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Critiques de Mo Yan (332)
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Au pays des conteurs

Le 8 décembre 2012 Mo Yan prononce son discours de réception du Prix Nobel de littérature. C'est un discours simple et émouvant qui débute par un très bel hommage à sa mère décédée en 1994. Une femme humble et sage, capable de pardonner les injustices et les violences subies durant les années Mao. Mo yan poursuit son discours en racontant la naissance de sa vocation. Dans son petit village, les jours de marché, arrivent les conteurs. "Le petit dernier" les écoute d'abord en cachette mais comme il a beaucoup de bagou, il raconte à sa mère ce qu'il a entendu en enjolivant les épisodes et bientôt tout le village accourt pour l'écouter. Cette tradition orale est le terreau de son oeuvre. Il ne reçoit de formation littéraire qu'en 1984, à l'armée. Ensuite il explique qu'il est un écrivain refusant de "laisser le politique l'emporter sur le littéraire". Il est et demeurera un homme qui conte des histoires.

https://www.nobelprize.org/prizes/literature/2012/yan/25466-mo-yan-conference-nobel/
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Beaux seins, belles fesses : Les enfants de..

A travers le destin des membres de la famille Shanggguan, nous suivons l'évolution et les avatars d'une famille rurale chinoise au cours du XXe siècle. Une époque bien difficile car nous verrons ces paysans subir dans l'ordre l'occupation allemande, puis japonaise, la lutte pour le pouvoir entre les nationalistes et le communistes, la victoire communiste des maoïstes, l'implantation de la société communiste à travers le « mouvement des cent fleurs », le « grand bond en avant » et la révolution culturelle, avant l'instauration de la société libérale autoritaire que nous connaissons aujourd'hui. Le héros malgré lui du livre est le jeune Jintong, bébé jusqu'à l'âge adulte, obsédé par les seins des femmes, brave garçon, naïf et candide, pas méchant mais peu courageux. Il est entouré d'une myriade d'autres personnages tous plus hauts en couleurs les uns que les autres dont Shangguan Lushi, sa mère, véritable « mère courage ».

Voilà un livre truculent, d'un réalisme délirant, sensuel à souhaits, violent comme l'époque dans laquelle il s'inscrit qui fait que l'on pourrait qualifier Mo Yan de « Rabelais chinois ».

Selon les goûts, ce livre peut paraître un peu épais. Dans ce cas une lecture fractionnée est possible.
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Beaux seins, belles fesses : Les enfants de..

Lorsque Shangguan Lushi donne enfin naissance à un garçon, après avoir élevé sept filles, c’est une véritable délivrance pour toute la famille. Jintong, par sa veulerie et son indécrottable manie d’être accroché aux seins de sa mère, ne sera certes pas à la hauteur des attentes de la famille ; mais lui et ses sœurs traverseront ensemble cinquante ans d’Histoire de la Chine contemporaine, affrontant mille épreuves infligées à la famille.

Rocambolesque, parcourant toute la gamme du registre épique au burlesque, Beaux seins, belles fesses dresse le portrait au vitriol d’un pays en proie à toutes les formes de violences. Conjuguant au folklore de la Chine rurale quelques touches de réalisme magique qui lui ont souvent valu d’être comparé à Cent ans de solitude, ce roman-fleuve, malgré sa forme baroque et monumentale, reste toujours à hauteur d’homme et rend un hommage puissant à un peuple balloté par les cahots de l’Histoire.
Lien : https://balises.bpi.fr/litte..
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Beaux seins, belles fesses : Les enfants de..

UN CONTE CHINOIS MÊLÉ À L’HISTOIRE CONTEMPORAINE.

L’auteur, Mo Yan, élevé dans une famille paysanne pauvre du Shandong, construit une saga truculente et rocambolesque dans l’environnement qui a été le sien : occupation par l’armée japonaise, guerre civile entre communistes et nationalistes, le grand bond en avant et sa famine, la révolution culturelle et ses gardes rouges puis le néocapitalisme débridé. Ce témoignage personnel est cependant filtré à travers les yeux du narrateur : le seul garçon parmi huit sœurs, chéri de sa mère, personnage naïf et immature, sevré du sein à l’âge de 7 ans, puis élevé au lait de chèvre jusqu’à 16 ans d’où sa fixette sur les mamelles, puis sur les fesses féminines jusqu’à son dépucelage à 40 ans par une amie de sa mère en service commandé.

