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Critiques de Rivers Solomon (167)
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Sorrowland

Rivers Solomon nous offre à nouveau un roman surprenant, intense et marquant qui questionne de nombreuses thématiques avec force dans une intrigue mêlant SF, thriller, drame et weird fiction. Maternité, transformation psychologique et physique, amour queer, émancipation, rapport à la terre et au passé, oppressions et éducation sont autant de veines qui parcourent un récit puissant et organique qui ne peut pas laisser indifférent.



Critique complète sur yuyine.be!
Lien : https://yuyine.be/review/boo..
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L'incivilité des fantômes

Je referme ce livre avec un petit soulagement, car sa lecture a été plutôt laborieuse pour moi. De belles promesses pourtant avec cette dystopie dans le "huis-clos" d'un vaisseau monde, abritant une société terriblement inégalitaire... voilà un cadre de SF rassurant. Pour la touche originale nous suivons une héroïne puissante soutenue par une communauté de femmes opprimées.

Mais après mélange de ces ingrédients, on se retrouve à avaler une soupe assez lourde aux parfums confus. Trop de choses se bousculent : écologie, sororité, oppression, résistance, quête d'identité... Les personnages et les situations sont extrêmes, difficile alors pour moi de m''identifier et d'être plus qu'un spectateur qui attend juste le dénouement par curiosité. On attrape ponctuellement des passages très inspirés, et on se dit que cette auteure "non-binaire" dont c'est le premier roman (j'apprends cela en lisant d'autres critiques) a encore de belles choses à raconter. Il y a des chances pour que j'y revienne à l'occasion !
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Sorrowland

Du body horror sur fond de paranoïa et d’hallucinations, mais aussi d’une critique acerbe tant du patriarcat que de l’impérialisme interne des États-Unis. L’évolution de l’histoire est assez inattendue et malgré quelques passages un peu plus en-deçà, le roman se laisse lire avec plaisir – entrecoupé de frissons.



Rivers Solomon s’est fait une place dans les littératures de l’Imaginaire avec ses deux premiers romans, et tout en continuant d’explorer les thèmes qui lui sont chers, signe un nouveau texte plein de tripes, de colères mais aussi d’espoirs.



Critique complète :

https://blog.belial.fr/post/2022/10/26/Pour-quelques-runes-de-plus-Bifrost-108
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Sorrowland

Sorrowland est le troisième roman de Rivers Solomon. L’auteurice met en scène le personnage de Vern, jeune femme qui s’échappe d’une secte, le Domaine Béni de Caïn, pour survivre à sa violence aliénante et élever ses enfants, Farouche et Hurlant, comme elle l’entend, d’abord dans la nature, puis dans le monde extérieur hostile, auquel elle se doit s’adapter. La narration nous montre les pratiques coercitives employées par la secte pour briser et maintenir les croyants sous sa coupe, mais aussi la manière dont Vern tente de se reconstruire malgré ce qui se trouve à ses trousses. Cette reconstruction psychique s’articule à une transformation physique, puisque le corps de Vern se métamorphose, mais je ne peux pas vous en dire plus.

Comme les romans précédents de Rivers Solomon, Sorrowland est magnifique et je ne peux que vous encourager à le lire !

Chronique complète et détaillée sur le blog.
Lien : https://leschroniquesduchron..
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Sorrowland

Un thriller fantastique endiablé pour un troisième roman de résistances mythologiques foisonnantes et convergentes.





Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2022/07/16/note-de-lecture-sorrowland-rivers-solomon/



Pas de note de lecture pour ce « Sorrowland », troisième roman de Rivers Solomon, publié en 2021 et traduit en français en 2022, toujours par Francis Guévremont et toujours chez Aux Forges de Vulcain : l’article que je lui consacre est à lire dans Le Monde des Livres daté du vendredi 15 juillet 2022, ici. Si je n’ai pas résisté au plaisir de reproduire ci-dessus la citation illustrant l’article dans le quotidien du soir, et d’en proposer quelques autres ci-dessous, le reste des commentaires sur cette page de blog sont donc plutôt à considérer comme des notes de bas de page vis-à-vis de l’article principal, incluant éventuellement quelques bribes (n’ayant pas été utilisées telles quelles) de mon entretien à Paris avec Rivers Solomon il y a quelques semaines.



L’un des traits saillants de ces 500 pages, qui empruntent cette fois davantage les codes de l’horreur gothique et du thriller d’espionnage (en un cocktail particulièrement réjouissant, la composante thriller proposant un mix redoutable de classique Robert Ludlum – les super-héros solitaires ne sont pas toujours où l’on croit – et de minutieuse fiction documentaire à la Dana Spiotta – lisez « Eat the Document ») plutôt que ceux de la science-fiction interstellaire ou de la fantasy mythologique, est leur foisonnement thématique, appuyé dans certains chapitres, beaucoup plus discret dans d’autres. Si l’on ose un glissement stylistique (mais oui !) du côté de ce que les universitaires anglo-saxons appellent, pour le meilleur et pour le pire, la « French Theory », particulièrement familière à Rivers Solomon, avec son master de Stanford en études comparatives raciales et ethniques, « L’incivilité des fantômes » et davantage encore « Les abysses », regardent vers Jacques Derrida et ses flèches métaphoriques acérées, là où « Sorrowland » lorgne beaucoup plus manifestement vers les rhizomes de Gilles Deleuze et Félix Guattari (et pas uniquement par la présence officielle dans le texte, le moment venu, de mycélium).



