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Critiques de Rivers Solomon (167)
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Les Abysses

Voilà un récit nuancé auquel nous invite ce roman à lire entre les lignes. Métaphorique, mais toujours d’une étonnante clarté et distillant un nombre incroyable de thématiques. Au point d’en rester souvent bouche bée devant tant de clairvoyance, avec l’envie de surligner nombre de passages du texte, encore et encore. Il est d’une telle force émotionnelle, poétique et d’évocation qu’il est à conseiller au plus grand nombre. L’aspect fantastique n’est qu’un prétexte pour faire réfléchir sur des sujets profonds et ressentir des troubles face à ceux du personnage principal
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Les Abysses

Résumé : Lors du commerce triangulaire des esclaves, quand une femme tombait enceinte sur un vaisseau négrier, elle était jetée à la mer. Mais en fait, toutes ces femmes ne mouraient pas. Certaines ont survécu, se sont transformées en sirènes et ont oublié cette histoire traumatique. Un jour, l'une d'entre elles, Yetu, va le leur rappeler, dans ce roman d'émancipation, magique et réflexif, sur la condition noire et sur l'impossibilité d'une justice, en l'absence de vérité.



Un roman poétique mélangeant fantasy et historique. Nous plongeons dans les profondeurs des océans à la découverte des souvenirs d'un passé douloureux.

Une très belle découverte livresque que je recommande.
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L'incivilité des fantômes

Je tiens tout d'abord à remercier les éditions J'ai lu et Babelio pour cette lecture.



Mon avis sur L'incivilité des fantômes est très mitigé. J'ai eu beaucoup de mal à le terminer. J'ai eu l'impression d'une lenteur et d'une lourdeur (surtout pendant la première moitié qui ne décollait pas à mon sens).



L'organisation de la société est décrite, mais c'est tellement brouillon et confus que je ne suis pas sûre de m'y être bien retrouvée. de même certains passages plus pointues de mécaniques ou de sciences m'ont complètement perdue, cassant le rythme de ma lecture.



Au final, je partais confiante en cette lecture, car le résumé est très intrigant... Mais plus ma lecture avançait plus j'allais de désillusion en désillusion. Clairement, ce n'était pas une lecture pour moi, même si l'histoire est intéressante et remplie de bonnes idées !
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L'incivilité des fantômes

L'incivilité des fantômes est le premier roman de Rivers Solomon, auteur transgenre qui se désigne par le pronom anglais "they" au singulier, ce qui pourrait être traduit en français par le pronom "iel" (contraction de "il" et "elle"), d'ailleurs utilisé par le traducteur. Cette particularité de l'auteur, nous la retrouvons fortement dans son roman, où la notion de genre est complètement chamboulée, parfois de manière un peu confuse. Ainsi, bien que j'ai été fortement intriguée par cette histoire, qui m'a somme toute plutôt bien plu, c'est surtout ce sentiment de confusion qui est resté une fois ma lecture terminée.



Si le résumé éditeur m'a donné envie de lire ce roman, au fur et à mesure de mon avancée dans l'histoire, j'en suis venue à le trouver assez peu représentatif. En même temps ce livre est, je trouve, plutôt difficile à résumer.

Alors, parlons déjà du contexte de cette histoire... Le Matilda est un immense vaisseau spatial à bord duquel voyage ce qu'il reste de l'humanité. Les choses ne sont jamais dites clairement, mais l'on devine, à travers divers contes et légendes narrés durant le récit, que la Terre n'était plus vivable, bien que nous n'en ayons pas la véritable raison. Cela fait tellement longtemps que le vaisseau navigue dans l'espace (environ trois siècles, il me semble) que plus personne ne se souvient de l'Histoire. Ainsi cet exode spatial vers une planète habitable s'est transformé en une sorte de quête religieuse : la Terre est nommée la Grande Maison de la Création, et le vaisseau est censé les conduire vers la Terre Promise, mais uniquement si tout le monde se comporte "bien". En gros le voyage serait une sorte d'épreuve, et si les humains gardent foi et moralité, alors ils parviendront à la ligne d'arrivée. Donc, pour être sûr que les gens se comportent correctement, et pour bien faire fonctionner le vaisseau en attendant la fin du voyage, une certaine organisation a été mise en place.

Le vaisseau est divisé en ponts allant de A à Z. Dans les Hauts-Ponts vivent dans le luxe les blancs riches, et parmi eux le Souverain, chargé de veiller à ce que la volonté de Dieu soit respectée (en gros c'est un roi tyran). Dans les Bas-Ponts sont rassemblés les personnes de couleur, traitées comme des esclaves, considérées comme des animaux. Afin de toujours les garder à l’œil, les autorités ont mis en place un couvre-feu, les Bas-Pontiens sont surveillés (par des gardes ou des contremaîtres) et ne peuvent passer d'un Pont à un autre sans laissez-passer, chacun doit effectuer son service chaque jour (par exemple entretenir les champs des ponts agricoles), etc. Ils peuvent se faire attaquer à tout moment par la Garde, que ce soit par des coups ou des viols, et ne peuvent se défendre au risque d'empirer leur situation. Même dans leurs chambres, ils ne sont pas en sécurité. Enfin, il y a les Mi-Ponts, où vivent les blancs pas riches et, d'après ce que j'ai cru comprendre mais c'est un des points que j'ai trouvés assez confus, certaines personnes de couleur ayant pu grimper l'échelle sociale (cordonniers, etc.). Les Mi-Pontiens travaillent et, contrairement aux Bas-Pontiens, ils ont un salaire, peuvent suivre des cours universitaires, etc.

Nous constatons là une énorme régression des droits, libertés et égalités de chacun. Bien que ce qui ressorte le plus de prime abord soit le racisme, nous faisons également face à l'inégalité des genres et à l'homophobie.