Cette naïveté permettra à l’auteur d’écrire une satyre à peine masquée de la vie en Chine profonde sans jamais juger directement le régime et ses aberrations. L’ironie est cependant toujours présente en toile de fond : l’épisode des intellectuels envoyés à la campagne en camp de rééducation qui font des essais d’hybridation inter-espèces en injectant du sperme de cheval à une lapine est proprement hilarant. Le pseudo de l’auteur Mo Yan signifie d’ailleurs « celui qui ne parle pas » alors que tout est dit en filigrane : le livre sera longtemps interdit en Chine. L’auteur s’est vu attribué le prix Nobel de littérature (mérité) en 2012.

Attention, le style est tout à fait particulier : hyper-réaliste, mais aussi très asiatique avec hypotyposes, emphase, métaphores, et hyperboles. Il faut s’y habituer mais je suis rentré dans le livre dès la 50ème page pour n’en sortir qu’à la 900ème, bien que la fin me soit apparue bâclée et décousue.

En conclusion : un réalisme déjanté dans une fresque historique passionnante.
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Beaux seins, belles fesses : Les enfants de..

Dans la famille Shanguuan, il n'y a que des filles. Enfin nait Shanguuon Jintong, le fils tant attendu, pendant l'invasion japonaise. L'enfant grandit, obsédé par les seins de sa mère, dans une famille qui semble maudite. Des années 40 aux années 90, on voit la Chine rurale évoluer. C'est un roman intéressant, mais très long, avec des passages que je n'ai pas compris, une écriture un peu lourde parfois.
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Beaux seins, belles fesses : Les enfants de..

Saga familiale qui raconte, au travers des yeux d'un jeune homme faiblard obsédé par les seins, l'histoire du XXème siècle chinois et les grands bouleversements qui ont traversé le pays. On passe d'une société paysanne à une société de consommation en moins d'une génération, comme en témoigne le parcours de Jintong, le personnage principal. Je dirais, à mieux y penser qu'il y a deux personnages principaux, Jintong et Lushi, sa mère qui est peut-être le vrai protagoniste. Jontong est trop mou, fou et fils à maman pour être intéressant alors que Shangguan Lushi est une femme forte, une battante, résiliente et courageuse. On passe d'un registre à l'autre, de la farce à l'horreur en quelques secondes à peine. Le style est intéressant (quelques variations pour marquer le style de certains personnages comme Han l'Oiseau) et accessible. Je regrette une fin trop amère pour ce pauvre Jintong, mais vu son caractère pouvait-il en être autrement ? Le fait d'ouvrir et de refermer sur Lushi est très astucieux et intéressant, cela marque le contraste avec la société moderne. On passe des pieds bandés, de l'empire, du temps des colonies au capitalisme le plus débridé en un éclair !
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Beaux seins, belles fesses : Les enfants de..

Ce roman est une vraie fresque pleine de ces couleurs qu'on ne trouve que chez l'auteur de Cent ans de solitude. Mais à voir le plan du texte et le style de l'auteur, il se rapproche autrement du Tambour de Günter Grass et des Enfants de minuit de Salman Rushdie. À vrai dire, comme dans ces deux derniers, le roman commence avant même la naissance du héros principal, annonçant déjà sa vie mouvementée, même si une grande partie est ici différée avec encore plus de surprises de page en page. Comme avec Grass, le sens du détail et de l'humour est aussi inégalable, mais ce que j'ai le plus aimé chez Mo Yan, ce sont les figures de style et surtout les comparaisons omniprésentes qui se servent souvent d'animaux comme comparants parfois avec une exactitude étonnante.

En plus de certaines facettes de la société chinoise qu'on découvre, notamment la vie paysanne à différentes époques, c'est une occasion de plonger dans l'histoire récente de la Chine qu'on revit autrement avec la grande famille Shangguan mais aussi le reste des innombrables personnages plus amusants les uns que les autres, chacun avec sa particularité. Entre guerre et amour, rire et tristesse, l'ennui n'a pas de place, sachant qu'il ne nous est pas toujours donné de lire un millier de pages sans la moindre envie de lâcher le livre ou l'appareil numérique (comme dans mon cas).

