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Critiques de Joseph Boyden (444)
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Le Chemin des âmes

Sur le Chemin des dames nombreux ils succombaient, “Le chemin des âmes” alors ils empruntaient...

Publié en 2004, le roman de Joseph Boyden est un mélange de barbarie et de spiritualité, guidé par deux voix qui tour à tour lui donne vie.



“Le chemin des âmes” c’est l’enfer du nord de la France raconté par un amérindien, Xavier, enrôlé avec son ami d’enfance Elijah dans un bataillon canadien vite embourbé dans les tranchées durant des mois interminables face à l’envahisseur allemand ; c’est une immersion au cœur de ”la Der des Ders” ; c’est le quotidien de soldats terrés dans des trous à rats avec la peur, la boue, les poux chevillés au corps ; ce sont les assauts répétés de ces pauvres bougres sous la mitraille, les obus et les gaz qui fauchent aveuglément.



“Le chemin des âmes” c’est aussi l’histoire de la tribu Cree en voie d’extinction, racontée par la tante de Xavier qui récupère celui-ci en piteux état dans une gare de l’Ontario un jour de 1919.

Chamane pour les uns, sorcière pour les autres, c’est elle qui a recueilli Xavier et Elijah encore enfants, qui leur a appris à survivre en milieu hostile au cœur de la forêt.

Arrivera-t-elle par ses remèdes ancestraux, par ses incantations, par son amour, à sauver une fois de plus son neveu maintenant à l’agonie au fond du canoë qui lentement glisse vers "son chez elle” ?



L’infinie tristesse qui hante “Le chemin des âmes” longtemps me poursuivra ; la personnalité hors norme de ses trois personnages principaux longtemps me fascinera ; la plume incisive de Joseph Boyden longtemps m’appellera !

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Le Chemin des âmes

♫Elle rentrera blessée dans les parfums d'un autre

Tu t'entendras hurler "que les diables l'emportent"

Elle voudra que tu pardonnes, et tu pardonneras

C'est écrit♫

-Francis Cabrel-1989-

----♫---♪---🏹----🍁----🏹---♪---♫----

Sur un sapin, les ailes écartées, gloussait une gelinotte

(c'est écrit alors pas besoin de prendre des notes !)

30 ou 40 oiseaux autour de l'arbre, en cercle, tournaient

Ils se dandinaient suivant les appels de l'autre qui les menait...

Puis, il s'est produit quelque chose de stupéfiant...

(Il y a l'onguent , ça c'était avant, concoction plantes et racines; remplacé par l'emprise de la médecine, comprenez morphine !)

Grande gélinotte a replié ses ailes, gloussé de plus belle

les autres, s'arrêtant net , ont ébouriffé leurs plumes

-ils en doublaient de volume-

Avant de recommencer leur ronde dans l'autre sens.

Personne ne te croirait ....Houhouhou !

Aussi quand c'est tes cris : preuves y dansent

Invocation par Cri de chouette

Pincée de glandes de mouffette

Cendres d'orignal, singulier car y bout

Fit celle qui m'apprenait l'esprit des animaux

traditions que je n'aurais pu dire avec des mots

merci à Niska, ma tante, femme tipique

dans l'Environnement d'un camp amérindien.

Je ne suis qu'un Cree...

Signé X...14-18

Chemin des Dames

Jetez les D, comme pour une partie de Yams

DCA

DCD

Dés sans D sur le chemin des âmes...



Des maux Crient

Mais les Cree restent...

♪C'était Cree♪

et ma Cree tique 😱



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Le Chemin des âmes

Une immersion dans les tranchées de la Première Guerre mondiale, ça vous dit ?



Perso, quand je vois "guerre" dans la 4e ou dans les retours, je m'enfuis en moins de temps qu'il n'en faut pour y penser... et c'est ce que j'ai fait.

Mais c'était sans compter sur la maîtresse Sandrinette qui m'a rattrapée par le fond de culotte et m'a mis le chemin des âmes entre les mains.

Ajoutez à ça que notre petite chouette, probablement complice, a trouvé judicieux de lancer une lecture commune, et j'étais acculée.



Ça démarrait moyen : deux gamins de 12 ans trouvent une martre dans l'un de leurs pièges et ça ne se passe pas bien pour elle.

En même temps, au fil du récit, on se rend bien compte que dans les grandes étendues sauvages du Canada, vers Ontario, les Indiens ne peuvent pas survivre autrement. Les baies et racines, ça va bien deux minutes.



Les enfants vivent avec la tante de l'un d'eux, Xavier, ainsi rebaptisé par les bonnes-soeurs du pensionnat dans lequel sa mère l'a laissé.

Tante a donc "récupéré" Neveu, ainsi que son meilleur ami, Elijah.



Un peu chamane, devineresse, d'aucuns diront même sorcière, la Tante vit seule en pleine nature, succédant ansi à ses ancêtres du Clan des Crees qui lui ont tout appris.



Et puis la Première Guerre mondiale éclate et les Indiens, encouragés par les chefs de tribus s'engagent et partent pour l'Europe...



Aucun détail de la vie dans les tranchées ne nous est épargné. L'avancée de la compagnie de laquelle font partie Elijah et Xavier est narrée par ce dernier.



Je me suis attachée aux deux Indiens, évidemment, mais aussi aux soldats qui combattent à leirs côtés.



L'horreur de la guerre frappe de plein fouet. le mépris pour les Indiens est encore tenace, et les deux amis doivent faire leurs preuves pour être considérés.



L'amitié entre les deux personnages principaux est un thème très fort et minutieusement exploité.



Le chemin des âmes est un roman choral à deux voix.

Xavier qui relate son histoire, du plus loin qu'il s'en souvienne, et la Tante qui fait de même et nous livre un récit passionnant.



Ce livre m'a bouleversée, émue, mise en colère aussi et je ne suis pas près de l'oublier.

D'ailleurs, il file tout droit sur mon île déserte.



Je remercie ma Sandrinette qui n'a pas lâché l'affaire et ma petite chouette qui a permis que cette lecture ait lieu.

Merci également à nos compagnons d'aventure : ma Bichette, Berni-Chou, ma Yaya et mon Isa.



.
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Le Chemin des âmes

1919. Niska, une vieille Amérindienne du nord du Canada vient chercher son neveu Xavier à la gare. Elle le ramène chez lui après des années passées à faire la guerre en Europe. De là à leur campement, ils ont trois jours de voyage à faire en canot. Ce long chemin est l’occasion pour Xavier de faire le point sur sa vie, de faire la paix avec lui-même. Et pareillement pour sa tante. C’est ce que nous propose Joseph Boyden avec son roman « Le chemin des âmes », un voyage vers l’intérieur, spirituel mais pas dans le genre psychologie pop. Dans tous les cas, moi, j’ai apprécié. C’est un de mes coups de cœur de l’année.



Dans les tranchées de France et de Belgique, Xavier a vécu l’horreur de la Grande Guerre. Boyden (pourtant à son premier roman !) a réussi à dépeindre admirablement bien ce conflit. Avec réalisme, parfois la barbarie, d’autres fois l’ennui du quotidien, souvent la peur, à l’occasion l’héroïsme. La bataille de Vimy, les escarmouches à Passchendaele, etc. Mais surtout la vie dans les tranchées et les petites excursions. C’est que Xavier et son meilleur ami Elijah, son frère d’adoption, sont tellement bons à atteindre la cible qu’ils sont devenus des tireurs d’élite. Ils étaient souvent envoyés en avant des lignes. Là, embusqués, ils devaient éliminer les ennemis dangereux. Si Xavier ressent une réticence à tuer, Elijah y excelle rapidement. Peut-être même y prend-il goût ?



