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Critiques de Maylis Adhémar (292)
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Bénie soit Sixtine

Ce premier roman est le récit poignant d'une émancipation, celle de Sixtine, jeune femme pieuse qui se libère de l'emprise d'une secte catholique intégriste tendance extrême-droite. Une lecture forte qui a fait écho à la formidable mini série diffusé sur Netflix, Unorthodox , qui racontait la fuite d'Esther de son milieu juif orthodoxe.



La première partie est remarquablement édifiante. Avec minutie, Maylis Adhémar décrit les rites de cette frange catholique fondamentaliste. L'immersion est totale, presque ethnographique. Même si j'avais déjà vu des reportages sur ce sujet, j'ai été interloquée par la violence de ce milieu. A l'égard des femmes d'abord. On colle au pas de Sixtine, à son ressenti, à son chemin de croix qui débute avec sa grossesse qu'il faut endurer les dents serrés, une tisane aux feuilles de framboisier étant vu comme le mal car soulageant des douleurs voulus par Dieu. Violence tout court lorsqu'il s'agir de mêler religion à la xénophobie et au nationalisme le plus extrême, jusqu'à organiser des opérations coups de poing contre les ennemis de la « bonne France ».



Cela aurait pu donner lieu à un récit manichéen et caricatural mais l'auteure parvient à trouver le ton juste, la bonne distance pour se concentrer sur l'évolution de Sixtine. Au départ, elle ne veut pas forcément s'émanciper, on lui a bien trop appris que l'extérieur, l'autre c'est le Diable. Son désir de liberté est bine plus organique, plus instinctif : elle va devenir mère et veut sauver son enfant.



Le scénario mis en place est très bon, avec un point de bascule tragique qui sert de catalyseur à la fuite de Sixtine. C'est à partir de là que je suis moins convaincue par la deuxième partie, celle de l'ouverture au monde qui va lui donner envie, cette fois, de s'émanciper totalement sans perdre sa foi. Son combat intérieur est bien rendu, entre petites avancées et reculs, mais le chemin d'émancipation est très convenu avec beaucoup de clichés. Il n'était pas nécessaire, à mon avis, d'aller aussi loin dans les antipodes, entre les squatteurs, la ferme autogérée et une solidarité, certes réelle et bienveillante, mais qui ressort un peu trop gentillette. J'ai un peu décroché à ce moment-là ...



... pour me raccrocher aux interstices du récit : ces très belles lettres écrites par la grand-mère de Sixtine à sa fille, la mère de Sixtine. Une autre temporalité, une autre fuite du milieu familial, dans l'autre sens. En fait, les personnages des mères, celle de Sixtine et sa belle-mère auraient pu être passionnants à condition d'être plus mis sur le devant de la scène.



Lu dans le cadre du collectif 68 Premières fois #4





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Bénie soit Sixtine

Sixtine fait le mur de la Chapelle !

Quoi de mieux que de donner un prénom désuet ou composé à son enfant pour afficher son statut social et montrer qu'on n'est pas n'importe qui. Dans la bourgeoisie tradi de province, c'est très tendance et cela ouvre les portes des rallyes et du paradis. Il faut faire chauffer la particule.

Sixtine est une jeune femme très pieuse et vulnérable, barrettes, socquettes blanches et robe sage à fleurs, élevée à l'hostie par une mère bigote. Sa grande soeur est rentrée dans les ordres. Elle, elle est toujours aux ordres. Inutile de remonter vos montres à gousset, l'action ne se déroule pas en 1913, mais bien en 2013.

Sixtine rencontre puis épouse Pierre-Louis Sue de la Garde, après quelques galoches en latin, langues presque mortes. Grande école et petit esprit, le jeune homme de très bonne famille, est engagé dans le mouvement des Frères de la Croix, secte fondée par le Père André, sorte de gourou qui ne s'est jamais remis de Vatican 2. Vade retro dans le rétroviseur !

La destinée de Sixtine est toute tracée : études abandonnées, carrière de mère au foyer d'une ribambelle de têtes bien blondes et bien peignées, messes et diners mondains. Un chemin de croix.

Après une nuit de noce calamiteuse où la fonction reproductive bannit toute notion de désir et de plaisir, Sixtine tombe enceinte et traverse une grossesse difficile. Son mari, qu'on imagine le cheveux court avec son pull noué sur les épaules, est occupé à chasser du gauchiste et à organiser des expéditions punitives contre le Mariage pour Tous, les punks à chiens, les étrangers, les homosexuels et autres créatures du diable. Un croisé bien barré.

Sous l'emprise de sa mère, de son mari et de sa belle-mère, Sixtine vit dans la repentance perpétuelle. Plusieurs évènements vont l'amener à réagir contre l'intégrisme religieux et la fachosphère qui l'étouffent.

Dans ce premier roman très réussi de Maylis Adhémar, j'ai particulièrement apprécié la finesse du propos. Dans ce récit d'émancipation qui fréquente les extrêmes, il aurait été facile, comme je le fais, pour forcer le trait de la rébellion, de transformer sainte nunuche en actrice porno, de découvrir sous son voile un crop top « Blanquérisé », de passer du bénédicité au livre rouge, des culs bénits aux culs nus, de Valeurs Actuelles à l'Humanité. Or, si Sixtine fuit l'intégrisme et sa famille, elle ne perd pas sa foi et ne renie pas son éducation. Elle se confronte seulement au monde et c'est en devenant mère qu'elle trouve le courage d'échapper à son milieu pour protéger son enfant du dévoiement de sa religion. Elle ne trahit pas ses valeurs, elle les adoucit.

L'auteure insère aussi à son histoire des correspondances qui raconte le parcours inverse et caché de la mère de Sixtine. On a parfois la généalogie honteuse. Ce roman très bien construit interroge donc aussi la transmission et l'héritage familial. Il témoigne que si les enfants ne choisissent ni leur prénom, ni leur éducation, ni leur religion, ils peuvent en grandissant mettre le cligno et changer de direction, souvent par réaction.

J'ai trouvé la seconde partie du roman moins réussie car on sent l'auteure plus à l'aise dans la description de milieu bourgeois et catho dont elle connait les codes pour y avoir grandit que dans celle des communautés de marginaux, plus fumeurs d'herbe qu'artistes et pratiquant l'amour libre. Sixtine n'a pas le gêne zadiste. La confrontation donne néanmoins lieu à des épisodes assez drôles.

Au final, même si l'héroïne a tendance à se poser un peu trop de questions face à des évidences, Bénie soit Sixtine (quel titre génial !) propose une belle ode à la tolérance et à l'ouverture d'esprit, saint ou pas.