Il est assez compliqué de parler de genre pour ce roman, car tout y est chamboulé. Dans les Bas-Ponts, le pronom féminin est employé pour tout le monde, sauf contre-indication (à travers un uniforme, un métier, un papier officiel démontrant le contraire, etc.). Dans le premier chapitre, toutefois, nous pouvons voir que sur l'un de ces ponts, les enfants sont définis par un pronom neutre "iel". J'ai trouvé que ce détail ne servait pas à grand-chose, car on n'en retrouve pas l'utilisation par la suite (peut-être n'était-ce alors qu'un moyen d'aborder l'utilisation du pronom féminin ?). Bref, du coup ça a rendu les choses un peu confuses pour moi, et c'est dans des moments comme ça que l'on se rend compte à quel point la notion de genre est ancrée en nous. Ainsi j'ai cru (peut-être à tort, je n'en sais toujours rien) que seules les femmes travaillaient dans les champs, qu'elles seules faisaient le travail manuel. Mais si ça se trouve certaines de ces femmes étaient des hommes, cependant seul le pronom "elle" étant utilisé, impossible de savoir vraiment. Et le problème c'est que les infos nous sont données au compte-goutte, au fil de l'histoire, ce qui rend les choses encore plus confuses, car au moment où je pensais avoir compris comment cela fonctionnait, l'on me donnait une nouvelle information qui rendait mon interprétation fausse. Un vrai petit casse-tête pour moi, donc.

En revanche, l'inégalité des genres est plus claire dans les ponts supérieurs, où les hommes et les femmes sont clairement distingués. Aux hommes reviennent les tâches intellectuelles et le gouvernement, tandis qu'aux femmes sont confiés le bon soin du foyer et la maternité (assurer la descendance, du moins, car ce ne sont pas forcément elles qui s'occupent de leurs enfants). Les femmes de couleur servent aussi à la reproduction, cependant cela est rarement consenti de leur côté. Et si leur enfant est considéré comme suffisamment blanc, il peut leur être retiré pour être intégré dans des ponts supérieurs (en général dans les Mi-Ponts, car ils restent tout de même des bâtards). En tout cas, peu importe le Pont, la femme n'a guère de véritable liberté/droit/égalité, car même dans les Hauts-Ponts, une femme peut être battue par son mari sans que cela pose problème à qui que ce soit (sauf à la femme, bien sûr, mais ça tout le monde s'en moque).

Et pour le coup on se pose la question : niveau moralité, il y a du travail là, alors comment peuvent-ils penser que le vaisseau n'avance qu'en fonction de ça ? Et bien simplement que, d'après la Souveraineté, n'est immoral que ce qui est contraire à leurs lois, or aucune loi n'interdit le viol, ni de battre sa femme, ni de battre des esclaves, etc. Voilà, voilà !



Bon, voilà pour le contexte, je passe donc aux personnages, tous aussi particuliers les uns que les autres.

Commençons par le principal : Aster. Elle est définie comme une jeune femme dans le résumé éditeur, pourtant elle ne peut être réduite à cela. Car Aster est à la fois psychologiquement et physiquement transgenre : elle possède des organes sexuels féminins mais certaines de ses caractéristiques physiques correspondent à celles d'un homme (carrure, pilosité), et ne se considère ni spécialement comme une femme, ni spécialement comme un homme. Son orientation sexuelle n'est également pas vraiment définie, car elle avoue avoir été attirée par plusieurs femmes (chose qu'il vaut mieux cacher car l'homosexualité est interdite) et est aussi attirée par un homme. Aster est un personnage que j'ai trouvé particulièrement intéressant et touchant. Elle a un esprit rebelle sans que cela soit forcément voulu : elle a simplement tendance à n'en faire qu'à sa tête, surtout quand elle s'est fixé un objectif, et dit ce qu'elle pense. Ce qui n'est pas au goût de tout le monde, en particulier des gardes et d'un certain Lieutenant, qui prennent un malin plaisir à la persécuter. Orpheline, Aster est une personne intelligente, autodidacte, qui possède un esprit pratique. Elle s'est d'ailleurs fait faire une hystérectomie pour ne pas tomber enceinte et applique le matin une sorte de pommade sur ses parties génitales pour éviter de souffrir au cas où il prendrait l'envie à un garde de la violer. Une illustration parfaite de la perversion de l'humanité dans ce vaisseau et de l'esprit à la fois pratique et rebelle de notre héroïne. Heureusement les laissez-passer que lui fournit le Chirurgien, dont elle est l'assistante (et surtout l'élève), lui permettent en général de circuler dans les Bas-Ponts sans rencontrer trop de problèmes. Elle exerce ainsi, en plus de son service dans les champs, la fonction de médecin. Cela lui permet d'aider les autres à sa manière, du mieux qu'elle peut, profitant au maximum des maigres libertés que son rôle d'assistante lui procure. Sa relation avec le Chirurgien, si elle n'est au départ qu'intellectuelle, va petit à petit évoluer. Mais Aster a du mal à comprendre les sentiments, que ce soit les siens ou ceux des autres, et peut ainsi heurter la sensibilité de ceux qui l'entourent sans le faire exprès. Elle a également du mal avec les images (métaphores, expressions, etc.) et prend tout au pied de la lettre, ce qui donne parfois des conversations assez amusantes. Mais ayant conscience de cette... déficience, Théo, le Chirurgien, reste en général particulièrement compréhensif à son égard.



Si le roman nous est raconté du point de vue d'Aster (à la troisième personne), trois chapitres donnent la parole à trois personnages (à la première personne).

