Citations de Pétrus Borel (66)
À Joseph Bouchardi,
Graveur.
SANCULOTTIDE
Extrait 4
Suspendue à mon flanc, bien aimée estocade,
Toujours tu sonneras… je baise ton acier !
Et, d’opimes joyaux, même dans la décade,
Couverte tu seras comme un riche coursier.
Dors, mon bon poignard, dors, vieux compagnon fidèle,
Dors, bercé dans ma main, patriote trésor !
Tu dois être bien las ? sur toi le sang ruissèle,
Et du choc de cent coups ta lame vibre encor !
…
p.17
À Joseph Bouchardi,
Graveur.
SANCULOTTIDE
Extrait 3
La mort d’un oppresseur, va, ne peut être un crime :
On m’enchaîna petit, grand j’ai rompu mes fers.
Le peuple a son réveil ; malheur à qui l’opprime !
Il mesure sa haine au joug, aux maux soufferts.
Dors, mon bon poignard, dors, vieux compagnon fidèle,
Dors, bercé dans ma main, patriote trésor !
Tu dois être bien las ! sur toi le sang ruissèle,
Et du choc de cent coups ta lame vibre encor !
Tiens ! vois-tu ce bonnet penché sur ma crinière ?
Dans le sang d’un espion trois fois je l’ai jeté :
Sa pourpre me sourit ; qu’il soit notre bannière !
Qu’il soit le casque saint de notre Déité !
Dors, mon bon poignard, dors, vieux compagnon fidèle,
Dors, bercé dans ma main, patriote trésor !
Tu dois être bien las ? sur toi le sang ruissèle,
Et du choc de cent coups ta lame vibre encor !
…
p.16-17
À Joseph Bouchardi,
Graveur.
SANCULOTTIDE
Extrait 2
Aujourd’hui, ta vengeance est nourrie ; une proie
À roulé devant toi sur la place… est-ce pas ?
C’est bonheur de frapper un tyran ? et, de joie
Crier entre ses os, d’y clouer le trépas !
Dors, mon bon poignard, dors, vieux compagnon fidèle,
Dors ! bercé dans ma main, patriote trésor !
Tu dois être bien las ? sur toi le sang ruissèle,
Et du choc de cent coups ta lame vibre encor !
…
p.15
À Joseph Bouchardi,
Graveur.
Sic locutus est leo,
PH ED.
Il y a quelque chose de terrible dans
l’amour sacré de la patrie.
SAINT-JUST.
SANCULOTTIDE
Extrait 1
Dors, mon bon poignard, dors, vieux compagnon fidèle,
Dors, bercé dans ma main, patriote trésor !
Tu dois être bien las ? sur toi le sang ruissèle,
Et du choc de cent coups ta lame vibre encor !
Je suis content de toi, tu comprends bien mon âme,
Tu guettes ses désirs ; quand mon bras assassin
Te pousse, en l’air traçant une courbe de flamme,
Tu vas à la victime et lui cribles le sein.
Dors, mon bon poignard, dors, vieux compagnon fidèle,
Dors, bercé dans ma main, patriote trésor !
Tu dois être bien las ? sur toi le sang ruissèle,
Et du choc de cent coups ta lame vibre encor !
…
p.14-15
À Alphonse Brot, poète.
MA CROISÉE
J’écoutai longtemps, et je me persuadai bientôt
que cette harmonie était moi…
BUFFON.
Extrait 1
Oh ! que j’aime à rêver, seul, amoureusement,
À ma large croisée au vent du soir béante !
Libre de tous soucis, dans le vague flottante,
Mon âme alors s’entr’ouvre au plus doux sentiment.
Sous les doigts aimantins de ce muet délire,
Ma nature s’émeut, vibre comme un lyre !
Là, penché dans les fleurs d’un large abricotier,
Dont les rameaux épais attouchent les murailles,
De l’astre, roi du jour, j’assiste aux funérailles
Que célèbre au lointain la cloche d’un moutier,
Poursuivant du regard le corbeau, le phalène,
Ou le mulet pesant attardé dans la plaine.
Mais surtout nul pinceau ne rendrait mon transport,
Quand, parmi les rameaux, quelque sylphide blanche
M’apparaît, m’éblouit ! semblant de branche en branche
Glisser comme un oiseau ; quand sa voix, doux accord,
Hautbois harmonieux qui lutine et qui joue,
Monte comme un parfum et caresse ma joue !
...
p.55-56
A peine au tiers de la vie, comme un voyageur lassé, déjà il faisait halte, et se retournait pour mesurer la route qu'il avait parcourue. Il se sondait pour voir ce qu'il lui restait de force pour achever son douloureux pélerinage.