Ainsi soit-elle.

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Bénie soit Sixtine

Quand j'ai résumé le début de ce roman qui m'a happée à une collègue, celle-ci m'a répondu : « mais c'est de la caricature ... ! ? » Hélas non, je peux en parler pour avoir côtoyé ce milieu : un groupe qui forme une secte au sein de l'église catholique, qui refuse Vatican II, des gens intolérants, qui voient le mal partout, des intégristes redoutables quant au harcèlement moral dont ils sont responsables sur la jeunesse.





C'est avec cette minorité que Maylis Adhémar commence ce récit passionnant. Sixtine, donc, sixième enfant de la famille Duchamp rencontre Pierre Louis Sue de la Garde au cours d'un mariage, alors qu'elle est assise à la table des célibataires (pratique courante dans ce milieu afin de provoquer quelques rencontres propres à marier des jeunes « comme il faut »), et ne tardera pas à se marier avec lui. (Je vous laisse découvrir les détails de cette rencontre et de cette union et de la nuit de noce qui suit).



Et voilà notre Sixtine mariée, rapidement enceinte, et prise dans le carcan familial des « Sue de la Garde », géré par une belle mère sectaire, peu ouverte à la négociation, et qui SAIT ce qui est bon ou pas pour ses ouailles.



Le mari Pierre Louis ? détestable, fidèle à l'éducation qu'il a reçue, on peut d'ailleurs se demander s'il est responsable ou victime de cette éducation assistée par les « Frères de la Croix » qui brandissent allégrement cette croix pour inciter à la haine et à la violence. Membre de la « milice », il se plaît à aller casser le gauchiste, molester le païen, pourfendre le musulman parce que son Dieu, c'est le vrai, le bon et lui, Pierre-Louis sorti de l'X, détient la vérité.



Sixtine quant à elle, est un bel exemple de la femme privée de liberté, comme toutes ses belles-soeurs qui ont fait des études pour ensuite tout abandonner et élever seules cinq ou si rejetons sans compter sur l'aide du père, et qui devront accoucher dans la douleur, dire "Amen" aux décisions du mari, de la belle-mère et se plier sans se plaindre.



Suite à un grave incident, Sixtine est accueillie chez belle-maman, séjour qui se passe mal pour la bru qui ne peut d'ailleurs pas non plus compter sur l'aide de sa propre mère...



Alors Sixtine s'enfuit avec Adam, son bébé, elle se retrouve dans un village en Aveyron, intègre la communauté, fait connaissance d'une nouvelle paroisse, conserve sa pratique religieuse qui s'adoucit, réfléchit, observe, chemine, évolue, même si cela lui semblera bien difficile en raison du poids de l'éducation qu'elle a reçue, oscillant entre ses croyances et ses principes et la philosophie de ses nouveaux amis, gentils, tolérants, abusant souvent des agréments de l'existence sous forme de substances illicite ou pas, à l'attitude extrême en comparaison avec sa vie passée.



Et Sixtine se pose mille questions, troublée par ce qu'elle peut lire sur internet concernant son ex-communauté, perturbée par un secret de famille qu'elle découvrira (et qui se dévoilera eu lecteur tout au long du récit).



Ce merveilleux roman est l'histoire d'un accouchement dans la douleur et le doute, d'une naissance ou plutôt de la renaissance d'une jeune fille qui va s'ouvrir telle une fleur et commencer à goûter à cette vie qui lui était interdite, la vraie vie, la vie ordinaire, mais elle va devoir se reprogrammer et se libérer du prêt à penser qu'on lui a servi depuis son enfance.



Je me suis apaisée avec Sixtine tout au long de ce pèlerinage vers la liberté, un peu comme si j'avais pris sa place.



Un très beau premier roman, qui conduit à espérer que d'autres suivront !



Challenge multi-défis.

68 premières fois.
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La Grande Ourse

Béni soit le pastoralisme !

Après s’être attaquée à la fange à frange de la bourgeoisie ultra catho de province dans un premier roman réussi « Bénie soit sixtine », sorte de chabrolinade à serre-tête, Maylis Adhémar égratigne les bobos citadins et rend hommage aux éleveurs pyrénéens. Elle idéalise le moustachu à béret un peu bourru et réactualise le mythe du « bon sauvage » des Lumières… tamisées.

Fini donc les prénoms vieille France. Côme, Isaure, Garance ou Leopold, pas de rallyes dans ses pages. Baptisons civilement ici Zita, Tommy, Damien, Thierry, Pierrick et Ines. Les prénoms sont devenus plus que des marqueurs sociaux, ce sont des marques de prêt à porter.

Le cadavre d’un ours est retrouvé sur une estive où paissaient les brebis de la famille de Zita dans la vallée d’Ossèse en Ariège. La jeune femme, qui venait de revenir au pays après plusieurs années de transhumance à l’étranger, se retrouve tiraillée entre ses chromosomes de bergère et des obligations professionnelles et sentimentales. Elle vit à Toulouse auprès de son compagnon, d’une belle-fille qui aime les gros zanimaux et d’une ex-femme envahissante, écolo mondaine mangeuse de graines qui méprise les paysous. Elle fréquente à reculons les défenseurs de nounours à trottinettes dans les bars à tapas et rêve de rejoindre les siens pour défendre ses troupeaux.

La polémique autour de la mort de l’ours va buzzer la polémique, attiser les passions et fragiliser le couple de Zita. Pour ou contre l’ours, même quand on a jamais mis les pieds dans les Pyrénées, c’est comme la température de la clim, les programmes télés, les plans de table, les réunions tardives, le projet de cave à vin ou de dressing, les brocolis ou les repas chez les beaux-parents : de bonnes occasion de s’engueuler.

Comme dans son premier roman, l’auteure s’attaque donc à un sujet qui prête à controverse et qui met en général de l’ambiance dans les repas de famille sur fond d’Armagnac, tout en y mêlant l’intime puisqu’elle traite aussi de la position délicate de la belle-mère, pièce rapportée dans les familles rafistolées.

Mon appréciation est contrastée. J’ai adoré tous les chapitres qui se déroulent dans la vallée ariégeoise car Maylis Adhémar décrit admirablement les paysages, l’authenticité des habitants et son attachement à ces terres âpres. Zita résume bien la pensée de l’auteur quand elle dit qu’elle n’est pas contre l’ours mais qu’elle est pour ses brebis. Des pages d’air pur et de grands espaces sans être obligé de se fader des vieux en peignoir dans une cure thermale.

