AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Paule Constant (103)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


C'est fort la France !

À partir d’une idée originale, Paule Constant a réussi un superbe roman qui met en lumière une époque un peu trop vite oubliée : celle des colonisations de l’Afrique. Au passage, je dois avouer, à ma grande confusion, que je découvre une autrice remarquable, membre du jury du Prix Goncourt et Prix Goncourt elle-même en 1998 avec Confidence pour confidence. Remarquable et confirmée, Paule Constant a déjà publié treize romans et C’est fort la France ! était son onzième.



Pour rafraîchir notre mémoire à propos de la colonisation, sa narratrice, Brigitte – on apprend son prénom dans les dernières pages – est écrivaine et a publié Ouregano, un roman où elle raconte son enfance à Batouri, au Cameroun, loin de Yaoundé, la capitale. Je note que ce titre est celui du premier roman de Paule Constant publié chez Gallimard, en 1980. Malgré ce détail troublant, ce qu’elle raconte n’a rien d’autobiographique.

Malgré tout, elle part de ce premier roman pour faire vivre ses personnages, ceux qui représentent la France, jalousés en métropole mais dont personne ne voudrait prendre la place. Une lectrice, furieuse de constater que son rôle, dans le livre, ne correspond pas à ce qu’elle a vécu, écrit à l’autrice et les deux personnes fictives se rencontrent, à Paris, dans une chambre de bonne, au sixième étage d’un immeuble où Mme Dubois finit sa vie, bien modestement.

Ainsi, Paule Constant m’a plongé au cœur de la vie quotidienne d’une dame qui prend très au sérieux son rôle de représentante de la France. Son mari est l’Administrateur, elle est donc la première dame de Batouri où une institutrice, un toubib et sa femme, les parents de Brigitte, Moïse N’Diop, le chirurgien, Bodin l’infirmier qui vaccine à qui mieux mieux contre la maladie du sommeil, Alexandrou le commerçant, Mme Tong qui fabrique des chaussures avec de vieux pneus et tient un bar dans la brousse, sont les principaux personnages auxquels je dois ajouter le Pasteur et sa femme qui commettent l’erreur de vouloir vivre comme les Africains, ce que les indigènes n’acceptent pas. Une léproserie et un orphelinat tenu par des sœurs complètent un village éclaté sur quatre collines.

Mme Dubois est restée là-bas une vingtaine d’années, revenant en vacances en France tous les quatre ans mais, dans sa Normandie natale, elle est mal reçue. À Batouri, son fidèle Djébé, son factotum, est indispensable, comme tous les boys aux rôles très précis.

C’est justement le fameux Djébé qui s’écrie « C’est fort la France ! » lorsque les époux Dubois tentent de lui décrire une vache. Comme dans tout le roman, les détails fourmillent, les anecdotes savoureuses et les événements dramatiques aussi. Je trouve ce livre important parce qu’il rappelle une époque pas si lointaine où nous autres Occidentaux pensions être tellement supérieurs, tellement civilisés, que nous tentions d’imposer notre présence dans ces pays nous fournissant beaucoup de ressources. Les frontières tracées artificiellement par les Européens, les territoires convoités par Allemands, Anglais, Belges ou Français, nous causions beaucoup de dégâts dont nous constatons toujours aujourd’hui les conséquences.



C’est fort la France ! Pas si sûr mais c’est ce que nous croyons depuis longtemps, une domination pas vraiment terminée comme en atteste régulièrement l’actualité. Ces hommes, ces femmes qui se dévouaient au péril de leur santé et de leur vie pour tenter d’améliorer le quotidien des Africains ne doivent pas être méprisés, oubliés et, à sa manière, Paule Constant leur rend un hommage intéressant dans ce roman.
Lien : http://notre-jardin-des-livr..
Commenter  J’apprécie          890
La cécité des rivières

Le grand Eric Roman, Prix Nobel de Médecine pour ses travaux sur l'onchocercose, une maladie parasitaire aussi appelée cécité des rivières, s’est laissé convaincre, à l’occasion d’une tournée présidentielle en Afrique, de revenir sur les lieux de son enfance, à la frontière entre Cameroun et Centrafrique, pour s’y prêter à un reportage réalisé pour Grand Magazine par Irène, une jeune journaliste, et Ben Ritter, un photographe de renom.





Le voyage, qui ne doit durer que deux jours et deux nuits, a pour destination Petit-Baboua, à peine une bourgade autrefois rassemblée autour d’un hôpital de brousse et d’une léproserie tenue par des religieuses belges. C’est là qu’entre douze et quinze ans, le scientifique aujourd’hui presque septuagénaire a vécu auprès de son père médecin-capitaine, ancien engagé des guerres coloniales : un homme traumatisé et violent qui lui a mené une vie si dure que l’adolescent avait sauté avec soulagement sur l’occasion de ses études pour revenir seul en France.





Si Ben Ritter est le parfait baroudeur sans chichis ni états d’âme, la jeune journaliste végane, pleine de clichés sur l’Afrique et son passé colonial, vit l’aventure avec d’autant plus de préventions que tout la heurte chez l’homme ambitieux et arrogant qu’elle voit en Eric, lui-même beaucoup plus à l’aise dans ses relations cordiales et viriles avec les autres membres de l’expédition que face à cette donzelle bien-pensante et volontiers critique. Pourtant, au fur et à mesure que leur imposant 4x4, escorté par quelques gendarmes en raison de troubles latents dans la région, s’enfonce dans la brousse par d’interminables pistes poussiéreuses, et qu’au gré d’hébergements de fortune, tous se retrouvent sur le même pied face à l’inconfort et aux imprévus, masques et a priori se fissurent peu à peu, laissant apparaître, parfois au détour de quelques mots seulement, les facettes d’une réalité autrement plus complexe que ne l’avait imaginée Irène.





