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Critiques de William Melvin Kelley (83)
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Danseurs sur le rivage

La Croisée continue son travail de ré-édition de l’œuvre de William Melvin Kelley, entamé avec la parution de « Un autre tambour » .



« Danseurs sur le rivage » est un recueil de seize nouvelles publié à l’origine en 1964; des nouvelles interconnectées. Si certaines sont complètement indépendantes, la majorité de ces histoires peuvent être considérées comme des vignettes décrivant des événements qui ont eu lieu dans l'histoire de deux familles afro-américaines - les Dunford et les Bedlow. Chacune de ces vignettes centre un personnage particulier et décrit des événements qui ont eu lieu à différents moments de l’histoire familiale. Les personnages vous deviennent vaguement familiers. Je me suis retrouvé à dire des trucs comme: « lui, ce doit être le frère aîné ». On y découvre leurs luttes, leurs chagrins, leurs amours, le racisme subi.



J’ai été impressionnée par la rapidité avec laquelle l’auteur dessine ses personnages et les émotions, dites ou non dites. J'ai apprécié et cru en chaque histoire. Je suis incapable d’en choisir une seule. C’est un tout, de qualité et d’intérêt égal. J'ai souvent souhaité qu’elles soient plus longues parce que l'intrigue et les protagonistes sont à chaque fois très intéressants.



Et puis il y a cette écriture simple, évidente mais juste et accomplie. Ce n’est pas pour rien que le New Yorker l’a surnommé« Le géant oublié de la littérature américaine ».



Traduit par Michelle Herpe-Voslinsky
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Danseurs sur le rivage

Avant toute chose, je tiens à remercier Babelio et les éditions La Croisée pour l'envoi de ce livre dans le cadre d'une opération Masse Critique qui m'ont permis de découvrir William Melvin Kelley.

Et quelle découverte ce fut ! J'ai particulièrement apprécié le fait que, bien que certaines nouvelles soient indépendantes les unes des autres, de nombreuses nouvelles soient liées entre elles et nous permettent de suivre différents membres de deux familles, concept littéraire que je n'avais encore jamais rencontré.

Je suis toujours hésitante quand il s'agit d'ouvrir un recueil de nouvelles car c'est un genre que j'ai souvent du mal à pleinement apprécier. Il me semble toujours que je passe à côté de quelque chose, que le puzzle n'est pas complet. Cela n'a pas du tout été le cas avec Danseurs sur le rivage car la faculté de William Melvin Kelley à faire le portrait de ses personnages et à les placer dans un contexte précis en un rien de temps est tout bonnement époustouflante. Dès la toute première nouvelle, "Le seul homme de Liberty Street", j'ai su que j'avais entre les mains une pépite.

D'une histoire courte à une autre, on passe du tragique au comique avec toujours, en toile de fond, la condition des Afro-Américains dépeinte avec authenticité et réalisme.

Une vraie belle découverte qui me donne envie de découvrir d'autres œuvres de William Melvin Kelley.
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Danseurs sur le rivage

Masse Critique Babelio, merci encore, que de découvertes. Et de redécouvertes. Notamment William Melvin Kelley que je viens de lire pour la troisième fois, dont deux grace à vous. Seul recueil de nouvelles de l'auteur, Danseurs sur le rivage, publié au début des sixties, se compose de seize textes courts sur la vie de familles noires américaines moyennes. Ce sont des nouvelles reliées, les personnages se retrouvant dans chaque histoire. Chose importante, l'humour n'en est pas absent et nous ne sommes pas dans une littérature strictement militante. Cela n'empêche pas ces scènes d'en dire beaucoup sur la société américaine de l'époque. En voici quelques-unes. Comme dans tout recueil elles peuvent être assez inégales.



Je l'ai expliqué dans mes deux chroniques précédentes sur Kelley (Jazz à l'âme, Un autre tambour), il y a quelque chose de musical dans ses textes, un rythme, une pulsation, un swing, un choeur gospel, que sais-je. Et pas mal d'émotion. Un de mes préférés est Pas tout à fait Lena Horne, gentille querelle de deux vieux amis déclinant, et dont l'unique divertissement est de compter les plaques minéralogiques des voitures sur leur pas de porte. Engueulades et attendrissements.