L’héroïne de « Bénie soit Sixtine » se libérait de l’emprise de sa famille traditionaliste, celle de « La grande ourse » va au contraire retrouver sa liberté dans ses racines. Est-ce que Maylis Adhémar n’essaye pas ainsi de se rabibocher avec sa propre famille après son premier roman à charge ?

En revanche, les pages « urbaines » du roman tombent souvent dans le cliché de la belle-mère qui ne trouve pas sa place entre un amant qui a le charisme d’un flan, pacifiste qui donne des envies d’homicide, une gamine qui est une plaidoirie pour le rétablissement des châtiments corporels et une ex au cerveau tofuisé. Les tergiversations de l’héroïne sont un peu trop répétitives et piochées dans les pages psychos à 2 euros de magazines féminins, même si cette construction alternée entre la ville et les champs permet de renforcer le clivage narratif.

A travers ce roman, Maylis Adhémar, qui est aussi journaliste, interroge moins la place de l’ours dans nos montagnes que la préservation de celle des éleveurs et bergers.

Une voix différente qui sort des sentiers battus et qui s’attaque à des sujets de société de façon un peu décalée avec une vraie patte… d’ours et d’écrivain.

Moi, sans demander l'avis de personne, je pense réintroduire des nains de jardins chez mon voisin bruyant, des moustiques tigres dans le bureau de mon patron et une peau d’ours (fausse) pour remplacer mon tapis de salon, rien que pour entendre hurler mes invités.

Mais la montagne appartient à tout le monde et les ours y vivaient avant l'homme. Les dinosaures aussi...



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Bénie soit Sixtine

Trois générations se succèdent, empruntant des itinéraires opposés, comme si à chaque fois les valeurs qui construisent un destin devaient être bafouées par les enfants.



C’est Sixtine qui ouvre le bal, si l’on peut dire, et si bal il y a, ce serait l’une de ces rencontres destinées à éviter que la progéniture n’aille se fourvoyer dans des mésalliances désastreuses pour les traditions. Et la tradition, ici, c’est celle d’une religion envahissante, jetant son ombre grise sur tout ce qui pourrait donner du sel à la vie. Si les jeunes filles se lancent dans des études, parfois prestigieuses, c’est pour mieux dégoter le futur père de leur nombreuse descendance, marquée du sceau de la convenance et des exigences d’un Dieu peu magnanime. C’est ainsi que Sixtine croise sur son chemin balisé Pierre-Louis, le gendre idéal. Mais rapidement la jeune femme va comprendre que l’homme qu’elle a épousé cache des tendances pour une idéologie extrémiste.



Les femmes ont une place bien claire dans cet échiquier. Ce sont les futures mères de nombreux petits croisés, mis au monde dans la douleur. De mère en fille, les transmissions ne laissent aucune place à l’empathie. Et pourtant…les lettres qui sont intercalées entre les chapitres consacrés à Sixtine laissent entrevoir un passé bien différent.



Le roman épingle sans concession les excès d’une religion dont les textes fondateurs sont interprétés, au mieux au premier degré, et au pire avec une intention claire d’asservir les adeptes. Comme dans la plupart de ces mouvements , le statut de la femme est celui d’une paria, qui porte en elle le péché originel et responsable de la concupiscence des hommes.



Sans jeu de mots, la mauvaise foi règne en maître au sein des fidèles, aveuglés par un discours manichéen et fermé.





Le roman est fort bien écrit et bien construit, et on reste au fil des pages suspendu au destin de Sixtine et au dénouement des recherches sur ses origines.


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Bénie soit Sixtine

Quand elle épouse Pierre Louis Sue de la Garde, Sixtine est une jeune femme lumineuse, un peu naïve et... très pieuse. Aussi lorsque leur nuit de noces s'avère une catastrophe, et sa première grossesse un chemin de croix, Sixtine prie et s'accroche avec courage et abnégation. Il faudra la naissance de son fils et un événement dramatique pour qu'elle trouve la force de rompre avec sa famille et sa belle-famille, qui ne lui parlent que de devoir et de Dieu...



Sans ébranler sa foi, une fuite salutaire qui ouvre le monde à Sixtine qui, n'en n'ayant pas pleinement conscience, a fui des catholiques intégristes. Des ultras d'extrême-droite, homophobes, misogynes et racistes, qui à l'intérieur visent à limiter la réflexion et à embrigader l'autre, et luttent à l'extérieur avec violence contre ceux qui ne pensent pas comme eux, c'est à dire le reste du monde. D'ailleurs ils se nomment eux-mêmes les croisés, c'est tout dire.



Un premier roman très réussi, aussi émouvant qu'édifiant, où le dévoiement sectaire de la religion catholique (qu'on peut mettre en parallèle avec celui d'autres religions) est parfaitement mis en scène par Maylis Adhémar, qui sans aucun doute connaît bien le milieu dont elle parle.
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La Grande Ourse

Zita, la baroudeuse diplômée de l'école d'agronomie revient au pays après avoir visité le vaste monde. Et là patatras, elle tombe amoureuse d'un parisien à la fête de la châtaigne (si, si) dans sa vallée natale pyrénéenne, peuplée de braves bergers qui se font bouffer leurs bêtes par le « type », un ours réintroduit dans le coin par les vilains défenseurs de la cause sauvage. Une histoire où les uns et les autres vont s'affronter et Maylis Adhemar enfiler les banalités et autres mièvreries comme des perles sur un collier. À coup sûr, si son intention de départ était louable, elle fut tuée par les stéréotypes sur les paysans, les néoruraux, le pastoralisme, la problématique des familles recomposées et les histoires sentimentales à deux sous, avec des personnages à ce point caricaturaux qu'ils rendraient presque ce roman divertissant. Allez Maylis courage, ce n'est qu'une mauvaise appréciation parmi tant d'autres positives. En plus, mes amis le savent bien, je déteste la campagne.
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Bénie soit Sixtine