La notion même de « sensitivity reader » demeure controversée aujourd’hui, tout particulièrement en France, alors qu’il semble plutôt normal et logique de s’assurer d’un minimum de respect et de vérisimilitude lors du traitement de sujets sensibles du point de vue des personnes directement concernées – sans préjuger naturellement des choix artistiques qui seront faits, en toute connaissance de cause, par les autrices et les auteurs in fine. On pourra noter ainsi que si Rivers Solomon réalise à l’occasion des consultations pour des collègues sur les sujets d’afro-américanisme et de troubles du spectre de l’autisme, pour lesquels sa légitimité semble indéniable, il ne lui a pas fallu un instant d’hésitation pour s’assurer à son tour d’une lecture sensible extérieure sur les questions amérindiennes et de troubles de la vision liés à l’albinisme, qui jouent un rôle essentiel dans « Sorrowland ».



D’une manière qui ne faisait pas jusqu’ici partie de son ADN observé, Rivers Solomon est aussi capable d’une belle dose d’humour (même s’il s’agit souvent d’humour noir), jouant soit des étrangetés de point de vue que lui permet son personnage principal, soit d’une forme d’anachronisme de tonalité que ne renieraient peut-être pas les Wu Ming (avec lesquels se partage de facto ici une certaine conception du lien combattant entre le politique et le littéraire) de « L’Œil de Carafa » ou la Marie-Fleur Albecker de « Et j’abattrai l’arrogance des tyrans ».



Comme dans les deux romans précédents, l’enjeu principal ici, au service duquel les moyens littéraires, aussi malléables que possible, doivent se mobiliser, est bien l’élaboration de contre-narrations au sens de John Keene, comme l’illustrent ailleurs un Colson Whitehead et un George Saunders (que je cite logiquement, après échange avec Rivers Solomon – qui apprécie tout particulièrement l’auteur de « Grandeur et décadence d’un parc d’attractions » -, dans l’article du Monde des Livres cité en introduction de cette « note »), ou encore une Nalo Hopkinson (également l’une des autrices favorites de Rivers Solomon, et dont on ne peut que regretter à nouveau qu’elle soit aussi peu traduite en France) et, bien entendu, une Octavia Butler, dont la stature de pionnière d’un afro-futurisme résolument littéraire ne cesse désormais de s’affirmer.



On notera également que par rapport aux deux romans précédents, « Sorrowland » marque certainement un point d’inflexion dans le nombre d’ambiguïtés dialectiques proposées à la sagacité de la lectrice ou du lecteur, du couple réassurance /endormissement (ou pire) de la religion (surtout dans sa déclinaison nord-américaine évoluant si souvent à la limite de la secte) à celui émancipation individuelle / lutte collective (si joliment incarné ici au sein du duo formé par l’Afro-Américaine Vern et l’Amérindienne Gogo), en passant par l’opposition ville-civilisation / forêt-sauvagerie qui, tout en jouant autour des figures mythiques de l’esclave en fuite et de l’enfant sauvage, force la question-clé : « qu’est-ce qu’être sauvage de nos jours ? », pour ne citer que quelques-unes des mécaniques de réflexion par opposition mises ici en œuvre par Rivers Solomon.



Assumant pleinement ses visées et ses ambitions politiques dans un contexte marqué par l’urgence à laquelle est désormais confronté « Black Lives Matter », parmi d’autres mouvements de défense des minorités bafouées ou menacées, « Sorrowland », tout en gardant les aspects joueurs et efficaces que lui permet le recours habile à l’arsenal des « mauvais genres », marque une nouvelle étape décisive dans le développement littéraire de Rivers Solomon, pour notre plus grand plaisir complice – et notre soutien un peu plus qu’implicite à tous ces éveils et travaux mémoriels si nécessaires.


Lien : https://charybde2.wordpress...
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Sorrowland

Je ne connaissais pas Rivers Solomon, mais sa présence dans le catalogue des Forges de Vulcain avait de quoi titiller ma curiosité, et trouver « Sorrowland » sur un présentoir de la librairie Aux Mots à la Bouche finissait de me convaincre à entrer dans l’histoire de Vern.

L’ouverture nous plonge directement dans l’ambiance : Vern, une jeune femme noire, accouche de jumeaux : Hurlant et Farouche. L’évènement serait banal si Vern n’était pas une adolescente et si elle n’était pas au beau milieu d’une forêt américaine. Une fois ses deux petits mis au monde, elle reprend sa fuite : Vern est traquée, elle vient de s’échapper d’une communauté, Le Pays de Caïn, dans laquelle elle a grandi et est devenue, bien malgré elle, la femme du gourou Sherman. La promesse du Pays de Caïn à l’époque de sa création pouvait être séduisante pour une population noire confrontée au racisme et à la ségrégation : créer un havre de paix pour les Noirs et leurs enfants, loin de toute influence des Blancs. Mais quand communautaire se met à rimer avec sectaire, quelques-unes déchantent et c’est le cas de Vern qui n’entend pas continuer à subir les sévices qu’on lui inflige et qui prépare son évasion à l’instar de sa meilleure amie qui, elle, a réussi à s’enfuir. La voilà donc en forêt, chargée de deux bébés, fuyant des membres de la communauté désireux de la récupérer et lui faire passer son envie de quitter le groupe.

