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Critiques de Zoé Cosson (43)
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Aulus

Une écriture singulière, entre journal post adolescent et nature writing à la française. Un instant suspendu aux côtés de Zoé Cosson, perchée comme un oiseau sur un fil électrique à observer un village ariégeois. Et on regarde avec elle, on découvre le charme du bizarre, du pas vraiment joli. La langue est belle, le livre tourne autant autour du père que du village que de l'enfance enfuie. Et si comme moi, vous passez souvent par Aulus, vous apprécierez la délicatesse de cette peinture, Aulus, c'est un village comme tant d'autres, unique. Sortez votre chaise et posez-vous, là, il ne se passe rien. Rien que la vie.
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Aulus

Nous partons en voyage dans un texte poétique et nostalgique sur un petit village nommé Aulus.

L'autrice nous emmène avec elle retrouver son village mais aussi son père, les habitants qu'elle connait bien, la station thermale et ses touristes.

Elle nous raconte avec beaucoup de douceur les chemins, les bois, les traditions, l'ours des montagnes...

Elle nous conte cette nature avec une telle poésie que cela en est reposant.

Chaque détail est décrit dans sa pure beauté, j'ai beaucoup apprécié.

J'ai adoré sa qualité d'écriture simple, envoutante et encore une fois empreinte de poésie.

Mais a Aulus comme dans tous les petits villages perdus et oubliés il y a aussi un coté sombre, il y a cette centrale qui inquiète et qui pollue, la mine désaffectée, les habitants qui vieillissent...

Comme une parenthèse dans sa vie, l'autrice nous propose ce partage et nous repartons ensemble suivi de son père, père vieillissant et village perdu.

Une belle traversée que j'ai aimé découvrir ou la nature nous accueille dans son plus simple appareil.

Un grand bravo a Zoé Cosson pour ce premier roman, une belle réussite!!
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Aulus

Ce petit roman retrace la vie de ce village qu'est Aulus. Ce village des Pyrénées, fort d'une centaines d'âmes dont on ne sait si leur présence relève du choix et de naissance, fut une ville thermale au début du XXème siècle mais aujourd'hui il n'est plus qu'un village comme tant d'autres où il ne se passe rien si ce n'est les querelles de voisinage et où les "étrangers" ne sont pas forcément les bienvenus.



La narratrice (l'auteur ?) nous raconte ce qui fait le quotidien de cette bourgade, endroit où elle vient passer ses vacances depuis que son père a acheté aux enchères un hôtel. Vacances qu'elle passe entre le village et les montagnes proches où elle s'adonne à la randonnée.



J'ai beaucoup aimé l'écriture poétique de ce court roman qui décrit en termes simples la réalité de ce village entre la ruralité, la nature, la présence du passé, l'impact écologique des décisions prises au nom de la sauvegarde et les répercussions sur le village, mais est-ce vraiment pour la sauvegarde ? N'est-ce pas aussi une histoire d'argent ? Ce roman est comme un cri du coeur : on aime ce village mais on ne peut y rester.



Lire ce roman est comme ouvrir une parenthèse, comme une main ouverte sur une plongée dans le temps et dans la nature, comme une bouffée d'oxygène, comme un endroit où l'on prend (reprend ?) le temps de vivre.



Un grand merci aux 68 premières fois 2022 pour ce beau moment hors temps et hors stress.
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Aulus

Retour à Aulus



Une jeune fille vient régulièrement séjourner dans l’hôtel désaffecté que son père a acheté sur un coup de tête. Pour son premier roman, Zoé Cosson a choisi de retracer l’histoire et la géographie d’Aulus, village des Pyrénées.



Ce court roman est d'abord un livre de géographie. De géographie physique d'abord. Qui raconte un paysage, un village des Pyrénées, son environnement, son histoire, ses habitants. De géographie intime ensuite. De l'attachement à cet endroit, du lien au père, des émotions qui s'emparent de la narratrice. Dans ses pas on découvre Aulus-les-Bains, station thermale qui a connu son heure de gloire et qui, à l'image du Grand Hôtel de Paris, racheté par son père, est désormais sur le déclin. Les habitants, une centaine, sont authentiques. «Ce sont des corps du dehors, habitués à négocier avec la solitude, le temps qui ne meurt pas. Des corps tenaces qui ne tressaillent pas à l’intérieur. Qui commencent par les pieds la plante les orteils, qui se tiennent par les cuisses et se terminent par des mains carrées. Ces corps-là ne plieront pas. Ils ne ressemblent pas à ceux de la ville. Frêles, élancés, gras, voûtés. Ils auraient pu partir, presque tous. Faire leur vie ailleurs, à la campagne, sur un terrain plus plat, avec un climat plus doux, mais ils ne se sont pas résolus à quitter cet endroit où chaque centimètre est connu, vécu, chéri. Ils n’ont pas voulu se séparer du lieu où le corps a ses marques, sous l’église, dans le creux. Les autres, ceux qui ne sont pas nés là, ont suivi un ami. Ils ont retrouvé un ancêtre, découvert une tombe à leur nom, ils ont fait leur premier vol en parapente ici. Le village s’est présenté par hasard. Ils se sont installés.»

Un microcosme

À l’aide des cartes postales anciennes décrites en début de chapitre, on prend la mesure du temps qui s'est écoulé, des changements de mode de vie. Si on peut imaginer que l'ours faisait déjà parler de lui dans les conversations de l'époque, ce sont désormais l'exode rural, la fin des petits commerces – il ne reste guère comme boucherie et une épicerie – l'environnement au tour de la question de la centrale hydroélectrique et les élections à venir qui rythment les conversations. Des échanges que l'hôtelier prend plaisir à initier et à entretenir, sorte de chef d’orchestre du Titanic.

