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4.08/5 (sur 46 notes)

Nationalité : Roumanie
Né(e) à : Bazias , 1924
Mort(e) à : Metz , 2002
Biographie :

Petru Dumitriu est un écrivain roumain.

Né dans un village de pêcheurs sur le Danube, son père y possédait un moulin, il étudie au lycée de Târgu Jiu puis à Munich.

Marqué par Giraudoux et Gide, il tente dans son œuvre de concilier idéologie communiste et style.

Ne pouvant concilier son art avec la pression politique, il fuit en Occident avec sa femme et cousine en 1960, s'installant tout d'abord à Berlin puis à Paris.

Auteur d’une œuvre très importante, écrite en roumain, en français et en allemand : romans, théâtre, essais, traduits dans de nombreux pays.

Il obtint le Prix des Vikings en 1968 pour L'Homme aux yeux gris. Son œuvre la plus célèbre demeure Rendez-vous au jugement dernier (1961).

Trois volumes, rassemblant cette œuvre et comprenant plusieurs milliers de pages inédites, ont parus à Bucarest en 2004.

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Bibliographie de Petru Dumitriu   (12)Voir plus

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Video et interviews (1) Voir plusAjouter une vidéo

Le prix de la liberté
Interview en français de l'écrivain roumainPetru DIMITRIU qui a fui son pays en compagnie de sa femme mais sans sa fille de 10 mois pour qui ils n'ont pas voulu prendre de risques. L'homme était dans son pays riche et célèbre mais il l'a fui pour la liberté d'écrire. le couple explique pourquoi il est parti, exprime sa souffrance d'avoir laissé leur enfant en Roumanie et demande le...

Citations et extraits (24) Voir plus Ajouter une citation
[Comment vendre un esclave qualifié ?]

Je n'ai plus rien à t'offrir, ô ombre portée d'Allah, sauf cet esclave. Son prix réside en autre chose [que sa religion]. C'est un matelot d'entre les matelots, père de la navigation, frère du gouvernail, cousin germain de l'ancre et oncle de l'astrolabe. Il a commandé un vaisseau et ravagé la mer ; il sait vaincre les Portugais ; il crache sur la semelle de sa pantoufle et leur en donne des tapes sur le crâne.

p. 621
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Et je lui contai la vieille histoire qui se chante chez nous dans les rues, par les mendiants aveugles: le roi don Pierre le Cruel et son frère bâtard Henri de Trastamare dans une tente à Montiel, se roulant par terre à qui étranglera l'autre; et le chef des soudards aventuriers, bretons, français, bourguignons et armagnacs, don Bertrand de Claquin, ou du Glaiquin, ou du Guaiclin, qui voyant son suzerain en mauvais point et à un doigt du trépas, maintient le roi par la jambe jusqu'à ce que l'infant l'ait égorgé. "Fi le vilain meurtre, messire Bertrand", lui disait-on par après à la cour de Bretagne. "Plus vilaine encore aurait été la déloyauté du vassal qui aurait laissé tuer son maître sous ses yeux. Plutôt que de faillir à mon seigneur, je veux être compère du fratricide."
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L'eau s'oppose à la rame comme une glu. La douleur vous donne mal au coeur. Chaque doigt ne semble plus tenir à la main que par une jointure amollie, étirée, boyau pourri. La main se défait en ses osselets. Et chacun d'eux est un élancement de souffrance. Mais le pire, c'est la jointure du poignet : comme si la main était prête à se détacher, mûrie par la douleur et même blette. Tels ces fruits qui ont pris la couleur du cuir, la mollesse de la purée, le goût du savon.