J’aime bien cette façon de Boyden de dépeindre la guerre. Ça me fait beaucoup penser aux romans de l’Allemand Erich Maria Remarque ou d’un autre Canadien, Timothy Findley. Oui, on y retrouve quelques hauts faits d’armes, mais l’accent est mis sur l’aspect humain de cet enfer. Comment les soldats l’ont vécu au jour le jour. Leurs craintes. Leur peine quand ils perdent l’un des leurs. Leur solitude.



Mais Xavier n’est plus seul. De retour au pays, il devrait pouvoir compter sur Niska, qui l’accompagne dans son parcours. Alors que le jeune homme reste muré sans son silence et ses souvenirs douloureux, sa tante ressent le besoin de parler, de raconter l’histoire de son peuple, les Crees. Comment ils vivaient avant. Avant l’arrivée des Blancs, de leur commerce des fourrures, de leur alcool ravageur, leurs écoles où ils ont amené de force les petits Amérindiens et les ont coupés de leur culture plusieurs fois millénaire. Puis elle lui parle de son père, de sa sœur, des raisons qui l’ont poussées à récupérer ce neveu. Chacun doit mener ses propres combats mais, parfois, certains sont trop lourds à porter…



Le roman va et vient entre les souvenirs de Xavier et l’histoire que raconte Niska. Cette alternance permet de bien digérer toutes les scènes de violence de la guerre. Il permet aussi de comprendre leur solitude. Leurs deux solitudes, qui se croisent sans vraiment se rencontrer. Et où peut-on vraiment en prendre conscience que dans les grands espaces canadiens ? Là où on ne retrouve que des rivières à fort débit et des forêts vierges à perte de vue. Là où la solitude de l’âme rencontre celle de la nature. La puissance d’évocation de Boyden est forte à un point tel que, en lisant ce roman, je me suis senti envahi par une nostalgie pour une époque que je n’ai pas connue. Malgré la longueur du bouquin, jamais je n’ai senti des chapitres inutiles ou ennuyeux, ni même des passages. Je me suis laissé porté par cette lecture qui m’encourage à lire d’autres roman de cet auteur canadien talentueux.
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Le Chemin des âmes

Premier roman de l’écrivain canadien Joseph Boyden, « Le chemin des âmes » nous conte le cheminement halluciné d’Elijah et Xavier, deux jeunes indiens Cree engagés volontaires dans l’armée canadienne, au cœur des tranchées de la première guerre.



Explorant avec une acuité bouleversante les méandres de violence absolue et de folie pure qui hantèrent les plaines de la Somme entre 1915 et 1918, le livre semble habité par une noirceur insondable, que peine à traverser la lumière d’éphémères instants de grâce.



Si les lieux et les protagonistes n’ont rien en commun, l’épopée des deux amis évoque « Apocalypse Now », de Francis Ford Coppola, ainsi que le roman qui l’inspira, « Au cœur des ténèbres » de Joseph Conrad. On y retrouve la même trame narrative, un voyage au bout de l’enfer, un voyage au bout de la nuit aussi, qui nous envoie côtoyer, comme ses deux jeunes héros, une horreur indicible. On y redoute également la confrontation avec une forme de folie à l’état chimiquement pur, qui se dessine peu à peu comme la destinée ultime des deux protagonistes, que le regard fou du colonel Kurtz semble attendre niché au creux d’une tranchée du nord de la France.



Les scènes de combat dans les entrailles d’un paysage lunaire, dévasté par la fureur guerrière, constituent le fil du récit, tandis que les troupes canadiennes reprennent peu à peu le terrain cédé aux Allemands, et qu’Elijah s’enfonce dans une dépendance mortifère à la morphine et dans une folie meurtrière inextinguible. Le roman observe ainsi avec une sagacité à la limite du supportable, l’horreur de la première guerre mondiale, cet enchaînement continu de bombardements, de combats au fusil, à la baïonnette et au couteau pour s’emparer des quelques arpents de terre qui séparent les tranchées des deux camps.



Et pourtant, « Le chemin des âmes » est aussi un roman ample et ambitieux dont l’objet dépasse l’aventure de deux guerriers indiens égarés parmi des visages pâles portant des casques à pointes.



En plongeant dans les souvenirs d’enfance de ses héros, l’auteur revient ainsi sur l’asservissement des tribus Cree ou Ojibwé par le colonisateur blanc, qui entend arracher les jeunes indigènes à leur culture d’origine en les plaçant dans des établissements où des bonnes sœurs acariâtres rivalisent de sadisme pour ré-éduquer les petits sauvages qui leur sont confiés.



Joseph Boyden revient surtout par l’intermédiaire du magnifique personnage de Niska, la tante de Xavier, sur la possibilité d’une survivance des traditions d’un peuple voué à la disparition. Le second arc narratif de l’ouvrage, consacré au trajet en canoë de Niska et de son neveu estropié et drogué, enfin de retour en ce début d’année 1919, fait songer à « Dead Man », le très beau film de Jim Jarmush. L’amérindienne, qui a hérité du don de chaman de son père et le jeune soldat hanté par le fantôme d’Elijah vont remonter la rivière vers le nord de l’Ontario, et parcourront à leur manière « le chemin des âmes ». Tandis que les souvenirs de la grande guerre éclatent tels des grenades derrière les yeux enfiévrés de Xavier, Niska devra faire appel une nouvelle fois à la magie indienne pour tenter de sauver le jeune homme dont l’âme semble sur le point de rejoindre le Grand Esprit.



Si le roman raconte, avec une profondeur émouvante, le tragique de la guerre de tranchées qui ravagea le nord de la France, au travers de l’odyssée du solaire Elijah et du taiseux Xavier, sa beauté incandescente se niche dans le combat que mène envers et contre tout une vieille indienne pour perpétuer la spiritualité d’un peuple que les visages pâles ont tentée d’éradiquer à tout jamais.



« J’ai longtemps prié Gitchi Manitou cette nuit-là, puis le lendemain : je l’ai remercié d’être toujours en vie et pour la mort de mon ennemi. Depuis lors j’arrive à tuer en sachant que je ne le fais que pour survivre, et tant que je dis mes prières à Gitchi Manitou : il comprend. Mon ennemi, lui, ne le comprend peut-être pas quand je l’envoie sur le chemin des âmes, mais j’espère qu’il le comprendra le jour où je le rencontrerai à nouveau ».



PS : pour découvrir l’avis de Onee c’est par là :
Lien : https://www.babelio.com/livr..
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Le Chemin des âmes

Joseph Boyden - Le chemin des ames - 2004 : 1919, ce canot qui glisse pendant trois jours sur une rivière de l’Ontario matérialise le chemin des âmes qui donne son nom à ce livre. À l’intérieur de l’embarcation Niska une vieille indienne décharnée et son neveu Xavier blessé et agonisant de retour après plusieurs années de guerre en France. Ces deux-là pendant les longues heures du voyages vont expier une vie qui arrive pour tous les deux à son terme. L’histoire du peuple Crees décimé et spolié de ses terres par les soldats blancs entre alors en résonance avec les récits de combats du jeune homme noyé dans un des plus horrible massacre de l’histoire de l’humanité. Alors que Niska arrive à remonter aux temps heureux de sa tribu, Xavier lui ne se sort pas de sa vision traumatisante de la violence et de la fureur incarné par son cousin Elijah transformé en bête sauvage par la vue du sang et par la consommation excessive de drogue. En effet comment ne pas devenir fou dans un monde où on passe par les armes un gamin de dix-huit ans pour s’être endormi sur son tour de garde et ou la seule consigne donné aux combattant est de tuer, de tuer et de tuer encore. Les deux jeunes indiens pour leur habilité au tir vont devenir les tireurs d’élite de leur compagnie et les bêtes noires d’un ennemi accablé par leur redoutable efficacité. Dans ce monde fracassé ou les deux seules portes de sortie sont la mort où l’hôpital psychiatrique la lumière ne vient même pas d’une présence féminine et innocente. Ce récit est terrible et sans espoir, c’est le premier livre d’un écrivain canadien marqué par un père militaire et par le sang indien qui coule en parti dans ses veines. C’est aussi un roman qui retrouve les mots désespérés de ceux qui ont vécu de prêt cet enfer et qui l’ont raconté (Erich Maria Remarque, Ernst Junger, Maurice Genevoix, Roland Dorgeles et beaucoup d’autres.)… beau et terrifiant à la fois
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Le Chemin des âmes