Coup de coeur ! ● Sixtine Duchamp grandit dans une famille catholique intégriste et se marie dans son milieu avec Pierre-Louis Sue de la Garde, issu d'une famille encore plus intégriste, adepte d'une sorte de secte ultra-catholique d'extrême-droite, les Frères de la Croix, inspirée par le père de Foucauld et créée par Frère André, une espèce de gourou sulfureux à qui l'on voue un culte sans limite : à côté, Saint-Nicolas-du-Chardonnet, c'est de la gnognote ! La nuit de noce tant attendue et rêvée par Sixtine est une épreuve atroce, et sa grossesse, qui vient rapidement, n'en est pas une moins pénible, surtout qu'elle est « guidée » par sa belle-mère Madeleine, type de la sévère et rigide matrone ultra-catho. Sixtine aura-t-elle la force de s'échapper de ce carcan ? ● Les milieux ultra-catho d'extrême-droite sont extrêmement bien décrits par l'auteure, qui doit bien les connaître. Tout sonne juste, tout est bien observé, bien rendu, bien écrit. Cela fait froid dans le dos, mais des gens vivent ainsi en 2020 : racistes, misogynes (même les femmes le sont), homophobes, excluant tout ce qui n'est pas eux, recourant à la violence pour asséner leurs idées, le tout en étant persuadés de détenir le Bien. Si le récit est une fiction, le milieu dans lequel évoluent les personnages, qui va sans doute étonner beaucoup de lecteurs, n'en est pas une. le roman est très original car c'est un milieu dans lequel il est peu fréquent de situer ses personnages. ● L'histoire est très prenante et passionnante et le livre se dévore. Il est plein de nuances et évite toujours la caricature. La foi catholique n'est jamais moquée par l'auteure, qui ne fait que raconter les dérives fondamentalistes auxquelles elle peut donner lieu. ● le personnage de Sixtine est très délicatement ciselé et très attachant. La belle-mère Madeleine et la mère Muriel sont également superbement mises en situation. ● Les passages en italiques, qui déconcertent au début, permettent d'approfondir le personnage de Muriel et forment à la fois un contrepoint et un parallélisme fort bienvenus. le récit est très bien construit. On comprend bien pourquoi Muriel est plus royaliste que le roi, et on peut aussi rencontrer ce genre de personnes dans les milieux cathos. Même la fin est belle dans ce premier roman qui est une réussite éclatante, que je me suis régalé à lire et que je conseille sans réserve !
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Bénie soit Sixtine

Sixtine est née dans une famille catholique rigoriste, fille de Muriel et Bruno Duchamp. C’est la petite dernière, elle est pratiquante assidue, chante à la chorale. Elle fait la connaissance de son futur époux Pierre-Louis au mariage d’Anne-Sophie son ami qui épouse Hugo, copain de promo de Pierre-Louis. Mariage dans la plus pure tradition (pour ne pas dire traditionaliste) du rite tridentin messe en latin, les prêtres qui tournent le dos aux fidèles…



Comme la famille de Pierre-Louis est dans la même tradition, ils se marient : on devrait plutôt dire d’ailleurs que leurs familles respectives les marient : arriver vierge au mariage, faire des enfants à tour de bras pour peupler le monde de « bons catholiques », le rôle de l’épouse est de faire des enfants, la cuisine, tenir la maison être une parfaite hôtesse, donc pas de pilule et le mot avortement n’en parlons même pas, c’est au-delà du tabou… la sexualité est tabou, on en est au « devoir conjugal » sinon on est dépravée… je vous laisse imaginer la nuit de noces…



Dans la famille, car Pierre-Louis est bien-sûr de la haute société : la famille Sue de La Garde, dont la mère, Madeleine, est monstrueuse à tout point de vue. Elle veille sur la tenue vestimentaire, la longueur des jupes, les couleurs qui doivent être discrètes, l’absence de maquillage, le chignon de rigueur, et surtout elle règne comme une matrone sur la tribu. Seule la dernière fille, Agnès, a osé s’opposer à elle, ce qui lui a valu d’être reniée. Elle revendique haut et fort son appartenance à Frères de la Croix. Muriel lui obéit, soumise, alors que son époux est proche d’un mouvement plus modéré la Sainte-Colombe.



L’époux a tous les droits puisqu’il travaille (dans la famille on passe par les grandes écoles, notamment Saint-Cyr, le gratin du gratin ! Pierre-Louis fait partie de la milice de la secte : il sort le soir avec ses coreligionnaires, pour aller matraquer les homosexuels, les musulmans les juifs, l’extrême gauche, (en fait tout ceux qui ne pensent pas comme eux) d’autant plus que le PACS leur est resté en travers de la gorge et que le projet de loi sur le mariage pour tous est en débat à l’Assemblée.



Pour entre à la milice, il faut prêter serment à l’âge de quatorze ans, ils s’entrainent comme des jeunes gestapistes à une autre époque. Un soir, ils vont « casser du dépravé » à une rave-partie (musique dégénérée drogués… C’est ainsi qu’ils caricaturent) et cela se traduit par des morts.



Entre temps, Sixtine est enceinte et sa grossesse se déroule de manière épique : pas de péridurale, puisque « tu enfanteras dans la souffrance », le médecin de famille qui est de la même obédience, (un gynéco ? pas question de montrer son anatomie…) on va même jusqu’à lui imposer le prénom : Foucault en hommage au père de Foucault… tandis qu’une des sœurs de Pierre-Louis, Élisabeth, reconstitue l’arbre généalogique (prestigieux, on s’en doute) du bébé ! du côté paternel bien-sûr…



Mais Sixtine va se réveiller, ce qu’elle n’est pas capable de faire pour elle, elle le fait pour le bébé, même si elle se culpabilise souvent, elle prend son destin en mains et met les voiles, enfin s’en va à l’autre bout du pays, éteint son portable, et ne donne plus signe de vie. Mais les ultra-cathos veillent …



Le récit est bien construit, et entre deux épisodes consacrés à Sixtine et sa « famille », Maylis Adhémar nous propose des lettres écrites par une mystérieuse Erika, artiste qui a fui l’Argentine et donc… secret de famille en vue.



J’ai adoré ce roman, Sixtine (en fait ce n’est pas en hommage à l’illustre Chapelle, c’est simplement parce qu’elle la sixième de la famille !) m’a beaucoup plu car c’est une battante finalement et elle élève son enfant comme elle le sent, alors qu’on lui rabâchait qu’il fallait le laisser pleurer tant de minutes avant d’aller le chercher sinon il allait devenir un despote, il fallait le dresser en quelque sorte au lieu de l’éduquer, de l’élever tout simplement. Pas de biberon bien-sûr, seul le lait maternel est pur ! tant pis si le bébé a faim ou la mère des crevasses…



J’ai bien aimé la plume de Maylis Adhémar, qui raconte bien l’emprise des sectes, la manipulation, la pensée unique, les prières à genoux pendant des heures, les chapelets, les rosaires, les confessions, les pseudo-prêtres aux mains baladeuses, l’aversion qu’ils éprouvent envers Jean-Paul II qu’ils appellent l’Antéchrist qui, combe de l’horreur, œuvre pour le rapprochement ou du moins le dialogue entre les religions, applaudissent quand Benoît XVI prend un virage à cent quatre-vingts degrés pour crier au scandale quand le Pape François est élu …



« Elles dissertent de l’élection d’un certain Jorge Bergoglio sur le trône de sains Pierre, ce pape n’a malheureusement pas le sens de la belle liturgie. »



Je ne révèle rien de plus sur l’intrigue et le cheminement de Sixtine, mais c’est une lecture passionnante, que je ne peux que conseiller… Dernier détail : Maylis Adhémar a été encouragée à écrire par Vanessa Springora qui dirige les éditions Julliard depuis 2019 et ce fut un bon conseil !