C’est ainsi que, lui-même surpris par l’assaut douloureux des souvenirs, l’impressionnant Eric Roman finit par laisser deviner en lui le petit garçon désespéré et à jamais marqué, tant par la souffrance et la brutalité de son père, que par sa découverte sans ménagements de la terrible mortalité africaine - « pour deux générations chez nous il y en a quatre ici » -, entre lèpre, maladies tropicales, puis plus tard Ebola et sida. Du dévouement, souvent impuissant, du personnel de l’hôpital de brousse et des religieuses de la léproserie d’antan, au combat du chercheur sa vie durant, voilà peu à peu de quoi ébranler les jugements manichéens d’une jeune femme juchée sur les hauteurs diabolisantes d’un anticolonialisme vertueux.





Pudeur et art de la suggestion président dans ce récit où se superposent l’Afrique coloniale de la propre enfance de Paule Constant, fille de médecin militaire dans les anciennes colonies françaises, et celle d’aujourd’hui, polarisée entre rejet de la France, radicalismes islamistes et emprise économique chinoise. Un roman tout en nuances, porté par une écriture magnifique, à la saveur subtilement douce-amère.


Lien : https://leslecturesdecanneti..
Commenter  J’apprécie          835
Des chauves-souris, des singes et des hommes

Quel beau livre !

La quatrième de couverture commence ainsi : "Dans un village africain, une fillette heureuse cajole une chauve-souris. De jeunes garçons rapportent fièrement de la forêt le cadavre d'un beau singe au dos argenté."

Voilà : tout débute doucement, tranquillement. Tout est calme sous le soleil africain. Le décor est rapidement planté, les personnages sont présentés.

L'Afrique noire est belle, ses habitants sont pauvres et attachants. Les enfants jouent avec trois fois rien : "Olympe ne possédait ni lit, ni couverture, rien qu'une natte usée qu'elle ne retrouvait pas toujours. Elle n'avait pas de jouets, de ceux que l'on achète, mais elle en fabriquait beaucoup avec du fil de fer, du bois et des os."

Alors, quand les frères d'Olympe reviennent de la chasse avec un magnifique cadavre de singe, c'est en triomphe. Ils sont fiers, et il y a de quoi ! Un festin géant se prépare, les villageois et leurs voisins seront nourris pendant plusieurs jours. Une aubaine !

Et pourtant...

L'histoire se passe près du fleuve Ebola. Le lecteur sait le drame qui va se nouer. Il assiste impuissant à tout ce qui se passe. Il voudrait prévenir : "Non, ne mangez surtout pas !" Il voudrait avertir Olympe : "Laisse cette chauve-souris, ne la touche pas !"

C'est, pour moi, le tour de force de l'auteur : nous impliquer dans l'histoire, ne pas nous laisser spectateurs immobiles et muets.

La sorcellerie, l'animisme, les rituels, tiennent une place prépondérante dans le quotidien. Toutes sortes de croyances surprenantes donnent des couleurs à la vie, mais elles rendent la tâche difficile au personnel médical chargé de la prévention et du soin. C'est très beau, même si c'est assez désespérant.

Le sujet est grave, mais Paule Constant réussit à travers ses descriptions de la terre et de ses habitants à y mettre beaucoup de poésie, et même de l'humour. Son style est paradoxalement très léger, ce qui rend le contraste entre le fond et la forme d'autant plus saisissant.

Un roman sombre et lumineux à la fois, dont je recommande vivement la lecture.
Commenter  J’apprécie          450
Des chauves-souris, des singes et des hommes

C'est pas gai, c'est pas gai

Ils ont perdu leurs pirogues

En descendant l'Ebola

qui se perd dans le Madulé

oui mais encore ...

l'une s'appelait S'en fout la mort



Ah Docteur Désir qu'as-tu fais ?

Tu n'avais donc jamais

entendu cet air autrefois en vogue

Gare au Gorille ? Manque de pot

La plaie d'argent aura bon dos



Suite à la malédiction ...

bref : "Thomas vit, accrochés dans le mangrove, les pirogues des morts, brisées par les courants, qui paraissaient des ossements jetés en vrac sous les arbres. Sur les branches, des oiseaux de mer d'une blancheur étincelante formaient de gros bouquets éblouissants. Les arbres couverts d'oiseaux étaient, sur cette terre brûlante, sous le soleil de feu, comme enneigés. Thomas compris où allaient les morts" p.156



Je ne dévoile rien car la citation du chant III de l'enfer de Dante au début du bouquin ne laisse aucun doute sur la fin ... qui nous attend.



C'est l'histoire d'une petite fille rejetée par les grands, et rejetée par ses frères.

" Olympe pleurait. [...] Elle les suppliait : "Attendez-moi...", et elle entendait leurs rires" p.13

C'est l'histoire d'un village africain, une histoire de survie et de faim dans la Nature, tellement pleine de vie et par là-même remplie de morts. C'est une histoire faite de tellement d'histoires. De ces histoires qui peuplent l'Afrique, des histoires qui font la vie.



C'est aussi l'histoire d'Agrippine et de Virgile, c'est l'histoire des petites Soeurs et de primatologues. Pourquoi vont-ils tous en Afrique, où ils n'ont finalement rien à y faire ? Tous ces occidentaux qui tuent la vie pour ne pas mourir, ne voient-ils pas qu'il n'y aura pas de rencontre possible ? Je n'irai pas : trop peur dans le noir ! Tous ces bruits, toute cette vie ... Bzzz... Des moustiques ! Sssfff ... Des serpents ! Grrr... Des, ... des quoi ??? La vie ? Nooon, j'ai bien trop peur de mourir.