Prenez deux univers fictionnels que rien a priori ne semblait pouvoir rapprocher. Deux univers dont le potentiel romanesque reste immense malgré la profusion d'oeuvres déjà produites. Prenez, par exemple… la guerre de 14-18 (une énorme boucherie qui a taillé dans le gras de la pyramide des âges de la population française comme dans un vulgaire morceau de kebab, en tout cas, c'est de cette façon édulcorée qu'on nous l'avait présentée dans les petites classes), et prenez, tiens, pourquoi pas… les indiens d'Amérique (un peuple décimé et spolié de ses terres ancestrales par un autre, prétendument censé représenter la civilisation). Dans les deux cas, ces sujets charrient beaucoup de bagarres, de drames et de morts inutiles, et dans les deux cas, ils ont inspiré (chacun de leur côté) pléthore de récits, romans, films, bédés, qui font désormais partie de notre imaginaire. Ces univers en apparence disjoints n'ont aucun point d'intersection. Enfin, si… maintenant, il y en a un. Ce point commun s'appelle le Chemin des âmes de Joseph Boyden.



En 1916, deux indiens Cree, Xavier Bird et Elijah Whiskeyjack, font la guerre dans les environs de Saint-Eloi et d'Ypres, en Belgique. Enrôlés comme tireurs d'élite, ils se cachent dans les recoins improbables laissés par la dévastation des combats. Ils observent et déciment les tireurs à découvert du camp d'en face qui paient de leur vie un instant d'inattention. Ils participent également aux assauts dans les tranchées, aux corps-à-corps à la baïonnette, à la reconquête des collines et des cratères investis par l'ennemi.

Le lecteur est à leur côté, rentrant la tête dans les épaules au miaulement des balles et des éclats d'obus, éclaboussé par la boue, le sang et les morceaux de cervelle des camarades.



Mais ce livre est beaucoup plus que ça. Une histoire complexe entre Xavier et Elijah, qui sont amis d'enfance, se développe progressivement, mêlant admiration réciproque, jalousie et compétition. Leur histoire finira en tragédie indienne ressuscitant le mythe du windigo, qui n'a rien à envier à la tragédie grecque.

On sait dès les premières pages que Xavier, accueilli par sa tante Niska à sa descente du train, rentrera au pays. Xavier et Niska sont tour à tour les deux narrateurs du récit. Sur la route du retour en canoë qui durera plusieurs jours, la guerre est racontée à travers les souvenirs de Xavier, anéanti, qui semble se laisser mourir. Niska rappelle comment a évolué le destin de sa famille confrontée à l'arrivée des wemistikoshiw, des hommes blancs, et raconte à travers son parcours personnel celui des indiens de l'Ontario. Ses vieux trucs de sorcière parviendront-ils à faire revenir Xavier parmi les vivants ?



A travers tout ce qu'il évoque et dévoile sur cette période, le chemin des âmes est un immense et exceptionnel roman, mais c'est aussi un premier roman, qui l'eût Cree ? A lire d'urgence.
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Le Chemin des âmes

J'ai accompagné Xavier à la lisière du chemin des âmes... Je les ai entendues murmurer leur ravage à son oreille, j'ai tremblé avec lui dans le fracas des armes, tellement fort qu’il en est devenu sourd. J'ai souffert avec lui. J'ai été dévastée devant la folie meurtrière d'Elijah, son ami. J'ai regretté le Canada, ses forêts sombres et ses animaux sauvages, la liberté de Niska, sa tante qui l’avait pris sous son aile.

Et Niska, justement, je l’ai admirée pour sa façon de vivre, libre et sauvage ; pour son refus de la Mort. Force de vie, elle est l’incarnation de la Déesse-mère qui fait fructifier ses petits et leur donne le courage de continuer.

La guerre des tranchées, en Belgique et dans la Somme, couplée à la chasse à l’orignal et à la magie de la religion des Indiens, forme un mélange détonant, hymne à la vie et à la mort.

Mais cessons d’évoquer cette histoire, car « évoquer sa mémoire ne ferait qu’inviter la tristesse et la tristesse, par ici, monte aussi vite que la pluie dans les tranchées, jusqu’à tout noyer. »



Ce roman, je l’ai donc aimé, mais pour ma survie, je suis contente de l’avoir refermé, il m’emportait trop loin et trop longtemps à la lisière de l’enfer.

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Le Chemin des âmes

Assise dans le canoë je me suis laissée bercée par l'histoire de Niska. J'ai entendu sa voix susurrer par-dessus mon épaule. Bercée par le clapotis des flots je l'ai écouté me raconter son peuple, me dire la liberté, la communion avec les éléments, les légendes millénaires. J'ai senti le souffle de ses ancêtres, vu l'orignal, ressenti la peur inspirée par les wemistikoshiw (les blancs), enduré la souffrance du carcan qu'ils ont voulu imposer aux Cree, aux Ojibwés et à tous ces hommes qu'ils disaient être des sauvages. J'ai senti l'arrachement de ce peuple à la nature, à leur terre avec laquelle ils ne faisaient qu'un ; senti la pitié de Niska pour ces pauvres fous et ressenti la futilité de leur grand Manitou et de leurs croyances. Comment un tel mépris de l'autre et de la nature peut-il être imposé par un Manitou bienveillant ? J'ai senti la fureur et la colère gronder dans son coeur et sa volonté s'affirmer à mesure qu'elle se heurtait au mépris et à la suffisance des wemistikoshiw.



J'ai écouté Neveu (Xavier) me raconter la pêche, la chasse, l'instinct, les traques silencieuses. Je l'ai écouté me raconter l'amitié, la fraternité quasi fusionnelle avec Elijha ce frère de coeur, cet autre lui. J'ai ressenti la fêlure quand les wemistikoshiw ont exploité ses dons, ceux des sauvages. Ces dons qu'ils essayaient d'extirper de leurs corps et de leurs coeurs à coup de prières, de vêtements « civilisés », de cheveux coupés et de sévices. Instrumentalisé dans cette guerre qui n'est pas la leur Neveu se bat pour rester humain, pour rester digne et ne pas se perdre. Elijha lui, veut plus il veut être le meilleur chasseur, meilleur que les wemistikoshiw. Il veut être le plus grand chasseur des tranchées, alors il comptabilise les cadavres des fritzs pour prouver sa bravoure, quitte à se perdre.



J'ai vu la fêlure devenir fissure puis plaie béante dans le coeur de Neveu et d'Elijha. J'ai vu la puissante médecine des wemistikoshiw pervertir leurs coeurs, et détruire leurs âmes.