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Beaux seins, belles fesses : Les enfants de..

Voilà ce qu'on peut appeler un roman fleuve qui charrie dans ses eaux une partie de l'histoire de la chine des 60 dernières années en arrière plan de la vie d'une famille composée de la mère, des ses huit filles - et nombreux beaux-fils - et de son fils unique qui restera tout sa vie une sorte d'obsédé de sein maternel.

Mo Yan est un prodigieux écrivain qui sait rendre avec un luxe de détails indispensables, toute la richesse, la profusion, le chaos, la cruauté de la vie.



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Beaux seins, belles fesses : Les enfants de..

Un livre étonnant, très riche dans la description des personnages et de l'univers rural en Chine, satire sociale . Mais en même temps très proche du fantastatique.
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Beaux seins, belles fesses : Les enfants de..

Années 90, le capitalisme bat son plein dans la Chine actuelle, la corruption est omniprésente. C’est le temps de l’économie socialiste de marché. Les néons illuminent jour et nuit Dalan, les supermarchés fleurissent, la jeunesse semble perdue, démobilisée attendant que la journée se passe au pied des cinémas.



Quelques années plus tôt et 895 pages en arrière, je suis un lecteur privilégié qui voit naître le petit Jintong en 1938. En compagnie des sept filles aînées de la famille Shangguan, Laidi (« Fais venir le petit frère »), Zhaodi (« Appelle le petit frère »), Lingdi (« Amène le petit frère »), Xiangdi (« Pense au petit frère »), Pandi (« Espère le petit frère »), Niandi (« Songe au petit frère »), Qiudi (« Réclame le petit frère »), la vie s’écoule paisiblement à Dalan, petite bourgade paysanne au Nord-Est du canton de Gaomi. Autant dire que le petit Jintong était très attendu !



Entre ces deux périodes, j’assiste impuissant à l’invasion barbare des « diables japonais », découvre la résistance qui s’installe aux abords du bourg pour saboter la progression de cet envahisseur. La cruauté des japonais fait place à celle des résistants chinois. La guerre civile s’enchaîne aussitôt entre combattants communistes et partisans du Guomindang (le parti populaire national), avec toujours cette même cruauté, toujours la vengeance d’un camp par rapport au précédent et toujours plus de sauvagerie pour défendre ses idées et la fondation de la République Populaire de Chine. Le « Grand Bond en avant » devient la philosophie du jour où les morts se comptent par dizaines de millions, suivie de la Révolution Culturelle instaurée par Mao Zedong. En fait, j’aurais vécu par procuration tout un pan de l’histoire contemporaine chinoise à travers le regard et la vie de Jintong, de sa mère Lushi et de toutes ses sœurs, de ses oncles et cousins.



Je découvre les coutumes de ces paysans chinois, leurs façons de vivre entre famine, inondation, déportation, emprisonnement et exécution publique. Rien ne m’est épargné, des humiliations à la torture, des décapitations au massacre de masse. Je partage au quotidien leur misère, leur richesse, leur espoir et désespoir. Je suis au cœur de cette famille au destin particulier avec le charisme de toutes les sœurs de Jintong : elles seront à tour de rôle Héros de la nation, Bandit notoire, Prostituée, « Immortel Oiseau », Voleuse professionnelle, Cadre du parti communiste chinois... Je croise des guerriers héroïques, des combattants de la liberté, des communistes hystériques, des chamans taoïstes, des bureaucrates corrompus.



Et je ne m’ennuie jamais au « sein » de cette famille, de cette bourgade de Dalan. Les récits épiques de certains protagonistes me font découvrir des contes et légendes issus de ce terroir (Jintong sous la direction d’un maître taoïste deviendra « Prince de la Neige »), les premières séances du cinéma en plein air ou les premiers essais de parachutisme au bord de la falaise. La famine, la misère et le froid permettent de resserrer les liens familiaux mais oblige la mère à vendre une de ses filles. Les inondations provoquent des dégâts matériaux à grande échelle, Jintong apprend à travailler dans une « ferme d’état », se retrouve en prison et suit une « rééducation politique »...