Sobre et très, très bien écrit. J'ai trouvé un grand intérêt à lire ce récit et sous cette construction de belle facture qui sait se faire oublier, qualité rare, suivre finalement de façon toute naturelle de multiples destins croisés. Suffisamment de poésie pour porter un beau regard sur ce qui m'est autrement très difficilement accessible. Un tout autre monde, riche de sa diversité.



Mon ressenti principal : trop repu, hélas, pour pouvoir communier très réellement. Ai-je vraiment entendu le mot faim ?
Commenter  J’apprécie          404
Des chauves-souris, des singes et des hommes

Malgré un palmarès honorable (Grand Prix du roman De l'Académie Française 1990, Prix Goncourt 1998), je ne connaissais pas Paule Constant, membre de l'Académie Goncourt depuis 2013. Je ne dois pas être la seule car une rapide recherche sur Babelio m'a montré que cette auteure n'avait qu'une petite trentaine de critiques à son actif. C'est lors d'une émission récente de la Grande Librairie que la verve et l'enthousiasme de François Busnel pour son dernier roman m'ont convaincue de découvrir "Des chauves-souris, des singes et des hommes". Aucun regret puisque ce livre au titre digne d'une fable de la Fontaine m'a totalement conquise.



Paule Constant nous entraine au Congo, au bord du fleuve Ebola, dans la tribu des Boutouls où Olympe, une fillette de sept ans trompe sa solitude en jouant avec une chauve-souris tombée d'un arbre. Au même moment, le groupe des garçons qui ne l'ont pas voulue dans leurs jeux, reviennent de la forêt avec le cadavre d'un gorille qu'ils disent avoir chassé et tué, un beau dos-argenté qui fera une excellente viande de brousse. Mais pourquoi après le gargantuesque repas, un mal mystérieux décime-t-il la tribu, en commençant par les petits frères d'Olympe ? Est-ce donc vrai qu'elle porte le mauvais oeil car elle a interrompu par sa naissance une longue lignée de garçons ? La sorcellerie réussira-t-elle a interrompre le sort ? D'autres personnages inattendus viendront croiser le chemin de la fillette, d'abord Agrippine, qui a fui sa vie en même temps que le confort européen pour se fondre dans une organisation humanitaire venue faire une campagne de vaccination. Médecin belge, elle va confronter ses idées à celle de Virgile, jeune sociologue et ethnologue à propos du réveil des maladies endémiques. La théorie va devenir rapidement réalité avec les rencontres, les contacts qu'ils soient entre humains ou avec les animaux et les échanges commerciaux.

Au passage, Paule Constant en profite pour évoquer l'intervention pas forcément glorieuse des "Blancs" sur le continent africain, qu'elle soit passée, principalement à travers l'époque coloniale, mais aussi actuelle avec la description d'une équipe de primatologues davantage préoccupée par la situation des gorilles que celle des populations locales. Je suis restée sous le charme de son écriture qui mêle, tel Baudelaire, la poésie et le macabre avec une élégance de "première de la classe", et cela dans la plus pure tradition du conte africain. Elle nous dépeint une Afrique vraie avec ses traditions, sa magie noire, opposée à une Europe qui agite le goupillon et le microscope, hésitant entre foi et science pour lutter contre les épidémies mais dont l'action des organisations humanitaires restent limitée par manque de moyens.

Le livre étant construit comme un véritable thriller, le responsable des morts successives n'apparait que dans la toute dernière phrase. Pourquoi alors lorsque l'auteure présente son roman dans une émission télévisée, aucun mystère n'est fait sur le sujet ? J'ai trouvé cela dommage, un peu comme si on dévoilait le coupable d'un roman policier lors de la campagne promotionnelle. Même si mon plaisir a été de ce fait un peu gâché, je ne peux qu'accorder un 20/20 à ce périple mortel.
Commenter  J’apprécie          342
Confidence pour confidence



Bonjour, aujourd’hui direction le Kansas, pour un huis clos entre nanas… En route !



Gloria Patter, universitaire noire, reçoit chez elle Aurore Amer une romancière française, Lola Dhol, une actrice norvégienne, Babette Cohen professeur d’origine pied-noir, suite à un colloque féministe…



Cette cohabitation va permettre à chacune de se poser quelques questions sur les choix de leur vie. Gloria qui fait passer son travail avant sa famille et dont la fille et le mari préfèrent vivre sous le toit de la grand-mère. Aurore Amer, qui n’a pas d’amer que le nom et qui a fui sa famille, Lola qui a été une actrice renommée mais qui n’a plus que sa bouteille pour spectatrice et Babette qui vient de se faire plaquer par son mec…



Chacune de ses femmes traîne des casseroles, certaines s’en rendent compte, d’autre non. Évidemment, il est plus facile de voir la brindille chez la voisine que la poutre chez soi… Cette journée va être l’occasion de faire un bilan, et il sera loin d’être positif ; car elles sont toutes les quatre désespérément seules.



Entre soutiens et coups bas, des dialogues parfois sympathiques parfois truffés de vacheries ; ces femmes vont faire le point et se dévoiler…



Bref, un huis clos qui oscille entre humour et sarcasmes, avec quatre femmes qui se débattent pour garder la tête hors de l’eau.



À lire assis(e) dans votre cuisine ou celle d’une amie, près de la cage d’un rat (en photo c’est bien aussi), en buvant un café noir accompagné d’un carré de chocolat (noir)… Bonne lecture !





Commenter  J’apprécie          306
Des chauves-souris, des singes et des hommes

Encöre une fois .. Merci à ma libraire ainsi qu'à la représentante de Gallimard pour m'avoir présenté ce livre.

