Citations de Yoan Smadja (64)
Car la tragédie d'un génocide réside aussi dans son dénouement. A un moment ou à un autre, il doit s'arrêter. Et que se passe-t-il après ? Les peintres ont pu peindre à nouveau, en noir et gris. Les sculpteurs ont pu sculpter à nouveau, la glaise tombante, le métal froid, le minéral. Les chanteurs ont pu fredonner à nouveau, des mélodies affligées. Les compositeurs ont pu aligner leurs milliers de notes, graves, lancinantes, oubliées.
Ceux qui ne savent qu'écrire n'ont pas d'issue, car il n'y a pas de mots. Il n'y a pas de mots. Il n'y a pas de mots. Il n'y a pas de mots.
Il me semble, je n'en suis pas certaine, que mon père m'a un jour dit : "Ceux qui se sont adaptés à tout ont survécu, mais la majorité n'en a pas été capable et en est morte." Il parlait de la Shoah. Ou peut-être de l'après. Car la tragédie d'un génocide réside aussi dans son dénouement. A un moment ou un autre, il doit s'arrêter. Et que se passe-t-il après ?
L'attente brûle comme un feu en vous. Et le désir a ceci de terrible que lorsqu'il n'est pas comblé, il vous consume.
L'indépendance est une sorte de jouvence, on n'en prend conscience que lorsqu'on la perd.
La pluie s'abattait de toutes ses forces sur le pays comme pour le laver.
Si les églises ne peuvent abriter la souffrance des réfugiés, si les croyants ne craignent pas d'y entrer et d'y tuer d'autres fidèles sous le regard de Dieu, alors aucun Tutsi ne doit survivre. Aucun Tutsi ne doit survivre et Sacha, qui avait par le passé croisé la route d'hommes qui consacrent leur vie à défendre Dieu, pensa que l'absence absolue de crainte devant le sacré porte en elle les germes d'une loi inique. Celle de l'instinct brut, animal, dénué de normes, de cadres comme de degrés. Le résultat s'offrait ici à leurs yeux nus, impuissants, condamnés à constater le carnage.
Chaque fleur a provoqué en moi une rosée. L'incendie jamais ne s'éteindra. Mais les flammes ont cessé de virevolter. Seules persistaient les braises, la honte.
On leur avait appris à haïr et à tuer. Pourquoi ces imbéciles en feraient-ils autrement ?
C'est en avril 1994 que j'ai demandé à Dieu de divorcer
"L'indépendance est une forme de jouvence, on n'en prend conscience que lorsqu'on la perd."
"Le miroir ne change pas. Seules les vies qu'il projette ne sont plus les mêmes."
"Petite, je voulais une vie extraordinaire. Aujourd'hui, je veux seulement une vie."
[Car] la tragédie d'un génocide réside aussi dans son dénouement. À un moment ou à un autre, il doit s'arrêter. Et que se passe-t-il après ? Les peintres ont pu peindre à nouveau, en noir et gris. Les sculpteurs ont pu sculpter à nouveau, la glaise tombante, le métal froid, le minéral. Les chanteurs ont pu fredonner à nouveau, des mélodies affligées. Les compositeurs ont pu aligner leurs milliers de notes, graves, lancinantes, oubliées.
Ceux qui ne savent qu'écrire n'ont pas d'issue, car il n'y a pas de mots. Il n'y a pas de mots. Il n'y a pas de mots. Il n'y a pas de mots.
Elle s'envolait, libre, douée d'une faculté rare : la capacité à percevoir le monde avec les yeux de l'autre. Inébranlablement convaincue que la matière dont se compose l'homme est si fragile, si fluide, que l'écoute ne peut que la révéler. Witz attendait d'elle qu'elle raconte les villes, qu'elle en rapporte le crépuscule, les instants précieux et, à travers eux, les affres de l'homme, l'aspérité des âmes, le battement des cœurs.
L'amour des choses est une chose étrange, on n'en prend conscience qu'après les avoir quittés. (p. 105)
Une pépite littéraire sans aucun doute.
Une fiction d'un réalisme étonnant dans laquelle le lecteur est au Rwanda plongé dans l'horreur du génocide.
Mais la flamme la plus forte est celle de l'humanité.
C'est avant avril 1994 que nous aurions dû poser les yeux sur le Rwanda. [...]
Un pays ne se déchaine pas ainsi, en vingt-quatre heures. Des milliers de personnes ne se convertissent pas en une meute de tueurs du jour au lendemain.
[...]
À quel point faut-il avoir oublié que ces Tutsi sont des hommes?
Entre les Hutu et les Tutsi, la déchirure est celle du quotidien, elle est intime.
[…]
On glisse dans l'absurde.
Irrésistible est le penchant des êtres pour le vernis, l'écume des choses : au Rwanda, il avait brouillé notre vision.
Passé un certain âge, nos sociétés se méprennent quant à l’émerveillement : on le prend facilement pour de la naïveté.
Petite, je voulais une vie extraordinaire. Aujourd'hui, je veux seulement une vie.
La ville brillait, mais elle brûlait aussi.
Je n'ai pas écouté un seul mot de ce qu'il a dit ce jour-là après avoir déposé un voile nacré sur le visage de Papa. J'ai pensé que le plus bel endroit où je pourrais me trouver à ce moment serait l'horizon, entre la mer et le ciel. Là où ils ne se distinguent pas vraiment. Là où l'un s'achève et l'autre prend naissance. Là où le flou apaise, où le monde ne vous rejoindra jamais.