Que de souvenirs, que de passions, que de moments mémorables et inoubliables parsemés par de petits clins d’œil humoristiques, des anecdotes cocasses du principal protagoniste Jintong, abreuvé au sein maternel tout au long de sa vie de « raté » et d’ « obsédé ». L’occasion de découvrir l’histoire récente de la République Populaire de Chine au cours de ces 60 dernières années...
Lien : http://leranchsansnom.free.fr/
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Beaux seins, belles fesses : Les enfants de..

S'engager dans un roman de 900 pages demande, en tous les cas pour moi, un effort et un petit travail préparatoire. Même s'il s'agît de Mo Yan , un auteur que je commence à connaître. Même s'il s'agît d'un livre "chinois", littérature qui ne m'a que rarement déçu.

Encore une fois, la lecture a été à la hauteur de mes attentes.Et même au delà.

L'histoire est celui d'un village dans le canton Nord Est de Gaomi, d'où est originaire l'auteur. Elle se déroule de 1939 au début des années 90 et sert de support à un inventaire de faits historiques qui ont émaillé la Chine.

Shangguan Lushi est à ce jour maudite. Elle a sept filles et est encore enceinte. Par miracle, ce sont des jumeaux et l'un deux est un garçon , Jintong, qui sera le "héro" de notre histoire. Les japonais sont sur le point d'arriver et la défense s'organise comme elle peut dans un pays où la république instaurée en 1911 a du mal à s'imposer et où la guerre civile entre les troupes de Mao et celles de Tchang kaï chek menace.



Que dire de ce livre si ce n'est qu'il m'a transporté pendant une semaine . Comme à son habitude Mo Yan décrit avec une précision chirurgicale les faits de guerre (le clan du sorgho rouge est aussi un chef d’œuvre) et n'a pas son égal pour insérer des pans poétiques pour magnifier la faune et la flore de son pays.

Mais ici , il va plus loin , plongeant le lecteur dans les coutumes et légendes de son pays sans que cela soit du saupoudrage gratuit. C'est un livre culturellement fort et bien entendu l'aspect historique de cette période , le XXème siècle, atroce pour le peuple chinois, est mis en exergue.

Le village, qui se trouve dans le Shandong (sud ouest de Pékin sur la mer) a été occupé par les Allemands au début du siècle. Ce sont eux d'ailleurs qui à Qindao construisirent la brasserie d'où vient a célèbre TsingTao. Puis les Japonais, la guerre Mao/Tchang, le communisme et le capitalisme fou.

Au milieu de ce marasme humain , des paysans qui luttent pour survivre et doivent s'adapter aux changements de dirigeants . Qui du jour au lendemain passent de l'ombre à la lumière et vice versa. Les procès , les chefs d'accusation seraient tellement risibles , s'ils n'avaient pas existé...

Vol, rapt, exécution , famine, viol, torture, vente d'enfants , humiliation , expropriation, canicule, vague de froid, exode, trahison , délation, je dois en oublier. Mo Yan rend hommage aux hommes et femmes de son pays à travers les souffrances qu'il décrit. Il fait, je trouve, un très beau portait de la mère, magnifiant à travers elle les mères chinoises, leur courage, leur abnégation.



Une scène va longtemps me rester. Celle de la mère qui vole des pois en les avalant, de peur de se faire fouiller. Elle les vomit arrivée chez elle, les lave et en fait une soupe pour nourrir ses enfants. Je ne suis pas sur que le Covid effraie beaucoup les Chinois qui ont traversé ces périodes.

Ce livre est une pure merveille, d'une richesse culturelle immense. Le génie vient d'y avoir glissé un peu de fantastique en s'appuyant sur les légendes mais aussi sur les phantasmes de Jintong.

Vous apprendrez pourquoi les Chinois pensaient que les Allemands n'avaient pas de genoux, vous verrez l'arrivée de la fée électricité, la première séance de cinéma , le premier saut en parachute, la transformation d'un village en grande ville industrielle. Vous verrez aussi beaucoup de seins , il y en a pour tous les goûts . J'y vois un hommage encore appuyé aux mères.

Je pourrai continuer des heures, tellement ce livre est grand.

Certains verront de la loufoquerie , des coïncidences fortuites où moi j'ai vu du génie. C'est tout le plaisir de discuter des livres !



"L'humanité ne se sentira bien que si l'on prend bien soin des seins"



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Beaux seins, belles fesses : Les enfants de..

« Beaux seins, belles fesses », tout un programme, non ?