Zoé Cosson défend et illustre à sa manière une thèse établie au XVIIIe siècle par

Charles Victor de Bonstetten, un Suisse auteur de L'homme du Midi et l'homme du Nord, ou L'influence du climat. Entre Rousseau et Madame de Staël, il tente de définir les typologies des européens et constate combien le climat – notamment la montagne – façonne les caractères. Ici, les gens ne ressemblent pas à ceux de la ville. «Ils ne fixent pas le sol à côté de leurs chaussures, ne soupirent pas, et quand ils rient, tout leur corps vibre avec eux». C’est ce que la romancière appelle «l’attachement paysager» et qu’elle nous livre à la manière d’un diamant qu’elle polit soigneusement pour en faire briller toutes les facettes.




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Aulus

"𝘖𝘯 𝘯𝘦 𝘱𝘢𝘴𝘴𝘦 𝘱𝘢𝘴 𝘢̀ 𝘈𝘶𝘭𝘶𝘴, 𝘰𝘯 𝘴'𝘺 𝘳𝘦𝘯𝘥."



Voici ce qui se dit de ce petit village, une ancienne station thermale, dont l'hôtel à l'abandon vient d'être racheté par la père de la narratrice.

Tout est minéral ici, de l'eau, des pierres, de la roche, partout. Des villageois aussi, que l'on découvre au fur et à mesure des chapitres : Paul le pêcheur, Nicole la déprimée, René, l'original.

Pendant que la narratrice passe le plus clair de son temps à se promener dans la nature, la découvrir, l'observer, son père bricole, entasse, collectionne, réfectionne...



"𝘓𝘦𝘴 𝘫𝘰𝘶𝘳𝘴 𝘳𝘦́𝘵𝘳𝘦́𝘤𝘪𝘴𝘴𝘦𝘯𝘵 𝘦𝘵 𝘮𝘰𝘯 𝘱𝘦̀𝘳𝘦 𝘴𝘦 𝘥𝘰𝘯𝘯𝘦 𝘭'𝘢𝘪𝘳 𝘥𝘦 𝘧𝘢𝘪𝘳𝘦 𝘲𝘶𝘦𝘭𝘲𝘶𝘦 𝘤𝘩𝘰𝘴𝘦. 𝘐𝘭 𝘣𝘰𝘶𝘨𝘦 𝘥𝘦𝘴 𝘱𝘢𝘱𝘪𝘦𝘳𝘴, 𝘪𝘭 𝘦𝘮𝘣𝘢𝘭𝘭𝘦, 𝘪𝘭 𝘱𝘢𝘱𝘪𝘦𝘳-𝘣𝘶𝘭𝘭𝘦. 𝘐𝘭 𝘵𝘰𝘯𝘥, 𝘪𝘭 𝘵𝘢𝘱𝘦, 𝘪𝘭 𝘥𝘦́𝘱𝘭𝘢𝘤𝘦 𝘭𝘦𝘴 𝘰𝘣𝘫𝘦𝘵𝘴 𝘵𝘳𝘰𝘱 𝘷𝘶𝘴 𝘰𝘶 𝘵𝘳𝘪𝘦 𝘴𝘦𝘴 𝘦́𝘤𝘳𝘰𝘶𝘴. 𝘚𝘰𝘶𝘷𝘦𝘯𝘵, 𝘪𝘭 𝘤𝘰𝘶𝘱𝘦 𝘥𝘶 𝘣𝘰𝘪𝘴 𝘱𝘰𝘶𝘳 𝘴'𝘰𝘤𝘤𝘶𝘱𝘦𝘳 𝘦𝘵 𝘭𝘦 𝘣𝘳𝘶𝘪𝘵 𝘥𝘦 𝘴𝘦𝘴 𝘤𝘰𝘶𝘱𝘴 𝘦𝘴𝘵 𝘶𝘯 𝘴𝘰𝘯 𝘲𝘶𝘪 𝘳𝘢𝘫𝘦𝘶𝘯𝘪𝘵 𝘭𝘦 𝘷𝘪𝘭𝘭𝘢𝘨𝘦."



Il ne se passe pas grand chose au final, mais cette lecture fait du bien. Chaque chapitre vaut un petit moment de vie : une randonnée dans les roches, une discussion au tabac-presse-boulangerie, les élections qui approchent...

L'autrice voit et observe tout et nous le retranscrit dans une langue magnifique, douce et poétique.

L'écriture est teintée de tendresse et de mélancolie pour cette nature rude et sauvage qui tend à disparaître, ces personnages d'une autre époque, loin des grandes villes et des nouvelles technologies, qui s'agrippent et défendent leur terre, racontent une histoire, leur histoire.



J'ai été charmée par cette lecture reposante, que l'on déguste pour en savourer chaque mot, chaque image de ces terres reculées, loin de l'agitation de la ville.
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Aulus

« on ne passe pas à Aulus, on s’y rend ». Niche au fond d’une vallée ariégeoise, c’est le village où se rend chaque année la narratrice. Un village d’une

centaine d’âmes, station balnéaire désuète, où son père a acquis un hôtel désaffecté. Lors de ses passages au village, elle marche, elle observe, elle écoute, témoin silencieux et attentif d’un mode de vie montagnard singulier et attachant.

.