Vern reste plusieurs années en forêt, mais le danger trop proche et l’impression grandissante que son corps, comme habité par un élément étranger, est en train de se transformer en lui infligeant des souffrances terribles, la poussent à sortir du bois et rechercher la protection de la civilisation. Sorrowland est un récit de passages, de transitions, de transformations. Et c’est dans la douleur que la jeune fille qu’elle était, contrainte, soumise, devra accoucher de la femme qu’elle veut être, libre. C’est en partie l’Amour et la Nature qui joueront le rôle de sage-femme en l’aidant à assumer ses différences et son passé. Un passé aussi tourmenté que l’histoire américaine et le fonctionnement de la secte qui l’ont vu grandir, et des différences qui auraient pu faire d’elle un monstre, que ce soit par la métamorphose qu’elle subit ou par ses amours lesbiennes rejetées avec brutalité, mais qui finalement se révèle des forces une fois assumées.

« Sorrowland » est une mine de thèmes abordés – Rivers Solomon en fait elle-même une liste sommaire en note d’ouverture – et la majorité d’entre eux pourraient sembler lourds, noirs. Le racisme, l’homophobie, la violence, ça ne vend pas du rêve et ça ne remplit pas de paillettes nos petits yeux de lecteurs ! Et pourtant, il y a dans la destinée de Vern une force intérieure, un combat qui force le respect, l’admiration et permet d’allumer quelques lueurs d’espoir agrémentées de touches d’humour toujours bienvenues. La plume de l’autrice est à l’image de l’héroïne, puissante, violente, tendre, dure et riche. Incontestablement bien écrit et traduit par Francis Guèvremont, le roman de Rivers Solomon est pour moi une incitation très forte à aller découvrir ses deux précédents romans.
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L'incivilité des fantômes

Quand un livre et un lecteur ne se rencontrent pas

Il est de ces livres où le sujet vous échappe complètement, où la forme et le fond paraissent si éloignés l’un de l’autre que les saisir vous semble improbable, à moins de plonger dans la tête dérangée de l’auteur. L’incivilité des fantômes est de ceux-là : le mystique, la religion et la science-fiction s’invitent pour nous donner à lire une aventure douloureuse, où les personnages malaisants et perturbants ne nous touchent pas vraiment. Il est difficile de les comprendre, ils restent comme hermétiques, peu enclins à partager leurs émotions et à partager leurs cheminements intérieurs.



Leurs manières de s’exprimer, leurs préoccupations, leurs histoires et leurs désirs restent parqués à des milles de notre cœur, déjà bien trop englué dans la masse noire dépeinte par le roman, qui nous enveloppe de son animosité et de son atmosphère déprimante, angoissante. Les douleurs des héros restent les éléments les mieux définis mais nous assaillent tant qu’il est nécessaire de fermer le livre pour mieux respirer et reprendre contenance. Les termes crus, familiers, en argots ou d’un autre temps, se mélangent pour définir les catégories sociales, et nous rappellent à quel point ces personnages sont pauvres, oubliés du pouvoir en place, et sans espoir de vivre dans un monde meilleur. Les métaphores du mal, de la crasse et de la douleur défilent sans discontinuer sans nous laisser de répit.



Une atmosphère bien trop perturbante et malsaine

L’auteur instille de l’espoir, pour ensuite le tuer dans l’œuf. Cette balance infernale donne la nausée, aggrave les émotions néfastes que le récit transmet et crispe le lecteur. En plus, les dialogues à rallonge et plats tournent en rond. Les personnages s’avèrent difficiles à saisir, alors que les chapitres les plus édifiants et intéressants n’arrivent que dans les dernières pages, des chapitres où les personnages prennent enfin toute la place qu’ils méritent, des chapitres où ils s’expriment dans toute leur puissance. Mais bien trop tard…



Une intrigue principale qui n’a plus aucun sens

Certains passages ralentissent inutilement l’intrigue, comme ceux qui nous racontent le passé d’une héroïne qui ne nous atteint plus depuis longtemps. Un suspense intenable et mal dosé qui ne fait que nous frustrer, nous donnant l’envie de tourner les pages pour enfin toucher le point sensible de l’intrigue principale. Celle-ci se distille à trop de niveaux, perd de sa substance première et nous perd, littéralement. Les discours métaphysiques et religieux reprennent de la place, nous questionnent, et ne semblent pas trouver de réponse satisfaisante. Les non-dits et les sous-entendus s’accumulent sans que la fin du roman ne nous aide véritablement à comprendre. Le message de l’auteur nous passe par-dessus la tête, et c’est vraiment dommage.



Les personnages asociaux et atypiques manquent cruellement d’émotions pour que l’on s’y attache. Tels des robots, ils s’expriment sans nuance, presque avec automatisme et raideur. Le lecteur se détache de leurs soucis, de leurs souffrances et reste simple spectateur d’une histoire qui part dans tous les sens. L’intrigue principale, d’abord dystopique et prenante, tombe à plat. Le combat contre le pouvoir n’intéresse plus, finit par lasser. Le roman décrit des tranches de vie, des instants simples qui auraient pu suffire à eux-mêmes si les personnages avaient été captivants.