p. 444
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Je suis petit-fils de marchands de la libre Novgorod, plus riches et fiers que ces princes moscovites que tu verras crever la faim dans les rues. Ceux -ci n'étaient que les gabelous des Tartares, et, quand ils venaient apporter à la Horde d'Or le produit de l'impôt, ils se mettaient à genoux, les Tartares posaient un grand plateau en guise de table sur leurs nuques, et festoyaient dessus, envoyant des coups de botte aux boyards moscovites qui se tenaient à quatre pattes sous la table. Que si par contre le produit de l'impôt était moindre que ce qu'ils avaient prescrit, les boyards gabelous devaient lécher et nettoyer avec leurs bouches les étriers embrenés des myrzas!
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Mais après un instant de cette contemplation, elle se raidit et retomba, pâmée, en me disant entre ses dents: "Satyre papiste, fais-le-moi".
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J’ouvris les yeux et levai la tête en souriant, pour comprendre, voir ce qui amusait l’enfant, avoir ma part de sa gaieté, m’y désaltérer, m’en nourrir.
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A côté, les corps décapités des deux chevaliers de Malte et du père Antonio gisaient à plat ventre, déshonorés par les têtes posées à la naissance des jambes. Mais pourquoi m'en étonner, moi qui ai encore dans le nez l'odeur des bûchers brûlant aux Cigarrales de ma cité natale - en ce siècle qui vit le massacre des huguenots à Paris, et la prise du château de Wittenstein en Finlande, dont le gouverneur fut embroché sur une lance et rôti?
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N'adorant ni Croissant ni Croix,
ni du Giaour ni du juif ne disant "c'est moi",
n'étant au Levant, n'étant au Ponant chez moi,
ni gnome sans âme, ni de la race des anges,
ni être de flamme, ni pétri de fange,
natif ni de Chine, ni d'Inde, ni du Mazendéran,
ni de Crimée, d'Iraq ou du Khorassân,
je ne vis ni au paradis, ni sous terre en enfer
(p. 477 de l'édition de 2005)
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Je ne dis rien de tout cela à personne, car qui aurait compris ? En effet, je trouvais que le parti, c'était comme mon père, pour qui sa femme avait toujours raison, et nous, jamais : " Vous ne la comprenez pas."
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Mais c’était cela le sens de l’univers : en arriver à l’amour. Voilà où m’avaient mené les étapes de ma vie. Tout était maintenant simple, limpide, et se découvrait à mes yeux comme en un éclair qui illumine le monde d’un bout à l’autre, mais sans que la nuit puisse jamais revenir. Pourquoi avais-je tant cherché ? Pourquoi avais-je accepté un enseignement venu du dehors ? Pourquoi avais-je attendu que le monde se justifiât devant moi, qu’il me prouvât son sens et sa pureté ? C’était à moi-même de le justifier, en l’aimant et en lui pardonnant, à moi de lui donner son sens par l’amour, et de le purifier par le pardon. Et ce moi n’était rien qu’une partie de l’univers - une partie qui ne dormait plus, qui ne souffrait plus, en qui il s’était réveillé à son vrai sens - car je ne pouvais croire que la profondeur de mes mécanismes cérébraux fût «moi», elle était aussi indépendante de moi que le reste du monde. Je n’avais qu’à aimer et pardonner, à donner ainsi valeur, structure et hiérarchie à l’univers, moi, «moi» qui n’étais personne, qui n’étais sinon rien, tout au plus cette tension de la volonté et de tout l’être, montée de je ne sais quel point qui n’était plus moi, mais lui. En cet instant où je prenais la décision la plus volontaire et la plus libre, la plus arbitraire même de toute ma vie, je savais que je n’étais même pas, que ma volonté n’était elle aussi qu’une succession et une structure de tropismes, de déterminations, de réactions à des sollicitations extérieures, que ce moi triomphant qui s’anéantissait librement n’était ni libre, ni soi-même, mais un point limité du tissu de l’univers, passager et diffluent, distinct seulement en apparence. Absolument moi-même et absolument personne ; absolument libre et absolument déterminé. Un mur s’était brisé, j’avais percé une croûte qui m’enfermait. J’étais plus fort, plus téméraire et plus énergique que jamais dans ma vie ; et humble jusqu’à dire ce que je n’avais jamais su dire ni comprendre : « Pas moi : toi.» J’étais le conquérant triomphant, et je