Dans ce court roman, point d’action ou d’intrigue mais le tableau précis et imagé d’un microcosme qui vit au rythme de la nature. Pour moi qui ai grandi au cœur d’un petit village pyrénéen, j’ai retrouvé dans cette lecture l’essence même des sensations de mon enfance. Une vie simple, tissée de liens entre personnes qui se connaissent depuis toujours et où il peut être compliqué d’être accepté. Une vie rude aussi, au gré des caprices de la météo, mais toujours respectueuse de la nature. Le temps semble s’y être arrêté mais hélas ces montagnes ne sont pas épargnées par les drames de notre époque, qu’ils soient écologiques, ou économiques et Zoé Cosson en parle avec franchise et sensibilité. Un texte lumineux et poétique, galerie de portraits et peinture impressionniste. Un joli voyage en terre pyrénéenne.
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Aulus

«  𝘈 𝘈𝘶𝘭𝘶𝘴, 𝘫𝘦 𝘯𝘦 𝘴𝘶𝘪𝘴 𝘯𝘪 𝘳𝘦́𝘴𝘪𝘥𝘦𝘯𝘤𝘦 𝘯𝘪 𝘦́𝘵𝘳𝘢𝘯𝘨𝘦̀𝘳𝘦 : 𝘫𝘦 𝘴𝘶𝘪𝘴 𝘭𝘢 𝘴𝘪𝘭𝘩𝘰𝘶𝘦𝘵𝘵𝘦 𝘥𝘦𝘳𝘳𝘪𝘦̀𝘳𝘦 𝘮𝘰𝘯 𝘱𝘦̀𝘳𝘦 (…) »



📖 Notre autrice est arrivée à Aulus-Les-Bains (𝘮𝘢𝘪𝘴 𝘵𝘰𝘶𝘵 𝘭𝘦 𝘮𝘰𝘯𝘥𝘦 𝘥𝘪𝘵 𝘈𝘶𝘭𝘶𝘴) à l’âge de 8 ans. Son père y achète un hôtel délabré pour une bouchée de pain. « Le Grand Hôtel de Paris » n’a pourtant plus rien de grand à part la surface. Elle nous conte son intégration dans la ville qui ressource et qui permet à 700 curistes par an de combattre le cholestérol. Les rêves de son père, les moments intimes, ceux partagés avec les commerçants, la vie de village où tout le monde se connait et où il est presque impossible de passer d’étrangère à résidente.



𝗖𝗲 𝗰𝗼𝘂𝗿𝘁 𝗹𝗶𝘃𝗿𝗲 𝗱𝗲 𝟭𝟬𝟳 𝗽𝗮𝗴𝗲𝘀 𝘀𝗲 𝗹𝗶𝘁 𝗱’𝘂𝗻𝗲 𝘁𝗿𝗮𝗶𝘁𝗲 𝗽𝗼𝘂𝗿 𝘂𝗻𝗲 𝗶𝗺𝗺𝗲𝗿𝘀𝗶𝗼𝗻 𝘁𝗼𝘁𝗮𝗹𝗲 𝗲𝗻 𝘁𝗲𝗿𝗿𝗲 𝗔𝗿𝗶𝗲̀𝗴𝗲𝗼𝗶𝘀𝗲. Plus que l’histoire de son enfance, l’autrice nous adresse un ode à son père. Les mots sont choisis mais pourtant allongés sur le papier comme imposés à elle.

On retrouve l’air vivifiant de la montagne, les longues marches qui font tirer les muscles, les commérages de village, les efforts incessants du père pour copiner avec le boucher ou recevoir un sourire de la laitière.

La vie loin de tout n’est pas facile. Mais elle sait aussi être douce.



On ouvre le récit sur l’arrivée de ce binôme père-fille et on le referme sur leur départ. Entre les deux, de nombreuses années, des efforts constants, des catastrophes et des moments doux.

Ce livre fait connaître ou sortir de l’oubli ce petit village d’une centaine d’âme, qui semble identique à tous les petits villages de montagne oubliés mais qui sont pourtant unique dans ce que les résidents, ensemble, en font.



On referme ce livre avec le sentiment que Zoé Cosson avait besoin d’écrire cette histoire. De sortir d’elle-même cette tranche de vie.

𝗨𝗻 𝗽𝗿𝗲𝗺𝗶𝗲𝗿 𝗿𝗼𝗺𝗮𝗻 𝗶𝗻𝘁𝗶𝗺𝗲 𝗲𝘁 𝗱𝗼𝘂𝘅 𝗾𝘂𝗶 𝗮𝘀𝘀𝘂𝗿𝗲 𝘂𝗻𝗲 𝗽𝗿𝗼𝗺𝗲𝘀𝘀𝗲 𝗱𝗲 𝗳𝘂𝘁𝘂𝗿𝘀 𝗯𝗲𝗮𝘂𝘅 𝗼𝘂𝘃𝗿𝗮𝗴𝗲𝘀.

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Aulus

J’aurais souhaité que ce roman soit davantage qu’une très belle découverte. J’aurais aimé me sentir embarquée dans une aventure atypique, extraordinaire au cœur de la montagne, de la nature, d’une richesse acculée loin des yeux, loin des cœurs. J’aurais aimé être émerveillée, éblouie. J’aurais tant aimé.





Je me suis perdue au cours de cette balade bucolique.





Espace temporel variable au grès de la déambulation de la narratrice, les souvenirs côtoient le présent, la dernière fois, la dernière balade, l’ultime au revoir. Des hommes, des femmes, des chats, des chevaux, des bâtiments qui s’étiolent dans l’absence, l’accumulation et l’ignorance. C’est le récit d’une multitude de vie gravée dans la roche inaltérable, éternelle. Un imbroglio de vagues espoirs, de lointains souvenirs et d’un présent inaliénable.





Un écriture saisissant l’instant T, poétique, posant un regard bienveillant, enjoué, rude et terriblement honnête. Un récit court qui s’anime à chaque respiration et qui se meurt dans un ultime regard.