Théo Smith est le fils de l'ancien Souverain, mais également celui d'une femme noire (il ne connaît pas l'identité de sa mère). La peur du scandale a alors poussé le Souverain à abdiquer. Étant donné que Théo était suffisamment pâle de peau, son père l'a récupéré non sans une certaine déception face à son aspect chétif, son physique trop peu viril. Par esprit de rébellion, Théo se rase tous les jours de près (la barbe est considérée comme un signe de virilité sur le vaisseau, et ceux qui n'en portent pas sont considérés comme des tapettes) et s'habille de manière extravagante. S'il peut se permettre une telle attitude sans avoir de problèmes, c'est parce qu'il est considéré comme la Main de Dieu depuis qu'il a sauvé le Souverain (celui qui a succédé à son père) en le soignant alors qu'il n'était encore qu'un enfant. Car Théo est un jeune prodige, très intelligent, devenu médecin très jeune. Il a ainsi acquis le grade de Général et le titre de Chirurgien, ce qui lui permet une grande liberté. Et s'il est fort respecté pour ses compétences, si son titre de Chirurgien le place très haut, il est bon de noter toutefois qu'il ne vit pas sur les Hauts-Ponts mais sur un Mi-Pont, et qu'il exècre au plus haut point les ponts supérieurs et leur impiété, et essaie d'aider au mieux ceux qui en ont véritablement besoin. Mais s'il ne respecte pas toujours les règles du Matilda, il s'est créé les siennes propres, en fonction de sa foi et de sa moralité, qu'il suit scrupuleusement. Rien n'est dit de manière claire quant à l'orientation sexuelle de Théo, même si la question de l'homosexualité, et à travers elle de l'homophobie, est abordée par le biais de ce personnage, son aspect trop peu viril poussant les autres, méprisants, à murmurer derrière son dos. Mais au-delà d'une quelconque orientation sexuelle (en fait aucun personnage n'en a une de vraiment définie, cela reste toujours très vague), ce sont les sentiments qui comptent vraiment. Et si de prime abord ce que Théo ressent envers Aster n'est qu'une grande estime, cela va finalement bien plus loin, vers des sentiments bien plus complexes, bien plus forts.

Autre personnage, particulièrement complexe et qui va jouer un grand rôle : Giselle. Je ne sais pas si j'ai apprécié ou non ce personnage, c'est un peu difficile à déterminer. Giselle est celle qui subit le plus, dans cette histoire. Parce qu'elle a été maintes fois battue et violée, son esprit est complètement brisé. Ainsi elle peut passer de la joie pure à une déprime totale ou à une colère dangereuse. Amie d'enfance d'Aster, avec laquelle (et d'autres filles) elle partage une chambre, elle peut un jour être sa meilleure amie, sa grande complice, et un autre son bourreau. Bien qu'Aster fasse tout son possible pour l'aider, elle ne peut la protéger d'elle-même, car Giselle a également des tendances autodestructrices, parfois en proie à un désir de souffrance et de mort.

Enfin, le troisième personnage qui a la parole dans ce roman : Mélusine. Je ne peux pas trop en dire sur elle sans révéler certains éléments qu'il est mieux de découvrir soi-même. Je dirais toutefois qu'il s'agit là d'un personnage fort. Mélusine a subi une perte terrible, mais n'a pas eu d'autre choix que de devoir s'en remettre et continuer à survivre (car on ne vit pas vraiment, dans les Bas-Ponts). Bien qu'elle ne se considère pas comme quelqu'un de maternel, c'est souvent à elle que l'on s'adresse pour éduquer les enfants, dont elle n'aime pourtant pas spécialement s'occuper. Seule Aster a été capable de percer sa carapace, et Mélusine est prête à tout pour l'aider.



À ces trois personnages importants, même s'ils ne sont pas forcément au centre de l'intrigue, j'ajouterai également quelques mots sur le personnage le plus détestable du roman : Lieutenant. C'est ainsi que le nomme Aster. Lieutenant est l'oncle de Théo et possède un grand pouvoir au sein du Matilda. D'ailleurs, le Souverain étant gravement malade, c'est lui qui est pressenti pour lui succéder. Mais c'est avant tout un homme particulièrement sadique et haineux, qui se considère comme la Tête de Dieu. Il voue un profond mépris pour les Bas-Pontiens, et tout particulièrement pour Aster. Parce qu'elle ne respecte pas les règles, parce qu'elle ne se comporte pas comme les autres, et surtout parce qu'elle est proche de Théo. Car Lieutenant semble éprouver une fascination plutôt perverse pour son neveu, qu'il cherche à tout prix à contrôler, comme tout ce qui l'entoure, et Aster est une donnée difficile à maîtriser. Il prend ainsi un malin plaisir à la persécuter, si ce n'est pas lui directement, du moins par le biais des gardes. Et plus l'histoire avance, plus les tensions augmentent, plus il devient cruel à son égard. Un personnage particulièrement haïssable, donc, et tout aussi important pour l'évolution de l'intrigue.

Lorsque l'on constate à quel point la Souveraineté est cruelle envers le peuple des Bas-Ponts, l'on ne peut que s'interroger : comment se fait-il qu'il n'y ait encore jamais eu de rébellion ? Tout simplement parce qu'au sein même des Bas-Ponts, tous les habitants ne sont pas capables de faire preuve de solidarité, les querelles explosant plutôt aisément, tantôt par simple désaccord, tantôt parce que certains ont besoin de se sentir un minimum supérieurs à d'autres, etc. Et le fait que tout le monde croit dur comme fer que le vaisseau ne les conduira à la Terre Promise qu'à la condition de respecter les règles ne fait qu'accentuer l'ascendant de la Souveraineté sur les opprimés.

Toutefois la maladie du Souverain va venir mettre son grain de sel dans le rouage si bien huilé de la tyrannie matildienne. Revenons aux difficultés qu'éprouve Aster à comprendre tout ce qui est abstrait, tout ce qui n'est pas dit clairement. Ce problème de compréhension l'aura empêchée, pendant des années, de découvrir le véritable contenu du journal de sa mère, Lune. De ce que sait notre héroïne, sa mère s'est suicidée après sa naissance, et Aster ne parvient pas à en comprendre la raison, ce qui l'obsède. Mais un événement va lui permettre de découvrir, avec l'aide de l'esprit dérangé de Giselle, que le journal intime de sa mère est en fait codé et contient des secrets sur le passé et sur le vaisseau qui pourraient bien tout changer. Franchement, j'ai trouvé le codage du journal vraiment malin. Je crois que c'est un des éléments que j'ai le plus apprécié dans ce roman : décoder l'histoire de Lune. Ces découvertes, ainsi que d'autres bouleversements dans l'organisation du Matilda, vont alors pousser Aster à voir les choses autrement, et peut-être à agir autrement. Elle, ainsi que d'autres.

