C’est un pronom. Répété, scandé, martelé. Déclamé. Une rythmique sourde pour faire taire le silence assassin. La ponctuation puissante d’une poétique affirmant la présence à un monde qui efface.
La scansion d’une ode à la femme par le pronom personnel d’un singulier bâillonné par les autres; celui qui s’est réfugié dans le réconfortant lieu fondateur d’une vie consacrée à briser le silence, dans l’âme fondatrice d’un combat pour la dignité, la parole et l’écoute.
Pour l’existence d’un pluriel féminin dans lequel elle se dissout pour en puiser sa force ; par la disparition volontaire en réponse à l’effacement collectif auquel il est condamné. Dans le sanctuaire de l’écriture, refuge hors du temps qui officialise sa part d’humanité aux yeux d’un monde qui la nie. Dans le temple d’une littérature qui engloutit symboliquement pour mieux ouvrir à ce monde des autres qui la refuse. Qui est la clé de compréhension de l’âme humaine et d’un monde qui efface les femmes, les minorités, depuis l’origine.
Pour faire de l’inexistence à laquelle son sexe la condamne, un art d’exister.
C’est un pronom qu’elle scande, martèle. Déclame. Pour l’expression de soi, pour la légitimation d’un vécu, pour l’affirmation du genre féminin.
Un pronom qu’elle répète, parfois trop, conférant à son propos une dimension par trop autocentrée, noyant les brillantes réflexions sur le genre et la littérature dans une multitude de détails et d’exemples, qui, s’ils sont autant de preuves de l’effacement condamnable dans elle a été victime enferment l’autrice dans une posture narcissique, prisonnière d’un ton pontifiant et parfois moralisateur : ce pronom personnel au singulier auteur d’une réflexion profonde devient tout et partie du « nous » général du genre féminin en opposition au masculin, général et global , dans la rhétorique d’un paradoxal effacement du singulier par ses multiples manifestations. Ayant pour conséquence la dissolution d’une réflexion profonde, d’une colère légitime et d’un propos juste dans un texte parfois trop manichéen. Qui les condamnerait à l’inexistence.
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