Un grand merci à NetGalley et aux éditions Julliard qui m’ont permis de découvrir ce roman et son auteure dont je vais guetter le prochain livre…



#BéniesoitSixtine #NetGalleyFrance
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La Grande Ourse

Lorsqu’elle revient au pays dans le hameau où elle a passé ses premières années, Zita retrouve les paysages chers à son coeur, elle qui se voyait bergère pour perpétuer la tradition familiale. L’évolution du monde rural en a voulu autrement : c’est avec un diplôme d’ingénieur agronome qu’elle a parcouru la planète. Si elle renoue avec l’ambiance bucolique des environs, elle y croise aussi ses amours d’antan, Damien l’idole des lycéennes, et Pierrick, papa solo depuis qu’il s’est séparé de sa compagne.



Au coeur du débat, le combat déséquilibré des bergers face à l’ours, parachuté dans la montagne pour des raisons qui se veulent écologiques. Malgré les compensations financières de l’Etat, l’avenir des troupeaux est compromis.



Rupture totale avec le cadre de son premier roman, Bénie soit Sixtine, Maylis Adhémar nous offre cette fois un roman du genre nature-writing. S’y opposent les partisans de l’ours et les défenseurs des troupeaux mis à mal par le prédateur. Même si les arguments des uns et des autres sont exposés, Zita ne cache pas son opinion : elle est du côté des brebis.



Maylis Adhémar s’appuie aussi sur des personnages très réalistes pour aborder la questions des couples et des familles recomposées. Outre les problèmes éducatifs vis à vis des enfants qui se joignent au package, lorsque les opinions politiques sont différentes, les repas de famille finissant souvent en portes claquées.



Documenté et et actuel, le roman se lit avec un grand intérêt, porté par des personnages intéressants. Il met en lumière les enjeux cachés de problèmes écologiques dont les intérêts cachés vont bien au delà de la simple présence ou pas d’un fauve dans les montagnes. Derrière les débats, se cachent des enjeux de pouvoir et d’argent, comme toujours.





J’ai retrouvé avec plaisir la plume acérée de Maylis Adhémar, qui a su créé pour ce deuxième roman quelque chose de différent mais tout aussi passionnant.



288 pages Stock 4 janvier 2023


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Bénie soit Sixtine

Qu’ils soient juifs ultra-orthodoxes, islamistes ou catholiques intégristes ces gens sont tous dédaigneux, méprisants, vaniteux, arrogants envers ceux qui ne n’appartiennent pas à leurs dépendances, à leurs mouvances immobiles.

Il faut fuir les excessifs, les abusifs, les virulents, les corrosifs, les violents.



C’est ce que nous enseigne Maylis Adhémar au travers de l’histoire de Sixtine son héroïne.



Sixtine s’est approchée très près des « Frères de la Croix » considéré comme une secte par la « Miviludes » (Mission interministérielle de Vigilance et de Lutte contre les Dérives Sectaires) et ce, jusqu’à se marier et avoir un enfant avec Pierre-Louis, fils de famille de cathos fondamentalistes, un des fers de lance de cette confrérie et casseur à ses heures.

Malgré son éducation stricte, sa dévotion, sa docilité, sa naïveté et sa grande piété Sixtine réussira à s’éloigner, s’envoler pour disparaitre de ce milieu castrateur après avoir subi maintes humiliations de sa belle-mère méprisante et de son propre mari.



Ce roman débute magnifiquement, les phrases courtes et efficaces de l’auteure m’ont immédiatement immergé dans les ressentiments de Sixtine.

J’ai moi-même, dès mon plus jeune âge reçu une solide éducation catholique et j’ai parfaitement assimilé l’emprise que peuvent avoir certains adultes endoctrinés sur des jeunes maniables et obéissants et ce, quel que soit la confession.



L’emprise familiale néfaste qu’elle a subi n’aura d’égal que son épanouissement à ce monde nouveau. C’est à ce stade que ce roman perd de son intérêt. Ce que découvre Sixtine n’est malheureusement que la vie banale qui, à l’encontre d’un rigorisme parfaitement dépassé fait apparaitre les travers de notre société d’aujourd’hui.



Pour elle, tout est neuf et tout est sauvage : le comportement trivial de toxicos post-punk jouant du heavy métal, la crèche pour les enfants des mères qui travaillent, les baisers fous et les caresses excitantes d’un joli petit mec à la peau lisse, la rencontre avec une mère et son enfant réfugiés Syrien à qui il faut tout apprendre. Même le curé est exotique, il ne porte plus la soutane et va vider des bières au café du coin.



J’ai apprécié la lecture du premier roman de cette auteure qui, au-delà de la trame religieuse aborde les crises générationnelles et les difficultés des relations familiales bien que j’aurais aimé que soit davantage développé le caractère et les mentalités de la mère et de la belle-mère de Sixtine. Les derniers chapitres s’apparentent plus à une bluette, c’est dommage.





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La Grande Ourse

Ce roman qui est à la fois romance contemporaine et enquête documentaire, nous entraine chez les éleveurs de brebis et les bergers de la vallée d’Ustou dans les Pyrénées ariégeoises.

La ruralité en montagne, Zita Albouy connait bien. Après avoir bourlingué dans le monde, la voilà de retour à la ferme familiale, parmi les brebis.



« Paisibles, les brebis plongèrent leurs têtes blanches dans le foin, oubliant vite l’humaine qui s’avançait sur la paille. Pelage blanc, semblable à celui de ses frères et sœurs de bergerie, Vanille, la chienne de race patou saut au-dessus de la mangeoire pour toiser Zita, avant de reprendre sa place parmi les siens, rassurée. »



Maylis Adhémar connait son sujet sur le bout des doigts, et elle sait le partager tout du long du récit en nous montrant les difficultés et les enjeux du métier d’éleveur. On apprend ce qu’est un dérochement, qui coûte la vie à de nombreuses bêtes, on sait l’importance du foin pour l’hiver, le danger d’une épidémie de piétin et on découvre le travail du berger.