Il est bien écrit , il se lit comme un conte ... Et pourtant a pour thème un sujet de santé publique ... La découverte du virus Ebola cette fièvre Hémorragique très contagieuse et mortelle.

Nous sommes au Congo , dans un petit village . Les garçons décident de partir chasser , fièrement, ils partent et ne veulent pas emmener la jeune Olympe , fillette qui dès le début est très attachante .... Elle va se trouver comme amies et activité les chauves souris ...

Les garçons rentreront avec un énorme Gorille qu'ils disent avoir tué .

Une odeur nauséabonde, de putréfaction envahi tout le village .

Le Chef confirmera que c'est de la viande de brousse .

Tous les villageois dégustèrent le repas.

Agrippine femme médecin en Afrique soigne les pathologies de la rivière Ebola arrive au dispensaire en pirogue.

Virgile quant à lui est sociologue et s'intéresse aux maladies endémiques.

Ils vont se retrouver ou des sœurs soignaient avec très peu de moyens, et dans la précarité la population .

Agrippine c'était apercue que les épidémies des singes précédaient celles des humains.

Les villageois tous malades , pris d'une fièvre hémorragique décédèrent .....conséquence de leur festin ... Le Gorille avait été trouvé mort et n'avait pas été tué.

Malgre tout , l'histoire est contée et en parallèle , le quotidien d'Olympe , de ses Chauves Souris nous fait passer un excellent moment .

Une thématique intéressante est également celle des croyances animistes des africains. Ils pensent qu'un sort leur a été jeté.

De même toute la hiérarchie du village avec le chef .... Qui a dit de manger l'animal !!

Je vous recommande ce livre , vous passerez un excellent moment .



Commenter  J’apprécie          300
Des chauves-souris, des singes et des hommes

Ebola. Un nom qui évoquera pour les mieux informés une fièvre hémorragique transmise du singe à l'homme. Mais pour la plus grande masse d'entre nous, qui n'est jamais qu'une éponge absorbant sans discernement le flot d'informations déversées en continu par nos médias, un fléau de plus menaçant la planète.



Mais combien savent qu'Ebola est une rivière du Congo qui se jette dans le fleuve Madulé ? Que cette rivière a donné son nom à une calamité annoncée à grand renfort de sentence définitive contre un auditoire assoiffé de sensationnel, à condition que cela n'entame pas son confort.

Paule Constant en fait le sujet de son dernier roman, Des chauves-souris, des singes et des hommes. Elle en profite pour renouveler, comme elle a eu l'occasion de le faire dans ses précédents ouvrages traitant de l'Afrique, cette condamnation douce qu'elle adresse aux nations ex-colonisatrices de ce continent. Douce parce que son caractère n'est pas à la harangue. Mais aussi parce que ça peut lui donner plus d'impact. Qui écoute désormais celui qui blâme dans le concert d'auto flagellation à la mode de la cacophonie médiatique ambiante ?



Une chose est sûre, Paule Constant connaît l'Afrique. Pas comme une touriste qui l'a traversée en 4x4 climatisé, appareil photo autour du cou. Son vocabulaire n'est pas ceux qu'on trouve dans les guides touristiques. La chicotte n'y figure pas. La chicotte, elle a marqué quelques peaux noires. Elle est restée dans le vocabulaire africain comme le symbole d'une menace brandie à qui oublie la discipline.



De ce continent, elle connaît aussi l'histoire. Elle en a retenu une amertume à peine voilée. Elle sait que les armoires à pharmacie sont restées vides au départ des colons. Et quand ces derniers réapparaissent sous couvert de quelque action humanitaire, le choc des civilisations est encore plus évident. La nantie expose son succès devant la démunie.



Difficile alors de faire comprendre dans ces conditions que des comportements peuvent avoir des conséquences désastreuses dans un pays où ignorance rime avec croyance, où pour toute médecine il ne reste que le désenvoûtement pratiqué par l'indigène auto proclamé sorcier, drapé dans la peau du gorille, celui-là même qui a apporté la maladie, et qui a bien compris le profit qu'il pourrait tirer de la détresse de ses congénères. En Afrique plus qu'ailleurs, demain n'existe pas.



Paule Constant dresse un tableau sans grand espoir de ces peuplades livrées à la fatalité comme en témoignent les noms qu'elles donnent à leurs pirogues : S'en fout la mort, la volonté de Dieu, Confiance l'Afrique.

Sans grand espoir non plus pour la nature quand son exploitation est la seule source de revenu, quitte à la piller pour survivre. C'est la fibre écologique de Paule Constant qui se fait entendre. Les accusations entendues, bien que non prononcées, ne s'adressent pas à ceux qui vendent, mais bien à ceux qui achètent.

Il faut voir dans cet ouvrage une mise en garde. Car la sentence définitive annoncée semble avoir été assortie d'un sursis. Gare à la récidive.



Une chose est sûre, je me suis laissé prendre au sortilège de cette écriture douce-amère qui parle de l'Afrique sans faux semblant, avec l'humanité tranquille de ceux qui ne baissent pas les bras devant l'immensité de la tâche.

Commenter  J’apprécie          290
Des chauves-souris, des singes et des hommes

Olympe est triste, elle est trop petite pour jouer avec les garçons. Ils disent qu’elle n’est qu’un bébé qui pleurniche tout le temps.

Alors, quand ils partent en expédition dans la forêt, sans elle, elle se prépare sa propre excursion, et recueille un bébé chauve-souris auquel elle s'attache immédiatement.

C’est une bien piètre trouvaille comparée au cadavre du grand singe ramené par les garçons. Il y a bien longtemps que les femmes n’ont eu autant de viande à cuisiner. De quoi nourrir le village et ses environs et qu’importe l’odeur pestilentielle dégagée par la bête !