Une autre semble avoir été inspirée par le classique shanty (chant de marin) Drunken sailor. Un marin ivre rêve d'un bordel et d'une fille couleur de miel et longues jambes de danseuse. Concrétisera-t-il? Connie est l'une des plus veilles histoires au monde. Enceinte, sait-elle seulement quelle décision prendre? Aucun misérabilisme, seulement une sorte de conseil de famille dans lequel chacun a ses bonnes raisons.



Pleurez pour moi clot le livre. Peut-être la nouvelle qui me touche le plus. Cela ne vous surprendra pas. Wallace Bedlow quitte son Sud pour rejoindre son frère à New York. Working hard. Mais Oncle Wallace, c'est raconté par son neveu Carlyle, est un géant sensible et un chanteur guitariste de folk, de blues, Kelley reste assez évasif. Le hasard en fera une vedette. Brièvement il réunira Blancs et Noirs en une farandole magique. Carnegie Hall, rien que ça. J'entendais Oncle Wallace chanter plus fort que jamais. Les gens se ruaient vers lui, pleurant et souriant comme des fidèles qui tombent en transe dans une église. On aurait dit qu'ils étaient tous sur la scène pour tâcher de l'approcher assez pour le toucher, lui serrer la main, l'étreindre, et même l'embrasser. Et puis la chanson s'est arrêtée.
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Dem

Roman américain des années 60, il évoque la ségrégation feutrée de la société américaine à travers un couple middle- class.

La quatrième de couverture est vraiment problématique; elle raconte quasi-l'intégralité du roman, ce qui forcément gâche un peu la lecture.

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Dem

Merci à Masse critique et aux éditions La Croisée pour m'avoir fait découvrir William Melvin Kelley. Malheureusement, difficile pour moi de faire abstraction du fait que ce roman a été écrit il y a plusieurs dizaines d'années, ou plus exactement, il fallait que je me le rappelle, sans quoi je n'aurais pas dépassé la dixième page, lorsque Mitchell rappelle à sa femme que coucher avec lui est "son boulot", cet élément revient d'ailleurs fréquemment, me causant une poussée d'urticaire et de grincements de dents.

Les relations avec les autres sont à l'avenant malheureusement, Mitchell est soit méchant gratuitement, soit lâche et peureux, sa réaction dépendra du sexe de la personne en face. Ce n'est pas un personnage auquel on s'attache, ce qui a rendu ma lecture plus difficile car j'apprécie de ressentir plus d'émotions.

Même l'affaire des jumeaux (je ne dévoile rien car elle est mise en avant en 4ème de couverture) est vraiment intéressante mais elle arrive tard dans la lecture et est finalement trop rapidement réglée, j'en attendais plus de rebondissements car il y avait de la matière.

Pour équilibrer mon avis : j'ai trouvé l'humour second degré très réussi, c'est rare de se moquer ainsi de son personnage principal. Le personnage de Calvin sort également du lot. Je l'ai lu en quelques heures et la fin est joliment amenée.

Merci

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Dem

Dem autrement dit "them" : eux, les Blancs. Voilà comment comprendre ce titre de William Melvin Kelley; titre qui m'évoque "Blues for Mister Charlie" (un livre de James Baldwin), autre surnom de l'homme blanc...



Le nœud de l'histoire aborde donc immanquablement la question raciale aux États-Unis. Les préjugés qui ont nourri la haine entre les deux camps et gangrénés leurs rapports.



Nous sommes dans les années 60 et Mitchell est un homme marié et père d'un enfant. L'auteur s'attaque de manière assez caustique à cette image idéale de la famille blanche à la prétendue morale irréprochable telle que la société américaine aimait à donner. Mais le vernis s'écaille, la belle vitrine se fend et laisse paraitre des côtés moins reluisants.

Il faut malheureusement attendre les deux tiers du livre pour qu'à mon sens l'histoire prenne son tour de force, lorsque sa femme, Tam accouche de faux jumeaux, l'un blanc, l'autre noir...

C'est là que véritablement cette satire sociale tire son épingle du jeu et prend toute sa dimension percutante.