Pourra-t-on parler alors de rébellion ? Je dois avouer que la fin m'a laissée un peu perplexe. Je ne peux pas trop en expliquer la raison sans spoiler, mais disons simplement que c'est là pour moi une fin plutôt individualiste alors que le roman semble exhorter à la solidarité. En fait ce n'est pas vraiment une fin, selon moi, plutôt l'évocation d'un possible recommencement, sans certitude aucune. Beaucoup de questions restent pour moi sans réponses, rien n'est vraiment résolu. Pour le coup, je suis restée sur ma faim, je m'attendais à davantage, surtout avec cette tension qui semblait monter de plus en plus, pour finalement retomber comme un soufflé.



En bref...

L'incivilité des fantômes est un premier roman de science-fiction particulièrement intriguant. Si de prime abord il peut sembler manquer d'originalité (un vaisseau qui amène les derniers humains vers une nouvelle planète, des inégalités qui peuvent conduire à une rébellion, etc.), c'est dans son traitement (univers, personnages, etc.) que tout se joue. En effet, Rivers Solomon met en place un univers oppressant où la société a fortement régressé dans l'expression des libertés, des droits et de l'égalité, remettant en place une ségrégation raciale assez violante, combinée à un retour de l'inégalité des genres et de l'homophobie comme règles essentielles. Toutefois parler de genre est compliqué, l'auteur brouillant les frontières, rendant cette notion particulièrement floue. Les personnages ne peuvent ainsi être considérés comme spécifiquement femme ou homme, ce qui ajoute à leur complexité déjà bien présente. Des personnages intelligemment développés, tout comme l'intrigue, qui nous fait poursuivre une énigme tout en nous faisant nous révolter face aux horreurs que subissent les personnes de couleur sous le joug des puissants blancs. Tout cela serait parfait si les explications sur le fonctionnement de cette société n'étaient pas données de manière confuse et au compte-goutte, disséminées dans l'histoire, au point d'en compliquer la pleine compréhension.

Ainsi, bien qu'ayant beaucoup aimé les personnages et trouvé l'intrigue particulièrement intéressante, je garde un sentiment de confusion à la fin de ma lecture, incapable de savoir si j'ai vraiment bien compris ou non le fonctionnement de cette société ségrégationniste où la notion de genre est particulièrement vague (à dessein).
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Les Abysses

Ici, nous suivons Yetu une Wajinrus, sorte de sirène. Elle a un rôle très important pour son peuple, elle est historienne, une sorte de réceptacle pour tous les souvenirs de leur histoire. Ce rôle la fait trop souffrir alors elle décide de partir après une cérémonie de Don de mémoire. Les souvenirs sont trop puissants et trop horribles, en effet ce sont les souvenirs de ses ancêtres esclaves, femmes enceintes jeté des négriers car elles ne rapportaient pas assez.

Nous sommes dans une sorte de récit initiatique sur l'importance de l'histoire et des souvenirs. Je dois dire que je ne m'attendais pas du tout à ça et j'ai été plus que déstabilisé au début de ma lecture. J'ai mis un certain temps pour le lire pour pouvoir apprécier au mieux ma lecture. Et c'est vrai que j'ai passé un bon moment même si je ne suis pas sûre d'avoir tout compris et d'avoir pu apprécier pleinement les messages qui y sont développés. Je pense que cela est dû au blocage que j'ai fait au début de la lecture. Je pense que c'est un très bon livre mais qui n'est pas fait pour moi. Trop de narration, peu de dialogue et peut-être trop métaphorique pour moi.
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L'incivilité des fantômes

J'ai découvert ce livre dans le cadre d'un masse critique de Babelio, je ne connaissais pas l'écrivain.e. J'ai appris par la suite qu'il s'agissait d'un premier roman (ce qui m'a surprise vu la richesse du récit) et réalisé que l'héroïne avait beaucoup de points commun avec l'écrivain.e. Ce qui fait l'un des principaux intérêt de ce récit dystopique, qu'on pourrait résumer rapidement par "le transperceneige dans les étoiles", est l'originalité de son personnage principal. Ainsi, Aster est (comme son autrice) transgenre et autiste de haut niveau. En plus du récit de science fiction, Rivers Solomon parle de racisme, de ségrégation, de différence...

Le récit se lit plutôt facilement, cependant, il est à la fois riche et aboutit mais aussi assez brouillon. Il est facile de perdre le fil ou de rester bloquer dans certains chapitres, alors que d'autres passages sont bien maitrisés, touchants, incisifs, percutants. J'ai apprécié l'univers dystopique que l'écrivain.e a créé ainsi que les sous thèmes abordés, la psychologie des personnages inhabituels et la profondeur de la réflexion socio-politique qui se cache dans le Mathilda.

Ce texte très hétérogène est dur à suivre mais en tant que premier roman, il contient toutes les promesses de futurs romans de grande qualité.
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Les Abysses

Les Abysses est le deuxième roman de Rivers Solomon (auteurice non-binaire, États-Unis). Ce livre mêle de façon remarquable l'histoire de la traite des esclaves et la fantasy. À travers le mythe des Wajinrus, Rivers Solomon interroge les dynamiques à l'œuvre dans les relations des individus et des peuples avec leur passé. Faut-il se souvenir ? Peut-on oublier ? Portant tous les souvenirs de son peuple, Yetu parviendra-t-elle à lui assurer un futur ?