Niska ne sait pas ce qu'est devenu Elijha mais elle sait que Neveu est là et qu'il a besoin d'elle. Elle sait que la médecine des wemistikoshiw est puissante mais ce combat elle ne peut le perdre. Alors elle susurre à l'oreille de Neveu ses vieilles histoires, sa vie. Elle lui insuffle la force de ses racines de ses ancêtres. Elle invoque le lynx, l'orignal et l'ours parce que face à la folie, à la barbarie et à la boucherie de cette guerre il faut des êtres puissants et dignes.



Ce récit est comme un conte initiatique. C'est l'histoire d'un peuple meurtri qui inlassablement se relève, toujours digne. Derrière la plume de Joseph BOYDEN j'ai entendu en écho celle de Richard WAGAMESE. Même humanité, même magie.

Portée par les mots, submergés par eux, j'ai fait un voyage incroyablement triste et lumineux. Peu d'auteurs savent faire cohabiter la laideur et la beauté, la cruauté et l'humanité sans que cela sonne faux, mais ici le tissage des émotions et des sentiments est d'une rare beauté.

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Dans le grand cercle du monde

C'est une oeuvre remarquable que Dans le grand cercle du monde. J'ai acheté ce livre sans en connaître l'histoire, à cause de tous les commentaires élogieux que j'en ai entendus. Joseph Boyden nous propose une visite dans le passé, au XVIIe siècle pour être exact. À cette époque, les Français commençaient à s'installer dans la vallée du Saint-Laurent alors que les Iroquois et les Hurons-Wendats étaient perpétuellement en guerre. Une situation trouble que l'arrivée des Blancs a exacerbée… Un des intérêts de ce roman est que l'auteur donne leur voix à tous les partis impliqués. Trois narrations. Trois points de vue différents. Donc, pas de parti pris !



D'abord, il y a Christophe, le jeune Français, un missionnaire, un jésuite, envoyé auprès des « sauvages » afin d'essayer de les convertir à la foi chrétienne, aussi pour consolider des liens d'amitiés (mais surtout de maintenir des liens commerciaux, un monopole sur le commerce des fourrures). Il est surnommé Corbeau à cause de sa robe noire, peu pratique, la risée des autochtones.



Ensuite il y a Oiseau, chef d'un village huron, membre de la puissante confédération Wendat, attaché aux traditions ancestrales de son peuple. Contrairement à ce que beaucoup croient, pas tous les Amérindiens vivaient dans des tentes au milieu des bois. Les Hurons étaient sédentaires, s'établissaient dans des villages de plusieurs milliers d'âmes, subvenaient à leurs besoins d'abord via l'agriculture (les trois soeurs : maïs, courge & haricot) puis ensuite grâce au troc avec d'autres peuples. Oiseau voit d'un mauvais oeil l'arrivée du jésuite (outre le fait que les contacts avec les Blancs étaient suivis de maladies, il sent que leurs valeurs et leur religion sont bousculés) mais l'estime tout de même essentielle dans sa lutte contre les Iroquois.



Puis il y a Chute-de-Neige, de la nation iroquoise. le roman s'ouvre avec sa capture par un groupe de Hurons menés par Oiseau et auquel participe Christophe. Sa famille vient d'être exécutée sous ses yeux on la ramène pour compenser la mort de la famille de Oiseau, dont elle deviendra la fille adoptive. D'abord hostile, elle finira par accepter sa nouvelle famille. À travers ce personnage, on découvrira que les deux peuples ne sont pas si différents l'un de l'autre.



Chaque chapitre, qui met en scène alternativement ces trois personnages, est court. Et le rythme est rapide. Ainsi, malgré les 600 pages du bouquin, on en remarque à peine l'épaisseur car l'histoire ne contient pas de longueurs. Il n'y a pas de passages que je juge superflu. Un seul regret : ne pas avoir le point de vue direct de Petite Oie. Il s'agit de la guérisseuse du village, une sorte de chamane aux pouvoirs multiples. Ce n'est pas une Huronne mais plutôt une Algonquienne de la tribue nomade des Montagnais qui a décidé recemment d'unir sa destinée à celle de ce grand peuple. D'où l'intérêt de son point de vue, original mais surtout plus objectif parmi tous ces Hurons et Iroquois en guerre.



Parce que c'est de guerre qu'il s'agit. Oui, l'arrivée des Français et des Anglais a exacerbé les tensions, mais le conflit existait depuis des générations. Il y a quelque chose de très tragique dans cette histoire. La fin d'une nation, d'une civilisation, est un événement troublant. Car les personnages sont témoins de tout ça, ils le voient venir et commencer à se produire. En tant que lecteur, on ne peut que se sentir interpelé par leur frustration, leur tristesse de voir leur culture s'éteindre avec eux. Certains ont peut-être moins aimé les scènes de torture, assez explicites vers la fin, mais c'était ça, aussi, le monde amérindien. Il ne fallait pas montrer que son côté polissé, dans le genre « communions avec les esprits de la forêt ».



Donc, le ton employé par l'auteur était très juste et ses choix littéraires, judicieux. de plus, Joseph Boyden a une plume très évocatrice. Il a su faire ressortir le tragique de cette situation sans tomber dans le mélodramatique, les moments héroïques sans tomber dans le patriotique et le parti pris. En fait, il a su respecter les points de vue de tous les côtés, sans jugement. du moins, c'est ce qu'il m'a semblé. Tout est arrivé parce que cela devait arriver, c'était dans l'ordre des choses. Bref, j'ai vraiment hâte de lire les autres romans de cet auteur de talent.
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Le Chemin des âmes

En chroniquant un roman de Louise Erdrich, un nom est apparu au détour des commentaires, celui de Joseph Boyden. Coup de coeur de plusieurs amis sur Babelio, je n'ai pas longtemps hésité à me jeter sur ce roman dont le magnifique titre et la couverture pleine d'une douleur sourde et touchante me plaisaient.

Je referme ce livre et je me demande comment, face à un livre d'une telle qualité à la fois littéraire, émotionnelle et historique, je vais pouvoir trouver les mots pour rendre compte de mes émotions et dire combien ce roman m'a plu, émue, touchée, bouleversée.



*

Ce récit porte un regard intéressant sur un aspect de la Première Guerre mondiale que je ne connaissais pas. En effet, j'ai appris que des Amérindiens s'étaient portés volontaires pour combattre en Europe.

Nous sommes en 1919. Xavier Bird revient chez lui, dans l'Ontario, après plusieurs mois passés dans l'enfer des tranchées d'Europe. Parti avec son ami d'enfance Elijah Whiskeyjack, il revient seul, bien différent du jeune homme insouciant, robuste et confiant qu'il était auparavant : il est amaigri, malade, amputé d'une jambe et fortement dépendant de la morphine.



Sur le quai de la gare, sa seule parente encore vivante, Niska est là. Après un voyage de plusieurs jours en canoë jusqu'à la ville, la vieille indienne Cree pensait accueillir Elijah à la descente du train. Quelle n'est donc pas sa surprise de découvrir son neveu Xavier qu'elle croyait mort rentrer sans son meilleur ami.



« Où est-il ? Nous aurons passé toute la guerre côte à côte pour nous perdre aux tout derniers jours. Un obus est tombé trop près. Il m'a lancé dans les airs et, soudain, j'étais oiseau. Quand je suis redescendu, je n'avais plus ma jambe gauche. »



C'est un voyage de trois jours qu'ils vont entamer en redescendant la rivière vers la Baie d'Hudson pour retrouver leur terre, leur forêt, loin de la civilisation et des hommes blancs.



*

J'ai aimé la progression de l'histoire qui s'ancre à la fois dans le présent et dans le passé des deux protagonistes.

