C’était dans les années 1968 alors que la France était agitée de soubresauts révolutionnaires et Philippe Petit n’avait pas vingt ans.
Souffrant d’une rage dentaire et alors qu’il attendait son tour chez son dentiste, Il feuilletait un magazine lorsqu’il tomba en arrêt sur un article relatant la construction des twins towers à New York.
Dès lors, notre funambule, fildeferiste, prestidigitateur et jongleur de rue n’eut plus qu' une idée en tête : franchir sur un câble d’acier l’espace séparant les tours jumelles.
Cet épisode romancé dans le livre de colum McCann, « et que le monde poursuive sa course folle » m’a incitée à en savoir plus sur les motivations et l’irrepressible besoin (envie, élan ?) qui pousse un homme à risquer sa vie en défiant l’espace et les éléments.
Pourquoi et comment une telle entreprise, dans quel but, pour quelle raison un acte qui semble de pure…déraison ?
Rien d’autre qu’un pied de nez clownesque au danger, au hasard ? Acte d’inconscience ou d’orgueil démesuré ?
Rien de tout cela.
A lire Philippe Petit, on mesure et on éprouve sa détermination, une volonté farouche et sans faille de mener à bien son/ses projets clandestins, et réussir ses trois incroyables « coups », le premier entre les tours de Notre Dame de Paris, le deuxième entre les twins et le troisième entre les piliers du pont de Sidney.
Comme un Arsène Lupin voleur d’espace, de rêve et de nuages qui se baladerait incognito entre terre et ciel, Philippe Petit, grand maître de l’Extrême, raconte cette incroyable passion qui le pousse à franchir les portes du ciel, à construire son entreprise au nez et à la barbe des autorités avec l’aide et le soutien indéfectible de son équipe d’irréductibles amis et supporters de longue date ou de circonstance.
Car, hors un entraînement intensif digne d’un sportif de haut niveau, c’est toute une machinerie à mettre en place selon des techniques rodées, le plus souvent de nuit, un matériel coûteux et fiable, une reconnaissance du terrain, si je puis dire, une prise en considération des conditions climatiques (vent, température, saison, pression atmosphérique, etc…), qui ne laissent justement rien au hasard,sans quoi la moindre erreur serait fatale.
Parties de plaisir, de rigolade, colères noires, peur de l’échec, Philippe Petit ne cache rien de ses états d’âme, de ses déboires, de ses souffrances, de ses exigences, de son sale caractère, des émotions partagées, des amitiés solides et de l’amour qui le portent au delà des toits.
Fasciné par les monuments érigés par les hommes, ponts, cathédrales, gratte- ciels, le funambule se fait poète lorsqu’il déclare : l'équilibre est voluptueux…le ciel immense m’appartient, j’en oublie de respirer.
C’est alors que, délivré de la peur du vide, libre et arrogant, le Petit marcheur facétieux qui salue son public du haut de son nuage prend des allures de géant.
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Philippe Petit est funambule, et il est poète. Ou plutôt il est poète, et il est funambule. Je crois qu'en lisant son livre on comprend qu'on ne peut d'ailleurs pas être complètement funambule sans être aussi poète.
Il y a sans doute beaucoup d'autres professions qu'on ne peut pas endosser pleinement sans être poète, on le comprend aussi grâce à ce livre. Jongleur, artisan ou réparateur du câble (c'est un jeu de mot).
On peut par contre être poète sans endosser pleinement un autre métier, mais on pratique alors une autre forme de poésie que celle de Philippe Petit. La sienne est pleine de vie, entière et rugueuse. Remarquable.
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