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Citations de Raul Argemi (104)


Avec le pouvoir, on peut modifier les résultats et jusqu’aux règles du jeu elles-mêmes : naître, vivre, mourir sont toujours les manifestations de quelque dieu éphémère et sans pitié, qui, en abaissant le pouce, condamne à vivre ou à mourir.
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"Butch Cassidy piqua un petit sprint, croisa la trajectoire de Pascualini et remporta la pomme de pin. Ensuite il essaya une passe vers l'Allemand le plus près de lui, mais elle aboutit n'importe où, parce que la balle improvisée avait ses propres idées sur la question."
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Je me suis éloigné en tâtant la capsule de cyanure dans ma poche. J’avais pris l’habitude de la tripoter, je me disais que c’était pour ne pas hésiter le moment venu.
Il faisait un froid de tous les diables. C’était du moins ce qu’il me semblait.
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Je n’avais plus qu’à me résoudre à entrer dans l’ombre, mais j’hésitais. Il y a chez tout militant un fond de connerie chrétienne qui lui donne l’impression d’être un traître s’il prend de la distance, y compris par rapport à la folie, car notre acharnement était désormais de la pure démence.
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Quand j’avais reçu ma capsule de cyanure, je disposais déjà d’un jeu complet de faux papiers : passeport, carte d’identité, carte de supporter du Boca Junior, permis de conduire poids lourds, le tout au nom de Carlos Meléndez, alias Pocho. Sachant qu’ils m’étaient destinés, les camarades s’étaient appliqués, tout était parfait, j’avais même un acte de naissance certifié conforme. Je me rappelle avoir passé un après-midi entier à faire les photos dans leur réduit. Dans une tenue, puis dans une autre, avec une moustache, sans moustache… Ils savaient que mettre la même photo sur tous les papiers était la pire des bourdes, puisque dans la vraie vie on les fait à différents moments. N’importe quel policier sait cela.
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Certains camarades changeaient de camp. Après avoir connu l’horreur d’un centre de détention clandestin, un beau jour ils disaient stop et commençaient à collaborer avec leurs geôliers. Ils sillonnaient les rues avec eux en voiture pour repérer d’autres camarades. Ils les interrogeaient sous la torture ou essayaient de les convaincre que la guerre était perdue et que se mettre à table était l’unique moyen de sauver leur peau.
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C’est Mao, je crois, qui a dit que faire la révolution, c’est comme chevaucher un tigre dont vous ne pourrez descendre qu’après l’avoir dompté, au risque qu’il vous dévore. Quand on a passé comme moi la barrière de la mort, on monte un tigre. Un tigre qu’on ne dressera jamais, qui finira par vous dévorer.
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Le premier policier a trouvé la porte ouverte, il est entré discrètement, en toute innocence. Mon revolver était resté quelque part par là, peut-être sous une chaise. J’ai ouvert l’armoire et pris un flingue avec son chargeur de rechange. Je n’avais pas l’intention de me livrer.
Nous nous sommes retrouvés le policier et moi dans le couloir de sortie, séparés de plusieurs mètres. Il a essayé de me calmer, parce qu’il pensait toujours avoir affaire à un accident, mais j’ai surenchéri. Je l’ai visé et lui ai demandé de me donner son arme, au lieu de quoi il l’a bien évidemment pointée sur moi. On était trop loin l’un de l’autre pour qu’il obtempère. On a fait feu. Tirs croisés dans un couloir exigu.
J’ai su plus tard qu’il avait déclaré que je n’avais pas l’intention de le tuer. Que je l’avais blessé au bras pour le désarmer. J’ignore pourquoi il a dit ça. À une si courte distance, on tire dans le tas, on ne cherche pas à jouer les Vengeurs Masqués.
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Ce coup de feu m’avait subitement transformé en meurtrier par pure bêtise.
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Quand cela me revient, même après tant d’années, j’ai le réflexe de plier l’index comme si je voulais presser la détente pour tuer le souvenir. Un automatisme que je garderai jusqu’au jour de ma mort, ou jusqu’à ce qu’on me tue, ce qui revient au même, encore que la deuxième proposition sous-entende peut-être une forme de punition ou de justice, afin que je puisse reposer en paix.
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Le fait est qu’un des revolvers était chargé. Quand j’ai appuyé sur la détente, juste après la détonation, un trou gris est apparu au milieu de son front. Je ne veux pas la nommer. Depuis, je coexiste avec son fantôme. Je n’ai pas besoin de la nommer. En ce temps-là mon nom de guerre était Isidro.
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Peut-être parce que les jeunes se croient immortels, on se foutait de tout. Moi, en tout cas, je me foutais de tout. Je ne peux pas parler en son nom, peut-être m’admirait-elle ou m’aimait-elle, ou allez savoir quoi. Il est facile de devenir cynique avec le temps.