Moi qui aime tant mes Pyrénées, je me suis sentie étrangement mélancolique.
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Aulus

❝Le roman est ennemi de la vitesse, la lecture doit être lente et le lecteur doit rester sous le charme d'une page, d'un paragraphe, d'une phrase même.❞

Milan Kundera



Les mots de Kundera semblent avoir été écrits pour Aulus, premier roman de Zoé Cosson, quoique « roman » ne soit pas le terme le plus convenable pour décrire ce qui est ❝le portrait rapiécé de ce lieu sans contour, un espace fait de calques, une sorte de cartographie qui n'élucide rien. Ce n'est ni une histoire, ni un bloc.❞



Aulus. Guère plus d’une centaine de pages pour autant d'habitants. Des phrases courtes avec des mots aussi lents que possible pour dire les rapports personnels et intérieurs — et par là non représentables — que la narratrice a avec ce lieu depuis son enfance. Une écriture du minuscule, propice à la contemplation qui dilate le temps. Pas d’intrigue ni de récit savamment élaboré, mais des vignettes qu’elle confie au papier pour qu’il en garde la mémoire, un peu comme Wim Wenders ou Andreï Tarkovski prenaient des Polaroïds sur leurs tournages pour en fixer l’esprit sur la pellicule, impression de la sensibilité de chacun.



❝L'image n'est pas une quelconque idée exprimée par le réalisateur, mais tout un monde miroité dans une goutte d'eau, une simple goutte.❞

Andreï Tarkovski, Lumière instantanée



Dans le monde miroité d’Aulus, ❝réel et fiction s’entremêlent❞.

Aulus. Station thermale du Haut-Couserans dans les Pyrénées ariégeoises, nichée à 700 mètres d’altitude, à l’écart de tout, au bout de tout : ❝terminus géographique❞ que surplombent des pics culminant à plus de 2 600 mètres. Si la Belle-Époque l’a connue florissante, aujourd’hui seule une centaine d’habitants reste à fréquenter ses rares commerces et à arpenter ses deux rues principales qui inscrivent leur trait dans le paysage et les autres, ❝écheveau de ruelles sinueuses comme de l'eau❞. Où que l’œil se pose, la pierre règne en son royaume. Elle a construit les maisons, érigé les murets, accueilli les arbres équilibristes, ❝les plus coriaces [prenant] racine dans des quartiers de roche❞, fait tintinnabuler les ricochets des cascades, s’est nichée jusque dans ❝les mots [qui] gigotent comme du gravier entre [les] lèvres de ces gens-là❞. Elle est ces montagnes désespérément fixes qui inventent leurs couleurs et barrent l’horizon, et dont ❝les aiguilles de pierre piquent le ciel comme des fleurets❞, ce ciel de montagne aux nuages toujours mobiles. Elle fige un décor à la majesté immuable, ❝stagnant❞, qui, croit-on, ne peut être bousculé.



En vingt-deux courts chapitres, Zoé Cosson rend sensible la présence du paysage,



❝Les jours sans nuages, je pars cueillir des fleurs poilues. Des chardons bleus, des crocus à peau de soie. J'allonge les végétaux sur des feuilles blanches, j'écrase de livres, je prépare l'itinéraire pour mes marches d'été. J'explore, j'apprends.

J'apprends la lumière du matin qui peine, vacille, s'élève faiblement au-dessus des crêtes avant de peindre chaque brin d'herbe. J'attends qu'elle glisse et révèle la soulane, la pente de lumière. Ensuite, le grand rond jaune domine tout-puissant le temps de tracer son bout d'arc trop court et de retomber de l'autre côté de la vallée, le mauvais, pas le nôtre. J'apprends les chemins d'herbe écrasée, tapis, les routes de ruban gris, les cirques où se marient l'eau, la pierre, le gispet. J'apprends le mot gispet. L'herbe glissante, gelée, mouillée, trop grasse. J'apprends les arbres solitaires qui poussent droit malgré le dévers, les passages délicats, les échelles en fer à béton vissées sur la roche, le corps serré contre la montagne, pendu dans le vide.❞



ainsi qu’une atmosphère surannée, grâce notamment à quelques cartes postales rescapées d’un passé sépia, décrites en début de chapitre, qui trouvent leur place naturelle dans le patchwork de fragments épars en train de s’écrire. Elles font revivre les fantômes de jadis et renvoient au temps où Aulus était encore Aulus-les-Bains, villégiature en vogue. Elles font prendre la mesure du temps qui s’est écoulé et des changements, perceptibles à force de petits riens, qui ont eu lieu.



L’hôtel délustré, racheté aux enchères par le père, est le cadre parfait pour la rêverie. La bâtisse centenaire, à la gloire passée, percluse d’humidité, geint, se détraque comme le corps de son propriétaire. Ses couloirs interminables ouvrent sur des chambres prises d’un fouillis d’objets disparates que le père, fantaisiste, collectionne à l’envi. Dans le Grand-Hôtel de Paris, la foule des objets a remplacé celle des curistes.



❝Je sens bien qu’à sa manière l’hôtel garde à l’ombre ces histoires que l’on tait.❞



L’hôtel, refermé sur ses secrets, est à l’image de cet homme habité par ❝des mots enfuis qu’il ne croit pas avoir l’urgence de dire❞, la relation forte, parfois chaotique, entre la fille et le père allant pudiquement à l’essentiel.



Les habitants sont croqués avec chaleur et une pointe d’humour. Aulusiens de naissance ou d’adoption, le lieu a façonné Fafa, Pince-cul, Paul n°1 et Paul n°2, Nicole, René, Marldingue, Pierre…



❝[Ils] sont des corps du dehors, habitués à négocier avec la solitude, le temps qui ne meurt pas. Des corps tenaces qui ne tressaillent pas à l’intérieur. Qui commencent par les pieds la plante les orteils, qui se tiennent par les cuisses et se terminent par des mains carrées. Ces corps-là ne plieront pas. Ils ne ressemblent pas à ceux de la ville. Frêles, élancés, gras, voûtés. Ils auraient pu partir, presque tous. Faire leur vie ailleurs, à la campagne, sur un terrain plus plat, avec un climat plus doux, mais ils ne se sont pas résolus à quitter cet endroit où chaque centimètre est connu, vécu, chéri. Ils n’ont pas voulu se séparer du lieu où le corps a ses marques, sous l’église, dans le creux. Les autres, ceux qui ne sont pas nés là, ont suivi un ami. Ils ont retrouvé un ancêtre, découvert une tombe à leur nom, ils ont fait leur premier vol en parapente ici. Le village s’est présenté par hasard. Ils se sont installés.❞



L’œil se meut et ce qu’il a à raconter dénote d’un sens de l’observation pointu.



