Citations de Mélanie Couture (16)
Son cœur était mûr, authentique, expérimenté. Il avait été blessé par le passé. L’enfant qu’il était possédait autant de bébelles et de gadgets qu’un garçon de dix ans. Pas des figurines de Batman ou des collections de bandes dessinées, ni des histoires de «Je me déguise en chevalier le week-end et tu dois m’appeler Thor de Bergerac!». Non! Des bébelles technologiques d’adulte.
Dans la vie, on nous enseigne à traiter les gens avec respect, et on doit s’attendre à rien de moins que la réciproque en retour. Malheureusement, trop de personnes se sous-estiment et acceptent de se faire traiter comme de la marde. Oui oui, j’ai écrit «marde» avec un «a». De la «merde» avec un «e» c’est trop propre, trop doux, trop film européen pour exprimer ce que je pense. Je n’ai pas dit «caca» non plus car même le caca, on en prend soin. On s’extasie devant celui de son enfant en couche et on dépose celui de son chat ou de son chien dans un beau petit sac parfumé conçu expressément pour ça. Mais dans la vie, lorsqu’on ne s’aime pas, on se sent comme de la «marde». La vraie, celle qu’on méprise.
C’était un baiser à l’image de ses yeux. Teinté de malaise mais d’une douceur exquise. Je ne m’attendais pas à ce qu’il se transforme en bête de sexe qui dicte quoi faire. Kastar n’avait pas en lui un leader caché qui se révèle au grand jour une fois nu. Kastar était constant, prévisible, rassurant, doux. Il avait la peau succulente et un beau pénis sans mauvaise ni bonne surprise.
Le problème, c’est qu’il n’existe encore aujourd’hui que deux étiquettes quand vient le temps de qualifier la vie sexuelle d’une femme: putain ou madone. Putain OU madone. «OU.» Seulement deux petites lettres, ô combien lourdes de sens. Ces deux petits symboles de l’alphabet nous obligent à choisir: vivre comme une sainte OU comme une dévergondée. Pas de zone grise, pas de juste milieu, pas d’équilibre et, selon moi, pas de plaisir. Pourquoi faudrait-il choisir entre la putain et la madone?
Lasse de me sentir coupable de pulsions plus que normales, j’ai trouvé une solution plutôt facile. J’ai remplacé, sans demander la permission à qui que ce soit, le «OU» par un «ET». Voilà! Un petit changement de conjonction et magie! Je me donne l’autorisation d’être putain ET madone.
L’avantage de faire l’amour avec un gars dans la vingtaine, c’est qu’il est rapidement prêt pour un deuxième round, mais malheureusement, je l’ai mis K.O. de nouveau en aussi peu de temps. Apparemment, personne ne lui avait parlé de son point de non-retour. Chaque fois qu’il venait, il tentait de se retenir. Ce n’est pas une vie sexuelle, ça! C’est une frustration sexuelle constante.
J’ai pour mon dire qu’on ne doit jamais profiter de la vulnérabilité d’un être vivant, peu importe à quel point il est affreux, à part si notre objectif est de le manger.
De plus, si la beauté était un facteur déterminant entre la vie et la mort, on m’aurait écrasée dans un mouchoir à la naissance. Bâtard que j’étais laide. Tête en cône, face gercée, peau verte ratatinée, plaques sèches, j’avais l’air d’un mini sapin de Noël déshydraté qu’on vient de mettre au chemin. Heureusement, on m’a donné une chance, et une trentaine d’années plus tard je peux te raconter ma journée de traîneau à chiens.
Les hommes veulent que tu aies du plaisir. Si tu les guides un peu, ils vont tout faire pour t’exciter, car ils veulent te voir à poil. Je sais que ce n’est pas le genre de chose que ta mère t’a enseignée entre deux recettes de biscuits, et encore moins le genre de chose qu’on t’a montrée à l’école dans ton cours d’éthique et de morale, mais oui, TOUS les hommes qui te frenchent veulent te voir à poil.
