S’il y a bien une chose que je déteste, ce sont les parents mal élevés. Eh bien, pas de chance, j’ai récolté la pire paire imaginable.
Sarah entend le mistral tordre la maison.
Très belle langue, une histoire magnifique qui permet d'aborder la guerre de 14 sous un angle original. La guerre est terminée, Léon, dont le père n'est pas rentré, vit chichement avec sa mère en bord de mer, non loin de Saint-Clément-des-baleines sur l'île de Ré. Au lendemain d'une terrible tempête, il trouve sur la plage le corps d'un homme noir. Avec l'aide de sa mère, ils parviennent à le ramener chez eux et à le soigner. Vraisemblablement, Tierno, dont c'est le nom, est un rescapé du naufrage du navire l'Afrique.
En retrouvant ses souvenirs, Tierno, le tirailleurs sénegalais, donne accès au monde caché de la guerre à Léon. Lui qui est surprotégé par sa mère, trouve en ces mots éprouvants la clé de son émancipation.
C'est un roman très bien construit, sans aucune faiblesse, écrit dans une très belle langue avec beaucoup de délicatesse pour dire les émotions, évoquer des sensations. Véritablement passionnant, ce roman est un coup de coeur et comme en plus il a pour ultime avantage de faire surgir du néant un épisode oublié de l'histoire (le dramatique naufrage d'un navire avec à son bord des centaines de tirailleurs sénégalais qui rentraient chez eux après avoir survécu à la boucherie des tranchées), ce livre est à recommander au plus grand nombre, jeunes ou adultes.
Plus ou moins vite, selon les ans, le printemps est revenu.
Et, à la fin de chaque été, j'ai semé à tous vents.
Des soldats blancs leur distribuent des vêtements et hurlent quand ils ne se tiennent pas en rang. Tierno n'a jamais entendu hurler comme ça, tout le temps, pour rien, mais apprendra bientôt que les hommes blancs s'expriment ainsi.
( p 92 )
J'avais envie de jeter un dernier regard à ce pays où j'étais venu faire la guerre avec des inconnus contre des inconnus.
C'est comme un corps d'homme mais la peau est totalement noire. De ses vêtements, il ne reste que des lambeaux déchirés. Je remarque la peau blanche sous les pieds. Je m'agenouille à côté du corps immobile. Si c'est un homme, il semble bien mort. Je m'approche de son visage.
Ils dorment peu, on les réveille à l'aube, ils doivent s'habiller avec leurs nouveaux uniformes et se mettre au garde à vous, puis enchaîner les exercices censés les préparer à la guerre. Pour l'instant, ils n'ont pas de fusil, on leur a donné des bâtons pour faire semblant. C'est le désordre. Les blancs crient beaucoup parce que personne ne parvient à suivre le rythme, à rester bien droit, à tourner à gauche quand il faut tourner à gauche.
( p 92)
Souvent, bien campé sur mes racines, j'ai regardé passer ceux qui partaient pour d'aériens voyages
L'été s'acheva et l'école reprit. Nous devions chanter pour le maréchal Pétain en nous tenant bien droit à côté de nos pupitres. Naturellement je n'y parvenais pas, mes jambes me dérangeaient, mes mains refusaient de rester collées contre mes cuisses mes cheveux se rebellaient et je me faisais régulièrement reprendre par madame Lair.
(p. 127)