Aussi hors du temps soit-il, ce microcosme esseulé, oublié des grandes voies de circulation, n’échappe pas à l’actualité et aux sujets du moment : compteurs Linky, bataille pour l’eau, problématique réouverture des mines de tungstène de Salau, ❝tombe sans fleur, sans croix, sans corps❞ qui balafre le paysage et déverse dans le sol de belles saloperies, querelles de clocher et de mairie au moment des élections sont autant d’occasions d’ancrer malgré tout le village dans le monde contemporain et le tirer de sa léthargie.



❝Nous pouvons exprimer nos sentiments vis-à-vis du monde qui nous entoure, soit par des moyens poétiques, soit par des moyens descriptifs.❞

Andreï Tarkovski



De toute évidence, Zoé Cosson a fait le premier choix. Son écriture douce, simple et poétique, épouse le rythme flottant des saisons selon lequel Aulus vit et les histoires éclatées, que chaque lecteur est libre de rapiécer à sa guise, brossent le portrait sensible d’un village, fragile mosaïque insaisissable d’un seul coup d’œil.



❝On ne peut pas saisir Aulus d'un seul regard, on le découvre dans l'effort de la marche, à l'échelle du corps, par bribes, et il faut ensuite recoller mentalement ces morceaux pour s'en fabriquer une image.❞



Aulus est un livre du grand air qui, avec bonheur, ne s’enferme dans le carcan d’aucun genre.



❝Le poète est un homme qui a l'imagination et la psychologie d'un enfant. Sa perception du monde est immédiate, quelles que soient les idées qu'il peut en avoir. Autrement dit, il ne "décrit" pas le monde, il le découvre.❞

Andreï Tarkovski, Le Temps scellé



Il fait bon découvrir ce village avant qu’il ne s’efface ; la balade est agréable pour qui sait prendre le temps de s’imprégner de l’atmosphère du lieu que l'on quitte à regret, jetant un dernier coup d’œil dans le rétroviseur, pour s'assurer d’en garder la trace.



Je suis restée ❝sous le charme d'une page, d'un paragraphe, d'une phrase même❞ de ce très beau premier roman dont je salue le mérite d'aborder la déprise rurale et autres sujets préoccupants sans les habituels tambour et trompette.



Lu pour la sélection 2022 des #68premieresfois


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Aulus

Zoé Cosson nous emporte à Aulus les bains, petite station thermale de l'Ariège qui a connu son heure de gloire mais se vide d'année en année. Le père de la narratrice a racheté aux enchères un hôtel et chaque été il emmène sa fille dans ce village.

Un roman minéral au cœur des montagnes ou l'humain est bien petit et pourtant bien présent.

Un roman sans début ni fin mais comme une tranche qui reste en tête bien longtemps après la fin de la lecture.
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Aulus

« Personne ne dit ‘Aulus-les-Bains’ en entier. On dit juste ‘Aulus’. ‘Aulus’ tout court. Aulus est un village d’eaux niché à 750 mètres d’altitude. Il reçoit 700 curistes par an et s’étend sur 5 224 hectares, comprenant forêts, pâturages, névés, pics et cascades. »



Aulus n’est pas un village que l’on pointe sur une carte par pur hasard. Les corps y vivent depuis toujours, habitués dans ce lieu isolé. Solitaires. Tenaces. Pour rien au monde ils ne changeraient « le lieu où le corps a ses marques, sous l’église, dans le creux. » En faire connaissance n’est pas une mince affaire, il faut y avoir été emmené ou y avoir rendez-vous, au risque de ne jamais en repartir.



« On ne peut pas saisir Aulus d’un seul regard, on le découvre dans l’effort de la marche, à l’échelle du corps, par bribes, et il faut ensuite recoller mentalement ces morceaux pour s’en fabriquer une image. »



Zoé Cosson m’a invité à passer quelques heures dans ce village des Pyrénées. Une échappée livresque dressant le portrait des Aulusiens, hommes et femmes, dans ce berceau où l’écosystème se fragilise de jour en jour. La pollution menace ce petit coin de paradis si cher au cœur de l’autrice. Elle, qui m’en parle avec tellement de poésie ne peut que me faire aimer l’endroit de son enfance. Comme une envie d’y être invitée, moi aussi. Je comprends son attachement à la nature aussi douce et rude soit elle, aux animaux se dressant, aux habitants si vivants.



Aulus est un récit d’une époque où l’urgence climatique résonne dans les montagnes. Inutile d’avoir fait math sup’ pour le savoir, il n’y a qu’à regarder chez soi. La météo devient folle ! Hélas pour les simples citoyens que nous sommes, même si nous faisons de notre mieux, avec nos propres moyens, il y en a au-dessus qui n’ont pas envie de se bouger le C..! Combien de temps cela va durer ? Est-ce que ma fille verra la beauté de nos paysages encore longtemps… Un texte qui sensibilise sur l’environnement mais pas que ! Je ne vous en dis pas plus, sa luminosité est à découvrir et savourer !