Qu’on ne s’y trompe pourtant pas, le roman fleuve de l’écrivain chinois Mo Yan n’est pas livre érotique ou tout autre ouvrage de ce genre (comme l’a cru fort innocemment mon compagnon en regardant mes mails par-dessus mon épaule ; ça lui apprendra, tiens…). Cette immense saga familiale débute en 1938 dans la bourgade de Dalan avec la naissance du petit Shangguan Jintong, une naissance qui se place d’emblée sous le signe du chaos et de la malchance, puisqu’elle a lieu au moment exact où les troupes japonaises envahissent son canton natal. Neuvième enfant d’une fratrie de huit filles, Jintong répond aux vœux ardents de sa mère et de son père – qui n’en profitera pas puisqu’il sera l’une des premières victimes à tomber sous les coups des « diables japonais » à leur entrée dans Dalan.



Hélas, le petit Jintong ne se révélera guère à la hauteur des attentes familiales : pleutre, geignard, dépourvu de volonté et d’intelligence, maladivement obsédé par le sein maternel qu’il tétera jusqu’à un âge avancé, il s’avère incapable de subvenir à ses besoins et, à plus forte raison, à ceux de la fratrie Shangguan dont il est devenu le chef de famille. Restent ses huit sœurs et son indomptable mère, neuf femmes au fort caractère et à la volonté bien trempée, à défaut de posséder beaucoup de jugeote. Car si, chez les Shangguan, les hommes sont des mauviettes, les femmes quant à elles ont de qui tenir ! Pourvues de beaux seins et de belles fesses, comme le dit si bien le titre du roman, c’est elles qui sont le cœur et l’âme de la famille Shangguan et lutteront pour lui permettre de surnager malgré les innombrables bouleversements que traversera la Chine de 1938 à nos jours : invasion japonaise, guerre mondiale, révolution culturelle, multiples réformes économique foireuses, etc.



A la première lecture de « Beaux seins, belles fesses » de Mo Yan, on ne s’étonne pas de l’accueil glacial qu’il a reçu en Chine à sa sortie en 1995. A travers les nombreux aléas de la vie du pauvre Jintong et surtout de celles de ses sœurs, le romancier chinois trace un portrait au vitriol de la Chine contemporaine. Avec humour noir, verve et un sens certain de l’absurde, il rentre allègrement dans le lard de l’Histoire officielle et nous embarque dans une aventure aux multiples rebondissements, où les larmes et le rire se côtoient régulièrement. Jamais condescendant ou méprisant, il rend aussi délicatement hommage à une certaine partie de la population chinoise, celle qui souffre et peine quels que soient les régimes qui la dominent, mais parvient toujours à survivre malgré les privations et les injustices dont elle est abreuvée. Si les malheurs du personnage principal, véritable mollusque, prêtent plus à rire qu’à pleurer, le personnage de sa mère nous touche bien davantage : petite femme au courage discret et à la détermination sans limites, prête à tous les sacrifices pour permettre à son innombrable couvée (qui ne tardera pas à s’enrichir d’une flopée de beaux-fils encombrants et de petits enfants…) de subsister.



Grinçant et cocasse à la fois, « Beaux seins, belles fesses » est un roman satirique d’une grande richesse. Malgré sa taille impressionnante et parfois quelques longueurs, il se lit très facilement et s’avère un excellent moyen de découvrir plaisamment l’Histoire de la Chine contemporaine.

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Beaux seins, belles fesses : Les enfants de..

C'est d'emblée une plongée dans une réalité dense, crue, épaisse, celle d'un patelin de bouseux, le canton du Nord-est de Gaomi, au moment de l'arrivée des troupes d'invasion japonaises. Accident très épiphénoménal à  l'échelle de la réalité de la bourgade. On devine l'existence d'un domaine seigneurial, celui de la famille Sima, on découvre la famille des sept sœurs Shangguan (le coeur du sujet), l'étrange bande des cind frères muets, des terreurs de village avec leurs cinq chiens noirs.

La famille Shangguan, dominée par de fortes femmes, ne vit pourtant que dans l'attente du fils, qui finit par arriver, par un accouchement aussi difficile (et simultané ) que celui de la petite ânesse fecondée par un trop grand mulet.  Le tout sur fond d'invasion japonaise et de manoeuvres de résistance aussi brouillonnes que dantesques et inefficaces. 