Même si l'auteur reste très agréable à lire, j'ai regretté quelque peu que le thème principal annoncé en quatrième de couverture ne soit intervenu ainsi qu'à la fin du livre...

Néanmoins, je reste tout à fait convaincue du talent et de la maturité de cet auteur sur ses réflexions quant aux rapports humains et plus spécifiquement sur cette éternelle verrue du racisme qui enlaidit l'Amérique.



Mes chaleureux remerciements à Babelio pour l'envoi de ce livre via l'opération Masse critique et aux éditions La Croisée.
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Dem

Un homme blanc de classe moyenne aux Etats-Unis dans les années soixante. Il gagne bien sa vie, habite dans un bel appartement, a une jolie épouse et un jeune enfant. Il passe son temps à admirer ou envier ses collègues (y compris les plus virilistes et déviants) et à craindre les "Noirs" - cette population singulière qui lui semble particulièrement menaçante.

Un événement va faire voler en éclat le joli récit qu'il se fait de sa vie : sa femme accouche de jumeaux. L'un est blanc comme lui et l'autre noir comme l'amant de sa femme.

.

Punaise, quel bouquin barré ! Tout part en sucette dès le début et le malaise ne disparait jamais plus.

Entre le collègue vétéran complètement psychopathe, la veulerie du personnage principal, la violence de ses rapports aux Noirs (qui ne sont jamais que fantasmés et là pour être utilisés ou manœuvrés) et le désenchantement et la lucidité de son épouse c'est une classe moyenne blanche bien répugnante qui est racontée.

Tout est glauque sauf les scènes dans les appartements des Noirs où la musique, les substances illicites et la danse accordent un peu de joie, de chaleur et de répit illusoire dans ce récit.
Lien : https://luparju.com
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Dem

New-York dans les années soixante et les déboires d'un couple de la classe moyenne ... Et quels déboires , la dame met au monde des jumeaux, un blanc un noir, pas d'autre explication que d'avoir couché avec un homme...noir , on a le droit bien sûr mais pas facile à assumer socialement .



Les détours et contours pour trouver une sortie honorable à la situation sont assez drôles mais ce n'est pas le seul point qui est mis à nu dans ce roman. On est très loin de l'égalité homme/femme et la place des celles-ci est peu de chose . Les relations blancs/noirs ne sont guère mieux. Ce n'est pas pour autant que l'homme blanc et riche bien installé dans la société est plus heureux, balloté d'une norme à une autre il a bien du mal à savoir ce qu'il veut.



Ce roman n'a pas la force de "Un autre tambour" du même auteur, la construction est un peu confuse mais la férocité de l'éclairage posé sur les personnages vaut la lecture .
Lien : http://theetlivres.eklablog...
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Jazz à l'âme

Jazz à l'âme c'est l'histoire de Ludlow Washington, un homme doué pour la musique qui va partir à la conquête de la scène New Yorkaise. Malgré ce talent inouï, il va être mis à part à cause de sa cécité & de sa couleur de peau.



C'est une histoire très intéressante sur l'ascension de ce musicien de jazz aveugle dont la musique ne va pas réussir à combler tous les manques.

Le personnage de Ludlow est complexe, écorché. C'est lui le seul point d'orgue du roman : du sommet de la gloire à la tragédie.



Jazz à l'âme nous offre la possibilité de voir un aperçu du monde du jazz (peut-être pas assez à mon goût) & des musiciens noirs.



Une lecture intéressante, pas désagréable qui m'a permis de découvrir William Melvin Kelley considéré comme l'un des plus grands écrivains afro américain de son temps.

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Jazz à l'âme

Enfant aveugle, Ludlow Washington est confié à une institution dès l’âge de cinq ans. Abandonné par sa famille, il grandit en apprenant que l’on est toujours l’esclave de quelqu’un. Mais les dirigeants blancs de l’école lui apprennent aussi la musique. C’est à grâce à son don musical qu’il peut quitter l’institut à seize ans tout en restant obligé de jouer pour l’orchestre de Bud Rodney jusqu’à sa majorité.