Des montagnes russes

Le côté science-fiction se perd de vue à de multiples reprises, tant le récit se focalise sur les vies étranges des héros. De temps à autre, l’âme du vaisseau et la traversée dans l’espace se rappellent à l’histoire, mais cela ne dure jamais bien longtemps. L’intrigue sur les « fantômes » prend rapidement et se trouve liée à celle de la mère morte de l’héroïne. Le lecteur joue le jeu, mais, comme le reste, elles s’éteignent d’elles-mêmes, tombent à l’eau sans explication satisfaisante. Le roman constitue une montagne russe dans laquelle les secousses et la vétusté ne nous donnent pas envie de rester, malgré des sensations agréables qui nous parcourent par moment.



L’incivilité des fantômes aurait mérité une construction peut-être plus linéaire pour que l’on puisse suivre, et surtout des personnages émotifs, qui touchent nos cœurs. L’univers morne et froid aurait questionné davantage, comme ceux des dystopies à la mode, si l’intrigue ne partait pas dans tous les sens, nous amenant à nous questionner à longueur de temps sur des sujets sans intérêt.



Un roman sans doute trop métaphorique, alambiqué et perché pour plaire à tous les fans de science-fiction et d’intrigues survoltées. La lutte contre le système n’a jamais été aussi ennuyante.



[Je publie des chroniques littéraires sur lavisqteam.fr et celle de ce roman est présente au lien suivant : https://www.lavisqteam.fr/?p=57759



J'ai mis la note de : 6/20]
Lien : https://www.lavisqteam.fr/?p..
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L'incivilité des fantômes

L'histoire se passe en huis clos sur un vaisseau spatial cité où vit depuis quelques siècles ce qui reste des humains de la Terre. D'ailleurs, la Terre n'y est plus guère qu'un mythe des origines sans réalité tangible. Les étages du vaisseau identifiés par des lettres, une société où la couleur de peau détermine le statut social. Des conditions de vie extrêmement dures pour les basses classes sans surprise. On suit Aster, une jeune femme qui a une intelligence hors normes, des compétences en médecine et sa relation privilégiée avec le Général Chirurgien Théo (héritier d'un des dirigeants) qui lui permettent de louvoyer à travers les niveaux, d'apporter son aide aux gens. Mais son passé et notamment celui de sa mère la met en danger vis à vis de l'oncle de Théo qui l'a prise en grippe.

Entre manœuvres politiques, secrets ancestraux et familiaux, racisme, oppression des masses, quête d'identité et de racines, violence extrême (trigger warning si vous êtes sensibles ce livre contient pas mal de scènes de viol et de torture assez insoutenables), recherche scientifique, course poursuite, le tout dans une atmosphère de cocotte-minute prête à l'implosion. Ce livre ne laisse pas indifférent mais la multiplicité des thèmes comme l'enchaînement erratique des séquences de narration, emmaillées de rêves, de souvenirs, de passages complètement en dehors du contexte présent, m'ont souvent sortie du récit et me l'ont rendu difficile à suivre. Ajouté à cela le style complètement détaché du personnage d'Aster dont l'emprise émotionnelle sur les choses est quasi inexistante.

Un OVNI littéraire qui m'a convaincue par son fond extrêmement riche, l'univers en huis clos de ce vaisseau monde et le foisonnement de thématiques importantes traitées ; moins par ces personnages trop détachés, le caractère violent de certaines scènes et l'aspect décousu de sa forme pour une finalité peu à la hauteur des espérances. A lire par les amateurs de SF qui n'ont pas froid aux yeux et l'estomac bien accroché.
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L'incivilité des fantômes

Ce premier roman de Rivers Solomon, An Unkindness of Ghosts ( 2017) traduit en français par Francis Guévremont sous le titre L’Incivilité des fantômes ( Aux Forges de Vulcain ) a été remarqué et souvent salué favorablement, surtout en raison des thèmes qui y sont abordés :

la domination d’une partie de la population du vaisseau regroupée sur les « hauts ponts » sur une autre (les « bas-ponts), oppression liée à la couleur de peau ( pour résumer : la domination blanche, particulièrement celle des hommes) ; la violence et la ségrégation ; la notion de genre ; et la perception interne du handicap ( autisme Asperger ).

Le roman se déroule à bord d’un immense vaisseau spatial, une arche générationnelle, un thème bien connu en SF ( Croisière sans escale — Brian Aldiss ; Les orphelins du ciel — Robert Heinlein ; et toutes ces représentations dans les séries TV plus proches de nous). Le Matilda, nommé en référence au dernier bateau négrier le Clotilda à avoir accosté aux USA, est en route depuis plus de 300 ans pour une planète qui accueillera enfin les rescapés d’une Terre mourante. Nous n’en saurons pas plus, ni des conditions de l’extinction de la Terre, ni de l’époque, ni de rien d’autre, d’ailleurs (et c’est là que ça commence à être faible mais j’y viens).

A bord, comme dans le Transperceneige, on trouve différents ponts répartis de A à Z : une élite, sociale, politique, économique, religieuse et blanche se situe dans les « hauts ponts. Les ponts inférieurs sont occupés par ce qu’on pourrait appeler des esclaves, une population noire, exploitée, laissée sans soins médicaux, sans confort, violentée, etc…

Ponts, vaisseau, tout cela rappelle les navires négriers.

(suite sur le blog)
Lien : https://imaladybutterfly.wor..
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L'incivilité des fantômes

Cela fait plus de 300 ans que les humains ont quitté une Terre en ruine et inhabitable, ils vivent désormais sur un vaisseau spatial en quête d’une nouvelle planète pouvant les accueillir.