J’aurais tellement aimé que Les Abysses soit plus long ! J’ai eu un peu de mal à entrer dedans : le texte est si dense, on doit à la lecture ingérer tant d’idées et de concepts. Et une fois dedans, je pensais déjà : il me reste si peu de pages, je veux maintenant rester plus longtemps avec Yetu et Oori ! J’aurais aimé que les autres personnages, Amaba, Basha, Ephras… soient plus développés. J’aurais aimé que les souvenirs des Wajinrus du passé prennent plus de place. J’aurais aimé que le rythme ralentisse à la fin pour que nous puissions mieux apprécier les événements qui précipitent un peu le dénouement.

Et pourtant, quelle belle lecture ! Peut-être d’ailleurs qu’en le relisant, débarrassé de mes propres exigences sur le texte, je profiterai mieux de ce qui est écrit.
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Les Abysses

Quelle est la place de l'histoire et de sa transmission dans notre vie ? À quel degrés nous sentons nous impliqués dans cette mécanique et comment vivons-nous avec cet héritage ? Voici les thématiques avec lesquelles le lecteur devra composer. Découpé en chapître court, Les Abysses nous plonge au coeur même du tumulte de la transmission historique. Le rôle du transmetteur et de son rapport à l'outil de transmission sont au centre de ce livre.



Un ouvrage qui ne fait pas de concessions, des personnages forts de caractères et prêt à défendre leur position peu importe le prix, les sacrifices ou encore les pertes. Ce livre fait forcément échos à notre rapport à nous face aux heures les plus sombres de l'Histoire, peu importe les siècles, peu importe les peuples. Ici, le sujet est très ciblé, violent et pourtant l'écriture de Solomon permet d'aborder avec beaucoup de recul le sujet de ce massacre. Il résulte beaucoup de pudeur dans son écriture mais sans pour autant reléguer au second plan la gravité d'un tel événement.



Tout l'intérêt du livre, pour moi, réside dans la dualité entre Yetu et tous ses interlocuteurs. La diversité des points de vues et de leurs arguments, la difficulté d'homogénéiser et d'objectiver l'Histoire, afin de la transmettre au plus grand nombres au-delà de l'émotionnel et pouvoir atteindre la vérité, celle immuable et irréfutable jusqu'à ce qu'elle soit à son tour réfutée. Un cercle sans fin fait de douleurs et d'émotions contradictoires.



Les Abysses, c'est cet endroit sombre que personne n'a pu visiter jusqu'à présent, un lieu où vit tout un royaume de Wadjinrus ces sirènes issues de la cruauté de l'homme, ces corps mi-homme/femme, mi-poisson mis au monde après que l'homme ait atteint la noirceur abyssale de son âme. Tuer la vie sur terre. Mais la mer clémente, mère de toutes les créations dans son royaume donne vie à ses presque fantômes, ses oubliés de la Terre qui ne peuvent se souvenir qu'en souffrant.
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L'incivilité des fantômes

La science-fiction éminemment politique de Rivers Solomon est à son image : à contre-courant et aux prises avec la violence politique du monde.
Lien : https://www.telerama.fr/livr..
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L'incivilité des fantômes

L'incivilité des fantômes est un roman SF de Rivers Solomon qui s’inscrit dans le courant de l’afrofuturisme. L'action se passe dans un vaisseau, Le Mathilda dont la mission est de trouver une planète habitable pour ce qu'il reste de l'humanité, échouée à bord de cette arche géante. Contrainte de quitter la planète terre plus de 300 ans auparavant (« Chronologie spatiale »), les humains ont construit au fil des décennies, une société malheureusement trop semblable aux modèles terriens.

Chaque strate du vaisseau symbolise une appartenance sociale et/ou ethnique et bien sûr, plus on descend, plus les habitants seront pauvres et obligés de travailler comme des forcenés.

C’est dans ce contexte que nous suivons le personnage d’Aster, jeune femme un peu androgyne et « spéciale » entourée par Mélusine, sa « Tanta » qui l’a élevé, ses amies et son mentor « Le chirurgien », lui-même marginalisé de par sa naissance et son apparence mais qui jouit de par sa couleur « claire » d’une position plutôt confortable au sein de la flotte.

C’est une lecture qui m’aura énormément marquée. Terminée il y a quelques jours, l’histoire reste très présente à dans mon esprit. Les personnages m’ont beaucoup touchée et plus particulièrement Aster et son amie Giselle dont les mots sont trop faibles pour décrire les agressions qu’elles ont subies depuis toute petite. Les conditions de vie du pont sur lequel elles vivent, déjà peu enviables, se détériorent au fil de la lecture. L’atmosphère était pesante, anxiogène, je craignais toujours qu’il n’arrive une nouvelle horreur aux personnages.

Les questions de genre sont très présentes. Les bébés sur certains pont sont genrés au féminin jusqu'à ce que les garçons se démarquent avec une barbe par exemple.

Un racisme primaire est omniprésent réduisant la communauté noire à moins que des animaux. Les mots employés sont parfois d’une terrible cruauté, visant à leur dénier leur droit à l’humanité.

C’était une excellente lecture qui m’a profondément attristée et laissé un sentiment de désespérance.

Reste une faible lueur au fond du tunnel, qu’Aster gardera allumée par sa rage et sa volonté D’être tout simplement.


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Les Abysses

J'ai tout d'abord beaucoup aimé le style de Rivers Solomon, poétique, un poil onirique, mais pas trop pour moi, et j'ai été emporté par la première moitié du roman. Il faut effectivement se laisser porter par l'histoire, car nous aurons les clés de compréhension au fur et à mesure. Au début, j'ai eu un peu de mal à identifier qui parlait et à quelle époque ou période l'histoire se déroulait. On devine ce qu'il s'est passé, mais les évènements ne sont vraiment racontés qu'assez tard dans l'histoire.

Même si l'histoire n'a rien à voir, j'ai beaucoup pensé au Passeur de Lois Lowry, avec l'importance de la mémoire collective, de la transmission aux générations suivantes.