Jeune homme doué et ambitieux, son chemin est jalonné de belles rencontres. Tout d’abord, Hardie, le tromboniste de l’orchestre qui restera son meilleur ami, puis Etta-Sue, la fille de sa logeuse qui lui donnera son premier enfant et surtout, Inès Cunnigham, la grande chanteuse de jazz qui lancera sa carrière.



La cécité de Ludlow accentue son questionnement sur ce que cela représente physiquement d’être noir.



» La vie hors du foyer était en tout point la même que dedans. Les gens au-dessus de vous s’acharnaient à vous rabaisser, et les gens au-dessous de vous s’évertuaient à vous tirer vers le bas. »



Ludlow a l’arrogance des génies. Il refuse la condition qu’on lui attribue. En musique, il ne peut s’astreindre à jouer les standards et préfère improviser, inspiré par son idole, Norman spencer. Il invente le jazz moderne.



» il s’était mis à suggérer aux musiciens pendant les jam sessions, comment interpréter certains morceaux. Mais jamais il n’avait considéré cela comme la recherche d’un nouveau style, il tentait seulement de capter le son qu’il aimait. »



Il n’est pas homme à accepter de rentrer dans une case, celle qu’on lui attribue en fonction de sa couleur ou de son handicap. En amour aussi, il se démarque en tombant amoureux de Ragan, la fille d’un colonel.



» S’il venait à comprendre un jour pourquoi il était tombé amoureux de Ragan, il ferait une découverte majeure sur lui-même. »



Mais le chemin qui mène à la compréhension de soi est parfois long et épineux, surtout quand l’enfance ne vous a pas permis de saisir les bonnes bases.



Pour avoir lu plusieurs romans sur la vie tortueuse de musiciens de jazz, j’ai eu moins d’affinités avec celui-ci. Je l’ai trouvé trop centré sur le personnage, pour lequel j’ai eu peu d’empathie, au détriment de la musique et de la cause noire.



Né en 1937, William Melvin Kelley est mort à New York, en 2017.
Lien : https://surlaroutedejostein...
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Jazz à l'âme

J’ai toujours eu un penchant tout particulier pour les vies de musiciens, pour les romans mélodiques et pour les damnés des caves obscures. Jazz à l’âme, le deuxième roman de l’écrivain afro-américain William Melvin Kelley (publié en 1965), avait tout pour me plaire : en retraçant le destin d’un musicien de jazz aveugle dans l’Amérique raciste des années 30 à 50, l’auteur s’empare de grandes problématiques sociales pour livrer un texte hors du temps, étonnamment contemporain. Étonnant et sensoriel, incisif et électrique, Jazz à l’âme laisse pourtant à mon sens un amer goût d’inachevé et de frustration. Malgré ses nombreuses qualités stylistiques, on pourra regretter un questionnement de surface, qui survole de nombreuses thématiques sans réellement s’y attarder.



Abandonné à cinq ans par son père dans une institution pour déficients visuels, Ludlow Washington construit sa vie comme une succession d’accords mineurs. Le jeune garçon s’émancipe des humiliations qu’il subit au sein de son pensionnat en développant un talent inné pour le jazz. Cédé à seize ans à un orchestre local du Sud des Etats-Unis, il entame une ascension vertigineuse qui le mènera jusqu’aux clubs enfumés d’Harlem, où il sera porté aux nues par l’avant garde new yorkaise en mal d'idoles. Derrière ce succès fulgurant, les fêlures de sa jeunesse dérobée, les souffrances de l’Amérique ségrégationniste et les déconvenues amoureuses ont néanmoins marqué au fer rouge le jeune prodige, qui flirte avec les ténèbres comme un funambule au-dessus de l’abîme.



Parce que Ludlow Washington est condamné à l’obscurité, William Melvin Kelley exacerbe les sens. L’écrivain déploie un talent rare pour réussir à se glisser sans accroc dans la peau de son protagoniste. Plutôt que de sombrer dans un pathos larmoyant, il préfère prendre le parti d’explorer la société américaine à travers un prisme unique et sensuel. La cécité de Ludlow permet à l’auteur de questionner frontalement les fondements du racisme, mais également d'asséner la difficulté d’exister lorsque l’on sort des carcans d’une société cloisonnée. Jazz à l’âme est le roman des premières fois, des découvertes - et donc des déceptions - sur lesquelles se construit Ludlow. C’est enfin le roman de l’exploration et de l’apprentissage amer de la vie, pour un homme en décalage perpétuel avec le monde, ses pairs, les femmes et les courants musicaux en vogue à l’époque.



