A l'horizon, quelques esquifs blancs glissaient sur l'eau dans une sérénité qui lui parut injuste. Pour un même lieu, dans un même temps, la vie réservait des drames à certains alors que ce n'étaient que des moments plaisants pour d'autres. Voila qui résumait au mieux la brutalité d'un été.
Ils se parlaient souvent mal ou s'envoyaient des piques, profitaient d'un détail ou d'une maladresse pour prendre l'avantage et se convaincre de leur innocence ou accabler l'autre des petits maux qui font les grandes douleurs de couple .
Comme disent si bien certains de mes collègues pompiers en pensant aux conducteurs qui font obstruction au passage : "s'ils savaient que c'est leur mère qu'on va secourir,ils nous laisseraient passer plus vite."
Elle découvre un homme d’une quarantaine d’années en choc hémorragique, inconscient, gémissant, les deux jambes écrasées. Deux garrots ont été posés au-dessus des genoux avant qu’elle n’arrive. Vanessa cherche une veine pour perfuser le patient. Il est urgent de lui remonter la tension. Ce sera fatal, autrement. Malheureusement rien n’est simple. Les veines sont plates, le patient a perdu énormément de sang.
Au-dessus d’elle, Vanessa entend cette litanie incessante : « Comment il va ? … Est-ce qu’il va s’en sortir ? Hein ? ...Dites-moi, madame… Est-ce qu’il va s’en sortir, comment il va ? Dites-moi ... »
Elle n’ose relever la tête. Elle a besoin de se concentrer. Tout en elle bouillonne. Aucune veine n’est accessible. Elle doit rester calme.
« Comment il va ? ... » La litanie recommence. Elle exploserait peut-être, mais se retient.
Lorsqu’elle lève la tête, elle découvre avec stupéfaction que la voix est celle d’un jeune ado de 11 ou 12 ans.
« C’est mon papa », dit-il.
On l'imagine en super-héros, sauvant des vies, défiant la mort, affrontant la misère et l'horreur. Il court d'un malade à l'autre dans une espèce de jungle terrible que sont les services d'urgences, saute dans une voiture rouge ou blanche, repart dans une ambulance avec panache, sirène hurlante, après avoir décroché le pendu, ramassé le défenestré, réanimé l'accidenté de la route, le noyé, le brûlé...La liste est longue.
"Vous devez en voir de toutes les couleurs , docteur ?"
Claude Bernard, médecin et physiologiste français du XIXe, pense que la première démarche d'un savant est de spéculer, de proposer des hypothèses. Hypothèses qui doivent rester fausses tant que la démarche expérimentale n'a pas prouvé le contraire. (p. 8)
Elle découvre un homme d’une quarantaine d’années en choc hémorragique, inconscient, gémissant, les deux jambes écrasées. Deux garrots ont été posés au-dessus des genoux avant qu’elle n’arrive. Vanessa cherche une veine pour perfuser le patient. Il est urgent de lui remonter la tension. Ce sera fatal, autrement. Malheureusement rien n’est simple. Les veines sont plates, le patient a perdu énormément de sang.
Au-dessus d’elle, Vanessa entend cette litanie incessante : « Comment il va ? … Est-ce qu’il va s’en sortir ? Hein ? ...Dites-moi, madame… Est-ce qu’il va s’en sortir, comment il va ? Dites-moi ... »
Elle n’ose relever la tête. Elle a besoin de se concentrer. Tout en elle bouillonne. Aucune veine n’est accessible. Elle doit rester calme.
« Comment il va ? ... » La litanie recommence. Elle exploserait peut-être, mais se retient.
Lorsqu’elle lève la tête, elle découvre avec stupéfaction que la voix est celle d’un jeune ado de 11 ou 12 ans.
« C’est mon papa », dit-il.
Lorsqu’une mère vous demande où est son enfant et qu’on ne sait même pas s’il est vivant, on aimerait se cacher dans un trou de souris. On aurait pu lui amputer une jambe à cette pauvre femme, je crois que c’était secondaire. Elle n’avait qu’une idée en tête : Où est mon fils ?
Laissez passer les plus pressés, il y aura toujours un bouchon un peu plus loin qui les freinera et vous serez juste derrière eux. Ils ne seront pas plus avancés.
Le départ de sa femme l’avait rendu des plus sauvages, reclus dans un silence pragmatique, économisant chaque mot, avec un goût démesuré pour la solitude. Le genre d’homme-ours qui ne parvient à supporter la vie qu’avec la nature autour de lui. Il avait très vite abandonné son poste d’ingénieur, s’était soudain passionné pour l’histoire, l’histoire, encore l’histoire, la grande histoire, mais s’était contenté d’une place rangée de cantonnier dans un petit village de l’Ariège. Combien de fois Paul avait souffert d’être la risée de ses camarades à cause de ce père qui ne s’exhibait qu’avec un balai en main ! Pas la peine de raconter qu’il était ingénieur, on ne l’aurait pas cru.