Bref, le fils naît enfin et endosse, dès le sein de sa mère, le rôle de mâle dominant mais aussi celui de témoin et narrateur d'une histoire puissante, odorante, brute et légèrement délirante  où il est aussi bien question d'hommes, de femmes ou de bêtes que de sexe, de violence, de nature ou de tradition. Quoiqu'il raconte, Mo Yan est intense : que ce soit la narration d'un quotidien dur aux hommes comme aux femmes, le récit d'une invasion fulgurante, quasi fantasmatique, les scènes dantesques d'accouchement, un enterrement hallucinant, la description de la campagne ou de l'hiver, le froid, la faim, et même, au sein de cette crudité, la profondeur, et même une certaine douceur, du lien familial... Tout est d'anthologie.

C'est captivant, et je n'en suis qu'à la page 148, quand Sima Ku (de la lignée des dominants) décide de saboter  le pont ferroviaire utilisé par les Japonais. Son ancêtre avait déjà essayé de résister à l'époque de sa construction par les Allemands (évocation de la Révolte des Boxers, merci Wikipedia, mais loin des manuels pédagogiques, Mo Yan  raconte l'histoire à l'échelle des bouseux du patelin : une improbable guerre de la merde et de l'urine doit venir à bout des Allemands, vu qu'ils sont intolérants à la saleté...)

Et c'est ainsi, sur un mode romanesque souvent drolatique, qu'on glane un tas d'informations sur la culture, l'histoire, les moeurs chinoises... en même temps que se construit une fresque historique et familiale. Mais je n'en suis qu'au chapitre 14 (sur 63)
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Lire "Beaux seins, belles fesses" c'est faire montre de patience et de persévérance (894 pages) mais c'est surtout vivre une aventure épique, quasi picaresque qui traverse le 20ème siècle chinois. Quel roman !



Comme souvent avec Mo Yan on voit la grande histoire (invasion japonaise, la révolution, le communisme, le capitalisme ...) à travers la toute petite, celle de ceux qui vivent modestement dans un village où les traditions paysannes sont bien marquées. Ici la famille Shangguan.



Shangguan Lushi est le désespoir de sa belle-mère car elle ne met au monde que des filles. Ce n'est qu'à son huitième accouchement que viendra enfin le soulagement en la personne de Jintong.



Jintong voue une adoration pour le sein maternel et cette adoration deviendra une dévotion puis une obsession. Les seins seront le fanal qui éclairera toute sa vie. C'est le fil conducteur du récit.



Ainsi, peu à peu, le roman, entremêlant les personnages issus des diverses familles du village, se déploie sous un angle plus léger, plus érotique mais surtout avec beaucoup d'humour dû à des situations cocasses qui frôlent l'absurde.



Dans un style très abordable (merci aux traducteurs) Mo Yan nous brosse un tableau sans concession de la Chine rurale au vingtième siècle et nous fait prendre conscience de la rapidité des changements qui ont secoué ce monde qui paraissait immobile pour en faire aujourd'hui la puissance mondiale que l'on sait.
Lien : http://animallecteur.canalbl..
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Lecture marquante qui couvre 100 ans de l'Histoire chinoise moderne, de l'Impérialisme à un retour d'une certaine forme de capitalisme. Très éclairant.
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Shangguan Jintong est le personnage principal de ce roman. Il est le dernier né des 9 enfants de Shangguan Lushi. Avec sa soeur jumelle,aveugle, Yunu, ils sont les bâtards nés d'un amour incestueux avec un pasteur suédois.

J'ai trouvé cette histoire extraordinaire : une gigantesque famille et leurs déboires de toutes sortes... Il y a un coté un peu fantastique au roman, un peu surréaliste qui n'enlève le coté tragique du roman.

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Mo Yan nous propose de suivre la destinée de Jintong - Enfant d’Or - et de sa grande famille. Meurtris par l’histoire de la Chine - traversée de part en part par les guerres et les changements de pouvoir, de gouvernement, et de hiérarchie sociale - la tribu des « Shagguan » doit lutter pour survivre, garder sa dignité et protéger le seul descendant mâle : notre fameux héro.



