La littérature noire propose un éventail de lectures très large, et c’est une véritable aubaine. Tombée dans cet univers avec le thriller, je ne voulais toutefois pas m’y cantonner ni m’en contenter. C’est en explorant le genre que j’ai appris à reconnaître le roman noir et surtout, à l’apprécier …
Derrière cette vitre dégoulinante de pluie, les toits de Paris, la nuit. Dès la prise en main du livre, la couverture nous révèle une ambiance morose et un horizon bouché. Jérémie Guez nous embarque dans une balade nocturne des plus agitées.
Abraham alias Abe, a perdu sa mère à l’âge de cinq ans. Aujourd’hui, il n’a quasiment aucun rapport avec son père, ils cohabitent ni plus ni moins. Il a arrêté l’école depuis longtemps et ne fait rien de sa vie, à part la regarder couler. Avec Goran, son meilleur ami ils partagent alcool, drogues, petites combines et gardes à vue.
Jusqu’au jour où, après avoir découvert une salle de jeu clandestine, Abe et ses potes décident de passer à la vitesse supérieure en braquant les types du bar. Un coup facile, qui leur permettra de gagner pas mal d’argent sans prendre trop de risques. Ensuite, juste besoin de s’éloigner quelques temps histoire de laisser les choses se tasser et de revenir comme si de rien n’était.
« Je réalise, comme si cette pensée devenait une ultime révélation, que ma vie est ici et que, malgré sa violence et sa médiocrité, j’y suis attaché »
Exit la balade pour touristes, le Paris que nous dépeint Jérémie Guez est un univers violent, dans un paysage urbain des plus sombres.
Le roman est rédigé à la première personne du singulier, et pour ceux qui commencent à me connaître, j’affectionne particulièrement cette technique littéraire. Certes, elle limite le lecteur au point de vue d’un seul personnage –en l’occurrence Abe- mais il n’y a, en ce qui me concerne, pas meilleure perception voire compréhension, de ce que vit ledit personnage. Un choix particulièrement adapté en ce qui concerne ce roman, qui transpire les émotions et les sensations.
Nous arpentons donc les trottoirs de Paris aux côtés d’Abraham, qui va volontairement passer du statut de petit délinquant à celui de braqueur. Une vie qu’il a choisie de niveler par le bas, avec son pote Goran.
« La nuit, je ne dors plus. Je somnole, hébété par la drogue et l’alcool qui viennent lancer la combustion d’un grand réservoir de haine. Je suis sûr que ma tête finira par me tuer, que cette roue, à l’intérieur, qui se met en branle en un éclair et qui tourne de plus en plus vite une fois lancée me rendra fou. Un jour, elle se détachera, quittera son axe et heurtera sans interruption les parois de mon crâne. Je vis en sursis et n’ai qu’un seul souhait : retarder l’échéance. »
Ce roman très court, compte 126 pages. Je n’ai pas éprouvé le besoin d’en avoir plus. Le texte concis et clair permet d’en dégager l’essentiel et le rend d’une incroyable efficacité. De plus, l’écriture nerveuse et le vocabulaire percutant de Jérémie Guez viennent coller parfaitement au sombre décor.
PARIS LA NUIT est le premier volet d’un triptyque consacré à Paris. Ce « petit » roman noir est une excellente introduction pour poursuivre avec BALANCÉ DANS LES CORDES son deuxième opus, que je m’offrirai prochainement lors de ma rencontre avec Jérémie Guez à Lyon, sur le salon Quai du Polar.
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