On suit le méandre de leurs pensées qui se croisent. A chaque coup de pagaie, le récit glisse dans le territoire des souvenirs de Xavier ou de Niska dans un fondu parfait qui permet de passer d'une histoire à une autre sans que le lecteur perde de vue l'ensemble.



Sous l'effet de la morphine, le jeune homme nous laisse voir sa vie avant la guerre, les parties de chasse avec son ami, l'expérience de la guerre. Les souvenirs le hantent, le tourmentent. La guerre l'a forcé à faire des choix pour survivre. Mais quelque chose s'est brisé en lui, son innocence, son âme d'enfant.



« Vous vous conduisez en lapins, l'heure est venue de vous conduire en loups ! »



Alors que les réserves de morphine se réduisent comme peau de chagrin, Niska voit son jeune parent souffrir et s'affaiblir. Craignant que plus rien ne le retienne à la vie, la vieille chasseuse de windigos essaie de l'amarrer à sa vie d'avant, à son histoire, à ses souvenirs heureux, à ses racines, en lui parlant l'histoire de sa famille, d'Elijah, de ses pouvoirs de vision et de guérisseuse transmis par son père.



*

L'auteur ne cherche pas les effets de style, au contraire. Sobre, sensible, mélancolique, poétique et d'une justesse parfaite, c'est par la simplicité que l'auteur a réussi à me toucher.



Campés avec autant de justesse, de profondeur que de tendresse, les trois magnifiques personnages de ce roman prennent vie et forme sous sa plume poétique. Plus vrais que nature, terriblement attachants, leurs personnalités se dessinent peu à peu. Si Elijah est désinvolte, intrépide et exubérant, Xavier est au contraire réservé et peu bavard. Quant à Niska, elle déborde d'un amour discret et bienveillant.



« Mon corps vibre à la douleur de Neveu ; à l'idée qu'il n'est rentré chez lui que pour mourir. »



*

Avec ce récit, le lecteur part à la découverte du peuple nord-amérindien des Ojibwa-Cree situé dans le Nord de l'Ontario.

A mesure que Niska se remémore son passé, on pénètre leur culture, leurs traditions, leurs légendes et leurs modes de vie traditionnels. Mais en même temps, on prend conscience des conditions de vie extrêmement rudes des peuples amérindiens subissant la domination des Blancs, l'auteur mettant l'accent sur la politique d'assimilation et de « civilisation » par l'éducation des enfants autochtones dans des pensionnats.



Le lecteur est aussi catapulté dans l'horreur des tranchées. L'auteur les décrit avec brutalité mais sans exubérance.

Les talents de chasseurs des deux jeunes indiens sont vite repérés par les gradés, des qualités utiles pour la guerre. A mesure que le ciel canadien s'assombrit de nuages et que le tonnerre résonne au loin, les souvenirs de Xavier reviennent auxquels les grondements des canons, le sifflement des obus, leur choc assourdissant et leur souffle meurtrier font écho. Entre peur et survie, absurdité et folie, douleur et fatigue, souffrance intérieure et mal du pays, les mots tombent, explosent, se fracassent, répandant chairs et entrailles sur le sol détrempé et crevassé, gorgé d'eau croupie et de cadavres en décomposition.



« Je glisse dans un demi-sommeil bizarre, couché là, sous la surface de la terre, parmi les morts. Je sais qu'ici, je suis en sûreté, que mon heure n'est pas venue de les rejoindre. »



*

« le chemin des âmes » est un roman choral puissant et poignant, violent et cruel, tendre et pudique qui évoque avec subtilité des destins brisés par la bêtise des hommes.

Il y a beaucoup d'amour, de tristesse et de souffrance dans ce livre. J'en ressors émue, conquise par l'émotion de ce récit aussi sombre et que lumineux. Ses personnages vont m'habiter pendant longtemps tellement j'ai aimé partager, au fil des pages, leurs vies, leurs joies et leurs souffrances, leurs doutes et leur honte.

Un roman passionnant, foisonnant.

Un très gros coup de coeur.
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Le Chemin des âmes

Niska, une vieille Indienne Cree retrouve, sur le quai d'une gare, Xavier, son neveu, survivant de la guerre, enrôlé dans les troupes canadiennes et le ramène chez elle, à l'écart de la ville, à quelques jours de voyage. Nous sommes en 1919.

Il est des chemins dont on ne revient pas indemne. La guerre, par exemple.

Il est des guerres qui se délestent de leur emprise initiale, de leurs représentations, des croyances qu'elles peuvent véhiculer dans l'histoire de l'humanité.

J'ai écarté ce rideau.

J'ai poussé ma barque silencieuse sur le flot des pages. Des lumières se balançaient dans un geste régulier comme pour me guider vers le rivage de cette rivière de l'Ontario.

Il y avait Niska dont je vous ai parlé et son neveu Xavier, tous deux m'attendaient... Je savais qu'ils avaient une histoire à me raconter. Je savais qu'il manquait encore à l'appel quelqu'un d'essentiel à l'histoire, Elijah, le frère d'âme, je savais qu'il allait bientôt nous rejoindre pour ce rendez-vous ultime, je ne savais pas comment, mais je le savais. Et le rendez-vous vint plus tard...

Alors, ils m'ont raconté tous trois leur histoire autour d'un brasero sur ce bord de rivage.

C'est un roman choral, où les voix s'alternent et se mêlent dans un chant d'humanité magnifique et douloureux.

Tout a-t-il été dit sur l'enfer des tranchées ? Je suis incapable de répondre à cette question. Peut-être jamais encore avec le regard, le souffle, la respiration, les gestes, les mots, l'âme d'un indien Cree. Comment faire venir dans ce récit ce qui lie les personnages à la terre, au paysage, aux animaux, au monde, à l'invisible, à la vie, à la mort ?

La glaise des tranchées est-elle si différente de l'humus hérité des ancêtres du peuple Cree ou des Ojibwés ?

C'est l'histoire fraternelle et intime de deux Indiens Cree, qui se confond avec la boue des tranchées de la première guerre mondiale.

Mais ce qu'ils ont vécu de la guerre se mêle à celle de Niska qui porte l'histoire de son peuple.

Niska va nous raconter sa propre histoire, son enfance, d'où elle vient, peut-être depuis la nuit des temps et son récit se noue avec celui des siens partis à la guerre.

C'est un roman chamanique, avec le geste des prières, l'odeur du tabac qu'on répand au pied d'un orbe, le désir de liberté, l'invocation du ciel, des arbres qui se dressent pour nous protéger, du lynx qui attend ou qu'on attend...

La puissance évocatrice et onirique de ce roman dépasse les récits qui ont su dire l'horreur et la folie de la barbarie humaine, dans sa quintessence. Ici des mots vont dire la différence, la douleur des minorités, l'exclusion, d'autres combats, celle d'un peuple qu'on cherche à déposséder de son identité, comment continuer à transmettre cela malgré les guerres.

C'est un récit d'une poésie envoûtante, magistrale, pour dire la tristesse infinie, crépusculaire, celle à la fois des profondeurs atroces des tranchées et celle d'une humanité qui survit malgré la folie de la guerre.

Être Cree, c'est être oiseau, c'est être orignal, c'est être loup, c'est ce confondre avec la terre et le ciel en même temps ; un obus tombe et forcément déchire le paysage, les corps aussi, les pages, les mots pour le dire plus tard.

Un obus tombe, c'est s'envoler comme un oiseau et retomber avec une jambe en moins, c'est être vivant cependant et revenir de cette boucherie, revenir sur un canoë qui traverse le monde d'une rive à l'autre. Revenir bancal. Revenir presque debout et survivre après.

Le chemin des âmes, c'est un roman que j'ai lu et pris en moi dans son devoir immense de mémoire.