Vous l’aurez compris, ma lecture de Jazz à l’âme s’est achevée en demi-teinte. Avec ce récit qui promettait de s’attaquer à des thématiques aussi graves que complexes, du handicap à la question raciale en passant par la découverte de la sexualité, les stigmates de l’enfance ou encore la difficulté des rapports hommes/femmes, William Melvin Kelley s’est engagé dans l’écriture d’un roman complexe, aux multiples tiroirs. Malheureusement, à trop vouloir en faire, l’auteur effleure ces problématiques sans les confronter de plein fouet. En revanche, si j’ai eu quelques accrochages avec le style elliptique et très délié de William Melvin Kelley, ceux-ci se sont dissipés rapidement. Au départ laborieuse, la lecture s’avère percutante et fluide, faite de silences et respirations savamment entremêlés, de pugnacité et d’audace ; enfin d’amertume et de sensualité.


Lien : https://lesopuscules.fr/avis..
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Jazz à l'âme

Non voyant de naissance, Ludlow Washington est confié dès son plus jeune âge à un foyer spécialisé dans lequel, entre brimades et humiliations, de ses camarades comme des adultes, il apprend à jouer, avec virtuosité, de la musique. Dès ses 16 ans, il est engagé pour ses talents par Bud Rodney, enfin « engagé » est un grand mot : le chef d’orchestre l’achète au foyer, et le jeune homme sera sa propriété jusqu’à ses 18 ans. Ludlow découvre ainsi le monde dans le Sud ségrégationniste des Etats-Unis, le jazz et l’amour devenant les deux moteurs de son existence. Jusqu’à sa liberté accordée à l’âge dévolu, grâce à laquelle son univers, fait de voyages et de rencontres déterminantes, va encore s’étoffer, humainement comme musicalement, pour le meilleur comme pour le pire.



Alors qu’il raconte l’histoire d’un homme qui connaît une double exclusion, empreinte, forcément de pathos – au sens originel -, William Melvin Kelley fait le choix, bienvenu, de la sincérité, plus que de l’empathie, pour son personnage. Ainsi, Ludlow nous est décrit dans toute son humanité, avec ses nombreux défauts, comme ses nombreuses qualités, au-delà de sa condition première. Il est un personnage riche, dont l’on suit l’existence avec beaucoup d’intérêt, de ses débuts tonitruants dans le Sud, jusqu’au dénouement, inattendu, de sa carrière, en passant par l’acmé new-yorkais, chaque étape de cette existence donnant lieu à une rencontre amoureuse décisive, qui aura, à chaque fois, une influence, bénéfique ou néfaste, sur notre personnage. Et l’on suit, dans le sillage de Ludlow, avec tout autant d’intérêt, l’évolution du jazz dans les années 30-40, à travers une galerie de personnages, parfois tout aussi décisifs pour lui.



Je remercie les éditions 10/18 et NetGalley de m’avoir permis de découvrir la version poche de ce roman.
Lien : https://lartetletreblog.com/..
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Jazz à l'âme

Je tiens tout d'abord à remercier le Picabo River book club et les éditions Delcourt de m'avoir permis de découvrir ce roman.



J'ai beaucoup entendu parler de William Melvin Kelley et j'étais donc assez curieux de découvrir ce "Jazz à l'âme" n'ayant pas encore eu l'occasion de lire son premier roman ("Un autre tambour").



