AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Jacques Lusseyran (156)


Car, en France, chaque maison a son odeur. Les adultes s'en aperçoivent à peine, mais les enfants le savent bien, et ils reconnaissent les maisons à leur parfum. Il y a l'odeur de la crèmerie, l'odeur de la pâtisserie, l'odeur de la confiserie, l'odeur de la cordonnerie, celle de la pharmacie et celle de la boutique de ce marchand auquel on donne en français un si beau nom: le marchand de couleurs. (p; 19)
Commenter  J’apprécie          80
La vie, ce n'était pas une chose qui tombait sur mon visage toute fraîche, comme une pluie, ou dans mes mains, toute ronde comme un fruit, mais un flot qui montait du dedans de moi et que je pouvais ou bien tenir à l'intérieur et calmer, ou bien précipiter vers le dehors.
Commenter  J’apprécie          80
L'amour est une traversée. Tout ce qui l'arrête est une faute et il y a vingt façons de l'arrêter. Il suffit de se l'interdire. C'est ce qu'on appelle quelquefois la pureté. Mais de quelle impureté se protège-t-on alors ? Il suffit de faire l'amour comme on mange - et le repas fini, il n'y a plus rien à manger. Il suffit, l'amour à peine terminé, de partir en claquant la porte. Chaque fois c'est une désertion. L'amour est une traversée, un voyage. Nous sommes faits pour que toutes les fleurs et tous les cailloux du chemin nous entrent dans la peau. Nous sommes faits pour nous laisser aimer quand nous aimons. Et ce n'est pas la femme qui aime l'homme ou l'homme la femme, pas seulement : ils sont aimés ensemble.
Commenter  J’apprécie          80
Nous n'étions que six résistants en première supérieure. Au moins, de jour en jour, nous savions pourquoi nous l'étions, et que cela n'était pas par patriotisme seulement. Ce n'était pas la France qui était menacée : c'était l'homme.
Commenter  J’apprécie          70
Je n'avais pas encore dix ans que je savais déjà -et de quelle confiante certitude- que tout, dans ce monde, est signe de tout, que toute chose est prête à chaque instant à prendre la place d'une autre, si celle-ci vient à manquer. Et c'était ce miracle permanent de la guérison que j'entendais, totalement exprimé, dans le Notre-Père que je récitais le soir avant de m'endormir.
Je n'avais pas peur. D'autres diraient: j'avais la foi. Et comment ne l'aurais-je pas eu en présence de cette merveille à chaque seconde renouvelée : tous les sons, toutes les odeurs, toutes les formes, dans mon esprit, ne cessaient de se transformer en lumière, et la lumière en couleur, métamorphosant ma cécité en un kaléidoscope.
Commenter  J’apprécie          70
Oh! s’éveiller chaque matin
- et pourquoi pas chaque minute -
et regarder le monde qui commence
Commenter  J’apprécie          70
Le nazisme, c'était un germe omniprésent, une maladie endémique de l'humanité. il suffisait de jeter quelques brassées de peur au vent pour récolter, à la saison prochaine, une moisson de trahisons et de tortures.
Commenter  J’apprécie          70
La joie ne vient pas du dehors. Elle est en nous quoi qu'il nous arrive.
La lumière ne vient pas du dehors. Elle est en nous, même sans les yeux.
Commenter  J’apprécie          70
Je suis convaincu que les enfants savent toujours plus de choses qu'ils ne savent en dire. Ce qui fait une belle différence entre eux et nous autres les adultes, qui, dans les meilleurs cas, ne savons pas plus qu'un centième de ce que nous disons.
Sans doute Est-ce tout simplement que les enfants savent toutes choses par tout leur être, au lieu que nous les savons seulement par notre tête. (p. 21)
Commenter  J’apprécie          70
Les gens que tout le monde avait toujours respectés couraient après leur respect. Mais du respect, il n'y en avait plus trace. Et les intellectuels, les hommes de culture, les forts en tête, ceux-là avaient de grands chagrins. Ils ne savaient plus que faire de leurs connaissances. Elles ne les protégeaient pas contre le malheur. Dans cet énorme bouillon de d'humanité, elles étaient noyées... Ils étaient prêts à tout comprendre, sauf que leur intelligence n'était pas de saison. Nous avions nos riches à Buchenwald. Leur richesse n'était pas faite de courage. Le courage c'est toujours suspect, ou alors c'est la conséquence d'autre chose. Les riches étaient ceux qui, d'une façon ou d'une autre, ne pensaient pas à eux mêmes...
Commenter  J’apprécie          70
“Les poètes, eux, portent leur attention très loin, si loin quelquefois qu’il nous est malaisé de les suivre. Ils assistent à des fiançailles, à des mariages partout, ils ont une tendresse sans fin pour les relations les plus distantes : entre les idées et les objets, les hommes et les pierres. S’ils ne voient pas tout, s’ils ne possèdent pas la connaissance pleine, c’est peut-être simplement qu’ils parlent. Les mots font retomber leur vision en poussière. Les mots les plus beaux, les plus rares n’ont ici aucun privilège : ils diminuent, eux aussi, tout ce qu’ils touchent.”
Commenter  J’apprécie          70
Sur la porte il y avait écrit: "Konzentrationslager Buchenwald".