Héro, vraiment ? Nous connaissions déjà les « Anti-Héros » à l’Européenne tel Bel-Ami ou Hernani, mais ceux-ci gardaient un certains charme ou une fougue suffisante pour se faire aimer du lecteur.



Jintong est un « obsédé surdoué », qui profite bien souvent de la force ou de la puissance de son entourage.

Et Mo Yan parvient à me faire détester son personnage principal ! Entouré de figures emblématiques, merveilleuses, fortes, énigmatiques… Ce bâtard maigrichon est la seule ombre au tableau, pourtant somptueux, d’une Chine en pleine mutation.



L’écriture est subtile, empreint de la culture asiatique de l’auteur, qui, par ailleurs réussit à nous transmettre sa vision de son pays, mais aussi son recul par rapport à la civilisation dans la quelle il a grandi.

Au fil de l’ouvrage, on comprend à quel point la politique d’un pays peut influencer le quotidien de ses habitants. Combien il est important, pour survivre, d’être « du bon côtés » de ma puissance. Combien il est important, pour lutter, d’être assez nombreux « de l’autre côté » du pouvoir. Et surtout, combien il est important de comprendre que la puissance et le pouvoir peuvent être renversés facilement et remettre en question toutes les prises de position antérieures.
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Beaux seins, belles fesses : Les enfants de..

Ce roman raconte l’histoire de la famille Shangguan, et plus exactement, celui de Lushi, mère de famille pauvre, mariée au forgeron du village de Gaomi, ainsi que de sa descendance, ses 8 filles et son unique garçon, Jintong.



A travers les changements politiques qui se sont opérés de 1900 à l’an 2000, les destins de cette famille se croisent, changent, évoluent au grès des pouvoirs politiques en place. Suivant le mariage des filles, c’est soit l’opulence, soit la plus grande pauvreté. On découvre également l’évolution de la Chine, les changements qui s’opèrent, pas toujours pour le mieux de la population.



Dans ce livre est décrit la répression, les guerres, la famine - Lushi devra même vendre une de ses filles, et une autre se vendra à une maquerelle afin d’obtenir de l’argent qu’elle remettra à sa mère afin de permettre à sa famille de survivre - les tortures, la corruption à tous les étages de ceux qui ont le pouvoir, de la jalousie.



Jintong est le narrateur de ce livre. C’est un garçon pleutre et peureux. Il ne sera sevré qu’à l’âge de 7 ans. Il n’a d’autre intérêt dans la vie que de s’accrocher aux seins des femmes. Sa mère ne pourra pas compter sur lui. Il sera placé dans un camp pendant 15 ans. On en sait très peu sur la vie de Jintong durant ces quinze ans. Dommage.



Mon Yan donne un très beau portrait de la femme tout au long de ce livre. Je me demande comment Lushi a-t-elle pu survivre après tous les maux qui lui sont tombés sur la tête au cours de sa vie, et cela commence dès son enfance. Elle n’aura pas de répit.



Je suis contente d’avoir fini le livre. On suit facilement l’histoire, mais il ne m’a pas enthousiasmé, trop de violence, de guerre, d’atrocité tout au long de ce roman. Il n’y a pas de pause. Comment des êtres humains ont-ils pu vivre tous les changements qui sont intervenus en Chine et s’en sortir ? C’est vrai que beaucoup sont restés sur le carreau…

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Beaux seins, belles fesses : Les enfants de..

De Mo Yan, prix Nobel de littérature en 2012, je n'ai pour l'instant lu qu'un seul roman, Beaux seins, belles fesses : Les enfants de la famille Shangguan.

Ne vous méprenez pas sur le titre, ce n'est pas un récit érotique, mais une vaste fresque historique, familiale et sociale chinoise qui s'étend sur le XXème siècle.

La guerre, la barbarie, l'effroi et la mort traversent ces près de neuf cents pages comme elle a traversé la vie de cette région de Chine, de la province du Shandong et ce canton rural de Dalan où vit la famille Shangguan.

Ce roman raconte l'histoire de cette famille, avec en son coeur la figure de la mère, Shangguan Lushi, magnifique portrait de femme, humble et généreuse, qui donne naissance à neuf enfants dont un seul garçon, Jintong.

En compagnie de cette famille vaste comme le roman, nous nous apprêtons à visiter un pan de l'Histoire de la Chine contemporaine, au travers de sa ruralité, de ses joies, de ses malheurs.

