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Citations de Lucie Delarue-Mardrus (79)


À QUELQU’UNE


Si vous aimez encore une petite âme
Que vous avez eue en mains au temps passé,
Qui n’était alors qu’un embryon de femme
Mais dont le regard était déjà lassé,
Si vous aimez encore une petite âme,

Laissez-la quelquefois revenir encor
À vous, que charmaient ses yeux mélancoliques.
Vous vouliez, songeant déjà sa bonne mort,
La refaçonner dans vos doigts catholiques,
Laissez-la quelquefois revenir encor.

Elle n’est pas devenue une chrétienne,
Elle est même à présent, comme qui dirait,
Sans foi, sans loi, ni joie, une âme païenne
Des temps de décadence où tout s’effondrait.
Elle n’est pas devenue une chrétienne.

Sa fantaisie a la bride sur le cou.
C’est un bel hippogriffe qu’elle chevauche,
Qui de terre en ciel la promène partout
Sans plus s’arrêter au bien qu’à la débauche.
Sa fantaisie a la bride sur le cou.

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L’ÉTREINTE MARINE


Une voix sous-marine enfle l’inflexion
De ta bouche et la mer est glauque tout entière
De rouler ta chair pâle en son remous profond.

Et la queue enroulée à ta stature altière
Fait rouer sa splendeur au ciel plein de couchant,
Et, parmi les varechs où tu fais ta litière,

Moi qui passe le long des eaux, j’ouïs ton chant
Toujours, et, sans te voir jamais, je te suppose
Dans ton hybride grâce et ton geste alléchant.

Je sais l’eau qui ruisselle à ta nudité rose,
Visqueuse et te salant journellement ta chair
Où une flore étrange et vivante est éclose ;

Tes dix doigts dont chacun pèse du chaton clair
Que vint y incruster l’algue ou le coquillage
Et ta tête coiffée au hasard de la mer ;

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Elle ne savait pas comme elle était seule au monde. Parfois, simplement, elle le sentait. Et sa tristesse, alors, était immédiate, impérieuse et sans espoir, car les enfants ne pensent presque jamais à l'avenir.
N'ont ils pas raison ? L'enfance terminée, c'est une autre vie qui commence pour eux, presque sans rapport avec la première.
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Fatigue :

Je veux rester dans mes coussins aujourd’hui,
Seule à goûter, muette et presque inanimée
L’heureux éreintement de t’avoir trop aimée
Et d’avoir énervé tes sens toute la nuit ;

Je sentirai profondément que ma jeunesse
Est à présent un fruit mordu dans sa fraîcheur
Par cet amour de toi qui me creuse et me blesse
Et laissera sa marque au meilleur de mon cœur.

Et je rirai tout bas, folle, cernée et blême
Du désir de ma bouche humide et de mes doigts,
Et de savoir mon âme enrouée elle-même
Irréparablement, en moi, comme une voix.
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Appel

Je n'ai pu contenter mon âme inassouvie
Avec toute la vie.

Je n'ai pu contenter mon corps inapaisé
Avec tout le baiser.

Le désir éternel qui gémit dans mon être
N'a pas trouvé son maître.

Et rien ne fera taire en mon âme et mon corps
La voix qui crie : Encore!....Encore!....
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Automne
On voit tout le temps, en automne,
Quelque chose qui vous étonne,
C'est une branche tout à coup ,
Qui s'effeuille dans votre cou.
C'est un petit arbre tout rouge,
Un, d'une autre couleur encor,
Et puis partout, ces feuilles d'or
Qui tombent sans que rien ne bouge.


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COQUELICOTS

Seule, je parcourais la colline punique
Et féroce, où guettaient encore des échos,
M'épouvantant de voir, le long des champs tragiques
Ces mares de coquelicots.

De si vastes, profonds, écartâtes espaces,
Nul n'en a jamais vu. Par places.
C'était, dans l'herbe haute où je me promenais,
Comme si, largement, les ruines saignaient...

— Serait-ce que la Souvenance
A travers cette terre où plus rien n'est vivant,
Incita le hasard vagabond et le vent
A ces semailles-ci qui demandent vengeance?

p.68
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BERCEMENT POUR MA SIESTE

L'été pousse sur nous, du fond de l'Orient,
Son étincelante marée.
Que tes rideaux soient clos sur le dehors brillant,
Et que ta sieste soit comme une mort dorée.

L'ombre chaude est sur toi. Tes colliers sont éteints.
Prends ta nuque dans tes mains vides ;
Endors-toi dans tes ongles teints,
Le 'front rose et les pieds livides.

Laisse soyeusement épouser ton contour
Tes deux robes asiatiques,
Et panteler encore un souvenir d'amour
Dans tes narines pathétiques.

Dors. Je veux qu'un sommeil tellement merveilleux
Pénètre tes veines bleuâtres
que tu sentes tomber lourdement sur tes yeux
Les paupières de Cléopâtre...

p.42-43
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L'Odeur de mon pays...

L'odeur de mon pays était dans une pomme.
Je l'ai mordue avec les yeux fermés du somme,
Pour me croire debout dans un herbage vert.
L'herbe haute sentait le soleil et la mer,
L'ombre des peupliers y allongeaient des raies,
Et j'entendais le bruit des oiseaux, plein les haies,
Se mêler au retour des vagues de midi...


Combien de fois, ainsi, l'automne rousse et verte
Me vit-elle, au milieu du soleil et, debout,
Manger, les yeux fermés, la pomme rebondie
De tes prés, copieuse et forte Normandie ?...
Ah! je ne guérirai jamais de mon pays!
N'est-il pas la douceur des feuillages cueillis
Dans la fraîcheur, la paix et toute l'innocence?


