Citations de Nathan Hill (180)
Quand vous comprenez tout à coup que non seulement la vie que vous vivez n'est pas du tout celle que vous vouliez vivre mais qu'en plus vous avez le sentiment d'être agressé et puni par la vie que vous avez.
Le baromètre de la santé du pays semblait réglé sur l'opinion des hommes d'âge mur quant au comportement des étudiantes.
Ce genre de trucs n'arriverait jamais dans un jeu vidéo, dit-il. D'être pris par surprise, comme ça. Dans un jeu, on t'envoie un message tout de suite. Dans un jeu, t'as un signal sonore, un petit bonhomme triste serait apparu pour m'alerter chaque fois que je perdais des points et glissais vers le divorce. Du coup, j'aurais pu m'excuser immédiatement et ne jamais recommencer.
Elle est un corps rencontrant un autre corps. Son corps à lui est chaud, sa peau pressée contre la sienne, salée, dégageant une odeur d'ammoniaque. A l'aube, elle retrouvera l'usage de son cerveau, mais pour le moment tout est simple - elle savoure. Son corps tout entier grand ouvert au monde, les sens en éveil.
C'était toute la différence entre l'amour qu'on donnait par devoir - pour suivre un mouvement politique - et l'amour qu'on donnait par sentiment. L'amour - le vrai, authentique et gratuit - engendrait toujours plus d'amour. L'amour, donné librement, se dédoublait, se démultipliait sans cesse.
Classique pour des gamins qui avaient tous les deux ingurgité des heures de porno sur Internet et qui ne faisaient que reproduire des scènes devenues normales pour eux, banales mêmes.
C'était une réalité nouvelle.Peut-être sa mère s'était elle fait cette m^me réflexion. Si facile de partir. Qu'est-ce qui retenait les gens dans leur orbite quotidienne ? Rien, comprenait-il à présent, pour la première fois. Il n'y avait rien qui empêche qui que ce soit de décider, un jour, de disparaître.
A chaque article, elle poussait un Oh ! de surprise, l'examinait, le retournait dans sa main, lisait l'emballage et disait : "Je me demande qui a pu concevoir un truc pareil ? " Elle se méfiait de ce genre de choses, soupçonnait que quelqu'un les avait créées dans le but unique de susciter un besoin chez elle, ou bien que quelqu’un avait décelé en elle un besoin dont elle-même ignorait l'existence.
Ils s'énervent donc, beuglent, font des gestes obscènes, collent au pare-chocs devant eux. De sorte qu'il n'y ait plus le moindre centimètre pour les tricheurs.Ni pour personne. Samuel fait comme tout le monde, avec le sentiment que s'il laissait passer qui que ce soit devant lui, il trahirait tous ceux qui attendent derrière lui.
Cette publicité ne fait que mettre des mots sur une angoisse existentielle intense que chacun soupçonne sans l'admettre : le consumérisme est voué à l'échec, et, quelles que soient les sommes dépensées, il est inutile d'espérer y trouver le moins sens. Le grand défi pour les gens comme moi, c'est de convaincre des gens comme toi que le problème ne vient pas du système. Le problème, ce n'est pas que l'encas te laisse sur ta faim, c'est que tu n'as pas encore trouvé le bon encas. Le problème, ce n'est pas qu'en fait la télévision est un piètre substitut aux relations humaines, c'est que tu n'as pas encore trouvé la bonne émission. Le problème, ce n'est pas que la politique est une impasse totale, c'est que tu n'as pas encore trouvé le bon politicien. C'est ça que dit cette publicité. Je te le jure, c'est comme de jouer au poker contre quelqu'un qui montre ses cartes et continue de bluffer quand même.
Ce qui se passe, c'est que le gaz lacrymogène se répand, que les flics sont furieux, il s'engouffre dans l'ouverture du bar, déboulent du hall d'entrée car ce qui était censé ne jamais arriver à Chicago vient précisément de se produire : les délégués et les manifestants sont, ensemble, dans la même pièce.
Leurs ordres à cet écart étaient pourtant très clair : les délégués devaient être pris en charge à l'aéroport, dès qu'ils mettaient un pied hors de l'avion, emmenés au Hilton, puis déplacés dans d'énormes bus et escortés jusqu'à l'amphithéâtre raccompagnés de la même manière - protégés, sous cloche, totalement séparés des hippies car les hippies représentent un danger et une menace pour notre démocratie ainsi que l'a expliqué le maire à longueur de déclaration à la télévision. (En réponse à ses déclarations, les leaders du mouvement ont rétorqué qu'une démocratie cessait d'être une démocratie lorsque ces représentants avaient besoin de se protéger du peuple qu'ils étaient censés représenter, réponse restée en grande partie inaudible et bien entendu jamais reprise par le maire ou son service de presse).