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Aulus

La narratrice a huit ans quand elle arrive pour la première fois dans ce petit village des Pyrénées. Et puis elle en repart, quelques années après. Entre temps, elle a découvert le village et ses habitants, elle a parcouru les sentes et gravi des pentes, elle a vu passer l'hiver, fondre la neige et refleurir les jonquilles. Elle raconte, par petites touches, ce qu'elle apprend d'Aulus : sa splendeur passée d'ancienne station thermale et le Grand Hôtel de Paris acheté par son père, mangé par la pourriture et où il entasse une invraisemblable collection d'objets disparates ; ses habitants dont elle fait le portrait : Marie l'épicière revêche, Nicole et ses chevaux, les manies de Perce-neige, Pierre le chanteur, les deux Paul, René l'artiste de la nature ; ses montagnes qui enserrent le village et le maintiennent l'hiver dans une pénombre quasi permanente. Petit-à-petit Aulus se dessine et s'affirme, avec un peu d'humour, un peu de gravité, se crée une place dans l'imaginaire du lecteur. En contrepoint, la description de photos de l'époque des bains vient ancrer le village dans son histoire. Des raisons pour lesquelles la narratrice et son père finissent par quitter le village, on n'en saura rien ou presque. Mais quand le camion s'éloigne, reste la trace tangible de ce séjour en montagne, comme une photo que l'on glissera dans les pages d'un livre, en fidèle marque-page de ses prochaines lectures.



Lu dans le cadre des "68 premières fois".
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Aulus

Aulus-les-Bains est situé dans le massif des Pyrénées ariégeoises, plus exactement dans le Haut Couserans. L’Espagne se trouve à peine à cinq heures de marche. Si l’activité thermale est connue dans cette région depuis l’époque romaine, elle a pourtant été longtemps seulement un lieu d’exploitation des mines de plomb, au XVIe, au XVIIIe et jusqu’après la seconde guerre mondiale. Pourtant c’est bien au XIXe siècle que l’exploitation des eaux l’emporte sur celle des mines. À partir de 1822, 1845 les cures sont déjà surveillées médicalement. Et les buvettes, l’établissement thermal et les nombreux hôtels font désormais la renommée de la station.



C’est dans ce contexte de fin de règne que le père de la narratrice décide d’acheter un vieil hôtel qui a connu ses heures de gloires à la belle époque. Abandonné de tous, mais pas de ce père original qui tente aille que vaille de restaurer quelques pièces de cette vaste bâtisse qui tombe en décrépitude.



Au cours de ses vacances dans la région, la narratrice qui n’est autre que sa fille va observer non pas simplement la nature, mais bien la nature humaine et les quelques spécimens qui constituent la population permanente du village. Au cours de nombreuses marches dans les sentiers de randonnée du coin, ou aux abords des maisons du village, elle fait des rencontres, apprend à connaître l’autre, celui qui n’a jamais quitté son coin perdu de montagne et qui vit bienheureux là-haut, celui qui aime raconter la nature, les aventures, les anciens, la vie en apparence si simple mais pourtant si complexe pour ceux qui doivent faire avec. Ce sont des chemins, de cascades, des couleurs et des saisons, des feuilles qui bruissent aux arbres et des étendues de neige où rien ne bruisse. Ce sont des rencontres, des disputes, des souvenirs, des attentes ou des espoirs. C’est le père qui tente de faire revivre son hôtel délabré et vide, qui le peuple d’objets à défaut d’humains, qui partage, donne, échange avec les autres, chaque jours, par habitude, par soucis d’intégration, par plaisir finalement.



Si la vie y est souvent difficile, la chaleur des échanges, la beauté de la nature, donnent sa véritable dimension humaine au village et à l’aventure vécue par l’autrice. Le roman est court, l’écriture ciselée, sans un mot de trop, construit autour de quelques cartes postales anciennes, d’instantanés de vies, qui donnent corps et présence à tous ces absents qu’elle n’a pas oubliés. J’ai aimé ces portraits, ces traits de caractère, ces anecdotes qui font revivre avec humour, nostalgie et tendresse les années d’enfance. Mais aussi la façon dont la narratrice narre cette relation entre un père fantasque et malade et une adolescente pas toujours d’accord. Une jeune fille qui vit au plus près de ses émotions et fait preuve d’une capacité d’émerveillement face à l’autre, quel qu’il soit. C’est un roman atmosphère, de vivants, bien plus que de souvenirs enfuis. Alors qui sait si, en passant du côté des Pyrénées ariégeoises, vous n’aurez pas envie vous aussi de continuer votre route pour découvrir Aulus.
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Aulus

Petit roman (106 p.) au format très agréable dans lequel l'autrice évoque Aulus, village des Pyrénées, ancienne station thermale, où ne vivent plus aujourd'hui qu'une centaine d'âmes.

Entre souvenirs d'enfance, descriptions de lieux par touches légères, exploration des montagnes alentours, Zoé Cosson nous offre en 22 chapitres de contempler, goûter, sentir, la vie présente et passée d'Aulus, à travers sa nature et ses figures marquantes.

Elle nous brosse le portrait de son père avec délicatesse et pudeur et accompagne celui-ci avec une tendresse filiale touchante, malgré parfois ses agacements ou ses incompréhensions.

Un beau texte pour toucher du doigt l'attachement que peuvent mystérieusement éprouver certains pour un lieu perdu, loin de toute civilisation.
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Aulus

Aulus est un tout petit village de montagne, agonisant, déserté par la jeunesse et le second souffle apporté par quelques néo ruraux toisés d’un oeil suspicieux par ce qui reste de la population locale, sera sans doute insuffisant pour assurer la relève.



Le père de la narratrice est un de ces doux rêveurs, prêts à consacrer toute leur énergie pour une cause perdue d’avance. C’est ainsi qu’il fait l’acquisition d’un hôtel délabré et tente de lui redonner un aspect décent, dans un but indéterminé (il n’est pas question de faire renaitre de ses cendres la station de curistes renommée du début du 20è siècle). Caprice d’un citadin idéaliste, ou lutte désespérée contre une entropie galopante ?



