
Voilà une forêt de rêves !
Un brave homme a marché dans l'herbe
Encore humide de rosée.
Souriant, il se dit :
On est si bien dans la forêt !
ROMAN SEF
L' HOMME
Dan l'étable voisine
La vache calmement rumine.
Dans sa tanière
L'ours
dort tout l'hiver.
La neige
tombe
en silence...
Mais l'homme
Ne peut s'arrêter :
Automne,
Hiver,
Eté,
Il faut qu'il se remplisse la panse_
Et pense,
pense...
Roman SEF
DEUX OURSES
Sur la banquise au pôle
Deux ourses
Rigolent :
-Oh, ces étoiles,
Qu'elles sont drôles !
Elles s'appellent comme nous
Mais ressemblent à des casseroles ...
Samuel MARCHAK
L’avenir
Qu’apprend d’abord
un petit chat?
À saisir!
Qu’apprend d’abord
un oisillon?
À voler!
Qu’apprend d’abord
l’écolier?
À lire-écrire1
Le petit chaton devient un chat
pareil à tous les chats du monde.
L’oisillon devient un oiseau
pareil à tout oiseau au monde.
Mais l’enfant a beau lire,
l’enfant a beau écrire,
nul ne peut dire au monde
comment il va grandir,
ce qu’il va devenir…
(Valentin Bérestrov)
Le grand voyage
Ivan
s’en va souvent
sur l’océan.
Éveillé ou rêvant
hiver comme printemps
Ivan
vogue gaiement
sur l’océan.
Sans peur des vents
ni des requins géants
Ivan
va vaillamment
sur l’océan.
Ivan
s’en va souvent
sur l’océan
sans quitter pou autant
son divan…
(Roman Sef)
Le petit poète
« Salut, poète! » criait-on en riant.
Le poète était un enfant.
Et il ne rêvait ps de gloire,
Il rêvait seulement de pouvoir
Se venger de ceux qui criaient à tue-tête :
« Poète! Poète! Pouète-pouète! »
(Valentin Bérestrov)
Le silence
Dans la forêt
Par un beau jour d’automne
Je me promenais
Avec mon téléphone.
Et sans arrêt
Mon téléphone
sonnait,
sonnait…
Alors j’en ai eu marre
Et j’ai jeté dare-dare
Le combiné.
Aussitôt
il s’est fait
Un grand silence
dans la forêt.
Et puis j’ai entendu
Un vol d’oiseau,
Une biche et son faon
Qui allaient boire
À l’étang.
(Roman Sef)
Un poème violet
Toute violette
Est ma maison
Et tout violet
Est mon chaton.
Violettes sont
Chambres, cuisine,
Et la piscine.
À l’horizon
Un train violet
Est à l’arrêt.
Et voici là
De beaux lilas,
Un gros bouquet.
C’est si mignon,
Tout en violet!
Et puis,
Je n’avais pas
D’autres crayons…
(Roman Sef)
sur le toit
Vivre ce n’est pas vivre
la gorge nouée face au miroir,
sur le plancher des vaches
enceintes poussées vers l’abattoir
Vivre ce n’est pas comme
avoir toutes les nuits été rêvé
par l’immanence des oracles,
par une pucelle aux yeux délavés
J’étais né au pivot de l’automne
pour me baigner dans la fange salutaire
de l’amour et de l’amitié, puis vieillir
avec les refuzniks de tout inventaire
Me voilà nu sur le toit, un pinceau de lune
titille mon âme désossée,
ma verge témoin des joyeux naufrages,
mourir ne sera pas ma dernière pensée
*
comme si
Poésie d’un jour, papillon
docile à l’instant qui nous fige
comme l’élyme des dunes sarmates
Cœur ébloui, lèvres à vif,
clameur tentaculaire
venant couvrir le pathos
d’un macrocosme hors de portée
On rampe sur nous-mêmes,
le poing serré,
on expire une aria indigène,
une rengaine détournée
Peut-être y avait-il
autre chose,
une folie plus âpre, des blés
chantants nés de la pierre
Peut-être aurions-nous pu
entendre chuchoter les ossuaires
sous des ciels innocents
Poésie d’un jour
qui nous empoigne, nous écartèle
comme si nous étions encore
sans âme entre les mains de Dieu,
à l’unisson des cristaux
et de leur flamme bleue
*
belles heaulmières
Ainsi en prend à maints et maintes
Maintes avaient tant de mains
qu’elles auraient pu broder
la trace des voix évanouies,
ma doublure ayant repris son arc
pour des duels surannés
Maintes avaient égaré en chemin
le don des circonstances fugitives,
mais paraissaient plus glorieuses encore
que le ciel-fleuve des conquérants
où les siècles ne coulent plus
Maintes, déployées sur parchemin,
gardaient à leurs lèvres en sang
le goût et sentiment de l’aborigène,
la haine glissant vers un abîme
tapissé d’ongles et d’injures imberbes
Maintes aussi vivaient des lendemains
tripatouillés, flétris, recomposés
par deux ou trois positions illicites,
et le soleil jouait sur leur paillasse à l’aube
comme une annonce de salut