Ce coin tranquille et rural de Chine aura donc connu tous les affres du monde, comme d'autres territoires de Chine, comme d'autres territoires du monde : l'invasion allemande puis japonaise durant la seconde guerre mondiale, la guerre civile entre combattants communistes et partisans du Guomindang (le parti populaire national), le « Grand Bond » en avant qui porte mal son nom sauf à décrire une situation à l'arête d'un précipice, la révolution culturelle, les différentes réformes économiques qui n'ont fait qu'aggraver les malheurs du peuple chinois... La fondation de la République Populaire de Chine s'est établie sur la cruauté, la répression et le sang, sur des principes bien éloignés des belles idéologies de départ, et c'est à ce seul prix que le pouvoir en place s'est maintenu jusqu'à présent. J'imagine que ce prix Nobel de littérature a dû être accueilli avec ferveur par le gouvernement chinois.

Le héros de ce roman, - si on peut le désigner ainsi, ou plutôt appelons-le donc anti-héros, est Jintong, neuvième et dernier enfant d'une fratrie qui comprend huit soeurs.

Forcément, quand on naît dans une fratrie de huit soeurs qui l'ont précédé, le garçon tant attendu devient l'enfant prodige, le roi, l'arrogant. Certes Jintong est un être actif, qui ne sait plus à quels seins se vouer, un enfant têtu et en tétée, cela n'en fait pas pour autant un être courageux. Au grand dam de sa famille : il est pleutre, geignard, paresseux, grotesque, obsédé, dépourvu de volonté et d'intelligence, sa seule religion ce sont les seins.

C'est l'histoire de l'impossible sevrage de Jintong qui continue de téter à un âge avancé, autant pour le sien que pour celui de sa pauvre mère...

Il ne fera pas grand-chose parmi les malheurs du monde, des siens, des paysans de là-bas, de leurs enfants... Ces derniers pourront davantage compter sur les soeurs de la famille Shangguan, leurs beaux seins, leurs belles fesses...

Éloge de la sororité au sens propre du terme, dans ce roman les soeurs sont des personnages toutes magnifiques.

C'est un hommage aussi aux laissés-pour-compte de la Chine passée et contemporaine. Un tableau au vitriol.

J'ai été emporté par ce roman ample qui se lit facilement, touché par son lyrisme, sa force, son humanité.

Je fais partie d'une génération sacrifiée, celle qui n'a connu que le biberon, le sein maternel ne fut qu'un concept vague pour moi, une vue de l'esprit, je suis le dernier d'une fratrie de cinq enfants qui n'aura pas connu ce privilège... Ce dernier propos personnel ne doit en aucun cas vous influencer dans cette future lecture ni justifier mon ressentiment contre cet anti-héros pleutre et grotesque que fut cet enfant prodige nommé Jintong. Tout le reste est beau et grandiose.

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Beaux seins, belles fesses : Les enfants de..

Shangguan Jintong naît après 8 filles, il a été un garçon très attendu par sa mère mais qui se révèle en grandissant faible et lâche contrairement à ses soeurs. Il a une particularité, il voue un amour obsessionnel pour le sein des femmes et ce, depuis qu’il est bébé ce qui d’ailleurs lui vaudra quelques mésaventures.

Je découvre donc sa vie et celle de sa famille dans une Chine paysanne et pauvre des années 1930 aux années 1990. Avec l’invasion japonaise, le maoïsme puis le néo-capitaliste, j’ai assisté à une leçon d’histoire assez intéressante ma foi.

Mais pour le reste quelle lecture laborieuse voire ennuyeuse car répétitive ! Je n’ai pas pris de plaisir à suivre la vie de Shangguan Jintong, il est tellement passif de sa vie. Mais surtout beaucoup trop de violence, d’injures, et de morts jalonnent ce roman. Par contre par moment, il devient un bel hymne à la femme, forte et courageuse.

Car oui, j’ai apprécié (surtout) le personnage de Shangguan Lushi, la mère de Shangguan Jintong qui fait face contre vents et marées pour élever et protéger ses enfants et ses petits-enfants. Les derniers chapitres sont consacrés à sa jeunesse et j’ai aimé en découvrir davantage sur les anciennes traditions chinoises comme par exemple les pieds bandés. Un enfer cette coutume !

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