savais que, mendiant chanceux, tout cela m’avait été donné gratuitement. Je savais que j’avais trouvé, au prix de mes efforts et de mon vouloir ; mais que rien, ni effort, ni vouloir, ni amour ni prière, n’eussent pu me faire obtenir cela, que c’était un don arbitraire. Mérité, mais imméritable ; gagné, mais ingagnable ; sauf par la grâce de cet univers, de ce «toi» - ou, pour parler comme on parle d’habitude, par un «heureux hasard». Je me trouvais sur le plus haut sommet que j’eusse pu rêver d’atteindre, je possédais enfin le bonheur que j’avais toujours cherché, et je savais que ce n’était qu’un passage vers quelque chose de plus haut. Il y avait de quoi devenir fou d’orgueil : c’était bien pourquoi je m’anéantissais dans l’humilité. Je vis tout, ou plutôt je fus, enfin, enfin, à l’intérieur de tout : les étendues, les distances, les mouvements, les durées, le temps à venir, le passé, et d’autres catégories que je ne peux nommer, tous les êtres vivants ou minéraux, et les étendues, les durées, les êtres qui se trouvent encore au-delà, et puis tous ceux qui sont ou ne sont pas dans les ténèbres du dehors, peut-être pleines, peut-être vides. Autour de moi, au-dessous de moi, au-dessus de moi, en moi, suivant toutes les dimensions des catégories connues et inconnues, et même inconnaissables. C’était l’univers. Il m’avait fait, il me contenait. Il me portait. Il était en moi. Je ne pouvais m’en séparer qu’illusoirement, en limitant ma conscience. Il n’était pas comme un océan où je flottais, car il était également à l’intérieur de mon être. Ni comme un père, ni comme une mère, car ils ne sont pas aussi l’enfant. Mon amour qui sourdait de je ne sais quelle profondeur -si, je le savais bien-, n’était pas une conquête, une invasion du monde, car j’envahissais le monde en m’y dissolvant. Ni une éjaculation, car plus l’amour jaillissait de moi, plus j’en avais à donner, je restais non pas vidé, mais au contraire plus plein qu’avant. Ni un orgasme, car je n’y perdais pas conscience, ma conscience était plus aiguë et plus lucide que jamais, comparée à ma conscience quotidienne elle était comme l’état de veille comparé au sommeil profond. Ni une ivresse, car j’étais plus sobre et plus pur que jamais, sans vertige ni impureté. Ni pareil à l’exaltation donnée par les drogues, car mon être était enfin rentré dans ses gonds, rattaché au monde, et remis d’accord avec lui, organisé à jamais.
J’étais à genoux et les larmes coulaient sur mon visage. Comment remercier ? Comment l’appeler ? «Mon Dieu», répétais-je dans un murmure, «mon Dieu». Comment l’appeler autrement ? «Ô univers», «Ô conglomérat», «Ô amas» ? «Père» ou «mère» ? Autant dire «mon oncle». «Seigneur» ? Autant dire «cher monsieur» ou «cher camarade». «Seigneur» à l’air qu’on respire et aux poumons avec lesquels on respire cet air ? «Mon enfant» ? Mais il me contient, il m’a précédé, il m’a fait. «Toi» est son nom, et on peut ajouter «Dieu». Car «moi» et «je» ne sont qu’un arrêt à mi-chemin entre le vaste univers extérieur qui est lui, et cet intérieur le plus intime de nous-mêmes qui est également lui. L’adoration brûle les contradictions, le paradoxe est son support. L’horreur du mal pousse à l’adoration, car Dieu est terrible, et horrible, et effrayant. L’attendrissement y pousse aussi , car Dieu est attendrissant. La pitié y pousse, car Dieu souffre. Et l’amour est l’adoration même. J’étais écrasé d’effroi, ébranlé de pitié, ému de la grâce et de l’innocence de cet univers où j’étais plongé, dont j’étais fait, et qui produisait sa fleur dans mon coeur, dans cette flamme tremblante et immobile, inexhaustible et toujours épanchée. Dieu avait été devant moi depuis le commencement, je n’avais eu qu’à le nommer : devant moi, autour de moi et en moi-même, il n’y avait qu’à le nommer, c’est-à-dire à le craindre et à l’aimer, à l’adorer dans l’amour et dans l’horreur sacrée.
J’étais serein maintenant, et je n’aurais rien su dire de ce que je savais, éprouvais et faisais, que le mot «oui». Je me rappelle m’être trouvé à un moment donné étendu par terre, dans la froide humidité, mais je l’oubliai bientôt et retournai vers Dieu, et cette fois-ci je n’aurais su dire que moins encore : rien que non, nier toute tentative de la pensée, toute conscience même, qui ne pouvait plus être que pénombre. Puis il n’y eut même plus de non : rien que le silence.
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