C'est un roman d'une beauté tragique, crépusculaire, qui m'a totalement bouleversé.

Le chemin des âmes, c'est la confrontation d'une fraternité unie dans la ferveur de vivre et dans le sang, celui partagé, celui qui coulera plus tard.

Le chemin des âmes, c'est un chemin sans retour entre les vivants et les morts.

Le chemin des âmes, c'est peut-être trouver désormais un endroit où se réconcilier avec les autres, avec le temps, avec le destin.

Joseph Boyden se contente de dire cela dans ce roman épris de vie et de sidération.
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Le Chemin des âmes

Cher Isi,





Je suis bien rentrée sous mon tipi, et t'écris en fumant le calumet que nous n'avons pas eu le temps de partager. J'espère que tu es bien remis de notre chevauchée de trois jours où nous avons raccompagné, sur nos appaloosas, Xavier et la tante qui remontaient la rivière en canoë jusqu'à chez eux.





J'ai trouvé impressionnant d'accompagner tante Niska jusqu'au train pour récupérer Xavier. Ou plutôt son fantôme... Car Isi, dans quel état ils nous l'ont rendu ? Je ne sais pas si j'ai eu plus de peine en croisant son regard sans vie sur son visage cadavérique, ou en m'apercevant qu'il lui manquait une jambe. J'aurais voulu lui poser tant de questions alors, mais la tante a eu raison de nous enjoindre de lui laisser reprendre des forces. D'ailleurs peut-être est-ce un grand mot. J'ai l'impression qu'il tirait ses dernières ressources de sa médecine à aiguille qu'il a ramené de cette guerre entre la France et l'Allemagne… Et en même temps, la tante a raison, peut-être que ce venin qu'il s'infiltrait faisait ressortir le poison qui hantait ses rêves, lui permettant comme une fièvre d'expulser toute la noirceur accumulée.





C'était terrible d'entendre ses psalmodies, ses cauchemars, ses peurs à ciel ouvert… Trois longues journées à chevaucher sous ses souvenirs de la guerre, les horreurs qu'il a vues et celles qu'il a commises au nom et pour le compte d'un peuple qui le voyait à peine, et pour un combat qui n'était pas le sien, ni celui de notre peuple. La tante a bien fait, dans les moments où il s'apaisait, de lui raconter sa propre histoire d'indienne, elle qui s'est toujours battue pour sa liberté que les blancs appelle sauvagerie. Je crois que ses récits faisaient beaucoup de bien à Xavier, à son esprit et à son corps. Cette voix apaisante qui nous ramène aux sources, aux choses simples et au sens de la vie, dans un monde où la vie a un sens, un monde où on ne tue que pour la conserver et sauver la sienne. Un monde où creuser des tranchées pour exploser la gueule du plus d'humains possible n'est même pas envisageable, et n'a aucun sens. « Chacun se bat sur deux fronts à la fois, l'un contre l'ennemi, l'autre contre ce que nous faisons à l'ennemi ».





Les récits que la tante intercalait entre deux réminiscences de scènes de guerre sont ceux qui m'ont le plus émerveillée, car même lorsqu'ils parlaient de famine ou de descentes de blanc pour les civiliser, les mater, les martyriser et les parquer dans des réserves, ça me faisait du bien d'entendre que les nôtres s'attachaient au sens des choses. Et puis cette romance, sous la tente de sudation, avec le beau chasseur blanc… Ça commençait si bien ! Indispensable chasseuse de wendigo, la tante est une passeuse formidable, qui continue de se battre pour transmettre ses dons et perpétuer les traditions. Pour autant, j'apprécie quand même d'avoir pu entendre les cauchemars éveillés de Xavier. J'ai trouvé ça long, pourtant, et parfois répétitif, souvent trop violent pour moi lorsque ses souvenirs s'intensifiaient au rythme des combats dans lesquels son esprit replongeait. Mais ça m'a aidé à le comprendre, car jamais il n'aurait raconté tout cela consciemment. Comme la plupart des nôtres, il est plutôt silencieux sur ses « exploits ». Sauf Elijah, mais toi et moi savons ce que ça lui a valu, n'est-ce pas ? Deux guerriers Crees se servant de leur expérience silencieuse de la chasse pour décimer les lignes allemandes… L'un d'entre eux qui commence à aimer ça ; Au bout du compte, comme disait Elijah, « nous faisons le sale boulot à leur place : Quand nous rentrerons chez nous, rien d'autre n'aura changé, on nous traitera toujours comme des merdes. Mais tant que nous sommes ici, il n'y a qu'à faire ce que nous savons si bien faire ».





Sais-tu ce que j'ai préféré, Isi ? La fin de cette aventure. Encore une fois, c'est elle qui donne son relief à l'histoire, sa rondeur, qui boucle la boucle, referme le cercle, celui de la vie éternelle ou de l'éternel recommencement, de la renaissance. Lorsque leurs deux voix se rejoignent, lorsque le passé et le présent ne forment plus qu'un. Car alors tout s'éclaire, le job a été fait et bien fait, tout a finalement un sens. « Je suis devenu ce que tu es, Niska », a marmonné Xavier, tu te souviens ? Et c'était tellement vrai. Paix à leurs âmes pleines de vie, puissent-elles trouver le chemin de futurs lecteurs. En attendant, je te remercie infiniment d'avoir accepté de parcourir ce chemin avec moi. Ça restera un souvenir éprouvant, mais beau, aussi.





Amicalement,

Onee-qui-est-devenue-fan-de-ton-ragout-d'orignal-aux-racines.





L'avis d'Isidoreinthedark :
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Le Chemin des âmes

J’ai terminé ce roman il y a déjà plusieurs jours, mais j’ai du mal à rédiger cette critique, tans je suis sous le charme de la plume de cet auteur, de l’histoire qu’il a racontée. J’ai envie de rester encore un peu dans son univers magique…



Joseph Boyden nous parle de la tragédie d’un peuple, les Crees, Amérindiens dont le mode de vie a été bouleversé par l’arrivée des Blancs qui les ont colonisés, les obligeant à renoncer à leur mode de vie si proche de la Nature, exterminant les plus récalcitrants, les obligeant à envoyer les enfants dans les écoles catholiques, où la maltraitance physique et morale régnait en maître absolu.



Les Crees chassait le caribou, pour se nourrir et se faire des vêtements, vivaient en harmonie avec les éléments ; le chef savait où se trouver l’animal en observant les bois de l’animal qu’ils avaient tué auparavant, les faisant brûler pour lire comme sur un parchemin, la « carte géographique » de l’endroit où chercher. Le chef avait aussi le pouvoir de voir les « mauvais esprits » et délivrer pour protéger la tribu. Mais les Blancs, les wemistikoshiv , ont imposé leurs propres lois, tuant le chef purement et simplement.



« L’assassinat de mon père avait planté au fond de mon ventre une graine dure et amère ; au fil des ans il en monta la fleur obscure de la colère. Ma mère reconnut ce qui poussait en moi. A sa façon, elle cherchait à m’empêcher d’en user pour le mal, car c’est entrer dans une spirale à laquelle on n’échappe presque jamais. » P 122



Ce chef était le grand-père de notre héros, Xavier Bird, qui était si malheureux à l’école que sa tante Niska, autrefois l’enlever pour vivre avec lui dans la forêt selon les traditions, allant jusqu’à aller chercher plus tard un autre enfant, le seul ami de Xavier : Elijah.



Les deux gamins grandissent ensemble, comme des frères et finissent par s’engager dans l’armée canadienne pour aller combattre sur le front durant la première guerre mondiale. Si Elijah s’adapte très vite devenant un tireur d’élite, Xavier ne se sent pas à sa place, mais suit son ami : ils traquent les Allemands, comme ils traquaient le gibier dans la forêt, ce qui les rend très vite indispensables.