« Le berger doit être un peu vétérinaire, un peu botaniste pour reconnaître les plantes, mener le troupeau vers la réglisse, ne pas laisser les bêtes piétiner des terrains et abîmer l’estive, les faire circuler avec l’aide des chiens, tout en assurant leur alimentation et en subissant l’attaque de l’ours… »



L’ours ! Le véritable héros de ce roman, tant il suscite de fascination, d’amour, de rejet et de peurs. Sa réintroduction pose des problèmes aux éleveurs qui n’avaient plus l’habitude de cohabiter avec le fauve. Et les partisans de leur réintroduction, les défenseurs du monde sauvage s’opposent à la réalité rurale, mais il est facile de défendre un prédateur venu des forêts de Slovénie lorsqu’on ne connait pas la vie en montagne. Le pastoralisme s’il veut survivre, doit cohabiter avec ce prédateur qui vient se servir parmi le troupeau et c’est un crève-cœur pour le berger de voir ses bêtes éventrées par la bête sauvage.

Si la montagne doit retrouver un certain réensauvagement, le pastoralisme lui est aussi indispensable et c’est Simon, le berger, qui en parle le mieux.

« Vous voyez cette montagne, sa végétation, tout ce pour quoi vous venez ? C’est la brebis qui fait ça. Sans les troupeaux, elle ne serait pas entretenue, elle serait envahie par les genêts et les ronciers, recouverte, différente. »



C’est ce que j’ai aimé dans ce roman, l’affrontement entre les néo ruraux, les citadins écologistes parfois végétariens et les paysans installés depuis des générations dans leur montagne et qui tentent de survivre avec leurs troupeaux. Les esprits de tout ce petit monde vont s’échauffer lorsqu’un ours est retrouvé mort.

L’auteure prend parti, elle est du côté des éleveurs, des bergers et de ceux qui vivent en harmonie avec la montagne.

« En pointant du doigt les éleveurs et les bergers des Pyrénées, ils faisaient fausse route. Leur choix d’installer des ours slovènes sur ce territoire où le paysan est jardiner du paysage était une aberration. En voulant sauver la biodiversité, ils allaient l’achever. »

Et l’auteure, par le biais de Zita, va plus loin : pourquoi ne pas réintroduire l’ours dans les forêts primaires, « dans ces futaies où les cervidés sans prédateurs ne laissent aucune chance aux jeunes pousses. »



Bien sûr, il n’y a pas que des brebis et des ours dans ce roman, il y a aussi la relation amoureuse entre Zita et Pierrick, mais celui-ci est papa d’une petite Inès. Très envahissante, la mère d’Inès, qui est aussi végétarienne et écologiste convaincue, se révèle vite une rivale acharnée. Zita se retrouve dans le rôle délicat de la belle-mère.

J’ai été beaucoup moins convaincue par la romance de Zita avec Damien le beau rugbyman et ensuite Pierrick le citadin bobo.

Ce n’est pas l’intrigue du roman qui m’a le plus passionnée mais bien le regard que pose l’auteure sur le pastoralisme et le monde sauvage.







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Bénie soit Sixtine

Y a pas, la littérature, ça dépayse. D'accord, ça se passe en France. Au XXIème siècle. Mais les milieux fondamentalistes catholiques, pour moi, c'est un peu une terre inconnue, d'une étrangeté pas du tout familière.

Sixtine, elle, les connaît bien et épouse au début du roman Pierre-Louis Sue de la Garde, un pilier de la communauté des Frères de la Croix, créée en réaction au concile Vatican II, considéré par eux comme l'oeuvre du diable. le père Mathias leur rappelle alors leur «lourde tâche», «celle d'être des parents de nouveaux petits croisés qui devront grandir au milieu de ce peuple renégat».

Pour Pierre-Louis, pas de problème, il est membre de la milice des Frères de la Croix, dont il a prononcé les voeux, par exemple celui de n'accepter aucune collaboration ni entente avec une personne athée, il déteste les juifs, les arabes, les homosexuels et participe activement à des actions violentes contre les gauchistes. Mais Sixtine se sent de plus en plus mal, d'autant plus que sa belle-mère, hyper-autoritaire, vient renforcer le côté oppressant de sa vie de jeune mariée.

Le roman n'en est pas pour autant plombant, pas du tout, il nous raconte l'histoire de l'émancipation de Sixtine. Il faut dire qu'elle a de qui tenir, la jeune femme l'ignore mais dans sa famille les filles semblent avoir pour habitude de rejeter avec fracas le modèle maternel pour prendre des voies très différentes.

Certes, pour le moment, Maylis Adhémar n'est pas Joyce Carol Oates et son Bénie soit Sixtine n'a pas l'épaisseur, la profondeur impressionnante d'Un livre de martyrs américains, mais ça n'en est pas moins un bon premier roman, très prenant, qu'on quitte à regret.
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Bénie soit Sixtine

Dans les familles telles que celle de Sixtine, très catholiques, tendance intégriste obscurantiste et réactionnaire, on attend des jeunes filles qu'elles soient sages et bien élevées, qu'elles sachent prier, cuisiner et préserver leur chasteté, qu'elles fassent des études supérieures juste ce qu'il faut pour trouver un jeune homme de bonne famille promis à un bel avenir. Sixtine répond parfaitement à tous ces critères.



Dans ces familles-là, on attend des jeunes hommes qu'ils soient polis et sûrs d'eux, qu'ils fassent de solides études pour dégotter un solide emploi, qu'ils sachent prier et perpétuer la lignée, et qu'ils s'engagent dans une milice religieuse pour mener une croisade moderne (actions coup de poing incluses) contre les hérésies contemporaines telles que le mariage pour tous. Pierre-Louis Sue de la Garde correspond parfaitement à ce profil.



Et donc Sixtine et Pierre-Louis se rencontrèrent et se marièrent. Mais le reste du programme « ils furent heureux et eurent beaucoup d'enfants » ne sera pas d'application. Parce que finalement, Sixtine ne répond pas tout à fait aux critères susmentionnés. Surtout depuis qu'elle réalise que le mariage et ses accessoires s'apparentent plus à un purgatoire qu'à l'Eden d'avant la pomme. Nuit de noces désastreuse, grossesse difficile, belle-mère intrusive, autoritaire et culpabilisante, la jeune femme déchante encore davantage quand elle comprend que son bon, beau, fort et courageux Pierre-Louis ne mérite peut-être pas qu'on lui donne le Bon Dieu sans confession.



A la faveur (si on ose dire) d'un événement dramatique, Sixtine ouvre les yeux, comprend qu'il y a d'autres vérités que celle qu'on lui assène depuis sa naissance, et décide de couper les ponts.