J'ai ainsi apprécié l'écriture, alerte, poétique, presque charnelle, qui sert un texte dénonçant avec vigueur la ségrégation raciale aux Etats-Unis. En revanche, l'histoire m'a plus laissé sur ma faim. Certes, le parcours de Ludlow Washington, aveugle, jeune et brillant musicien de jazz, est prenante et, par certains côtés, poignante. Je m'attendais toutefois à un récit dans lequel la musique serait plus présente. Or, ce sont les relations de Ludlow avec les femmes qui représentent l'essentiel du roman, des relations compliquées, mêlant passion et ruptures, dont Ludlow ne ressort pas toujours indemne. Le personnage de Ludlow lui-même est également un brin ambivalent, parfois égoïste, manipulateur, et je n'ai pas forcément éprouvé beaucoup de sympathie pour ce dernier. Enfin, dans le déroulé du récit, j'ai été un peu surpris que les jeunes années de Ludlow à l'internat, certainement très délicates, n'aient pas été plus développées.



Je n'ai donc pas vécu cette "expérience forte, poignante et emouvante" selon les mots du New York Times mis en exergue sur la couverture (superbe, au passage). Mais je reste malgré tout désireux de lire prochainement "Un autre tambour"...
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Jazz à l'âme

[ Roman paru en 1965 et édité pour cette rentrée par Delcourt ]



À l'âge de cinq ans, un garçon afro-américain aveugle est abandonné par son père dans une institution pour non-voyants. Ludlow Washington y souffrira pendant onze ans, jusqu'à ce que ses dons musicaux lui offrent un billet de retour dans le monde. Il débute dans un orchestre d’une ville du Sud. Il découvre la vie, il découvre les femmes, il découvre que blancs et noirs ne sont pas égaux. Son avant-gardisme musical le mène à New York jusqu’au sommet de la scène jazz - où ses démons personnels menacent de le ramener vers le bas.



Ludlow Washington est un homme doué mais endommagé, un homme totalement mis à part de la société - par la cécité, par sa couleur de peau, par le talent - qui doit lutter contre l'adversité et l'ambition pour parvenir à l'acceptation et l'estime de soi qui lui ont toujours échappé. L’auteur explore le racisme et les turpitudes des hommes à travers les yeux d'un aveugle et c’est une idée totalement géniale. Il nous montre l’Amérique ségrégationniste non pas à travers les yeux de la société blanche ou de la société noire mais comme la perçoit celui qui ne voit pas de différence.

Dans le contexte de la scène jazz américaine, la syncope et l'improvisation de la musique servent de métaphore à la vie de ce musicien.



J'ai vraiment apprécié ce roman que je qualifierai de brut.

L’histoire est structurellement simple, racontée chronologiquement, sans fioritures, sans effet de manches, presque dans une économie de moyen et pourtant avec beaucoup de classe. William Melvin Kelley pose le bon mot ou bon moment. Aucun pathos non plus, pas d’émotion à outrance. On ne s’attache pas particulièrement au personnage (manipulateur, égoïste ) et pourtant c’est une histoire très humaine qui résonne à de nombreux niveaux. Trompeusement facile à lire.



Une lecture que je dois au Picabo River book club. Merci à Léa et aux éditions Delcourt.



Traduit par Éric Moreau
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Jazz à l'âme

William Melvin Kelley est un écrivain redécouvert et remis en lumière aux États-Unis et en France. Publié en 1965 aux États-Unis, traduit en 2020 en France, Jazz à l'âme paraît tellement contemporain ! Cette façon d'aborder la question raciale m'a paru aussi cruelle que franche et réelle. L'auteur nous parle ainsi des représentations que les Blancs ont des Noirs dans le contexte des années 1930 à 1950, et finalement le comportement que ceux-ci doivent adopter comme quelque chose qui va de soi. Tout est en subtilité : les inégalités raciales, le handicap, les relations familiales et amoureuses à une époque où la ségrégation et la pauvreté des minorités (noires) sont ancrées aux États-Unis, l'acceptation de soi, la tolérance, pour finalement essayer de trouver sa place. Tout ça sur fond de musique jazz.

Ce texte est écrit avec une justesse qui m'a bluffée. Aucune fioriture. C'est un auteur à découvrir lire absolument !

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Jazz à l'âme

Magnifique livre. Il nous transporte aux États-Unis dans les cabarets de jazz.



Ludlow est un personnage touchant auquel on s´attache beaucoup.



Sur fond de ségrégation raciale, ce livre raconte le parcours troublant d´un jeune enfant noire.



Pour seule porte de sortie, le jazz... et l´amour dans tout cela ?



