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Critiques de Jean Reverzy (6)
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Le passage

« Je suis revenu pour crever ».

Lorsque la médecine est arrivée au bout de ses capacités et que le verdict tombe, il n’y a plus qu’à attendre sa dernière respiration. L’auteur conte dans une langue parfaitement maitrisée, avec des mots simples et imagés, les derniers jours d’un malade, Palabaud, confronté à l’inéluctable. Impuissant devant le terme pratiquement échu d’une vie légère et insouciante, presque animale, le condamné à mort, être peu réfléchi et simple, n’a pas le regard anxieux, perturbé et révolté qu’une personne plus occidentalisée aurait, se rebellant devant la plus grande injustice de la vie : la mort. Au contraire, comme il l’a fait tout au long de sa vie dans ces îles paradisiaques entourées d’une mer tant rêvée, il prend les choses comme elles viennent. N’est-ce pas là le véritable bonheur ?

Tant d’espoirs sont confiés à la médecine qu’il est inconcevable qu’elle soit si décevante selon Jean Reverzy, docteur des pauvres, à tel point que le narrateur de son roman en vient à abandonner son ami dans les mains d’un confrère qui aura l’indifférent courage de prononcer la sentence à sa place.

L’écriture parfaite de l’auteur atteignant l’équilibre subtil entre action et réflexion, livre un témoignage poignant sur la fin d’une vie.

Jean Reverzy signe avec son premier roman « Le passage » un très beau texte à redécouvrir.

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Le passage

Je ne connaissais pas Jean Reverzy voilà encore 3 semaines. Je n’ai donc pas la prétention, subitement, de pouvoir en faire une présentation complète. Cependant, comment ne pas s’intéresser, déjà, au parcours de ce médecin, mort (« probablement », disent les sources) d’un infarctus du myocarde à l’âge de 45 ans, et dont les trois livres publiés de son vivant – trois autres textes ont fait l’objet d’une publication par la suite – comportent tous une forte composante autobiographique ? Comment ne pas prendre en compte le fait que la mémoire, la mort, la fatigue sont des thèmes qui reviennent visiblement dans tous ses écrits ?



La première chose qui frappe lorsque l’on commence ce livre, c’est son style. À la fois riche, travaillé, mais jamais pesant. Ainsi, la deuxième phrase donne le ton :



« Je besognais dans une grande pièce médiocrement meublée d’un bureau, d’un fauteuil, de quelques chaises, d’un divan poisseux de contacts humains et d’une vitrine où luisaient des instruments de verre et de métal ».



Lorsque Jean, le médecin, décrit son travail, l’écriture est profondément incarnée. Si j’ose, on est en « rez-de-chair ». La peau, les organes, les humeurs sont bien présentes – sueur, sang, salive, vomi… Les patients sont décrits au plus proche : « … il s’était séparé de vêtements ternes, usagés, empreints de sa substance, scellés à sa peau comme le pansement à la plaie vive ».



Puis Palabaud survient, et il décrit l’apparition de sa maladie, des symptômes qui ont amené à découvrir que son foie était hypertrophié par une cirrhose pigmentaire – un comble pour un hôtelier qui ne boit jamais d’alcool -. On est dans les îles, entre Papeete, Maupiti, Raiatea, mais ce sont des îles qui n’ont rien de la carte postale paradisiaque : bien au contraire, il s’agit d’îles tristes, où évoluent des maoris qui ont renoncé, des tahitiennes qui se complaisent dans le rôle de vahinés et se donnent aux européens en échange de quelques cadeaux…



Jean Reverzy nous invite à explorer l’idée de passage – titre de son livre – : passage du temps, passage des sentiments – et notamment de l’amour, condamné à s’effriter : « …tout attachement évolue vers la rupture » -, passage, finalement, de la vie ! Palabaud, résigné, revenu dans une ville qu’il a quitté par amour de la mer, croise quelques personnages qui ont émaillé son enfance, dont l’abbé qui l’a fait renvoyer du lycée…



Seule, à la fin, reste l’envie de la mer. Tout le reste ne compte plus, mais ce besoin ressenti dès l’enfance devient l’ultime pierre angulaire de la vie de cet homme qui meurt.



Il y a d’ailleurs un incroyable paradoxe à voir que cet écrivain disparaîtra lui-même très jeune, pratiquement à l’âge de ce premier héros (Palabaud meurt à 40 ans) ; dans son deuxième roman, Place des angoisses, publié en 1956, Jean Reverzy mettait également en scène un patient malade du cœur…



Je ne résiste pas à l’envie de vous laisser une dernière citation, dans laquelle il décrit celui qui fut l’un de ses maîtres, pour mettre encore en valeur ce style incroyable :



« Tyran libéral, au faîte d’une médiocrité dès longtemps triomphante, il dominait un monde aux couleurs de poussière où l’intelligence sanglote comme une captive humiliée ».