La narratrice observe l’entreprise avec un regard mi-amusé mi-inquiet, mais profite de l’isolement créé par la géographie des lieux pour se nourrir de la nature ambiante.





Hommage du temps révolu, des vestiges d’une époque à la fois récente et si lointaine, ce roman est un constat de la fragilité de ce qui nous construit et peut sembler pour un instant ancré dans l’éternité.



Roman nostalgique, imprégné d’une tendresse pour le passé qui nous a modelé, porté par une écriture simple et belle.



107 pages L’Arbalète Gallimard 7 octobre 2021

68 premières fois


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Aulus

Un premier roman très beau à lire, l'auteure par petite touches dessine le portrait des villageois, les descriptions des lieux, des espaces, les balades en montagne sont des moments d'émerveillement pour la lectrice que je suis sous la plume ou rien ne semble échapper à Zoé Cosson.

Son écriture au plus près du réel, poétique, ciselé m'a fait penser à celle de Marie Hélène Lafon pour la précision, la justesse des mots.



« couper tresser labourer faucher traire. Ces geste-là, je les retourne à l'intérieur de moi. Je creuse des souterrains, des galeries de temps. ….Toute surface accessible vibrait de la pioche et du râteau. Toute surface fertile travaillait à la survie de ses occupants. Aujourd'hui la forêt marche, le paysage est bouché. »



« En face d'Aulus, il y a le Pouech. Pouech veut dire mont, monticule, éminence. le Pouech est une éminence verte, une montagne raide au cou tronqué, abrupte et solitaire, dégoulinante de torrents, hirsute de pins sur ses flancs et pourtant chauve. Son sommet arasé, adouci par le temps, est le seul sommet vert des alentours. Un sommet de velours. »



« Le village est une surface cabossée, boursoufflée, qui cloque et se soulève brusquement sur ses bords pour épouser l'élan des montagnes. »



Le thème de ce roman est simple, la narratrice vit avec son père dans un hôtel désaffecté que celui-ci a acheté aux enchères. Son père s'acharne à sauver l'endroit. C'est un homme joyeux, méticuleux que les villageois ont adopté.



Un roman relatant les petits et grands événements du quotidien d'un village écrit avec beaucoup de pudeur et de délicatesse. Il m'a été recommandé par mon libraire et je l'en remercie.
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Aulus

Un livre plaisant a lire et déroutant car on s'impregne de la vie de ce petit village perdu aux fins fonds de la campagne.

Cela fait écho chez moi a mes lointains souvenirs d'enfance ou je passais mes vacances dans ce genre de village mais aux fins fonds de l'Alsace.

Trés touchant.

Merci aux 68 premiéres fois pour la découverte de ce livre.
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Aulus

Zoé Cosson nous dit « On ne passe pas à Aulus, on s’y rend. »

Elle s’y rend régulièrement parce que :

« Mon père a acheté là, au bout de cette vallée sévère qu’on dit pauvre, un ancien hôtel délabré au prix d’un terrain agricole. Le Grand Hôtel de Paris. Une bâtisse de cent vingt-trois ans, toit crevé, parquet éventré, tuyauterie corrodée. »

En deux phrases, l’auteur a éveillé en moi d’autres lieux, dans une autre zone géographique, attachée au souvenir de mon père et au berceau de ma famille paternelle.

Quand je décide de partir en pèlerinage, sur ce passé, et que les lieux se sont rapetissés ou effacés du paysage pourtant encore si présent en moi.

Cœur en écharpe et âme en bandoulière, je fais revivre tout un monde disparu.

Aulus construite à la Belle époque ne compte plus qu’une centaines d’habitants.

C’est un récit en un bloc qui tangue entre portraits croqués sur le vif, rugueux et humoristiques et des images de ce lieu en images diffractées, l’écriture suit ce mouvement avec une absence voulue pour certaines phrases, qui enfilent les mots comme le lien les perles colorées que les enfants font glissées, pour faire colliers ou bracelets.

Il y a rupture entre le temps présent et l’immuabilité que le temps qui passe n’a pas érodé.

Immanquablement j’ai eu le sentiment que le déséquilibre vient du présent, ce qui est millénaire vacille mais comme le roseau, ne rompt pas.

J’ai aimé la nostalgie diffuse qu’insuffle en nous ce texte, nous avons tous des lieux qui ne survivent parce que nous y allons encore.

C’est cette France que j’aime, cette survivante, celle qui se mérite, car elle n’a pas suivi les autoroutes monotones, monochromes, elle vibre hors de la pression du monde qui court après le vide.

Un premier roman qui donne envie de suivre Zoé Crosson.

©Chantal Lafon


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Aulus

On ne passe pas à Aulus, on s’y rend », nous est-il écrit en exergue. Ce village ariégeois d’une centaine d’âmes au bout d’une vallée « un terminus géographique » a connu son heure de gloire lorsqu’il était encore une station thermale (les Thermes ont brûlé en 1947). L’achat aux enchères d’un ancien hôtel désaffecté, Le Grand Hôtel de Paris, va conduire la narratrice et son père à Aulus Les Bains. Personne ne dit «Aulus-les-Bains» en entier. On dit juste «Aulus». Zoé Cosson, dont c’est le premier roman, a 26 ans aujourd’hui mais n’en n’avait que 8 lorsqu’elle est arrivée dans ce «splendide village.» Depuis sa position de visiteuse car elle sera toujours considérée comme une étrangère dans le pays, elle décrit le lieu et ceux qui y vivent avec les Pyrénées comme cadre. Elle dessine des atmosphères en quelques mots « les habitants assistent au combat perdu du soleil qui ne perce pas, au blanc en ciment des éléments, à la résignation des arbres nus, des tombeaux de feuilles à leurs pieds. Au printemps après la fonte des neiges, les torrents se remplissent». Les Aulusiens «ne ressemblent pas aux gens de la ville. Ils ne fixent pas le sol à côté de leurs chaussures, ne soupirent pas […], et quand ils rient, tout leur corps vibre avec eux». C’est le deuxième roman que je lis écrit par une auteure diplômée d’un master de création littéraire : décidément les 68 y ont trouvé une source inépuisable de beaux romans !