Une fois la moitié passé, j'ai commencé à m'ennuyer.... Une fois ce sujet posé, j'avoue que je n'ai pas forcément vue quel était l'objectif du texte.... Je l'ai terminé sur un gros sentiment d'inachevé, et de tout ça pour ça....

De beaux messages, de belles valeurs, une plume élégante, mais trop peu de surprise dans ma lecture, et pas d'attachement aux personnages.

J'ai un autre roman de l'auteur.rice, L'incivilité des fantômes, que je suis curieuse de découvrir malgré tout.
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Les Abysses

Yetu est l'historienne Wajinru, celle qui détient la mémoire collective de son peuple. Elle seule sait comment ses ancêtres sont devenus des sirènes. 🧜

Une fois l'an, elle partage ses souvenances avec son peuple lors d'une cérémonie, mais elle profite de cette occasion pour s'enfuir et abandonner pour toujours cette charge insupportable.

C'est ainsi qu'elle va rencontrer le peuple des 2 jambes...



⚠️ comme lu dans plusieurs chroniques, évitez de lire le résumé de l'éditeur avant ⚠️



Les Abysses c'est un court roman afrofuturiste. 🧑🏿‍🚀

Les Abysses, c'est une histoire qui part d'une des plus horribles tragédies de notre Histoire pour créer un monde fantastique au fond des océans. 🐠

Les Abysses, c'est l'histoire émouvante d'une Sirène qui ne supporte plus la charge que son peuple fait peser sur ses épaules. 🏋‍♂️

Les Abysses c'est la rencontre improbable de 2 êtres solitaires. 💔

Les Abysses c'est une histoire poétique qui traite de l'importance de ne pas oublier le passé. ⏰️

Les Abysses c'est à lire absolument ! 📖
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L'incivilité des fantômes

Genres : science-fiction, dystopie, post-apocalyptique, space opéra, afrofuturisme.



Thèmes abordés : racisme, ségrégation, esclavage, domination des puissants, classes sociales, endoctrinement, résistance, importance des racines, droit à la différence, neurodivergence / neuroatypie, questionnements sur le genre et le corps, santé mentale.



Contexte :

Le récit est situé dans un futur non daté, suffisamment lointain pour que les humains aient dû fuir la Terre devenue inhabitable depuis plusieurs générations, dans un gigantesque vaisseau spatial. En quête d’un nouveau monde qui semble de plus en plus inatteignable, voire utopique, les habitants du vaisseau vivent au sein d’une société très stratifiée et policée, de plus en plus détachés de leurs racines et sans réelles perspectives d’un nouveau foyer.



Le pitch :

Aster, une jeune habitante des Bas-Ponts, vit et travaille avec les autres Goudrons, les personnes noires regroupées sur les ponts les plus pauvres du vaisseau. Elle a toutefois été formée à la médecine par le Chirurgien, un haut gradé parmi les personnes au pouvoir, et elle est respectée par ses pairs pour son savoir-faire. Cela lui permet également de se déplacer plus librement que les autres Bas-Pontiens, et de bénéficier d’une certaine protection du Chirurgien. Aster est toutefois détestée par le Lieutenant, le futur successeur de l’actuel Souverain du vaisseau, et elle doit donc rester discrète.

La population des Bas-Ponts est exploitée, brimée par les Gardes, et leurs conditions de vie sont de plus en plus difficiles, notamment à cause de pannes de courant répétées qui plongent cette partie du vaisseau dans un froid terrible.

Aster, obsédée par sa mère décédée, dont il ne lui reste que des carnets illisibles, va s’intéresser à plusieurs événements étranges qui lui semblent liés, accompagnée par son amie Giselle.



Mon avis :

Ce livre est pour moi l’exemple parfait du roman que l’on apprécie pendant la lecture, mais dont la puissance vient vraiment nous frapper une fois refermé, et qui continue à se déployer dans notre esprit dans les semaines qui suivent.

Il se lit très facilement, et son apparente simplicité cache une construction très maîtrisée. L’auteurice a porté une grande attention aux détails pour faire vivre ses personnages et nous partager ses réflexions sans alourdir le récit.

Iel déploie une originalité dans son écriture, ses personnages et les thèmes abordés. Il est rafraîchissant de lire du space opéra, genre emblématique de la SF “traditionnelle”, renouvelé ainsi avec brio.

Les idées sont développées avec un parti pris qui nous pousse à nous questionner. Rivers Solomon a une vision personnelle qu’elle insuffle dans son roman, et elle n’a pas peur d’aller jusqu’au bout dans ses prises de position, ce qui permet d’éviter les évolutions de personnages ou les intrigues consensuelles et tièdes. J’ai depuis écouté plusieurs de ses interviews et j’aime beaucoup ce qu'elle apporte, son éclairage sur des questions relatives notamment à l’afrofuturisme.

C’est un roman noir, qui ne laisse pas beaucoup d’espoir quant à l’avenir de l’espèce humaine, et il risque de vous heurter si vous êtes sensible aux sujets explorés. Mais on y trouve également des passages de douceur qui réconfortent (un peu) sur la beauté des relations qui peuvent se développer, même dans le contexte le plus sordide. Notamment, les relations atypiques entre Aster et le Chirurgien sont pleines de respect et de tolérance, et constituent le genre de représentations que l’on voudrait voir plus souvent dans les films ou les romans, afin de créer de nouveaux modèles où se projeter.



Points forts du roman :

Des personnages ancrés dans leurs différences, un roman noir sans sensationnalisme, des messages forts exprimés par les personnages et l’univers, le traitement des questions liées au genre et au corps.



Pour une analyse détaillée de l'intrigue et des procédés narratifs, rendez-vous sur curiosites-litteraires.fr


Lien : https://curiosites-litterair..
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Sorrowland

"Les os, le sang, la pourriture font pousser les arbres et les champignons. La forêt transforme le chagrin en fleurs."



