Maggie Nelson - De la Liberté
And that although I have tried to imagine her death, there’s really no way of knowing what she went through—not only because I don’t know what happened to her on the night of her murder, but because no one ever really knows what it’s like to be in anyone else’s skin. That no living person can tell another what it’s like to die. That we do that part alone.
( Bien que j’ai imaginé sa mort, il n’y a aucun moyen de savoir ce qu’elle a vécu- non seulement je ne sais pas ce qui lui est arrivé la nuit de son meurtre, mais personne ne peut vraiment savoir ce que d’être dans la peau d’un autre. Aucun vivant ne peut savoir ce que c’est de mourir. Cette épisode on le vit seul .)
Plus un problème devient difficile à résoudre, plus il est tentant de l’ignorer. Si on l’ignore suffisamment longtemps, il finira par devenir insoluble. Renoncer peut alors ressembler à un soulagement, dans la mesure où, ne serait-ce que l’espace d’un instant, on se sent libéré des affres d’un effort voué à l’échec. Mais ce soulagement ne saurait durer, car le problème irrésolu ne fait que générer d’autres problèmes, de causer d’autres souffrances.
Voilà que tu parles de l'amour comme si c'était une consolation. Simone Weil nous a pourtant prévenus. "L'amour n'est pas une consolation, il est lumière."
Je vais tenter de le formuler autrement. Quand j'étais en vie, je n'aspirais pas à étudier la nostalgie mais la lumière.
Je voudrais simplement que tu te sentes libre, ai-je dit par colère déguisée en compassion, par compassion déguisée en colère.
Tu ne comprends toujours pas ? as tu crié.
Je ne me sentirais jamais libre commet toi, je ne me sentirais jamais chez moi dans le monde, je ne me sentirais jamais chez moi dans ma peau.
C'est comme ça et ce sera toujours comme ça.
La liberté est un processus par lequel on développe une pratique afin de se rendre indisponible pour la servitude.
Il ne nous est pas donné de choisir qui l’on aime, ai-je envie de dire. Nous n’avons pas le choix, voilà tout.
Un des films que notre prof nous montra fut Sueurs froides, d'Alfred Hitchcock. Je me souviens de m'être sentie troublée par la façon dont le personnage de Kim Novak paraît égaré entre le fantôme et l'être de chair, tandis que Jimmy Stewart semble, lui, très "réel", incarné. Après le film, j'aurais voulu demander au prof si, d'une certaine façon, les femmes n'étaient pas toujours mortes, ou, à l'inverse, n'avaient pas commencé d'exister. Mais je n'arrivais pas à formuler la question de manière à n'avoir pas l'air, ou à ne pas me sentir, plus ou moins folle.
Les bouddhistes tibétains parlent de la mort comme d'un moment de "grande opportunité "mais à laquelle il convient de se préparer pour savoir quoi en faire. Il faut s'entraîner de telle sorte que si vous étiez, par exemple, soudainement abattu d'une balle dans la tête tirée à bout portant, ou si, autre exemple, votre coeur explosait dans votre poitrine au beau milieu de la nuit, vous seriez instantanément prêt à partir, à accéder à l'état intermédiaire du bardo. Je sais que je ne suis pas prête et l'idée de ne pas apprendre à temps me terrifie. Mais comment apprendre si je n'essaie pas?
"Pourquoi le ciel est-il bleu ?" - une assez bonne question, dont j'ai appris la réponse à plusieurs reprises. Pourtant, à chaque fois que j'essaye de la restituer à quelqu'un ou de me la remémorer, elle m'échappe.
Désormais, j'aime me souvenir uniquement de la question, parce qu'elle me rappelle que mon esprit est avant tout une passoire, que je suis mortelle.
Apprendre tout
ce qu'il y avait à savoir
sur le fait d'aimer quelqu'un
puis t'en aller, froidement
Je n'ai pas honte
L'amour est immense et monstrueux