Tout le monde se régale ou fait semblant, et c’est le début d’une tragédie. Le singe est mort du virus Ebola. La chauve-souris est un porteur sain du virus.

Un mal pernicieux se propage silencieusement au pied de la Montagne des nuages, et le long d’une rivière sur laquelle glisseront bientôt les pirogues funèbres.

La plupart l’ignorent superbement, d’autres en cherchent vainement l’explication dans la magie, la science ou la nature.



C’est avec poésie et humour que Paule Constant nous fait vivre ce conte déchirant de notre temps, dans un style dont la paradoxale légèreté parvient à nous faire partager tant de douloureuses péripéties.

L’écriture est belle, imagée, drôle parfois.

J’ai été pleinement conquise par cette lecture.





Commenter  J’apprécie          270
Confidence pour confidence

Ayant beaucoup apprécié le dernier roman de Paule Constant "Des chauves-souris, des singes et des hommes", j'ai voulu la découvrir davantage et je suis tombée par hasard sur "Confidence pour confidence", Goncourt 1998. Une fois de plus, cela confirme mon questionnement quant à l'attribution des prix littéraires car cette histoire confuse ne mérite pas à mes yeux une telle récompense.



A la suite d'un colloque féministe à Middleway dans le Kansas, quatre femmes se retrouvent chez l'une d'entre elles. Gloria, l'universitaire noire aux envies de plagiat, Aurore, l'écrivaine orpheline en mal d'Afrique, Lola, l'actrice alcoolique et égocentrique et enfin Babette, la professeur d'origine pied noir récemment abandonnée par son mari, toutes ont en apparence professionnellement bien réussi, chacune à leur façon. Et pourtant les voilà à l'aube de la cinquantaine, en train de dresser un triste bilan de leur vie d'où les hommes sont plus ou moins absents. Entre mesquineries et jalousie, entre tentatives de réconfort et engueulades, entre cris et larmes, elles vont se rendre compte qu'elles ne sont pas parvenu à faire abstraction de leurs blessures anciennes et qu'elles sont toutes à la recherche de leur identité réelle (ce sont toutes des expatriées).



Je n'ai pas réellement trouvé dans ce roman l'humour ravageur promis dans la quatrième de couverture, j'ai plutôt ressenti une nostalgie dramatique et pitoyable dans les paroles et les faits de ces femmes. Certains passages ont attiré mon attention (Gloria face au racisme, Babette revivant son expatriation) mais d'autres, frôlant la caricature (les secrétaires homosexuels) ou incongrus (la mort du rat) m'ont rebutée. Je n'ai absolument pas retrouvé dans cette satire du féminisme à laquelle je n'accorde qu'un 5/20, le charme de l'écriture de Paule Constant.
Commenter  J’apprécie          230
C'est fort la France !

Après la publication d'Ourégano, un roman où elle racontait son enfance dans un village africain, une romancière française reçoit plusieurs lettres d'une dame qui l'accuse d'avoir déformé la vérité des faits. Au fil des courriers, la romancière reconnait Madame Dubois, l'épouse de l'Administrateur de Batouri, le village camerounais de son enfance. Elle décide d'aller à la rencontre de cette femme, désormais très âgée, revenue en France après toute une vie dans les colonies françaises en Afrique, et qui, dans les années 50, régentait la vie du village au nom du prestige de la France. Ensemble, elles vont confronter leurs souvenirs, leurs visions d'une Afrique qui n'existe plus que dans la mémoire de ceux qui ont connu le temps des colonies.





Batouri, c'est le Cameroun, la brousse, la poussière rouge, la chaleur accablante, la mouche tsé-tsé...C'est aussi un hôpital, une léproserie, un orphelinat et la belle maison de l'administrateur. Dans ce petit poste français, deux visions s'affrontent, celle de Madame Dubois au service de la France et celle des parents de la narratrice, présents dans un but humanitaire (le père est médecin). Si les deux se regardent avec méfiance et condescendance, elles ont pourtant en commun d'avoir transposé un petit bout de France en Afrique et d'être sûres de leurs bons droits. Si a priori on rit ou l'on s'offusque des pratiques de l'épouse de l'Administrateur qui sort l'argenterie à chaque repas, qui reçoit pour le thé chapeautée comme la reine d'Angleterre, qui organise une crèche de Noël dans la brousse, qui vante la supériorité de la France auprès de ses boys, on oublie vite le ridicule pour éprouver de la tendresse à l'égard d'une femme qui a quitté sa Normandie natale à 18 ans à peine et qui tente par tous les moyens de maintenir le fil de plus en plus ténu qui la relie à sa patrie. Etrangère en terre africaine, elle le devient aussi dans son propre pays où les membres de sa famille envient une vie qu'ils croient privilégiée et rejettent celle qui vit trop loin pour créer des liens. Réfugiée dans une vision fantasmée d'une France parée de toutes les qualités, elle a trouvé ce seul moyen pour vivre au mieux dans un endroit très différent de tout ce qu'elle a connu. Infâme colonialiste Madame Dubois? Amoureuse de l'Afrique sans se l'avouer, elle a peut-être moins à se reprocher que ceux qui ont mené des campagnes de vaccination forcée dévastatrices, que ceux qui se sont attirés la foudre des populations locales en chassant sur des terres sacrées...