En plus d'être probablement l'instit' le plus cool du système solaire, le bookstagrameur @easy_grinder a bon goût, que ce soit en musique, en cinéma ou en littérature. Parmi tout un tas d'autres trucs, on aime Rivers Solomon, l'auteure de "L'incivilité des fantômes" et des "Abysses". On s'est donc jetés tous les 2 en même temps sur sa nouvelle pépite : "Sorrowland"...



Vern, jeune femme afro-américaine albinos et enceinte jusqu'aux yeux s'enfuit dans la forêt, loin de la secte qui la retenait prisonnière. Séquestrations, humiliations, mariages forcés, viols... Vern en a fini avec tout ça. Elle donne naissance à des jumeaux, en pleine nature et, bientôt, son corps subit d'étranges mutations. Elle va devoir affronter son passé et ses fantômes pour découvrir l'horrible vérité sur le Pays de Caïn... mais à quel prix ?



Rivers Solomon se revendique non binaire. Chacun en pense ce qu'il veut, on s'en moque, ce n'est pas la question. Ce qui est passionnant en revanche, c'est que la totalité de son œuvre est traversée de questionnements politiques et philosophiques sur la condition du peuple afro-américain, sur le devoir de mémoire, sur la quête d'identité. L'ensauvagement et la transidentité de Vern (et par extension de l'auteure) sont une façon de se réapproprier son corps après l'oppression qu'il a subi et de trouver un chemin vers la liberté totale, qu'elle soit physique, sexuelle ou spirituelle. Comme à son habitude, Solomon nous livre un texte puissamment évocateur, brutal et dérangeant. Et malgré un happy end plutôt décevant, "Sorrowland" est très difficile à oublier sitôt la dernière page refermée...
Lien : https://www.instagram.com/bi..
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Les Abysses

J'ai choisi ce livre un peu au hasard, pour la beauté de sa couverture (édition de 2020) et pour son titre.



C'est une histoire plutôt perturbante par la richesse de son imaginaire, de son peuple, de son monde.



Je n'ai pas trop aimé le poids porté par son personnage principal, sa souffrance et celle de son peuple. J'ai surtout apprécié à partir de la deuxième partie du roman, après qu'il se soit débarrassé justement de toute cette souffrance.



Mais la qualité du monde crée vaut vraiment le détour.
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Les Abysses

�itation: « Elle ne savait pas si elle disait vrai ou non. Emportée par un souvenir qui n'était pas le sien, elle avait été absente tandis qu'elle dérivait vers les requins qui voulaient la dévorer. Ce moment qu'elle vivait, à cet instant, était-ce réellement le présent ?»🧋



J'ai été très agréablement surprise pas ce livre. J'avais lu le résumé et j'avais un peu peur que je me retrouve dans un univers trop difficile à supporter, avec trop de drames.



Au final pas du tout, je me suis très vite attachée à notre personnage principal, qui voulait juste vivre sa vie. Ce qu'elle ne pouvait pas, car elle était l'historienne. Elle conserve en elle tous les souvenirs de tout son peuple, elle connaît leur passé, elle les subit même parfois. Un poids qu'elle trouve trop lourd à portée, elle en souffre trop.



C'est comme ça qu'un jour lors d'une fête spéciale et annuelle elle va rendre tous ses souvenirs à tous les membres de son peuple et s'enfuir pour la surface. Là elle sera un moment bléssé et elle restera dans un bassin naturel pour reprendre des forces.



Elle perd ses souvenirs petits à petits, mais pas entièrement et elle rencontre une humaine, qui lui apporte du poisson pour qu'elle se nourrisse. La sirène et l'humaine vont apprendre à s'apprivoiser, parler ensemble, échanger jusqu'à ce qu'une tempête dangereuse comment à pointer le bout de son nez au loin.



Elle est causée par le peuple de sirène qui souffre de leurs souvenirs, que va-t-il donc se passer?



Je ne peux pas vous dire sans spoiler tout comme je ne peux pas vous dire les origines de ce peuple de sirène.



Acceptera-t-elle de retourner auprès de son peuple pour les sauver et donc reprendre sur elle le fardeau des souvenirs? Ou bien les laissera-t-elle souffrir au risque de déclencher des cyclones et des tsunamis sur Terre? L'amitié avec l'humaine va-t-elle évoluer ?🎏
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Sorrowland

J'avais déjà lu les abysses de Solomon Rivers. Et là encore je suis envoutée par son écriture si particulière, douce, forte, violente parfois.

On nous parle des oubliés, des spoliés, des victimes, de racisme, de la lutte des noirs contre les blancs, des premiers peuples contre leurs envahisseurs, mais aussi d'homosexualité et d'amour tout simplement.

Avec une note de fantastique ce qui en fait un récit tout à fait à part.
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Sorrowland

Franchement, je ne sais pas vraiment comment vous parler de ce bouquin. Il fait partie de ces expériences littéraires qui ont du mal à rentrer dans une case et j'adore ça.



Il y a quelque chose de très humain, à l'intérieur. De très violent, aussi, en même temps que plein d'amour. On passe par beaucoup d'émotions. C'est une lecture très viscérale, dans tous les sens du terme, et ça me laisse une impression étrange, que j'ai du mal à décrire.



C'est marrant, parce que j'ai l'impression que j'avais le même sentiment en terminant "L'Incivilité des Fantômes" il y a quelques années. Ce sont des lectures fortes, qui abordent de manière plus ou moins dissimulées des tas de sujets importants, mais ce sont aussi des lectures qui laissent des sentiments indescriptibles et puissants. Peut-être bien que c'est justement ce que j'aime dans les récits de Rivers Solomon, cette impression nébuleuse à la fin, indéfinissable, mais inoubliable également.



J'ai particulièrement aimé la première partie, où la nature est omniprésente et Vern livrée à elle-même avec son caractère bien assis et ses enfants, tous vivant au jour le jour, en cohésion avec la brutalité tout autant que la beauté qui les entoure.

J'ai un chouïa moins accroché ensuite, où les événements s'enchaînent pour changer de sujet, bien que les deux parties soient liées, l'une apportant les réponses à l'autre. Toute cette histoire de métamorphose est fascinante et super intéressante.