Pourtant, pour chaque image montrant un de ces gamins se faisant matraquer, CBS reçoit 10 coups de fil en faveur du type qui tient la matraque. Les reporters se font gazer dans la rue, et quand ils reviennent à leur rédaction, ils trouvent un télégramme envoyé depuis l'autre bout du pays disant que les reporters n'ont rien compris à ce qui se passe à Chicago. Lorsqu'il a entendu cela le vieux Cronkite a su qu'il avait échoué. Ils avaient tellement montré les extrémistes et les hippies que les téléspectateurs ne voyaient plus au-delà. La zone grise avait cessé d'exister. Et le vieux Cronkite en tirait deux conclusions. D'abord, que quiconque pense que la télévision puisse être capable de rassembler une nation et d'ouvrir un véritable espace de dialogue pour que les gens se comprennent et aient de la compassion, celui-là est dans l'illusion totale. Ensuite, que Nixon va gagner.
[...] c'était là un autre des pièges neurobiologiques d'Elfscape : plus il jouait à Elfscape, moins son cerveau était capable d'envisager autre chose que des objectifs à court terme, c'est-à-dire les objectifs d'Elfscape - le jeu était conçu pour récompenser les joueurs toutes les une ou deux heures avec un nouveau butin ou un nouveau passage de niveau, accompagné par une fanfare et des feux d'artifice -, et plus il s'habituait à ce type d'objectifs, insidieux, petits, proches, plus les objectifs à long terme, requérant un minimum d'anticipation, de discipline et de persévérance intellectuelle (comme écrire un roman ou suivre un régime) semblaient littéralement insondables pour le cerveau, [...]
Mais à chaque fois qu'il lui prenait l'envie d'écouter en classe et de faire le travail elle-même, de vraiment réviser ses cours, rédiger ses devoirs, elle était tétanisée : et si elle en était incapable ? Et si elle n'était pas assez bonne ? Pas assez intelligente ? Si elle échouait ? Elle craignait qu'une Laura dépourvue de ses manigances et doubles jeux ne soit pas l'étudiante excellente qu'elle et sa mère pensaient qu'elle était.
- Face aux calamités d'envergure nationale et à l'anéantissement manifeste de leurs perspectives personnelles, les gens ont généralement deux options. Il y a toute une littérature sur ce sujet. Soit ils deviennent des parangons de moralité, perpétuellement indignés et surinformés, auquel cas ils se mettent alors à poster de long laïus libertaires sur iFeel ou autre, soit ils sombrent dans une sorte d'ignorance confortable, auquel le spectacle de Molly Miller faisant réchauffer une sauce marinara dans une casserole constitue le summum du divertissement.
- L'Iowa. je ne vois même pas à quoi ça ressemble.
- Pense friche industrielle. Fermes vendues aux enchères. Champs de maïs hérissés de pancartes Monsanto. je suis justement en train d'en dépasser un.
- Tu t'es retrouvé dans la même pièce qu'elle, tu as vaillamment surmonté des années de ressentiment et elle s'est ouverte à toi comme elle ne l'avait jamais fait avec personne avant, elle a déversé le drame de sa vie, qui, au terme de deux cent cinquante pages faciles à lire, se termine par un happy-end idéal. C'est bien ça ?
La vallée du Mississippi, bien qu'étant l'une des plus contaminées par les produits chimiques du pays, avait toujours l'air aussi verte et luxuriante. Sur presque chaque façade de chaque maison des villes qui longeaient la rivière, flottait un drapeau. L'ancestral patriotisme n'avait pas été diminué par deux cruelles décennies de délocalisation des emplois et d'effondrement industriel. Certes, le centre de gravité de la ville avait dérivé du quartier pittoresque d'origine vers le nouveau grand Walmart, mais personne n'avait l'air de s'en offusquer. Le parking de Walmart, en constante effervescence, ne désemplissait jamais.
Pourquoi donc les adultes éprouvaient-ils le besoin de mettre des choses si inconfortables pour profiter des moments importants ?
"Je suis davantage partisan d'un travail de synergie multi-supports entre les plateformes communicantes, poursuit Perywinkle. La société pour laquelle je travaillais a été absorbée par un autre éditeur depuis un bon moment déjà, qui lui-même a été absorbé à son tour par un plus grand groupe, etc. Comme le bonhomme Pacman. Aujourd'hui nous appartenons à un conglomérat multinational qui possède des actions dans l'édition, la télévision câblée, la radio, l'industrie musicale, les médias, la production cinématographique, les cabinets de conseil politique, la gestion d'image, les relations publiques, la publicité, les magazines, l'imprimerie et les droitt. Et le transport aussi, il me semble. Quelque part au milieu de tout ça."