Avec beaucoup de tendresse, d'empathie et un humour pince-sans-rire assez jubilatoire, Paule CONSTANT raconte une Afrique d'un autre temps, très critiquée après la décolonisation, mais qui était la norme de l'époque. Loufoque et grave à la fois, son roman est un très bon moment de lecture.
Commenter  J’apprécie          231
Des chauves-souris, des singes et des hommes



Paule Constant revenant sur le drame d'Ebola, écrit un récit qui tente d'exprimer les causes de ce drame venu d'un village africain du Congo, qualifié par certains d'un tsunami sanitaire, une épidémie vertigineuse appelée fièvre hémorragique avant de s'appeler Ebola pour la presse du monde entier.



On frémit quand Paule Constant rend compte des conditions dans lesquelles les vaccins arrivent à l'ONG d'Agrippine, blocage à la douane, restitution tardive des vaccins sans respect de la chaîne du froid , acheminement via le fleuve Ebola, sur des embarcations fragiles, pour qu'enfin les doses arrivent à destination. Agrippine découvre alors qu'il n'existe pas tout le matériel stérilisé nécessaire, pas de seringues.



Seul le découragement fait échos à ses efforts.



« Les chants désespérés sont les chants les plus beaux », le livre est ce chant, qui commence dans les bras d'Olympe, petite fille congolaise ( de Boende ) interdite de chasse, elle suivra un autre sentier et trouvera une chauve-souris et la bercera, comme une revanche, et nous franchissons dans l'insouciance la dixième page.



Puis les enfants apporteront le grand singe de la montagne des nuages, Îlot encore préservé entre les champs d'hévéas. Puis les premiers morts inexpliqués surgiront, de la nuit dans ce village où l'on ne parle que le boutoul, qu'aucune lampe ne vient éclairer la nuit, ni aucune parole contester la parole du chef, pour lequel une malédiction est à l’œuvre.



Olympe est une fille, dans ce village qui manque de garçons, et cet animal , une chauve-souris la voilà la malédiction. Battue et rejetée elle sera recueillie par Agrippine, Olympe tombera malade.



Les primatologues en mission, singeront une mauvaise caricature de ce qu'il ne faut pas faire, une mascarade face à des hommes démunis, ils ne feront pas ce qui aurait pu limiter l'extension de la maladie, ils feront ce qu'il fallait faire pour démultiplier l'épidémie, donner à boire sans penser hygiène et se contaminer par suffisance et incompétence.





Faut-il laisser des docteurs Désir enfumer des hommes, et les pousser à s’offrir des séances de désenvoûtement, devant une peau de grand singe contaminée, si grande quelle suscite admiration, et pour le bon docteur Désir de quoi gagner beaucoup, bien plus qu'en vendant des objets de pacotille.



Paule Constant aura su aller au bout de son indignation. Demain ce continent exigera d'autres moyens que ceux de lambaréné, il faudra d'autres réflexes, d'autre Docteurs Virgile et de nouvelles Agrippine, il faudra combattre les croyances ancestrales et enseigner la médecine d'aujourd'hui, un sacré gap encore à franchir.



Le travail d'investigation est remarquable, j'y retrouve l'ambiance de mon passage éclair dans un dispensaire du Nigeria. Le déroulement final de cette terrible épidémie est parfois un peu confus. Le style ne m'a pas toujours convaincu, avec des lourdeurs inutiles, en effet la première partie est superbe, plus forte et beaucoup plus émouvante, que la dernière partie.



Sur un plan médical et pour notre compréhension de l'ampleur de cette catastrophe sanitaire le mieux est de faire un tour chez Wikipédia

Commenter  J’apprécie          220
Des chauves-souris, des singes et des hommes

Le titre invite au voyage en terre africaine mais la réalité s'annonce bien plus violente quand le contexte du virus Ebola brouille la carte postale du dépaysement.



Un petit village de cases, isolé sur la terre rouge en bord de fleuve, les échanges lents mais incessants par pirogues rudimentaires qui véhiculent l'invisible, des dispensaires de brousse dont les cimetières racontent l'histoire des épidémies passées, des médicaux européens porteurs de connaissance et d'expériences, dépositaires du savoir mais conscients de leur limites.



Le décor est planté et la narration confronte les points de vue, de la petite fille, bouc émissaire du malheur des siens, aux querelles des soignants et chercheurs dans la course aux soins et compréhension épidémiologique. Par petites touches de scènes de vie et de mort annoncée, la piste mortifère se dessine là où passe secrètement le virus.



L'´Afrique me tente rarement en littérature. J'ai souvent du mal à m'intéresser aux destinées humaines dans ces sociétés claniques, fortement influencées de symbolisme et superstitions. Le continent porte en lui des strates de violence par son histoire, ses conflits, la pauvreté de ses populations et les maladies endémiques. Mais j'ai été happée par le désastre annoncé, implacable dans sa chronologie.



L'auteur a su apporter une touche de légèreté par la beauté des paysages, en opposition avec la dramaturgie des scènes de vie. L'écriture est travaillée. Il faut la déguster sans urgence. Sa petite héroïne à la chauve-souris est une très belle image.



La lecture requière la langueur africaine pour suivre le fleuve et les pistes, comprendre les mentalités et le contexte médical dramatique.

Un livre original, sorte de thriller médical non dénué de poésie.

Commenter  J’apprécie          210
Des chauves-souris, des singes et des hommes

Voilà une lecture qui m'a été conseillée par une amie dans le cadre d'une rencontre sympathique de lectrices passionnées , on pouvait choisir autant de livres qu'on le souhaitait , livres présentés de façon charmante dans une grande valise en carton .

Déjà cette présentation m'a séduit et j'ai ajouté quelques livres à ma rassurante pile à lire , je ne sais si vous êtes comme moi , mais moi j'adore les PAL , un peu comme un écureuil qui trésorise ses noisettes pour l'automne , moi j'ai besoin de la présence de nombreux livres autour de moi .