« Bénie soit Sixtine » est donc une histoire d'éveil, d'émancipation, d'une initiation à une autre vie. La première partie m'a semblé la plus intéressante, par le portrait ahurissant de ces familles et de ce courant catholique intégriste. Je savais vaguement que cela existait mais je ne me doutais pas que cela allait aussi loin dans la déconsidération des femmes (être femme se limite à être mère), ni dans la dénaturation de la religion et dans la violence : ces soldats du Christ post-modernes sont en réalité de dangereux fous furieux, bien loin du Dieu d'amour, miséricordieux et tolérant. J'ai moins aimé la seconde partie, un peu lente, caricaturale et trop feel good pour moi. Pas très crédible non plus à mes yeux l'histoire de la mère et de la grand-mère de Sixtine, ni la fin en forme d'improbable retour aux sources.



Mais le plus important de ce roman finalement assez agréable à lire, c'est son message de tolérance et de liberté.



Qui me permet une transition facile et me donne l'occasion de vous souhaiter un joyeux Noël et une année 2022 remplie de joies et d'émerveillements, de bienveillance et d'empathie et de toutes ces petites choses qui font du bien et qui ne s'achètent pas (et remplie aussi de livres, tout de même).
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Bénie soit Sixtine

Emprise puis renaissance

*

Réaction à chaud: je viens de le finir, complètement charmée par cette lecture.

Charmée n'est peut-être pas le mot qu'il faudrait employer ici. Mais "émue" et "estomaquée".

*

Il est question d'émancipation d'une jeune femme, de dé-conditionnement sous influence religieuse intégriste. Appelons un chat - un chat. Nous oublions parfois que dans notre beau pays, nous avons nous aussi la chrétienté qui a ses groupuscules portant haut le flambeau du salut du Christ. Avec ses membres flamboyants et dévoués, sous l'égide d'un leader charismatique édictant des valeurs pieuses mais pas très louables. Mais quelle violence assumée dans leurs actes guerriers. J'ai parlé de guerre. Oui il en s'agit bien d'une quand ces croisés modernes partent à l'assaut de personnes n'ayant pas le même point de vue qu'eux. Homophobes, royalistes, sectaires et rétrogrades. Des catholiques intégristes dont l'héroine Sixtine est la victime bien malgré elle.

*

Jeune fille dont l'éducation exemplaire lui a valu de se marier à un homme de ce même groupe. Les ennuis débutent le jour de la nuit de noces. Cette belle-famille peu indulgente, souhaitant tout régenter. Un mari réactionnaire qui l'engrosse (c'est cru mais c'est de cette manière que Sixtine l'aborde). Puis un drame éclate et tout bascule.

*

En contrepoint de cet éveil, d'initiation à une autre vie plus humaine et respectueuse, on apprend des secrets de famille sous forme de lettres. Des confessions de la grand-mère maternelle de Sixtine qui apportent une lumière bienvenue.

Sixtine, de jeune fille, épouse puis mère, aura fait un immense bond en avant; de la ténacité, du courage.

*

L'auteure n'a pas mis tous les catholiques dans le même bain et a préféré faire un focus sur les dérives de quelques branches fondamentalistes. Le sujet est bien traité (peu vu en littérature) et permet de mieux cerner le problème. (cette prison mentale dont l'extirpation doit être ardue).

*

Un beau portrait de femme allant de l'intime à quelque chose de plus vaste (un sujet d'actualité). La première partie est terrifiante et glaçante. Heureusement que le chemin de vie qu'a pris Sixtine dans la seconde partie est pavé d'amour et d'espérance, sinon j'en aurais pleuré.
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Bénie soit Sixtine

Ce titre m'a attiré tout de suite, étant moi-même sortie depuis plus de vingt ans d'un mouvement sectaire légaliste.



Sixtine est célibataire, rayonnante et très pieuse, elle fréquente un mouvement religieux, rigoriste. Lorsque Pierre Sue de la Garde se fiance à elle, son coeur est en fête. Ils se connaissent à peine. Les parents ont arrangé leur union qui va dicter leur vie commune. Vierge, elle rêve d'un mariage idyllique, mais la nuit de noces se réserve à une fonction reproductive.



Sa désillusion va lui faire prendre conscience petit à petit dans quel guêpier elle s'est enkystée.



Elle se voit délaissée durant sa grossesse par son mari, qui déserte le domicile familial pour militer dans une communauté catholique extrémiste.



Sixtine s'accroche avec courage et abnégation, elle est corsetée dans ses convictions religieuses, sous la domination familiale de part et d'autre qui lui dicte sa conduite et lui fait sans cesse des récriminations.



Maëlys Adhémar nous fait plonger dans l'horreur, la violence psychologique de son quotidien et cela colle à la peau du lecteur.



La jeune mère est lucide sur son futur, elle ne peut se résoudre à une telle pénitence et ne sait comment s'affranchir de cette pesanteur.



Un drame familial va faire basculer sa vie. Sixtine fait le mur une nuit avec son fils pour échapper à cet enfer et vivre une vie meilleure. Petit à petit, elle va cheminer tenter de s'épanouir, même si parfois la culpabilité se fait encore insistante.



Va-t-elle réussir à s'échapper complètement de ce joug ?



L'auteur lève le voile sur ce qui semble être du vécu. C'est pour cela qu'elle illustre si bien l'emprise religieuse.

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Bénie soit Sixtine

Sixtine. A l'annonce de ce prénom, nous pressentons déjà dans quel milieu se situe ce roman. Sixtine a été élevée dans un milieu intégriste catholique. Jusqu'à ce qu'un incident remette en cause le seul monde qu'elle connait.



La première partie m'a pleinement convaincue. Sans jamais se moquer, Maylis Adhémar raconte toute en nuance comment peut être vécue la foi. Tout sonne juste, sans doute grâce à sa connaissance de ce milieu. Afin de faire évoluer son personnage, l'auteur va avoir recours à une pirouette, mettant en application le célèbre adage ‘un mal pour un bien'. Dans une seconde partie nous découvrons comment Sixtine va s'affranchir de son milieu. Elle va rapidement s'adapter à un environnement très différent de ce qu'elle connaissait jusqu'alors, et certaines situations m'ont paru peu vraisemblables, tournant parfois même à la caricature. La fin du roman tombe dans la mièvrerie.



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Bénie soit Sixtine

Voilà un très bon premier roman qui mérite amplement son succès sur BABELIO. C’est en effet grâce à ODP31, Palamede, Latina, JMB33320, ou encore Framboize12 : beaucoup de mes amis Babeliotes ont lu ce livre et l’ont apprécié à juste titre.





Car « Bénie soit Sixtine » traite d’un environnement dont on parle peu, hormis des évènements récents qui ont fait la Une des Médias, comme la dissolution de l'institut Civitas, proche de l'extrême droite catholique.