Et qui donc a jamais guéri de son enfance ?...
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À UNE MOUETTE

Qui donc aura souffert, pauvre mouette prise,
Ton grand essor capté ?
Tu tremblais dans mes mains, doucement blanche et grise
Toute chaude de liberté.

Esclave, je t'avais achetée au passage
À ces mauvais garçons,
Et ce geste me plut d'aller jusqu'à la plage
Te rendre à tes quatre horizons.

Les plumes de ta tête étaient lisses et belles
Sous mon baiser fervent;
Puis j'ouvris mes deux mains, tu ouvris tes deux ailes
Et partis librement dans le vent.

― Emporte sans le savoir le baiser du poète
Au large inapaisé.
C'était toute la mer, ô chère sœur mouette,
Que j'embrassais en ce baiser.

p.268-269

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MÉDITATION SUR UN VISAGE

J’ai douloureusement médité devant vous
Et j’ai pleuré sur vous, vieille dame étrangère
Qui ne pouviez savoir ma jeunesse légère
Occupée à fixer vos traits pâles et mous.

Je m’étonnais si fort que vous fussiez rieuse,
Moi qui d’abord pensais que vous n’aviez plus rien
Ayant à tout jamais perdu l’unique bien
D’être tentante, d’être étrange et vaporeuse.

La vie est-elle donc moins dure qu’on ne croit,
Puisqu’elle soigne encor comme une bonne mère,
Qu’elle sait égayer cette vieillesse amère
Où tout semblait devoir n’être que morne et froid ?

Et pourtant avec quelle épouvante cachée
Je regardais, songeant à la blancheur de lis
De nos âges, la peau ravagée et tachée
De ce masque qui fut jeune femme, jadis !

— Moi qui veux vivre jusqu’au bout, est-il possible
D’imaginer qu’ainsi je pourrai rire un jour
Lorsque je n’aurai plus ce trésor indicible :
L’audace, la beauté, l’entrain, l’orgueil, l’amour ?...

p.185-186
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AMOUR
Qu'obtiendrons-nous jamais de vous, noces humaines,
Puisqu'en nous l'animal est mort ou presque mort ?
Mais t'obéir, nature ! aller où tu nous mènes,
Et que tes seuls parfums tuent en nous tout effort.

Mais nous mourir, les soirs que le désir nous couche,
De la possession de tes grands bras touffus,
T'aimer, nous qui savons quelle épouse tu fus
Pour ceux qui t'ont voulu connaitre bouche à bouche !

Propice à nos repos comme à nos passions,
Ton visage, qui change avec toutes les heures,
Rit lorsque nous rions, et, si nous pleurons, pleure,
Sans yeux pour nous tirer une explication.

Tu ne sais pas l'horreur du geste et des paroles,
La contradiction de cet amour impair ;
Tu nous tends seulement tes profondes corolles
Qui sont une douceur plus douce que la chair.

Ton sein ne connait point la limite du spasme,
Le funèbre regret du plaisir accompli.
Pour offrir à nos sens un éternel phantasme,
Au creux des horizons ton amour fait son lit,

Nature, seul rachat de l'homme et de la femme,
Unique amie en qui cesse l'isolement,
O toi qui nous connais, toi dont nous savons l'âme,
Puisque ton âme, c'est la nôtre, simplement.

p.221-222
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COMPLICITÉ

Ma grande tourmentée, éternelle, la mer
Que voici ce matin bleue à trois rangs d'écume,
M'offre son âcre goût d'iode et de sel clair
Comme une immense coupe amère que je hume.

Je sais le sens exact de la fausse douceur
Faite de sable tiède et de vagues arquées.
Nous n'avons pas besoin de nous être expliquées ;
Je connais le secret de ma divine sœur.

Jamais son flot qui s'échevèle et se rengorge
Ne pourra se guérir du désir exigeant.
Il ne sera jamais ce calme carré d'orge
Dont frissonne au soleil la verdure d'argent.

p.217
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PROBLÈME

On coupe deux pommes en quatre,
Combien cela fait-il de quarts ?

Hélas ! Au lieu de me débattre,
J'aimerais mieux manger les parts !
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PETITES SOURIS

C’est la petite souris grise,
Dans sa cachette elle est assise.
Quand elle n’est pas dans son trou,
C’est qu’elle galope partout.

C’est la petite souris blanche
Qui ronge le pain sur la planche.
Aussitôt qu’elle entend du bruit,
Dans sa maison elle s’enfuit.

C’est la petite souris brune
Qui se promène au clair de lune,
Si le chat miaule en dormant,
Elle se sauve prestement.

C’est la petite souris rouge,
Elle a peur aussitôt qu’on bouge !
Mais, lorsque personne n’est là,
Elle mange tout ce qu’on a.
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LE CHAT NOIR

J'ai dans ma cave un chat noir.
Ses yeux sont de couleur claire.
Mais s'il les ferme, bonsoir !
Pour le trouver, rien á faire !

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Lucie Delarue-Mardrus
J'ai dix ans aujourd'hui. Dommage !
Ça va devenir sérieux.
Un seul chiffre disait mon âge,
A présent, il en faudra deux.

Deux chiffres ! la même frontière
Que les gens les plus importants,
Deux chiffres pour la vie entière …
A moins d'aller jusqu'à cent ans !
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Lucie Delarue-Mardrus
L'odeur de mon pays était dans une pomme...
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Lucie Delarue-Mardrus
Et qui donc a jamais guéri de son enfance?
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