Sur ce vaisseau la discrimination fait rage, et les castes sociales se mesurent en fonction du pont sur lequel vous vivez et de votre couleur de peau. Nous suivons Aster, jeune femme à la peau noire, vivant sur les bas-ponts. Héroïne incroyable de par son intelligence et sa différence, elle nous entraîne dans un monde régressif, qui fait froid dans le dos.



L’histoire est passionnante et le lecteur est entraîné dans cet univers futuriste dramatique. Action, drame, politique, flashback, on ne s'ennuie pas une seconde au cours de la lecture. Mais la vraie force de ce récit est Aster. Aster est la voix principale de ce roman. C’est un personnage attachant, passionnant, brillant. Sa voix, sa façon de penser et d’aborder les choses de manière très littérale donnent un ton apaisant au récit. Un ton inébranlable, un ton qui défie le monde. C’est une héroïne comme on en voit rarement, mais assurément, elle restera dans les mémoires par son exceptionnalité.



Le roman se lit tout seul, et l’auteur, à travers ses écrits, parle de racisme, de politique, d’autisme, de transgenre, d’écologie, de famille, d’amour... Jamais elle ne met des mots dessus et pourtant on ne peut pas les rater. C’est très bien écrit et très bien abordé. Et cela prend encore un sens plus profond quand on sait que l’auteur, River Solomon, se définit comme transgenre et non binaire.



Ce livre bouleverse et transporte le lecteur dans un univers qui fait écho à notre passé et notre présent mais, espérons-le, pas à notre futur.
Lien : http://wlatetedanslesetoiles..
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Les Abysses

Je comprends l'intention. J'apprécie l'originalité de l'idée mais... ça manque un peu de clarté, heureusement que la quatrième de couverture explique clairement de quoi il retourne parce que ce n'est pas évident à mon sens de comprendre ce qui est dénoncé. Fait pourtant assez peu connu, en tout cas peu évoqué, de l'histoire de la traite des noirs.

Ce livre dépeint l'horreur qui a été infligée aux femmes enceintes, une horreur qui devient le passé et l'histoire d'un peuple marin en fuite face à cette réalité. On parle beaucoup de la douleur de l'Historien, celui qui a la mémoire de ce passé, un passé évoqué par petit bout, de façon évasive. Il y a une grande réflexion sur la nécessité de se souvenir, d'en faire une force plutôt qu'une faiblesse, d'accepter l'horreur pour grandir et perpétuer la mémoire.

Je suis très mitigée et quand je vois les critiques je me dis que j'ai peut-être loupée quelque chose. Le sujet m'intéressait vraiment mais j'ai le sentiment qu'on est passé à côté de quelque chose. Moi uniquement, qui sait ?
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Les Abysses

L’histoire de ce roman résulte « d’un jeu de téléphone arabe artistique ». Ce n’est pas moi qui le dit mais le groupe de hip-hop Clipping. En effet, dans les années 90,un mythe afrofuturiste voit le jour grâce au groupe Drexciya. L’élément central de ce mythe est un peuple sous-marin issu des esclaves africaines enceintes jetées par-dessus bord.Un nouveau peuple né du chaos. Les fœtus plus fort que la mort et qui ont su s’adapter à leur nouvel environnement.





« Souvenez-vous. Dit-elle. Souvenez-vous »

Dans Les Abysses , Rivers Solomon reprend ce postulat. Nous suivons Yetu, l’historienne des Wajinrus, ce peuple sous-marin apparenté aux sirènes. Chaque année il y a la cérémonie du «Don de mémoire », durant laquelle l’historienne partage avec ses congénères tous les souvenirs de son peuple. Seule une personne de la tribu détient les clés du passé. Un lourd fardeau pour Yetu, toutes ces « souvenances » sont pour elle de plus en plus difficile à porter. Elle veut être libre. Revenir avant ses 14 ans. Être exempt du poids du passé. Elle va alors prendre une décision radicale…





C’est un récit fantastique certes, mais ne vous arrêtez pas au genre et n’ayez pas peur de vous lancer si vous n’êtes pas adeptes habituellement. Ici les Wajinrus ne sont que la partie émergée de l’iceberg. Attention ce n’est pas un récit centré sur ces femmes sacrifiées lors des traversées. Elles ne sont « que » la genèse de ce mythe. Une partie qui aurait pu être plus développée mais je ne crois pas que l’envie de l’auteure eut été de traiter ces destins tragiques. Ici c’est bien le poids du passé, de l’importance des origines, du genre et de l’amour qui transcende le genre(peuple hermaphrodite et Rivers Solomon est transgenre). Sommes-nous plus heureux en occultant le passé ? Et à contrario comment vivre avec un passé riche en souffrances ?





Un roman singulier dans lequel je me suis peu à peu laissée emporter. Si bien que je n’ai plus vraiment fait de différences entre les Wajinrus et nous les « deux jambes », « les nageoires fendues ». Cependant il y a bien quelque chose qui nous différencie et qui est toujours d’actualité : la cruauté humaine…
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Les Abysses

Commençons par la fin du livre... qui en explique la genèse ! L'idée de départ vient d'un groupe de techno des années 90, Drexciya, reprise dans une autre chanson, hip hop cette fois, de clipping., que Rivers Solomon étoffe à sa manière en en faisant un roman.

Ce "mythe afrofuturiste" fait des bébés des femmes esclaves enceintes jetées par dessus bord, les premiers représentants d'une race de sirènes.