Car c’est bien dans cet univers catholique intégriste que débute le roman. Sixtine, jeune fille de bonne famille, se rend à un mariage et, comme souvent dans les milieux favorisés, elle y rencontre son futur mari. Celui-ci, doté d’un nom à particule, fait partie de mouvements très engagés dans le milieu intégriste : il est contre le mariage pour tous (évidemment) mais aussi ne voit pas l’intérêt que sa femme éprouve du plaisir lors de la nuit de noce (plus alarmant). Et puis il veut « faire le coup de poing » contre des mouvements gauchistes, qui ont le malheur d’accueillir des réfugiés (au secours) ou qui ne respectent pas les symboles de la mère patrie (quelle horreur).



Bien sûr, dans ce milieu, on va à l’église, pas seulement tous les dimanches, mais le plus souvent possible, on porte la mantille, pour ne pas attirer le regard des hommes, et on se confesse pour tout péché qu’il soit par action ou en pensée. Et le devoir d’une femme mariée est … de faire des enfants.

Sixtine coche d’abord toutes les cases, et coup de bol (et tant pis pour le plaisir féminin – elle a juste droit à un geste de son mari avec une croix sur son front avec l’acte de procréation) elle tombe très vite enceinte.



Mais la belle machine, cuisinée par sa belle-mère qui n’en est pas à son coup d’essai question dressage de belle-fille, ni à sa propre mère qui boit de la même eau, va se dérégler. Quelque chose cloche chez Sixtine qui commence à réaliser où elle a mis les pieds. Elle aimerait même ne pas être enceinte, et ne pas mettre au monde un rejeton qui rejoindrait la cause défendue par sa belle-famille, prélude de futurs très nombreux frères et sœurs à venir.



Oui la machine se dérègle, et même violemment pour son mari, alors qu’il veut en découdre avec un groupe de gauchistes.



Et voilà notre Sixtine livrée à elle-même, qui doit seule décider si elle va opter pour la péridurale ou pas (sa belle-mère est contre : il faut souffrir pour enfanter) et s’il est indispensable qu’elle allaite (ça fait mal, et les biberons sont bien pratiques). Mais surtout, après avoir fait le choix du prénom pour son fils contre la proposition qu’avait faite son mari, il faut qu’elle décide de ce qu’elle veut faire de sa vie.



Commence alors une seconde partie, qui a le gros avantage de ne pas être manichéen : si elle fuit l’environnement toxique du milieu catholique intégriste, elle ne renie pas pour autant sa foi, et tente de vivre selon ses convictions. Un village de l’Aveyron qui l’accueille est le lieu pour elle de découvrir le "vrai " monde : une coiffeuse que sa mère jugerait vulgaire mais au fond très sympathique, un groupe de musiciens New Age dont l’un d’entre eux l’attire étrangement, alors qu’il n’est clairement pas de son milieu, ou encore un prêtre issu des JOC qui lui pardonne tous ses péchés sans faire d’histoire.



« Bénie soit Sixtine » est un premier roman d’une toulousaine jusque là journaliste indépendante. Très bien mené, il révèle de grandes surprises à l’héroïne et à nous lecteurs qui suivons son cheminement. Un seul petit regret : j’aurais aimé une scène de confrontation avec la nouvelle Sixtine et sa mère confinée dans ses préjugés, mais l’autrice envoie son personnage principal à des milliers de kilomètres quand cette rencontre aurait pu avoir lieu.



Il n’empêche, je n’en veux pas à Maylis Adhémar qui m’a fait passer un bien bon moment de lecture.

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Bénie soit Sixtine

Un livre que j'avais très envie de lire. Je coupe net le suspense : pas de déception pour moi, bien au contraire. Lu en deux jours, conseillé à mon mari.... En un mot j'ai aimé !

L'histoire, je pense que vous en avez entendu parler : une jeune femme, Sixtine, issue d'un milieu catholique (ultra) intégriste. Un mariage dans l'élite. Arrêt des études car une femme est là pour procréer et s'occuper des enfants. Et puis tout ne se passe pas comme prévu.....

Une ou deux fois, elle s'étonne de l'impression qu'elle donne de venir d'un autre monde. Et pourtant c'est cela....



Petite expérience inverse me concernant.

Pour mon boulot je me suis trouvée devant une école catho intégriste (Fraternité de St Pie X) hors contrat évidemment, et pas prévenue. Seule femme au milieu des soutanes, des garçons en bermuda, des ados en cravate et blazer bleu marine.

Cet établissement scolaire accueille uniquement des garçons, du primaire à la terminale. Là c'est moi qui me sentait déplacée dans un monde qui n'était pas le mien. Je crois que c'est la première fois qu'être une femme m'a semblé.... étrange.... déplacé ? Je ne sais pas... Mais je n'étais pas à l'aise ! Et pourtant des milieux masculins j'en connais !

Je pense que je n'oublierai jamais l'arrivée dans le bureau du directeur, père abbé, avec une photo, non du pape, mais de Mgr Lefebvre.... J'ai découvert que ce prêtre officiait à chaque anniversaire de Pétain dans le village voisin (où Pétain est né) avec "Maréchal nous voilà" en fond sonore.... Effarant ! Effrayant ? Quelque part oui......



Un autre monde vraiment.... Une lecture passionnante !
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Bénie soit Sixtine

Le catholicisme dans tous ses états. Sixtine, benjamine d'une famille catholique très pratiquante, épouse Pierre Louis Sue de la Garde issu d'un milieu extrémiste religieux, totalement formaté par sa famille. Sixtine, comme toute jeune mariée, attend tendresse et amour de son mari. Mais sa nuit de noce est une réelle déception. S'ajoute à cela une belle-mère rigide particulièrement envahissante et la découverte que son conjoint fraie avec l'extrême droite. L'union s'avère guère joyeuse pour la jeune épousée. Bientôt un événement dramatique l'amène à questionner sa foi, sa relation aux autres et ses ambitions. Sixtine prend son destin en main…

Le récit d'une émancipation douloureuse, porté par une plume précise. Un premier roman parfaitement maîtrisé, qui peint avec justesse la misogynie, le racisme des milieux catholiques extrémistes, sans jamais mettre à mal ni caricaturer la foi. Seuls ses dérives sont pointées du doigt. le texte est très prenant, se lit comme un thriller et les personnages très bien campés : Sixtine, paumée puis battante, sa mère Muriel, convertie, surinvestie dans sa pratique religieuse et sa grand-mère maternelle Erika dont on découvre, à travers les lettres, l'incroyable parcours.

Une réussite. Une écrivaine à suivre.

#BéniesoitSixtine #NetGalleyFrance
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