Bref, je n'en dis pas plus. Le genre de bouquin qu'il faut lire parce qu'il faut le vivre. Si son précédent roman m'a déçu, Rivers Solomon revient en force avec Sorrowland, et j'en suis ravie !
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Les Abysses

Formidable conte contemporain d’une mythologie aquatique et fantastique née de la traite esclavagiste. Sensibilité, poésie et combativité pleinement au rendez-vous.





Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2022/05/25/note-de-lecture-les-abysses-rivers-solomon/



Yetu est l’historienne officielle de son peuple aquatique, qui vit libre et joyeux au fond des océans, parmi les cétacés et autres créatures bienveillantes. Cette vie libre et joyeuse, la plupart du temps, semble possible uniquement parce que, justement, l’Historienne assume l’intégralité de la mémoire cruelle de son peuple, ancrée dans des origines désormais presque mythiques, mais ayant clairement à voir avec les enfants miraculés des femmes noires enceintes jetées par-dessus bord, victimes impuissantes d’une quête inlassable du profit calculé, par les vaisseaux de la traite négrière arbitrant en permanence les centimes de coût et de bénéfice attendu.



Censée porter ce fardeau en permanence, pour le partager seulement brièvement, de temps en temps, lors de cérémonies rituelles où ces terribles souvenances, pourtant indispensables boussoles dans l’obscurité, parcourent chaque wajinru, avant d’être à nouveau enfermées, rendues à leur innocuité – sauf pour l’historienne -, dans le cerveau désigné pour cela de Yetu.



Mais Yetu n’en peut plus : doutant d’elle-même comme de sa fonction, se jugeant sévèrement atypique et pas à la hauteur de sa tâche, une crise plus aiguë que les précédentes lui fait abandonner sa charge à un moment crucial, et rejoindre la surface où l’attend peut-être, au contact ambigu des « deux-jambes », un destin tout différent.



Publié en 2019 et traduit en français par Francis Guèvremont en 2020, toujours chez Aux Forges de Vulcain, le deuxième roman de Rivers Solomon, deux ans après « L’incivilité des fantômes », transporte son puissant questionnement autour de la possibilité et du devoir de mémoire, de l’Histoire en général et de la traite esclavagiste en particulier, de l’univers clos, oppressant et particulièrement familier aux lectrices et aux lecteurs de science-fiction qu’est le vaisseau spatial générationnel, vers les profondeurs de l’océan et des secrets qu’il peut encore et toujours abriter. Jouant subtilement, dans certains interstices abrités de son récit, avec les motifs menaçants qui peuvent irriguer cet univers-là (on se souviendra certainement de la « trilogie des Rifteurs » de Peter Watts, peut-être de la nouvelle de Scott Baker, « Dans les profondeurs de la mer repose le sombre Léviathan », et même éventuellement de l’imposant « Abysses » de Frank Schätzing, avec son traitement d’éco-thriller géopolitique), Rivers Solomon a choisi une forme relativement brève (180 pages), et une tonalité plus proche de celles de la fable, ou même du conte, qui se chanterait peut-être le soir à la veillée, sous les grandes algues à palabres.



S’il y a bien un enjeu vital pour la littérature contemporaine qui refuserait de se résigner à être simple spectatrice désabusée d’une déliquescence – ou pire, son accompagnatrice spectaculaire marchande -, dans la création ou la réactivation de mythes puissants, populaires et politisés, au sens le plus pur et le plus authentique du terme, comme le collectif italien Wu Ming en ébauchait avec brio la théorie en 2008, avec leur « Nouvel épique italien », Rivers Solomon, dès ses deux premiers romans (et ce sera encore plus flagrant peut-être avec son troisième, « Sorrowland », dont on vous parlera très prochainement sur ce même blog), en propose des formes déjà hautement accomplies, tout en poursuivant son travail le plus personnel en interrogeant ce que nous doit la mémoire, et ce que nous lui devons, malgré tous les piaillements de celles et ceux trouvant si souvent que l’on en fait trop. En matière d’actualisation, de constitution des résonances des luttes (et des défaites) passées dans le travail au présent, non, « on n’en fait jamais trop » – comme le rappelait encore le grand Valerio Evangelisti quelques mois avant son décès : avec ce travail poétique intense au cœur de la fabrique contemporaine des résistances, et en insistant joliment sur les chemins souvent inattendus, riches de leurs altérités, que celles-ci peuvent emprunter, Rivers Solomon nous en offre une démonstration éclatante.



« Les abysses » est aussi, il faut le noter, une passionnante démonstration de la manière dont un travail collectif, formel et informel, peut s’emparer d’un motif imaginaire pour le faire vivre à plusieurs dans la durée, et lui donner progressivement cette décapante puissance mythologique : né en 1992 dans la musique du duo techno Drexciya à Detroit, repris et développé en 2017 par le hip-hop du crew the clipping, voici maintenant le mythe doté d’une musculature renouvelée (ou bien d’un exo-squelette, en plagiant par anticipation « Sorrowland »), pour affronter les irascibles et les atrabilaires mentionnés en exergue du roman.


Lien : https://charybde2.wordpress...
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Les Abysses

Yetu ne supporte plus sa mission d'historien.ne : son peuple, qui vit dans les fonds sous-marins, est né d'une histoire tellement horrible qu'iels l'oublient régulièrement, à l'exception d'un individu par génération.

Ce roman afrofuturiste s'inscrit dans une tradition qui débute et participe à la création d'un mythe. En cela, il est particulièrement intéressant, comme l'est la réflexion de Solomon sur la langue. Le style est en revanche un peu simple, je le classerais dans la catégorie "Young Adult".

Quelques indices m'amènent à m'interroger sur la qualité de la traduction française : je ne suis pas certaine qu'elle respecte la non-binarité des personnages, alors que c'est un élément important. A lire en version originale, donc.
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