Ce livre poignant est à lire absolument.



Bonne lecture
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Jazz à l'âme

Ludlow Washington est abandonné à 5 ans par ses parents dans une institution pour aveugle. Il y apprend la musique et se révèle extrêmement doué pour cela. Cela lui permet de quitter plus tôt les brimades et le huis-clos du lieu pour intégrer un orchestre. Une nouvelle vie commence pour lui, une vie à laquelle il n’est pas préparé. L’amitié de Hardie, un autre membre, lui est d’une aide précieuse. Progressivement, il devient autonome et prend son envol sur les scènes de Jazz New-yorkaise. Il fait parti de l’avant-garde de Harlem. Malheureusement il est hanté par son enfance volée et ses déboires amoureux.



Ludlow découvre la sexualité et les femmes. Il connait les humiliations et les doutes et cela fait ressortir chez lui une certaine forme de colère. Il a passé son enfance et son adolescence entouré de garçon et n’a autour de lui aucun modèle de couple. Son rapport aux femmes est donc très compliqué et biaisé. Seul son ami Hardie lui fourni des conseils mais ce dernier est un garçon volage qui ne l’aide pas forcement dans ses questionnements. Les relations amoureuses sont un des sujets principaux du roman. L’échec de ses amours a une grande influence sur sa carrière. La question de l’amour entre noir et blanc et de l’acceptation de la passion de l’autre se pose également. Ludlow, tout comme Hardie, à un rythme de vie très particulier à cause de ses concerts. La femme qui partage sa vie doit composer avec ses nombreuses absences. Le caractère torturé de Ludlow et sa difficulté à communiquer mène bien souvent dans une impasse. Cette impuissance et cette incompréhension de l’amour le pousse parfois à la violence ou la colère. Cela en fait un personnage plutôt contrasté.



La musique est bien sûr au cœur du roman également. Ludlow a la conviction que sans son talent il ferait la manche sur le trottoir. Qu’adviendra t-il d’un noir aveugle et sans argent ? Sa trompette, c’est ce qui le caractérise, ce qui attire les femmes et les louanges à lui. C’est grâce à sa musique qu’il existe. De bars miteux en scènes avant-gardistes, il navigue dans le jazz et fait entendre sa singularité. Sans la musique, il redevient un anonyme, un handicapé ou un noir uniquement.



C’est un texte moins militants que son précédant et plus intimiste. On plonge dans l’âme meurtrie d’un homme et dans ses errements. La question raciale est plus sous-jacente mais néanmoins permanente. Ludlow, en plus d’être noir est aveugle. Il subit une double discrimination et une double marginalisation. Son rapport au monde en est profondément imprégné. C’est un personnage qui m’a touché par ses failles et ses nuances.



Le roman s’achève par un postface rédigée par l’épouse de l’auteur et qui nous parle du contexte dans lequel le roman a été écrit. C’est un texte très intéressant qui montre comment l’écriture et la jazz prenait de la place dans la vie du couple.
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Jazz à l'âme

J'avais beaucoup aimé "Un autre tambour", mais là, c'est bien au delà.

Je rédige mon impression à la centième page. L'univers est captivant. Le jazz bien sûr, mais plus encore les premiers pas dans la lumière d un musicien démuni. Sa découverte des autres, de la vie, du désir.

presque envie d'en rester à la 100e pour ne pas être déçu. Non, vivement la suite du récit.
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Jazz à l'âme

Jazz à l'âme n'est pas une nouveauté. Les Éditions Delcourt ont eu la très bonne idée de nous proposer, pour cette rentrée littéraire 2020, une traduction du roman de William Melvin Kelley paru en 1965 et dont l'action se déroule en majorité dans les années 1930/1940. C'est un récit sensible qui m'a passionné et qui colle malheureusemen, bien à l'actualité.

Le jazz et la musique sont toujours en arrière-fond de ce roman mais, pour moi, le sujet principal est la ségrégation raciale qui gangrène une société américaine peu éduquée. Le personnage de Ludlow, abandonné à 5 ans dans un institut pour aveugle puis vendu à un orchestre d'une petite ville du sud doit se construire seul. Il est doublement pénalisé, lui qui ne sait pas et ne saura jamais ce que c'est qu'être noir ou blanc. Il se heurte au racisme le plus primaire. Et il y a les femme... Celles qu'il côtoie au départ sont les prostituées qui travaillent dans le même bar que lui. Ensuite ses premières expériences ne sont que déboires. Il en sort traumatisé et ne peut avoir confiance en aucune d'elles.

