L'ÉPHÉMÈRE
Ah ! Les ailes de l'éphémère
Sont une robe bigarrée !
Mon cœur n'est que tristesse amère...
Reviens vers moi pour demeurer !
Les élytres de l'éphémère
Sont des vêtements chamarrés !
Mon cœur n'est que tristesse amère...
Reviens vers moi te reposer !
Il sort du cocon l'éphémère,
Blanc comme neige est son coutil !
Mon cœur n'est que tristesse amère...
Reviens vers moi et prends logis !
.
Soleil de l'aube à l'entrée du vieux temple ,
Le jour paraît sur la haute futaie.
Un sentier de bambous mène au secret
Des cellules tapies dans la verdure.
Clarté des monts où s'égaient les oiseaux
Reflets des eaux où s'épurent les coeurs,
Toute rumeur du monde ici s'est tue,
Rien que le son de la cloche et du gong.
Chang Jian
Clair de Lune dans la montagne après une éclaircie
Des hauts pins ruisselle une lune éparse
Dont l'ombre sur le sol est pareille à un parterre peint.
Je randonne, épris sous elle,
Et longtemps ne trouve le sommeil.
Je crains le vent où tourbillonnent les lotus de l'étang ;
Je déteste la pluie où chutent les fruits de la montagne.
Qui m'accompagnera, moi et mon chant amer ?
Dans la forêt entière stridulent les sauterelles.
Anthologie de la poésie chinoise
Wen Tang (1018-1075)
Pour Zhuang Zi, le locuteur se trompe en ayant l'impression qu'il maîtrise le monde en nommant les choses. Car le nom de la chose, pure convention, ne donne pas accès à la chose elle-même. Le monde est un tout, mais en nommant chaque partie de ce tout, on différencie et finalement on segmente cette unité.
(Sciences Humaines n°333)
Les plaisirs de la vie sont dans l'intimité de cœurs qui se connaissent.
Les livres qui plaisent à l'âme sont trop vite lus,
Les amis que l'on chérit, longtemps attendus, ne viennent pas;
C'est ainsi dans le monde que souvent choses s'opposent,
À de belles humeurs combien de fois s'ouvre le cœur dans une vie ?
Cristaux de brume
Parc au soleil levant, calme, nulle brise ;
Dans les cristaux de brume , fleurs éclosent partout semblables.
Je me souviens : dans le palais profond des Talents assemblés,
Une danseuse ajustait dans ses cheveux les épingles de jade.
Anthologie de la poésie chinoise
Zeng Gong (1019-1083)
Peut-être suis-je aveugle…
Peut-être suis-je aveugle
Je ne peux que vous toucher par ma voix
Ouvrir le poème comme la paume d’une main
Le tendre vers vous
Ô frères sur la rive mienne du Pacifique
De couleur rouge, de couleur claire, bleue, noire
Fleurs qui se mettent à pleurer sur la rive mienne du Pacifique
Cette voix a traversé un vide infini
// Gu Cheng / 顾城 ou 顧城 (1957 – 1993)
//Traduit du chinois par Chantal Chen - Andro
En contemplant les fleurs d'abricotier dans l'autel du Dieu du sol à Bo
Comme flocon de neige quand elle éclot,
Comme flocon de neige quand elle prend congé,
De toutes les fleurs la plus rare et étrange,
Son parfum n'est plus dans ses boutons,
Pas davantage dans son calice,
Mais de ses os il se diffuse.
Elles vont au gré du vent sur la rivière,
Y laissent la Lune s'attarder,
Et avilissent les pêchers des montagnes dont le sang blêmit,
Et même si la nuit, elles se dispersent, clairsemées et pâles,
Leur âme est en définitive singulière et charmante.
(p. 662 Chao Buzhi 1053-1110 dynastie des Song du Nord)
Cascade deux fois contemplée
« Le métier à tisser du ciel s’est arrêté, et la lune sa navette
se repose un instant
Depuis son sommet la falaise est drapée d’un tissu de soie
blanche de neige, froide !
Des fils de glace ruisselant en pluie sont suspendus au
Fleuve du firmament.
Depuis des millénaires, ils n’ont jamais séché ;
Leur fleur de rosée sont par trop fraîches pour qui ne
porte qu’un mince vêtement.
On dirait un arc en ciel s’abreuvant d’un torrent,
Un dragon de jade qui descend la montagne,
Une neige de lumière envolée depuis la grêve."
(p. 847 Qiao Ji 1 323 dynastie Yuan)