Donc cette lecture , quand on m'a dit que ça parlait du virus Ebola , j'ai eu un mouvement de recul , ah non pas pour moi ce genre de lectures mais les avis étaient positifs et je l'ai emprunté ainsi que quelques autres .

Première chose que j'ai appris , c'est qu'Ebola , c'est le nom de la region où a commencé la propagation de cette mortelle fièvre hémorragique , sans doute en voulant me protéger de ces infos si horribles , j'avais occulté une partie des infos .

Ebola c'est l'endroit où vit une petite communauté africaine , un petit village à l'écart de la civilisation , où les superstitions sont encore bien présentes , oú l'écart entre les mentalités , les croyances des blancs et des noirs est un gouffre sans fin

On est au début de la propagation de la cruelle maladie , on a le nez dessus , aucun recul possible donc , on pense que c'est une forme de malaria , on n'a que des moyens dérisoires , les communications sont inexistantes , et le drame immense peut commencer , la propagation galopante de ce virus .

Pourquoi faut - il lire ce livre ?

Parce que même s'il évoque un sujet qui fait peur , l'écriture est poétique , très belle , l'auteur est une conteuse .

Et puis il y a ce rappel qui est nécessaire , sur les différences de mentalités entre l'Occident et les pays africains .

L'episode de la jeune accouchée africaine qui est sauvée de la mort est crucial , pour ses proches , elle est définitivement perdue , maudite , elle a subi une césarienne pour la sauver mais ne pourra plus enfanter , pire , elle revient dans son village sans le petit corps , le village ne pourra faire la cérémonie du deuil .

Oui les bonnes intentions n'ont pas toujours l'effet escompté , on a trop souvent tendance à l'oublier .

En résumé , une lecture agréable , trois étoiles car l'histoire m'a paru parfois un peu confuse , je le recommande malgré tout .
Commenter  J’apprécie          202
Confidence pour confidence

La description poétique d'une aurore printanière flamboyante dans le Kansas qui sert d'incipit à ce roman laissait présager une lecture agréable, spirituelle, voir amusante,

Très vite, le gris, le sordide, la polémique , s'invitent dans ce huis clos, où se côtoient quatre femmes quinquagénaires , désabusées , réunies dans la maison de Gloria Patter, la doyenne noire du département de langues étrangères , présidente de plusieurs associations francophones, au lendemain d'un colloque. Elle a invité et hébergé Lola Dhol, une actrice norvégienne qui eut son heure de gloire désormais pocharde et aigrie , Aurore Amer écrivaine française, spécialisée dans les récits animaliers , passionnée par l'Afrique, sosie de Lola, Babette Cohen , rapatriée d'Algérie qui a choisi de devenir agrégée d'anglais pour oublier la France , qui vient de se faire larguer par son compagnon, après vingt-cinq ans de vie commune.

J'ai, très vite, poursuivi la lecture en diagonale, pressée d'en finir avec cette lecture « neurasthénisante ». L'apothéose dans cette noirceur c'est ce rat innocent, captif dans une étroite boite en carton, peu ventilée, qu'on entend, désespérément chercher un peu d'air, qu'on laisse lamentablement mourir, et qu'on achève, sans trop de scrupule pour mettre fin à ses souffrances, métaphore cruelle et douloureuse …

Au final, ***** , oui 5 étoiles noires décernées à ce roman lauréat, ce jour de la lecture qui m'a donnée le bourdon, le cafard et qui m'a plongée dans la sinistrose , il faut le faire, par ce beau jour d'été !

Mais je ne mets pas en cause le talent de Paule Constant, ce livre a été primé par le Goncourt, et il le mérite, probablement.

Commenter  J’apprécie          194
Confidence pour confidence

A l'issue d'un colloque universitaire au Kansas, quatre femmes proches de la cinquantaine sont réunies dans la maison de l'une d'elles et entreprennent de vider leur sac, chacune avec leurs travers et leurs côtés parfois ridicules.

Quatre personnages de femmes très intéressants, quatre femmes vieillissantes et qui se cherchent à travers leur vie bouleversée. Beaucoup d'échecs et l'espoir toujours présent d'une vie meilleure.

Avec une écriture très fluide, on passe d'une vie à l'autre et d'un souvenir à l'autre. L'auteure nous parle du rapport aux hommes, de la vérité, de la famille, de la réussite, de l'amour. La langue est belle, les questionnements universels. Paule Constant réussit à écrire sur les "non-dits", sur la pudeur entre femmes qui partagent beaucoup de choses . Beaucoup de sentiments sont exprimés de la simple amitié à la détestation.

De beaux portraits de femmes , un roman au ton sarcastique mais parmi les sourires, chacune de ses quatre femmes porte en elle le souvenir douloureux d'un abandon.

Commenter  J’apprécie          180
White spirit

Ce roman-fable, exotique et riche en descriptions, dépeint une Afrique sèche, colonialiste, froide quand il y fait si chaud et que les sueurs perlent tohu-bohu. Ici sont pourtant abordés le colonialisme voire l'esclavagisme, l'évangélisation, l'Afrique "poubelle", récolteuse des déchets occidentaux, la prostitution, le blanchiment de la peau noire, l'animalité versus l'humanité... mais ce, sous un angle unilatéral et glauque. La focalisation zéro est ici nulle de sentiment, d'émotion, comme si le livre avait suivit une trame robotisée. On y sent peu d'espoir et quand on se prend d'amour pour des singes, seuls êtres véritablement aimables et touchant, il nous sont arrachés violemment, quand on s'attend à une révolution, elle ne vient pas, quand enfin on veut s'attacher à des personnages, ils sont si vides de caractère que c'est impossible. Qui est Victor, le héro ? Je viens de refermer le livre et je n'en ai aucune idée... Pourquoi Paule Constant s'est-elle si peu intéressée aux réels personnages, aux travailleurs des bananeraies, à ceux qui disent l'Afrique, au point de vue des évangélisés, des putes de bordel... Pourquoi ainsi survoler l'essentiel sans jamais s'y attarder ?