Cette porte, je l'ai franchie en sens contraire quinze mois plus tard, le 12 avril 1945. Mais là, je m'arrête. Je ne saurais pas vous dire comment. Ce n'est pas moi qui conduis ma vie. C'est Dieu qui la conduit. Je n'ai pas toujours compris comment il faisait.
Commenter  J’apprécie          60
Dieu existe mais Dieu ne se montre pas à nous directement; il faut le deviner, le connaître dans nos rêves joyeux, dans toutes les confidences que la nature nous fait. Jamais il n'interrompt sa présence. Dieu nous protège.
Commenter  J’apprécie          60
Les mots latins, les mots allemands, les mots français, les mots grecs menaient joyeuse vie dans ma tête.
Commenter  J’apprécie          60
L’orateur vrai sait, lui, que les mots qu’il dit ne comptent pas beaucoup, et que sa personne – si exemplaire soit-elle – ne compte pas davantage. Tout le travail, pour lui, consiste à faire jaillir les mots du dedans de lui-même.
Il faut ici, de toute urgence, dire la chose au plus simple. Les mots ne nous appartiennent pas. Ce n’est pas moi – moi qui parle – qui les crée. Ils existent autour de moi à la façon d’un peuple vivant. Et peu importe ici qu’on appelle ce peuple « inconscient collectif » ou « verbe primitif ». Le fait est que les mots sont là avant moi, hors de moi et au-dedans de moi, dans un espace non physique mais immédiatement tangible. Mon affaire, ce n’est donc pas les mots, mais la conduite des mots, leur direction. Je dois les prendre, ou plutôt leur ouvrir la route, et surtout les mener jusque sous le regard des hommes assemblés devant moi. À tous ces gens, je vais montrer que tous ces mots que je dis et qu’ils entendent ne sont ni à eux ni à moi, mais qu’ils vivent. Ainsi, la parole sera une participation à la vie. p 73-74
Commenter  J’apprécie          60
Les voyants parlent si mal de l'imagination. C'est à croire qu'ils ne la connaissent pas. Ils font semblant d'être sûrs qu'elle remplace tout, et notamment les yeux. Ils ignorent qu'elle peut en effet créer des milliers de figures, les combiner pendant des jours, et vous laisser dans un vide aussi grand que celui de la migraine. La nuit de la cécité, j'ai toujours dit qu'elle n'existait pas. Mais elle existe : c'est l'invasion des images.
Car toutes ne sont pas bonnes. Il y a toutes celles qui vous disent le contraire de la réalité, qui ne vous disent plus que votre propre réalité à vous. Et si vous avez le malheur de les regarder trop, celles-là, c'en est fini de l'amour. Mais tout de suite, en quelques heures. Plus question de parler à quelqu'un ni même d'avoir envie qu'on vous parle. Plus question de se rappeler que les autres existent. On est prisonnier d'un monde qui tourne. On n'a plus de voix qu'à l'intérieur de sa tête. On n'aime plus rien, sinon s'entendre. Je n'en voulais pas, moi, de ce monde-là. Je ne voulais pas imaginer : je voulais voir.
Commenter  J’apprécie          60
La joie ne vient pas du dehors. Elle est en nous quoi qu'il nous arrive. La lumière ne vient pas du dehors. Elle est en nous, même sans les yeux.
Commenter  J’apprécie          50
C'est pourquoi je dis aux parents dont les enfants deviennent aveugles de se rassurer. Car la cécité est un obstacle, mais ne devient une misère que si on y ajoute la sottise. De se rassurer et de ne jamais s'opposer à ce que leur petit garçon ou leur petite fille découvre. Qu'ils ne leur disent jamais : "Tu ne peux pas savoir puisque tu ne vois pas.". Et qu'ils leur disent le moins souvent possible : "Ne fais pas cela ! C'est dangereux !"
Commenter  J’apprécie          50
"Quand un rayon de soleil venait, s'ouvrir tout entier, le prendre jusqu'au fond de son corps, ne plus penser qu'une heure plus tôt on avait froid, qu'une heure plus tard on aurait froid, lui faire fête." écrit Jacques Lusseyran depuis le camp de Buchenwald
Commenter  J’apprécie          50
Ce qu'une maman peut faire pour son enfant aveugle peut s'exprimer simplement : lui donner naissance une deuxième fois. C'est ce que la mienne fit pour moi, et c'est à son seul propos, non au mien, qu'il faut parler de courage. Mon seul travail à moi était de m'abandonner à elle, de croire ce qu'elle croyait, de me servir de ses yeux chaque fois que les miens me manquaient.
Elle apprit le Braille avec moi. Elle suivit mes études jour par jour pendant plusieurs années. Elle accomplit en somme toutes les tâches qu'un précepteur privé, spécialisé eût sans doute accomplies. Mais à la compétence, elle ajouta l'amour et l'on sait bien que cet amour-là dissout les obstacles mieux que ne le feraient toutes les sciences.
Page 45
Commenter  J’apprécie          50



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Jacques Lusseyran (389)Voir plus

Quiz Voir plus

Saurez-vous reconnaître ces incipit ?

Quelle réflexion sur la mémoire et le temps, publiée en 1913, s'ouvre sur : "Longtemps, je me suis couché de bonne heure." ?

Du côté de chez Swann, de Marcel Proust
Les Voyageurs de l'impériale, de Louis Aragon
Nadja, de André Breton

10 questions
101 lecteurs ont répondu
Thèmes : culture générale , littérature , incipitCréer un quiz sur cet auteur

{* *} .._..