Mais Elijah aime débusquer et tuer, devenant la coqueluche des supérieurs : on les méprise pour leur couleur de peau, comme s’ils étaient des sous-hommes, mais comme ils se comportent en héros, on les accepte mieux. Mais, pour avoir encore plus de sensations fortes, Elijah dérobe de l’héroïne et se pique en cachette…



« Nous aurons passé toute la guerre côte à côte pour nous perdre aux tout derniers jours. Un obus est tombé trop près. Il m’a lancé dans les airs, et soudain j’étais oiseau. Quand je suis redescendu, je n’avais plus ma jambe gauche. J’ai toujours su que les hommes ne sont pas faits pour voler. » P 22



On sait dès le départ, que Xavier revient de la guerre avec une jambe en moins, dépendant lui-aussi de la morphine, et c’est sa tante Niska qui va le maintenir en vie coûte que coûte, lui racontant l’histoire de la famille.



Dans ce roman, Joseph Boyden alterne les récits : ce qui se passe au front, la vie des soldats, leur quotidien, les rivalités, les chefs parfois tellement imbus d’eux-mêmes qu’ils envoient les soldats au casse-pipe alors qu’une autre solution serait possible, la souffrance de ces jeunes gens. Puis, on revient au présent, à Xavier et Niska et ce deuxième combat contre la dépendance à l’héroïne, la souffrance de l’amputation, le refus de continuer à vivre…



L’auteur a choisi de raconter la guerre, à chaque injection que se fait Xavier, pensant que sa tante ne s’en aperçoit pas, comme si la guerre était un « bad trip » ce que j’ai trouvé brillant. Les scènes de guerre, seraient, sinon, très difficiles pour le lecteur. Il en dénonce au passage l’absurdité…



J’ai vraiment eu un coup de cœur pour ce roman, et pourtant j’ai lu peu de livres sur la première guerre mondiale, m’intéressant beaucoup à la guerre suivante. J’ai trouvé des thèmes qui me touchent : les Amérindiens, leur mode de vie en harmonie avec la Nature : ils étaient écologistes avant l’heure, si l’homme blanc n’avait pas détruit toutes les autres civilisations sur son passage…



Cerise sur le gâteau: le titre est excellent…



Si ces thèmes vous touchent, et si vous faites partie des chanceux qui ne l’ont pas encore lu, n’hésitez pas, foncez !




Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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Le Chemin des âmes

Ce livre campe dans plusieurs iles desertes. Petite nature, influencable et malleable a souhait, je me suis mis a le lire moi aussi.

Je n'ai pas ete decu. Je ne l'emporterais pas dans mon ile, mais c'est decidement une belle lecture.



Deux recits s'entrecoupent, se completent et s'unissent. J'ai beaucoup aime l'un, un peu moins l'autre.

Deux indiens du Canada partent a la guerre de 14 en Europe. Un seul revient, mutile physique et moralement. La tante qui le recueille essaye de le remettre sur pied en lui racontant le passé, le vecu et les croyances de son people, les Cree.



Je commence par le moins (moins ne veut pas dire pas!). J'ai moins aime le recit guerrier. Je l'ai trouve trop hollywoodien, trop porte par les hauts faits d'armes des heros. Je n'ai pu m'empecher de revoir en memoire les classiques ecrits par les combattants d'alors, ou l'horreur etait presente aussi dans les moments de calme, dans les blague des soldats, jusque dans les permissions a l'arriere. Ou l'accent etait beaucoup plus mis sur la camaraderie, la solidarite, la fraternite qui liaient ces appeles. Le feu, de Barbusse, La main coupee, de Cendrars, A l'ouest rien de nouveau, de Remarque.

J'ai beacoup plus aime les chapitres ou la tante fait revivre les indiens Cree, leurs tratitions, leur symbiose avec la nature. Peut-etre parce que c'etait une lecture plus depaysante pour moi, plus neuve. En tous cas elle m'a plus emue.



Le tout fait quand meme un tres beau livre. Traverse par un grand souffle epique et empreint de beaucoup d'empathie.Il atteint pour moi le firmament des quatre etoiles.

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Le Chemin des âmes

Une couverture superbe, un titre qui ne l'est pas moins. Quelques critiques seduisantes lues il y a longtemps, un livre cité en commentaires de mon billet sur "Pour l'honneur de tous les miens", ... et puis recommandé par mon ami Isi, il méritait amplement de sortir de ma PAL, même si comme le fait remarquer mon amie Anna, ce nest pas vraiment une lecture légère pour les vacances.



Il s'agit en effet d'un roman d'horreur, ou plus exactement d'horreurs. N'y cherchez ni vampires, ni zombies, éventuellement quelques fantômes. Les horreurs que l'on croise ici sont seulement et atrocement humaines : la guerre de 14 et ses tranchées, son absurdité meurtrière, ses gradés imbus d'eux-mêmes et imbéciles. Comme si les allemands ne suffisaient pas à tuer les soldats alliés, ces gradés censés accompagner leurs hommes n'hésitaient pas à en exécuter un, qui avait eu le tort de s'endormir alors qu'il était de garde. L'autre horreur évoquée en filigrane de ce roman, c'est le sort réservé par les blancs aux tribus indiennes en Amérique du Nord, et ici spécifiquement au Canada, ces pensionnats religieux où ils étaient traités plus mal que des animaux, battus, enfermés s'ils résistaient, ce racisme à leur egard, ce sentiment de supériorité des blancs se jugeant plus évolués, l'utilisation du rhum comme "une arme aussi rusée que puissante", tout cela a contribué à ruiner la vie traditionnelle de ces peuples.



Ils sont deux, deux indiens Cree à s'enrôler pour participer à la guerre de 14 en Europe. Ils vont connaître l'horreur des tranchées, ces vies sacrifiées par centaines dans des assauts absurdes pour reprendre quelques mètres de terrain. Leurs compétences en tant que chasseurs vont leur permettre de se distinguer dans les actions individuelles, dont l'objectif est d'abattre des allemands en préparation d'assaut ou en représailles.

Mais comment sortir indemne dans son corps, dans sa tête de cette boucherie. Un seul reviendra, quasiment mourant.



Le roman alterne les chapitres relatant les horreurs de la guerre et ceux après le retour au pays. Le revenant est accueilli par sa tante, vieille indienne dotée de pouvoirs qui durant les trois jours de canoë nécessaires à leur retour lui racontera des épisodes de sa vie, seule et avec lui enfant tandis que le blessé de son côté revit dans sa tête quelques souvenirs de sa vie d'avant.



Un roman poignant, assez dur, mais qui se lit paradoxalement avec un vrai plaisir de lecture, tant le texte est beau, tant l'amitié y est célébrée, tant les personnages sont inoubliables
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Dans le grand cercle du monde

Un roman qui nous plonge au cœur du XVIIe siècle parmi les Sauvages qui peuplent le Canada, à travers les voix de Christophe, le jésuite français, d'Oiseau le chef de guerre huron, et de Chute-de- Neige, la jeune fille iroquoise.



Nous découvrons le mode de vie, les croyances et les traditions des tribus indiennes, qui évoluent dans un monde à la fois ténébreux et paradisiaque.



La nature, les animaux et les hommes font partie d'un même univers. Leurs esprits sont mêlés. Un peuple libre et généreux, à l'écoute de leurs enfants. C'est le côté paradisiaque.