J’espère que vous l’aurez compris, mais je préfère l’écrire : ce livre est un coup de poing. Si les bons livres sont ceux qui ne vous laissent pas indemnes, qui vous transforment, alors Le passage est un excellent livre, un livre qui marque la vie d’un lecteur.
Lien : https://ogrimoire.wordpress...
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Place des Angoisses

L'auteur, relativement célèbre à Lyon, nous raconte ses premiers pas en qualité d'étudiant en médecine habitant près de la place Bellecour (j'en ai déduit cela d'après la description de cette "place des angoisses") puis l'installation près d'une autre place cette fois dans un quartier excentré comme médecin des pauvres.
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Le passage

Une cirrhose tenace s'agrippe au foie vieillissant et surmené de Palabaud. Au bout du rouleau, l'homme va laisser son exil polynésien pour chercher en métropole quelque répit grâce la médecine scientifique. Roman dans lequel Jean Reverzy, médecin et écrivain, flétrit deux grands mythes; le paradis des mers du sud et la médecine; on en espère beaucoup, ils déçoivent presque toujours. Palabaud qui semble revenu de tout, trouve dans sa mélancolie la sagesse de n'espérer rien de ses deux illusions sinon un peu de cette humanité (l'amour facile d'une tahitienne, l'attention rituelle du médecin) qui aide à faire le passage vers la mort un peu plus sereinement.
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Oeuvres

Jean Reverzy. Un écrivain singulier, peu connu et pourtant un écrivain majeur.

Jean Reverzy est né le 10 avril 1914 à Balan, dans l’Ain. Sa mère est d’origine irlandaise. En 1915, son père, qui est officier, meurt au combat. Jean n’a alors que 18 mois, A l'âge de 4 ans il recevra la croix de guerre de son père décernée à titre posthume.

En 1932 il commence des études de médecine à Lyon. En 1940 il est obligé de démissionner de sa fonction d’interne pour attitude non conforme (propos et écrits anti-pétainistes). Entré dans la Résistance en 1942, arrêté par les Allemands puis libéré en 1943, il devient chef du maquis de l’Allier en 1944. En 1945, il s’installe comme généraliste dans le quartier de Montchat à Lyon.



Jean Reverzy exerçait avenue Lacassagne, dans un quartier alors miséreux, fait d'usines et de taudis. Il y logeait, dit son fils, Jean-François Reverzy, "au quatrième étage, dans un appartement, ou plutôt, un espace vide ne comportant que l'essentiel : quelques chaises, pas de livres sinon dans une vieille bibliothèque, un ouvrage de patrologie latine héritée d'un curé de Cressanges.... il méprisait toute possession d'objets ou de biens matériels...Au rez de chaussée le cabinet médical aux allures de tombeau, tout aussi dépouillé d'artifices. Seules de médiocres photos de Baudelaire, de Rimbaud et de Mallarmé venaient rompre la monotonie jaunâtre des murs. La salle d'attente ne désemplissait pas mais la misère des consultants l'obligeait le plus souvent à l'exercice gratuit de la médecine."



En octobre 1952 après plusieurs mois passés en Océanie (un rêve d’adolescent et une passion pour Gauguin) et poussé par des angoisses sur la maladie et la mort, il se met à écrire.

Depuis l’adolescence il rêve de ces îles lointaines. Il sera déçu du voyage, et l’écriture sera la seconde étape de son voyage polynésien. Reverzy s’inspire de l’un de ses patients pour inventer le personnage de Palabaud dans son roman "Passage", puisant aussi dans sa propre hypochondrie. Ce long récit magnifique parle de la maladie et de la mort ; sentant la mort proche, Palabaud veut regagner sa ville natale, Lyon, pour y mourir. Il y rejoint son ancien ami médecin – le narrateur.



Reverzy décrit aussi à merveille la lassitude. La lassitude face au monde et à ses chimères. "L’histoire d’un médecin est celle de sa lassitude ; son drame celui d’un épuisement surmonté. Il devient "celui qui, au lieu du rêve, ne dispose plus que du chien et loup de la Veille fatigante "

Il faut découvrir ou redécouvrir ce "Passage" entre la vie et la mort, l’écriture étant l’un de ces passages ; mais aussi encore la notion de « présence au monde » si chère à Reverzy et à tant d’autres écrivains. Enfin bien sûr la qualité d’écriture de Reverzy dans toutes ses oeuvres : c'est une écriture rythmée, riche, brillante, très ample. Généreuse.






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Le passage

Curieusement, malgré son sujet, le roman est d'une grande douceur, car l'idée centrale de Reverzy est que l'agonie n'est effrayante qu'aux yeux des vivants, de ceux justement qui sont encore en pleine santé, et ne comprennent pas cette résignation qui saisit les grands malades.
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