Citations de Margaret Atwood (1835)
Raconter, plutôt qu’ écrire, parce que je n’ai pas de quoi écrire et que de toute façon il est interdit d’écrire, mais si c’est une histoire, même dans ma tête il faut que je la raconte à quelqu’un. On ne se raconte pas une histoire seulement à soi-même. Il y a toujours un autre. Même quand il n’y a personne.
... personne ne meurt d'être privé de rapports sexuels. C'est du manque d'amour que nous mourons.
Ce n'est pas tout le monde qui recherche l'éclat pur et clair de la vérité.
LES FILLES DE L'AIR, RÉUNION AU SOMMET.
Il n'y a rien de pire qu'un imbécile instruit.
L'ordinaire, disait tante Lydia, c'est ce à quoi vous êtes habitués. Ceci peut ne pas vous paraître ordinaire maintenant, mais cela le deviendra après un temps. Cela deviendra ordinaire.
[...] De même, j'ai ménagé à ma Servante une évasion possible par le Maine et le Canada. Et j'ai aussi ajouté un épilogue, qui laisse imaginer que la Servante et le monde où elle vivait sont remisés dans un lointain passé historique. Quand on me demande si l'histoire de La Servante écarlate est sur le point de "devenir vraie", je me dis qu'il y a deux avenirs dans le livre, et que si le premier "devient vrai", le second le pourrait aussi.
p522 La Servante Ecarlate, Postface par l'auteur (traduit de l'anglais (Canada) par Patrick Dusoulier.
L'attente est aussi un lieu : c'est partout où l'on attend.
La nuit m'appartient, c'est mon temps à moi, je peux en faire ce que je veux, pourvu que je reste tranquille. Pourvu que je ne bouge pas. Pourvu que je reste couchée immobile. La différence entre coucher et se coucher. Se coucher est toujours pronominal. Même les hommes disaient j'ai envie de me coucher et pourtant ils disaient partout j'ai envie de coucher avec elle. Tout ceci est spéculation pure, je ne sais pas vraiment ce que disaient les hommes. Je ne connaissais que leur parole.
Je suis donc couchée à l'intérieur de la chambre sous l’œil en plâtre du plafond, derrière les rideaux blancs, entre les draps, aussi lisse qu'eux, et je fais un pas de côté pour sortir de ce temps qui m'appartient. Sortir du temps. Pourtant c'est bien ceci le temps et je ne suis pas à l'extérieur.
Mais la nuit est mon moment de sortie. Où irai-je ?
« Notre fonction est la reproduction : nous ne sommes pas des concubines, des geishas ni des courtisanes. Au contraire : tout a été fait pour nous éliminer de ces catégories. Rien en nous ne doit séduire, aucune latitude n’est autorisée pour que fleurissent des désirs secrets, nulle faveur particulière ne doit être extorquée par des cajoleries, ni de part ni d’autre ; l’amour ne doit trouver aucune prise. Nous sommes des utérus à deux pattes, un point c’est tout : vases sacrés, calices ambulants. » (p. 152)
Il est impossible de décrire une chose exactement telle qu'elle est, parce que ce que l'on dit ne peut jamais être exact, il faut toujours laisser quelque chose de côté, il y a trop d'éléments, d'aspects, de courants contraires, de nuances ; trop de gestes qui pourraient signifier ceci ou cela, trop de formes qui ne peuvent jamais être complètement décrites, trop de saveurs dans l'air ou sur la langue, de demi-teintes, trop.
Nous vivions, comme d'habitude, en ignorant. Ignorer n'est pas la même chose que l'ignorance, il faut se donner de la peine pour y arriver.
J'écris ces mots dans mon sanctuaire privé, au sein de la bibliothèque d'Ardua Hall - une des rares encore debout après les autodafés enthousiastes qui ont embrasé tout le pays. Il fallait éliminer les traces de doigts corrompus et tachés de sang du passé afin d'aménager un espace propre pour la génération moralement pure sans doute tout près de poindre. En théorie.
Notre fonction est la reproduction ; nous ne sommes pas des concubines, des geishas ni des courtisanes. Au contraire : tout a été fait pour nous éliminer de ces catégories. Rien en nous ne doit séduire, aucune latitude n'est autorisée pour que fleurissent des désirs secrets, nulle faveur particulière ne doit être extorquée par des cajoleries, ni de part ni d'autre ; l'amour ne doit trouver aucun prise. Nous sommes des utérus à deux pattes, un point c'est tout : vases sacrés, calices ambulants.
Quand j'étais plus jeune et que j'imaginais la vieillesse, je pensais, peut-être est-ce que l'on apprécie les choses davantage, quand on n'a plus beaucoup de temps devant soi; j'oubliais la perte des forces.
Le seuil d'une nouvelle maison est un lieu solitaire.
Les femmes prenaient des médicaments, des pilules, les hommes aspergeaient les arbres, les vaches mangeaient l'herbe, toute cette pisse épicée a coulé dans les rivières. Sans parler des explosions d'usines atomiques, le long de la faille de San Andreas, sans défaillance humaine, au moment des tremblements de terre, et la souche mutante de syphilis, qu'aucune moisissure ne pouvait arrêter.
p189
Et puis il a faim. C'est un truc qui a du bon : ça permet au moins de savoir qu'on est encore vivant.
[…] le savoir est pouvoir, surtout s'il est compromettant.
Si on était tous jugés pour nos pensées, on serait tous pendus.
Elle a dit: Je souhaite vous voir aussi peu que possible. Je suppose que vous êtes dans les mêmes dispositions à mon égard.
Je n'ai pas répondu car un oui aurait été une insolence, un non, une contradiction.
p34