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Cette maison devint le lieu de réunion clandestin d’une cellule de combat appartenant à une petite organisation que le désastre et le temps finirent par avaler. Je me souviens qu’on avait une armoire remplie d’uniformes arrachés à la police, de menottes, de plaques d’immatriculation pour nos voitures volées, d’armes et de pas mal de choses encore.
Chaque visite, sporadique, de la famille de ma femme était précédée d’un rituel consistant à cacher tout ce qu’ils ne devaient voir en aucun cas.
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Par prudence ou parce qu’on se prenait pour les rois du pétrole, on essayait d’appliquer des mesures rigoureuses de cloisonnement. Ainsi, l’équipe de faussaires était bien à l’abri, seule une poignée de gens y avait accès, or je comptais parmi ces privilégiés.
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Quand le bruit d’un coup d’État dur, vraiment dur commença à courir, des cadavres apparaissaient dans tous les coins, à croire que les Trois A avaient multiplié leurs effectifs par mille. En réalité, tout le monde se revendiquait des Trois A, y compris les Services, lorsqu’il s’agissait d’empêcher certains militants d’échouer en prison. Quoi qu’il en soit, la rumeur du prochain putsch militaire grondait très fort : il ne ressemblerait pas aux précédents, cette fois ils allaient tout balayer sur leur passage.
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Les théoriciens de toutes les organisations armées avaient la tête bouffie de poudre, persuadés que la prise du pouvoir était imminente. À cette époque, les cas de toutes les personnes trouvées mortes qui portaient des marques de torture étaient imputés aux Trois A.
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Le bref laps de temps entre la dictature précédente et celle qui s’abattait sur nous avait été d’une telle intensité qu’on avait l’impression qu’il avait duré un siècle. Il commença par une drôle de démocratie, quasi révolutionnaire, qui avait accordé l’amnistie à tous les prisonniers politiques. Tout le monde militait quelque part, les clandestins avaient refait surface. Mais avec le retour de Perón, les choses tournèrent au vinaigre. En particulier parce que le valet de Perón, López Rega, alias le Sorcier, avait inventé l’Alliance anticommuniste argentine. Cette organisation, mieux connue sous le nom des Trois A, entreprit de débarrasser le péronisme, et le pays, de ses partisans de gauche. À la mort de Perón, quand sa veuve, Isabelita, folle comme un lapin et téléguidée par le Sorcier, prit la tête du pays, tout partit définitivement en eau de boudin.
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L’organisation s’effondrait. Entre ceux qui désertaient et ceux qui tombaient, morts ou en prison, nos jours étaient comptés. Ayant choisi la lutte frontale, on était condamnés à perdre. Notre sursis, le temps d’une démocratie éclair, touchait à sa fin.
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On savait. Je savais que la maladie de Pocho était incurable, mais qu’il pouvait vivre mille ans.
– Quel malheur pour lui et sa famille ! Pourvu qu’il meure bientôt, le pauvre…
Ma mère était la couturière du quartier et, chez une couturière, comme dans un salon de coiffure, les femmes parlent sans retenue, et le fils de la couturière traîne par là en prenant un air idiot, « parce qu’il y a des choses que les enfants ne peuvent pas comprendre ».
La maladie de Pocho était incurable, mais il pouvait vivre mille ans. Confirmé.
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– Bonjour, je voudrais parler à M. Regules, je vous prie.
– M. Regules ne travaille plus chez nous depuis longtemps, mais j’ai repris ses dossiers. Je suis M. Carlos Pérez Urrieta. Je vous écoute…
– C’est pour une transaction signée à plusieurs il y a quelques années.
– Pourrais-je connaître votre nom, je vous prie, afin de pouvoir vous situer ?
J’ai décliné sans hésiter le nom d’utilisateur que j’avais donné à l’époque, Meursault, ainsi que mon code alphanumérique.
– Veuillez rester en ligne le temps que je procède à quelques vérifications…
– Prenez votre temps.
Pendant quelques minutes, j’ai eu droit à un extrait en boucle d’une quelconque symphonie, jusqu’au retour de M. Carlos Pérez Urrieta.
– Permettez que je vous pose quelques questions. Dans quelle ville est née votre mère ?
– Dans la commune de Trenque Lauquen.
– Quelle a été votre première mascotte ?
– Une chienne qui s’appelait Terry.
– Bien. Merci. Vous comprendrez, je suppose, la nécessité de ces mesures de sécurité. Que puis-je faire pour vous ?
– Je dois me rendre à Buenos Aires. J’aimerais vous rencontrer… Pour faire le point.
– Parfait, a-t-il répondu, puis on a fixé un rendez-vous.
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