L'écriture de William Melvin Kelley sonne juste. J'étais auprès de Ludlow dans ces bars à jazz plutôt louches d'avant-guerre. J'ai compris son désarroi et sa colère. Ce personnage est touchant même si, torturé par de multiples démons, il n'est pas toujours aimable. Il a des réactions violentes et son attitude envers les femmes est plus qu’ambiguë.

Le lecteur ne peut, lui aussi, qu'éprouver de la colère contre ce monde raciste dans lequel on juge sans se connaître et on ne veut pas sortir de sa bulle. Mais c'est une saine colère qui fait réfléchir sur nos propres réactions. Je frémis à l'idée que ça aurait pu être pire. Et si il n'avait pas été si doué pour la musique? Et si il avait été une femme?
Lien : https://ffloladilettante.wor..
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Jazz à l'âme

Ludlow Washington nait aveugle dans un monde qui ne pardonne aucune faiblesse, celui des « nègres » du Sud des Etats unis. Aussi son père le place dans une institution dès l’âge de cinq ans afin qu’il ne soit pas une charge supplémentaire à l’économie familiale défaillante et précaire du foyer. Aucun état d’âme quand il est question de survie. Mal grès l’hostilité du milieu pénitentiaire dans lequel il grandit (brimades, punitions, sévices), l’établissement va lui offrir la chance de révéler son immense talent de musicien de jazz et de pouvoir échapper à la misère, avec la force d’un caractère brut, éprouvé par le milieu hostile dans lequel il a grandi.

Toute son existence Ludlow va garder cet abandon, cet état orphelin sciemment provoqué, comme une marque écrite au fer rouge sur son âme. C’est ce qui va lui imposer d’avoir toujours une distance avec les autres, afin de ne plus jamais être la victime du rejet de l’autre. Il n’a pas le choix, il doit avancer dans la vie mal grès tous les handicapes dont sa destinée l’a accablé. Il y a là l’explication à sa faible empathie envers les autres. Il garde tout au long de sa vie un rempart élevé pour faire face à toute entreprise belliqueuse envers sa personne. Et comme la musique est la seule amie qui lui offrira de l’espoir, il y sacrifiera tout, y compris l’ébauche d’une famille qu’il a songé un temps construire, cette démarche tenant plus de l’expérience que de l’aboutissement.

Il connaitra l’amour mais aussi ses écueils, parce qu’il est ce qu’il est…

William Melvin Kelley s’est projeté dans cet orphelin, jazzman de génie. Son épouse Aiki écrit : « Il a sondé les profondeurs de son âme pour donner vie à Ludlow Washington. » Le roman nait en 1965, en même temps que sa fille, écrit entre Rome, l’Espagne et Paris parce qu’il fuit la ségrégation qui fait rage aux États-Unis. Il dépasse l’éternel procès du clivage entre blancs et noirs. Il est un message adressé aux générations montantes, qui acclame le travail et la persévérance comme remède à la pauvreté et aux accidents de la vie. Il montre que partie de rien et même moins que ça, puisque le peu qu’avait Ludlow, une famille, on le lui retire, qu’il y a toujours la possibilité de s’en sortir.

« Jazz à l’âme » est une fabuleuse histoire qui ne fait pas de concessions et qui ouvre sur des horizons chantant, pour autant que la vie y consente. Il aurait pu s’agir d’une histoire où la haine y aurait trouvé place, il n’en est rien. L’auteur a su adroitement éviter l’écueil des clichés raciaux pour ne promouvoir que l’histoire d’un homme et de sa réussite dans un milieu hostile.

Merci aux éditions Delcourt et à masse critique de Babelio pour m’avoir permis de découvrir cet auteur et cette histoire pleine d’espoir et d’humanité.

Traduction d’Éric Moreau.

Editions Delcourt, 247 pages.

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