L'autre penchant de ces hommes est leur art de faire la guerre et de se livrer à des cérémonies de torture insoutenables, à des guerres du deuil qu'on peine à comprendre. Nous sombrons alors dans les ténèbres.



Face à eux, les hommes velus venus d'au-delà de l'Océan, s'accaparent de leurs richesses et de leurs savoirs. Ils sont accompagnés des « Corbeaux », ces prêtres qui piétinent leurs croyances pour les contraindre au christianisme. Sont-ils plus civilisés ?



Deux cultures qui s'affrontent et s'observent. Ils s'admirent parfois mais sans jamais vraiment se comprendre ou se faire confiance. Le choc des cultures et des croyances est trop intense.



Un récit riche et poétique qui nous immerge dans un monde splendide, si on met de côté la rivalité des hommes.



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Le Chemin des âmes

Xavier et Elijah, deux Amérindiens propulsés dans la l'enfer de la guerre des tranchées, survivent grâce à leur don de chasseur. Silencieux, agiles et doués d'une vue perçante, ils sauvent leur peau en prenant la vie des soldats ennemis. De cette gadoue humaine sortent parfois des monstres, presque des mangeurs d'hommes.



Xavier, que l'on surnomme « Bird », survole parfois ces âmes perdues, comme il a vu faire sa tante Niska, une vieille femme chamane qui communique avec les esprits. Comment cet homme des bois, habitué à chasser seulement pour se nourrir, va-t-il sortir de cette drôle de guerre ?



Un roman très noir et puissant qui relate à la fois la vie de ces hommes englués dans cette guerre insensée, et la vie d'une tribu indienne qui tente de survivre en dehors de la réserve, continuant à perpétuer leurs rituels, refusant le monde moderne et sa barbarie.



La guerre fait prendre aux hommes un chemin qui n'a plus rien d'humain et ne les délivrera que pour les emmener vers le chemin des âmes.

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Là-haut vers le Nord

Dire quelque chose de plus après la magnifique critique d'un de nos babeliotes, Endymion, semble difficile et superflu mais je continue l'exercice car l'écriture de Joseph Boyden m'a vraiment touchée , émue et accrochée .

J'ai donc découvert cet auteur à travers ce recueil de nouvelles, et quelles nouvelles !

Mon premier Boyden est et sera Là-Haut vers le nord .



Treize nouvelles, comme les treize semaines composant le temps d'une saison…et il y a bien quatre saisons dans ce recueil .

Joseph Boyden amorce sa partition avec l'Est, la saison de la peine, ensuite avec le Sud, la saison de la ruine, puis avec le l'Ouest la saison de la course et enfin le Nord la saison du retour.



Cycle des saisons, cycle des illusions et des désillusions qu'il faut guérir. Et chez les Cree pour guérir, il faut honorer les quatre points cardinaux dans ce sens pour former le cercle avant le rituel.

L'auteur est avant tout un passeur de mémoire et il s'exprime à travers ses personnages, comme Rémi. « Rémi n'aime rien tant que les cycles. Les choses qui se répètent, les routines quotidiennes, il semble ne vivre que pour ça. Maman dit qu'il est l'incarnation des Crees d'autrefois, avec leur passion pour les cycles, les saisons, le cercle de guérison. »





Treize nouvelles pour nous faire ressentir le déchirement entre passé et présent et le futur rêvé ou possible.

Nous voyageons à travers une série de personnages, tous apparentés de près ou de loin à l'aïeul, « le vieux », celui qui parle au Weesageechak, le trompeur ou figure bouffone .

Dans ces tranches de vie, chacun à sa manière, témoigne d'une réalité quotidienne où affleure légendes et croyances amérindiennes : ici, les indiens Crees du Nord de l'Ontario, de la baie James (partie inférieure de la baie d'Hudson).

A travers chacun d'eux, l'auteur donne la parole à des âmes blessées, des esprits éveillés.



En même temps réalistes et poétiques, ces nouvelles nous permettent de percevoir, partager les difficultés, failles et maux (diabète, malformations dus à la pollution, drogue…) que les Crees rencontrent dans leur réserve au contact de la société moderne matérialiste.

Comme le dit Soeur Jane « N'oubliez pas, Père Jimmy, qu'il n'y a pas si longtemps, ce peuple vivait en autosuffisance. Les jeunes d'ici sont écartelés entre ce qui n'est plus et ce qui n'est pas encore là ; entre tout ce qui fait leur identité de peuple et tout ce que nous leur demandons de devenir. »



Mais ces nouvelles dessinent aussi les contours d'une spiritualité toujours vivace : les esprits, les windingos (les démons), les animaux totems sont bien présents et n'ont pas été effacés.



J'ai été particulièrement émue par la dernière saison, Le retour, où les points de vue de différents personnages interfèrent sur la vision d'un même événement : le décès de l'une d'entre eux Linda (petite-fille pour l'un, fille, tante, nièce, cousine pour d'autres).

Le retour de son corps parmi les siens permettra à la communauté de communier autour du chant de la rivière et , pour quelques heures renaître en célébrant les Manitous.



C' est avec ce recueil, Là-haut vers le Nord, que j'ai découvert Joseph Boyden.

C'est un gros coup de coeur, je suis tombé sous le charme de son écriture, profonde et sincère qui a déclenché en moi beaucoup d'émotions.



J'attends avec impatience de le retrouver dans « Le chemin des âmes » et « Les saisons de la solitude » ou « Dans le grand cercle du monde » .



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Dans le grand cercle du monde

Trois voix s'élèvent dans les immenses espaces canadiens. le XVIIe siècle est déjà entamé, quand des jésuites français essaient de convertir des Indiens. le jeune père Christophe, qui croyant bien faire en imposant ses croyances en prosélyte convaincu, trouve sur son chemin le chef Huron, Oiseau, et sa prisonnière iroquoise, Chutes-de-Neige, des ennemis de toujours.



Les Hurons ont décidé de garder le père Christophe qu'ils nomment ironiquement le Corbeau à cause de sa soutane. Oiseau est chargé de le protéger. Bien que critique et condescendant, le Corbeau en apprenant la langue des Indiens s'intègre peu à peu. il va même jusqu'à admirer les rites funéraires de ceux qu'il appelle les Sauvages, et dont il se désole d'en convertir si peu. A l'arrivée de la tribu en Nouvelle France, Oiseau rencontre le gouverneur, Samuel Champlain, qui lui propose d'unir leurs forces pour résister aux Hollandais et aux Anglais qui ont armé les Iroquois. En fait, c'est une manoeuvre pour s'allier ceux qui contrôlent le commerce dans les territoires sauvages.



Car qui gagnera la bataille du commerce gagnera la guerre. Dans cette lutte, les pères jésuites servent de lien avec les Français, ils sont tolérés dans la tribu pour cette seule raison. Après des combats épouvantables contre les Iroquois, et des tortures terribles auxquelles il assiste avec deux autres pères, le Corbeau continue son travail de conversion auprès des Hurons. Il prêche et répond à leurs questions auxquelles il n'a pas toujours de réponses. Ses convictions religieuses ne vacillent jamais, il résiste à tout, même à la sensualité des femmes de la tribu, surtout à celle de Chutes-de-Neige, maintenant résolue à rester avec les Hurons.



Un livre magnifique qui nous transporte dans le monde très codifié des Indiens. On découvre leurs us et leurs coutumes, leurs croyances et les rapports des tribus entre elles. Des rapports tendus entre les Hurons et les Iroquois, exacerbés par les Européens qui, venus pour des raisons mercantiles et pour imposer leurs croyances, ont apporté des maladies dévastatrices. Un monde qui peut se révéler impitoyable (les scènes de tortures sont insoutenables) mais aussi plein d'humanité.
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