L'écriture est stylisée, les thèmes choisis intéressants, le livre a même été primé par l'Académie française, mais à moi, il n'a pas parlé. Il m'a semblé comme une ébauche, comme un carnet empli d'idées, de lieux, de personnages à creuser...



Cette critique est rédigée à chaud, alors peut-être y reviendrai-je, puisqu'à mon sens un bon livre se distingue par la marque qu'il laisse sur vous dans le temps...



Commenter  J’apprécie          150
Confidence pour confidence

« (...) confidence pour confidence, (...) ce qui est si lourd à porter nous le partageons. » Quatre femmes à l'aube de la cinquantaine, Aurore Amer, écrivaine, Lola Dohl, actrice, Gloria Patter, doyenne du département des langues étrangères d'une université du Kansas et Babette Cohen, professeure, se déversent mutuellement leur amertume, leurs regrets et leurs déceptions à l'occasion de l'organisation d'un colloque féministe. Une matinée dans la cuisine de Gloria à se vider le coeur. Et comme le dit Babette, « C'est lourd le sac d'une femme qui vieillit avant que l'oubli ne l'allège. »

Je voulais d'abord lire C'est fort la France de Paule Constant, mais en fouinant sur Babelio, je suis tombée sur Confidence pour Confidence, lauréat du prix Goncourt 1998. Comme première incursion, c'est réussi, malgré un lent départ qui n'annonce pas ce qui va suivre. C'est un récit introspectif, qui dépasse l'anecdotique féminin, révélant une critique sociétale de la famille, des liens parentaux et des rôles professionnels ou non que l'on endosse au fil de notre existence pour plaire à autrui. J'ai beaucoup aimé l'écriture de Paule Constant qui a donné du souffle à un huis-clos qui, autrement, aurait pu être rébarbatif.
Commenter  J’apprécie          130
Sucre et secret

Paule Constant tape dans le mille et réussit encore un coup de maître avec ce roman. Sa belle écriture fait des merveilles. Elle utilise un style ferme et précis pour ce livre. La rigueur, l'âpreté, la justesse, la précision sont des appendices indispensables pour cette histoire grave et austère. La narratrice de Sucre et Secret est une écrivaine française invitée par l'université américaine de Rosebud en virginie. Cette chroniqueuse a dans l'idée, pour son prochain roman, d'écrire un livre sur une femme en noir qui se maquille outrageusement les yeux pour les cérémonies d'exécutions des condamnés à mort afin d'avoir leur dernier regard avant de mourir. Pour qu'elle se fasse une opinion vraie, elle est invitée par le juge à visiter un condamné véritable à Greensleaves qui n'a plus que 3 semaines à vivre avant son exécution. Elle va être bouleversée par cette entrevue et croira en son innocence dès le premier regard.

C'est l'histoire de David Dennis, jeune homme étranger d'origine française, sans argent, sans soutien, un étudiant fauché, obligé de gagner de l'argent pour financer ses études.

David Dennis est la victime expiatoire d'un petit monde de fils et filles de la bonne société de Norfolk à Richmond.

David Dennis est accusé d'avoir violé et tué avec perversité sa petite amie, mineure.

Est-il coupable ou non, peu importe, le mécanisme de sa mort est enclenché. Cela fait maintenant 10 ans qu'il attend dans les couloirs de la mort.

Au fur et à mesure des découvertes que fait la narratrice en ouvrant son dossier, on se fait notre propre opinion.

Complot, manipulation, vengeance du sud contre un yankee, tout y est.

On partage ces trois semaines de compte à rebours avec la mère de David, la bibliothécaire qui l'a aidé jadis et la journaliste noire qui fait connaître son histoire au monde entier.

C'est évidemment un plaidoyer contre la peine de mort mais pas seulement. Je trouve que Paule Constant fait le procès d'une certaine Amérique. Cette Amérique puritaine qui protège les riches qui peuvent être assistés par les meilleurs avocats. Cette Amérique qui protège ces fils de famille (wasp,)bien éduqués mais qui sont en réalité le plus souvent alcoolisés et drogués. Cette Amérique qui est injuste et fermée sur elle-même.

J'ai été textuellement accaparée par ce récit.

Paule Constant est une grande écrivaine qui sait par ses mots emporter son lecteur dans l'âme profonde des êtres.
Commenter  J’apprécie          130
Propriété privée

C’est l’histoire de la triste enfance de Tiffany.

Elle est envoyée en pension chez les sœurs Sanguinaires par ses parents restés en Afrique. Son seul rayon de soleil, c’est sa grand-mère, la colonelle Desarmoise, qu’elle retrouve le jeudi à ses parties de bridge, puis ensuite dans la magnifique propriété privée achetée par ses grands-parents.

C’est triste et lent. Tellement triste et lent que ça frise le déprimant.

L’écriture est riche, tellement riche que certaines phrases en deviennent compliquées à comprendre.

Bref, je ne suis pas mécontente d’en avoir terminé et de pouvoir passer à autre chose.

Commenter  J’apprécie          120




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Paule Constant (634)Voir plus

Quiz Voir plus

La Boîte à Merveilles

Quel est le vrai nom de l'auteur ?

Ahmad Safrioui
Sidi Mohamed
Mouhsine Raissouni
Ahmed Sefrioui

30 questions
526 lecteurs ont répondu
Créer un quiz sur cet auteur

{* *}