Des siècles plus tard, nous suivons les aventures de l'une d'elle, Yetu, historienne de son peuple, les Wajinrus.

Au travers de ses questionnements, de ses doutes, de ses "souvenances", nous bouchons quelques trous de cette Histoire. Depuis la noyade des meres humaines jusqu'au développement de cette civilisation des abysses.

Après le "Sirènes" de Laura Pugno, une nouvelle réjouissante variation sur le thème de ces créatures marines.

Le texte est jalonné de réflexions sur l'Histoire, la mémoire, le besoin ou non pour un peuple de connaître son passé.

Malgré le format relativement court du roman, j'ai néanmoins trouvé que l'héroïne nageait un peu en rond. Que l'on tournait autour du pot, sur ses souffrances et ses doutes. Comme je l'ai lu dans une autre critique, une multiplication de récits des souvenances aurait été appréciable et aurait permis de tracer d'autres lignes de l'histoire de ce peuple.

Ceci étant, la lecture est très plaisante et j'ai adoré la façon dont la civilisation, la vie sous-marine est brossée - à tel point que j'en aurais voulu plus !

Une belle lecture mais qui en garde sous la nageoire.
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L'incivilité des fantômes

Depuis longtemps, L’incivilité des fantômes de Rivers Salomon me faisait de l’œil. Et pourtant, ayant enchaîné une série de livres assez durs récemment, j’ai pris mon temps avant de le commencer. Une fois lancée, en revanche je me suis retrouvée happée par l’histoire d’Aster et du Chirurgien, tentant chapitre par chapitre de retrouver mon chemin dans cet univers riche et déroutant.

De quoi parle L’incivilité des fantômes ? Il pourrait se résumer très succinctement dans un croisement entre Racines et La Couleur pourpre confinés dans un seul lieu : un vaisseau générationnel. Une catastrophe non précisée a forcé l’Humanité à quitter la Terre et celle-ci vogue depuis des générations dans un vaisseau en ayant presque tout oublié de son lieu d’origine ou du fonctionnement dudit vaisseau. Dans cette société confinée, une ségrégation s’est établie entre les différents ponts : au sommet vit l’élite blanche et patriarcale gouvernant dans une sorte de dictature militaro-religieuse le reste du vaisseau ; dans la soute, les techniciens, ouvriers et autres personnes de couleurs survivent en étant corvéables à merci. Chaque pont va développer son propre langage et ses propres coutumes : sur l’un les enfants seront tous considérés comme neutres de la naissance à l’âge adulte, sur l’autre, les citoyens sont par défaut des femmes à moins d’en décider autrement, etc.

Plongeant au cœur du voyage, L’incivilité des fantômes nous propose de suivre Aster, assignée femme du pont Q, médecin clandestine, polymathe et malheureusement pas de la bonne couleur de peau. Orpheline, elle va tenter de déchiffrer les carnets de sa mère mécanicienne pour savoir ce qui cause la maladie du Souverain actuel et les défaillances du vaisseau.

À travers cette enquête, Rivers Solomon nous dépeint un monde cruel et dur, qui finalement rend malheureux tous les habitants du vaisseau, quel que soit leur étage de naissance ou de vie. Ses personnages, aussi bien les deux protagonistes principaux — Aster et le Chirurgien — que les seconds rôles comme la dangereusement fantasque Giselle ou la tante Mélusine, sont criants de vérité et particulièrement humains. Même le cruel Lieutenant et les gardes avec leur veulerie et leur violence ne sont que les travers d’un système profondément injuste. La résolution de l’intrigue tient également bien la route avec une fin douce-amère qui respecte fidèlement les personnages. En revanche, si vous êtes fan de hard-science-fiction passez votre chemin : les explications scientifiques sur le comment du pourquoi le vaisseau fonctionne et arrive à nourrir toute cette population depuis plus de trois siècles ne sont pas le fort de Rivers Solomon. Son point fort est dans les « soft science ». En effet, ses descriptions des interactions sociales, des différentes coutumes qui se sont établies d’un pont à l’autre et sur la transmission des savoirs sont fascinantes. Tout autant que les différentes approches du genre et de la sexualité de ses personnages, pas forcément réjouissantes en raison de la société dans laquelle ielles évoluent (oui, le pronom non-binaire est volontaire). En raison de certaines scènes dures, ce livre de conviendra pas à tout le lectorat. En revanche, c’est une œuvre de science-fiction particulièrement forte qui vous incitera, j’espère, à réfléchir.
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L'incivilité des fantômes

Avant toute chose, pour ceux qui, comme moi, seraient tombés amoureux de la couverture VO et veulent tenter la lecture en anglais, An unkindness of ghosts m’a semblé très accessible et je n’ai ressenti aucune difficulté de compréhension insurmontable à mon humble niveau. L’extrait en fin de chronique peut vous aider à voir si c’est compréhensible pour vous. Ce roman est en tout cas une véritable claque qui secoue non seulement nos émotions mais critique aussi fortement les inégalités sociales et de genres et le racisme tout en dénonçant les dérives d’une société ultra contrôlée, tyrannique et violente. Le vaisseau Mathilda [...]