Avec l’expérience, on finit par décoder pas mal quelle sorte de nuit nous attend, simplement en regardant profondément dans les yeux de l’homme qui nous veut. Si on a le courage de soutenir son regard, on peut voir son âme, ses envies, ses passions. Et je voulais ce que je voyais.
En discutant avec lui, j’ai découvert qu’il était un ex-soldat. Je ne sais pas comment on les appelle, mais c’est le genre de soldats qui se parachutent d’un avion cargo en pleine nuit pour atterrir en territoire ennemi. Chef de peloton, il n’aimait pas recevoir des ordres; il préférait en donner. Mais il aimait bien qu’on lui tienne tête avec assurance.
Je préfère les surnoms aux noms réels. Je les trouve plus faciles à retenir et ça évite bien des situations embarrassantes. J’ai déjà fait la gaffe d’appeler un Juan José. Ont suivi quinze minutes de malaise, pendant lesquelles je m’excusais en boucle tandis que Juan se lavait le visage à l’eau froide dans la salle de bain pour «décompresser». Rien de magique pour aider un homme à garder son érection, qui était aussi fâchée que lui.
J’aime les hommes. Chaque globule qui se promène dans mon sang, chaque synapse de mon cerveau, chaque terminaison de mon système nerveux aime les hommes. Ils sont fantastiques, beaux, charmants, intelligents, et la planète serait morne sans eux.
Par ailleurs, le mot «aventure» dans «aventure d’un soir» prend tout son sens quand on sait que j’habite la belle jungle multiethnique de Montréal. J’aime voyager par l’entremise des hommes. Une nuit je me retrouve au pied du Portugal, quelques jours plus tard je suis étendue sur Haïti. Il me manque juste le sac à dos et les photos souvenirs pour avoir des étampes dans mon passeport.
C’est la fille en nous qui rêve de répondre à ses pulsions sexuelles sans culpabilité et qui se laisserait aller sans retenue si les mots «guédaille», «putain», «charrue» et «fille facile» ne résonnaient pas aussi fort dans notre société patriarcale encore marquée par d’innombrables années de catholicisme.
Je sais, je parle peu d’amour et j’utilise souvent les mots «pute» et «putain». Je pourrais dire «diva» ou «déesse», mais contrairement aux auteures de romans à l’eau de rose, je refuse d’envelopper mes pulsions sexuelles dans des mots qui sentent la fleur. Le sexe, ça ne sent ni le lilas ni la lavande. Le sexe, ça sent la sueur et les hormones. Rien qui s’emballe dans du papier de soie, rien qu’on devrait servir avec des gants blancs. Le sexe, c’est de l’instinct, pas de la décoration.
Une pute, c’est comme un adolescent de seize ans qui revient de l’école et se plante devant un frigo plein de desserts: il ne faut pas le lâcher lousse. Premièrement, ce n’est pas bon pour sa santé. Deuxièmement, ce n’est pas bon pour le portefeuille.
L’entente de la libération de ma pute est simple: elle s’amuse de manière sécuritaire et, surtout, elle comprend que c’est le corps qui domine et non le cœur.
J’aime le mot «vagin». Il sonne comme le nom scientifique d’une fleur ou d’une plante. «Alors ici, à votre droite, vous pouvez apercevoir des plants de vulpin des prés, et à votre gauche, une espèce rare de vagin alopecurus myosuroides». Un vrai trésor.
Chaque fois que ça m’arrive, je me dis que ce sont mes hormones qui prennent le contrôle. Eh oui, je mets mes pensées perverses sur le dos de la biologie et des mystères du cycle menstruel: c’est beaucoup plus respectable! On ne se le cachera pas, avoir envie de baiser juste pour baiser en espérant que l’élu partira avant l’aube, ce n’est pas super bien vu quand on est née avec un vagin.
La folie avait pris le dessus sur l’intelligence. Pendant trop longtemps, j’avais mis de côté ma créativité pour faire plaisir à mes vieux. Mais à force de la faire taire, elle s’est mise à crier plus fort que ma logique. Et quand on a une formation de psychologue, on ne peut faire autrement que de s’analyser et d’écouter ses propres besoins.