Voilà un ouvrage qui répond aux exigences d'un catalogue, par sa thématique on ne peut plus précise, par la qualité des reproductions et de la mise en page (plus de 90 tableaux et dessins), et par la précision des références. Mais c'est plus qu'un catalogue, c'est un document indispensable à qui s'intéresse au poète, c'est une invitation à un nouveau regard pour ceux qui le jugent trop difficile d'accès, c'est un ouvrage de réflexion sur la création artistique dans son expression plastique et
poétique, par les extraits de ses fameux cahiers et de sa correspondance. C'est enfin un hommage attendu au poète dont le musée de sa ville natale porte le nom, à la date, est-ce un hasard, du centenaire de la publication du Cimetière Marin.
Comme un roman…
Tout commence au
Musée Fabre de Montpellier dont le poète était familier, avec Francisco de Zurbaran (Sainte Agathe, qu'il choisira comme prénom pour sa fille),
Eugène Delacroix (Orphée secourant Eurydice ),
Gustave Moreau (Suzanne et les vieillards), Courbet, Corot…Ensuite un intérêt tout particulier pour
Léonard de Vinci ce qui n'est pas étonnant chez cet auteur qui s'associe esprit scientifique et imagination prolixe…
Mais la naissance de son attachement à la peinture tient essentiellement à l'atmosphère familiale après son mariage avec Jeanine Gobillard, nièce de
Berthe Morisot (plusieurs toiles de cette grande artiste appartenant à une collection particulière). Sa soeur Paule Gobillard est elle-même peintre. Trois « huiles » illustrent son travail : Valery faisant une conférence, un cours au
Collège de France, ou à la fin d'un déjeuner familial et sont particulièrement touchantes (collection propre du musée). D'autres noms fameux dans le domaine de la peinture occupent ce premier cercle familial (famille
Rouart , et Manet…). L'arbre généalogique de cette grande famille est à la fin du livre…
Le cercle amical s'élargit aux amis proches et aux fréquentations, avec Renoir, Monet,
Odilon Redon,
Maurice Denis,
Marie Laurencin, Degas à l'origine d'un des seuls ouvrages de Valery, qui ne se considérait pas comme critique d'art, consacrés à la peinture. (Degas, Danse, Dessin).
Valery a surtout porté son intérêt aux impressionnistes et aux symbolistes comprenant mal la naissance du cubisme et du fauvisme. Il n'empêche que le portrait en dessin de Valery par Picasso pour la première édition de la Jeune Parque est de grande qualité comme les trois portraits de
Jacques Emile Blanche. Il faut rendre hommage à la commissaire de l'exposition
Maïthé Vallès-Bled d'avoir pu pour Picasso, Matisse, Monet, Marquet et Vuillard montrer des oeuvres d'une exceptionnelle qualité provenant de la Collection David et Ezra Nahmat.
La dernière partie (Valery peintre) qui appartient en propre au Musée Valery est particulièrement originale et touchante puisqu'elle réunit plus de trente dessins, aquarelles, gouaches ou huiles du poète. Heureux temps où bien que de valeurs inégales arts poétique et plastique se rejoignaient dans une même main.