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L'incivilité des fantômes

« Asperger welcome », disent parfois les offres d’emploi dans les labos de recherche internationaux actuellement. Est-ce l’influence de Rivers Solomon ? En tout cas celle de ses semblables, des autistes de haut niveau que la recherche et la création osent solliciter pour leurs qualités exceptionnelles, et leur sociabilité singulière, souvent à fleur de peau. Ce roman L’incivilité des fantômes, ISBN : 978-2373050561, a été traduit (très finement et ce n’était pas simple, saluons la performance consistant à respecter les décalages de langue : sa miman, iel…, mais aussi les qualités de traduction des termes inventés, tel le siluminium, ou pire et sans recours possible au latin) par Francis Guévremont pour les éditions AFDV, Aux Forges de Vulcain. L’univers de ce roman est constitué par le Matilda, un hyper-gigantesque vaisseau spatial bien au-delà de nos proportions et notre imagination. Le Matilda a quitté la Terre pour échapper à l’anéantissement et vogue entre les galaxies ; mais ses concepteurs et promoteurs ont reproduit les divisions sociales, comme si elles étaient essentielles. Pourtant l’auteur donne au vaisseau ce nom de Matilda, sans doute en hommage à Matilda Joslyn Gage, féministe américaine qui a donné son nom à « l’effet Matilda » désignant la dépréciation systématique des réalisations féminines. Et puis la figure centrale, Aster, semble parente d’Uhura, la lieutenant afro-américaine de Star-Trek, qui inspirera la vocation de la première astronaute noire, Mae Carol Jemison, scientifique titulaire d’un doctorat en médecine. Aster à la peau sombre et aux doigts agiles mais épais (dit-elle) est une soignante, dont les sources sont la nature et la pharmacologie, et une physicienne, capable aussi de chirurgie, autopsies, opérations. Elle assiste le Lieutenant-chirurgien, figure toute proche des hautes sphères (!!) du pouvoir (on verra par quels mystères de sa naissance), des ponts supérieurs, plutôt. En effet, haut et bas ont été reconstitués dans le Matilda, avec une atmosphère et une pesanteur propres à maintenir les divisions sociales.

Pour autant, et justement, ce roman vogue par-dessus les genres littéraires, et de même pour les identités socio-sexuées : Aster, qui vit avec ses compagnes sur un pont inférieur, est soumise comme elles à la vigilance et aux violences des gardes à la solde du pouvoir d’en haut, symbolisé par Petit-Soleil, mystérieuse source d’énergie, qu’il va falloir localiser et percer à jour pour envisager une libération de ce destin socio-ethno-cosmique ; sommes-nous dans la science-fiction, oui, dans la politique-fiction, oui, dans le roman d’aventure et d’action, oui, dans l’enquête et même la quête, oui aussi. Aster, en effet, cherche à comprendre le destin de sa mère, Lune, qui se serait suicidée en laissant un cahier personnel incompréhensible, qu’il va falloir décoder pour apprendre l’essentiel sur le Matilda, ses plans, ceux des circuits électriques et la localisation des sources d’énergie. Mais au fait, Lune s’est-elle suicidée ? Ou alors ? Et qu’avait-elle découvert ?

Nous suivons les tribulations d’Aster et de ses compagnes tout au long de ce récit fermement construit, en trois parties motrices chacune à sa manière : I. Thermodynamique, II. Métallurgie, III. Phylogénie, IV. Astromatique. Et l’autre intérêt de ce récit inclassable est qu’il mêle l’archaïsme au futurisme, par exemple, les châtiments corporels violents, les croyances sacralisées. Est-ce donc cela l‘avenir de nos successeurs ? Des luttes abolies dans une catastrophe plus que géante et une prise de pouvoir par une élite auto-proclamée déployant sa religion et ses forces de maintien de l’ordre social établi ?

Mais Aster et ses compagnes, dont la fantasque Giselle, vont accéder au saint des saints, l’énorme voûte de verre du Matilda et le cœur du réacteur propulseur et, avec l’aide du Lieutenant-chirurgien, comprendre ce que Lune a révélé dans son cahier codé, et ainsi pouvoir agir sur leur destin de filles dominées, noires quand les femmes des ponts supérieurs sont de peau claire. Reverront-elles la Terre, et dans quel état ? Vous le saurez en… lisant cet exceptionnel roman de SF et bien plus. Vous ferez confiance au pilote, qui le mérite bien. Vous ne le regretterez pas.

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L'incivilité des fantômes

Solomon Rivers reprend dans L’Incivilité des fantômes le trope du vaisseau générationnel pour dépeindre le Matilda, au sein duquel une population blanche réduit en esclavage une population noire. L’autrice aborde ainsi dans un contexte science-fictif les thématiques de l’esclavage et du racisme systémique, en montrant les violences et les exactions commises par des oppresseurs sur une population discriminée, à la fois par des descriptions explicites et des sous-entendus glaçants.

À travers le regard profondément sensible d’Aster, personnage non-binaire atteint de troubles autistiques, l’autrice rend compte d’une révolte grandissante au sein du vaisseau, en proie à un durcissement de son régime.

Ce roman m’a profondément secoué, et je ne peux que vous le recommander.

Chronique complète et détaillée sur le blog.
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L'incivilité des fantômes

Matilda: un vaisseau immense, qui emmène les reliquats d'une humanité survivante vers le mieux. Dans cette prison de métal, les riches blancs se pavanent sur les ponts supérieurs alors que les femmes de couleur, moins qu'esclaves, triment dans les entrailles du navire, sur des champs imitant les fermes de la Terre, planète en décrépitude laissée loin derrière.



