Je sais repérer instinctivement la lampe ou le petit bracelet qui peut réparer une ancienne blessure. Et dénicher les objets consolants...Ou les doudous aux couleurs d'arc-en-ciel pour adultes tourmentés. Pour trouver des lapins qui s'allument et des écrevisses en plastique rouge, qui me font poiler, je traverse la ville au pas de charge. Les grandes filles fragiles en manque d'affection ont besoin de plaisanter.
Je l'ai peut-être déjà noté quelque part, je seras de chaperon à ma petite soeur. Si on m'avait laissé le choix, j'aurais refusé le poste. Mais ma mère a préféré mettre un terme à une vie qui ne l'amusait plus..
Quand il s’agit de faire n’importe quoi, je ne suis jamais loin
Tombée sur la tête de Leslie Bedos
Récemment, après avoir refusé de dépasser les deux séances hebdomadaires, la dame s’est fortement intéressée à mon envie de mettre par écrit tout ce qui m’encombre.
Retrouver les souvenirs qui voudront bien se présenter. Et ne pas rougir si c’est un peu bancal. Depuis toujours ou presque (j’étais bien partie avant que ça déraille), je suis assiégée par des bouffées d’angoisse.
Ne pas oublier non plus de signaler ce toc : « Je vous l’ai peut-être déjà dit… » que je ressors souvent.
L’impression d’avoir tout raconté. De répéter les mêmes phrases. C’est navrant.
Se concentrer aussi sur mes pensées obsessionnelles. Des fixettes absurdes, qui m’éloignent momentanément des vraies catastrophes.
Tout noter dans un cahier, pour calmer la laideur. Commencer, continuer, terminer. Enchaîner les phrases, sans me décourager. Et retranscrire, au mieux, ce qui se passe dans ma tête.
Ma tête, avec des gros secrets à l’intérieur. Qui me fait mal. Très mal.
Premières notes :
C’est un soir de réveillon. Comme d’habitude, j’ai cherché une tenue à paillettes pour montrer que je suis d’humeur festive. Ce n’est pas tout à fait vrai. En fait, je suis à ramasser à la petite cuillère. Ça a commencé au mois de novembre, quand j’ai vu un mec perché sur un arbre accrocher les décorations de Noël. Début décembre, en sortant les guirlandes, j’étais au plus bas.
Pourtant je fais des efforts. Depuis que je me suis baladée une matinée entière avec mon pantalon sur l'épaule, en pensant que c'était mon blouson, j'essaye d'être un peu plus vigilante... ça ne dure jamais longtemps.
Je me suis réveillée avec un goût acide sur la langue.
Le fruit jaune a encore frappé. J'ai passé la nuit dans la peau d'un citron. Un gentil citron.