Entre Le Transperceneige, Underground Railroad et La Servante Écarlate, ce roman assez fulgurant et très militant fictionnalise les grands thèmes féministes actuels. Et plus précisément afro-féministes: personnes racisées, avortement, esclavage, transexualité, homosexualité, patriarcat, suprémacisme blanc, culte divin comme fondement de la hiérarchie sociale, violences sexuelles institutionnalisées... Mais c'est fin, jamais pontifiant, et ça se lit comme une grande œuvre SF bien plus que comme un essai à thèse.



L'héroïne, asociale et rebelle mais pas sans faille, se débat ainsi dans un univers proto-carcéral d'une violence insoutenable, où courber l'échine vaut parfois mieux que de bomber le torse. Avec quelques bribes de livres et les micropousses d'une pharmacopée cultivée en vase clôt, elle essaye de reconstituer la carte de cette prison céleste. Afin d'en trouver la sortie...



Le lecteur, lui, n'en sortira pas indemne.
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L'incivilité des fantômes

Ecrite par une personne transgenre noire américaine, cette science fiction magistralement dépeinte nous raconte l'histoire d'Aster.



Dans un vaisseau spatial colossal, l'humanité cherche une terre plus hospitalière que celle, en ruine, qu'elle a quittée il y a fort longtemps. A l'intérieur, des ponts se sont organisées, comme autant de strates qu'il y a de lettres de l'alphabet. Avec en bas, les plus pauvres et les plus noirs et en haut les plus riches et les plus blancs.



On suit les aventures de cette femme à la peau matte notamment sur le pont Q. Celle-ci sait soigner et connaît plusieurs formes de sagesses anciennes que sa mère, décédée, et sa tante (cuisinière entre autres) lui ont transmises. La dédicace qui précède le premier chapitre prend son sens très vite : "A ma mère et à sa mère et ainsi de suite jusqu'à Eve". De générations en générations les femmes vont imaginer des solutions pour contrer le racisme, la violence, l'ignorance.



En créant une langue remplie de secrets, voire même une infinité de langues qui se mélangent d'un pont à l'autre, le roman nous fait entrer dans une profondeur poétique incroyable. Dans le même temps, la violence est omniprésente et celle que les hommes infligent aux femmes est quotidienne. Les plus pauvres d'entre elles travaillent aux champs, cultivables grâce à la chaleur faiblissante d'un petit soleil artificiel dont l'énergie diminue progressivement. Et tout en bas, il fait un froid glacial et les plus défavorisés peinent à survivre.



Grâce aux carnets que sa mère a laissés derrière elle, Aster entrevoit une manière nouvelle de décoder les signes et peut-être d'envisager un espoir au milieu de cette obscurité insondable.



Très lentement, on se dirige ainsi vers une fin ineffable et bouleversante.



Ces fantômes vous accompagneront longtemps. Car même s'ils sont dans l'espace, ils nous parlent de nous sur la terre ferme.



Ce livre, c'est un cri dans la nuit. Inoubliable.


Lien : https://fromtheavenue.blogsp..
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L'incivilité des fantômes

Le monde a disparu et les habitants de la Terre sont embarqués dans un immense vaisseau, le Matilda, parti chercher une Terre promise. Dans ce monde futuriste, les personnages n'ont pas toujours de sexe, ils vivent dans un univers qui ressemble à une prison, composé d'autant de ponts/niveaux que de lettres de l'alphabet. Bien entendu, les pauvres sont en bas et les riches au sommet, avec de nombreux ponts agricoles entre les deux pour nourrir toute cette population déracinée, et un réacteur à fusion au centre, Petit-Soleil, qui fournit l'énergie au vaisseau.

Chaque pont possède un langage propre, et plus l'on monte vers les hauts ponts, plus les peaux de leurs occupants sont claires. On se croirait dans une fourmilière, où les hommes sont des soldats et les femmes des ouvrières et où subsiste une élite souveraine qui possède tous les pouvoirs.

Aster, une intrépide jeune fille des bas ponts, guérisseuse et scientifique, va tenter de percer le secret du vaisseau, que sa mère qu'elle n'a pas connue, a tenté d'élucider toute sa vie. Et c'est la présence de cette mère, comme un fantôme ressurgi du passé, qui va guider ses pas et ses recherches, bravant l'autorité et les punitions, comme un ultime espoir de conquérir un semblant de dignité.

Bien qu'il m'ait été difficile d'entrer dans cette narration complexe, avec de nombreux mots imaginaires et beaucoup de données pseudo-scientifiques difficiles à saisir, j'ai réussi à trouver mes repères dans ce labyrinthe métallique et verbal ; et finalement je me suis prise au jeu de la survie des personnages à travers les méandres de ce vaisseau.

Lorsque l'on s'interroge sur notre futur, ce n'est certainement pas à celui-ci que l'on pense et l'avenir paraît bien sombre à travers ce roman. Mais c'est aussi le rôle de la Science Fiction, d'être dérangeante et de soulever les problèmes latents qui, si nous ne les réglons pas aujourd'hui, nous persécuteront demain.

Un roman très original, où les propos de l'auteur, Rivers SOLOMON, témoignent de sa probable difficulté à s'intégrer dans la société, avec un espoir infime quant à l'avenir. Pessimiste certes mais intéressant sans aucun doute.

Merci à lecteurs.com pour ce livre.
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