Année après année, la narratrice se balade : elle regarde, écoute, recueillant les habitudes et les histoires des Aulusiens. C’est une écriture très contemplative. Zoé Cosson aime ce petit pays au point de l’avoir choisi comme thème pour son premier roman et de s’y être confinée pendant la pandémie du Covid (je l’ai découvert dans un article). Pas vraiment un roman, rien que de petites histoires qui semblent s’égrener sans lien apparent entre elles : des personnages passés ou présents, des bâtisses le plus souvent obsolètes comme l’église dont « Son seul plaisir, sadique en hiver, est de jouir de la lumière plus que n'importe quelle maison du village. » et surtout une nature omniprésente constituent les principaux thèmes. « Après, plus haut dans la montagne, il y a surtout des sapins prétentieux, et les pieds se plantent à l'aveugle dans des millefeuilles d'épines. Il y a de tout là-dessous. Des pierres et des trous, des vers de terre qui rêvent. » C’est un livre d’observations composé de vingt-deux chapitres courts, un livre d’apprentissage, d’initiation aux beautés de la nature : « J’apprends les chemins d’herbe écrasée, tapis, les routes de ruban gris, les cirques où se marient l’eau, la pierre, le gispet. J’apprends le mot gispet. L’herbe glissante, gelée, mouillée, trop grasse. J’apprends les arbres solitaires qui poussent droit malgré le dévers. » Là-bas, on vit vraiment au rythme des saisons « En août, le village est une fièvre, un bouquet. Une odeur d'herbe fraîche et coupée remue l'air, emplit les rues. Tout frémit et ondule, tout se gonfle de rires et de joies, de lumière verte, luisante.« Ces moments de l’année donnent son rythme au récit. Les balades dans les Pyrénées sont autant d’instants émerveillés. « La pluie ne passe pas, le vent à peine. Les limaces noires et dodues ont tout le sol pour elles, tout le temps pour tracer leur bout de chemin gluant. Les pieds s'enfoncent et disparaissent sous d'épais paquets de feuilles brunes. Je ne sais pas ce qu'il y a dessous. Je m'imagine que les feuilles rouillent jusqu'à s'effriter en poussières d'arbres. Qu'ensuite toutes sortes de bestioles les broient et les recrachent, et quand elles sont aussi petites que des atomes, elles rejoignent les strates noires et profondes du monde tellurique. » La narratrice est humble devant Dame Nature, elle a conscience qu’il lui faut ouvrir grand les yeux et « apprendre ».

L’écriture imagée retranscrit la lenteur du temps et ça le lecteur le ressent tout au long des pages. Il y a Aulus au présent mais aussi des passages tirés de cartes postales qui parlent de la ville au début du siècle dernier, cartes témoins de la vie fourmillante qu’il y a eu alors. Réel et fiction se mélangent. Des personnages passés ou présents, apparaissent au fil des pages comme Marie, surnommée Marldingue, qui tient l’épicerie ; le boucher, qui reste toute la journée assis sur le banc en face de sa devanture ; Nicole, « qui n’est pas du cru, c’est une arrivante, qui a repris le centre équestre, submergée par sa tâche, ignorante des règles implicites du village » ; Pince-cul nommé ainsi « car il a l’habitude de pincer le derrière des enfants quand il travaille l’hiver au tire-fesses de la piste Baby » ; René, « le monsieur de l’Imagerie végétale », qui « collecte les pierres, sélectionne les plantes rares » ; les deux Paul, le pêcheur, qui « laisse le bourdonnement de l’eau envahir sa tête » et celui qui recueille et domestique orvet, vipère, chouette.

Il y a aussi son père, un homme fantasque, atteint de syllogomanie, un TOC qui le conduit à collectionner ou plutôt accumuler tout et n’importe quoi : « Il y a la chambre électronique (grille-pain ayant déjà prouvé sa dangerosité, un compresseur à air) … la chambre couchage avec ses matelas multicolores empilés jusqu’au plafond, …la chambre sports et loisirs (une canne à pêche, six réchauds de tailles variées), …la chambre bois, …la chambre maquettes et enfin l’atelier d’apiculture de Paul » … Un véritable éventaire à la Prévert.

La narratrice évoque également les élections dans le village, sources d’échanges parfois virulents, la fermeture des mines de tungstène, le barrage hydroélectrique…

Dès sa couverture illustrée par un paysage ce livre est un hymne aux paysages et aux traditions pyrénéennes ! Les Pyrénées, cette montagne que je vois depuis mon balcon.









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Aulus

Il y a des endroits que l'on découvre un peu par hasard et qui finalement vont devenir de véritables lieux de vies...

Le hasard de la vie va conduire la jeune narratrice et son père à Aulus-les-bains, village thermal situé au cœur des montagnes ariègeoises, suite à la vente aux enchères d'un hôtel délabré.



Dans ce premier roman, Zoé Cosson nous confie ses souvenirs et différents récits de l'histoire de ce hameau qui compte encore aujourd'hui une centaine d'habitants... Ayant passé des vacances pendant plusieurs années à Orlu, un village situé à une quarantaine de kilomètres à vol d'oiseau d'Aulus, je me suis tout de suite représentée l'ambiance et l'atmosphère générale du lieu. Ce récit autobiographique m'a retransporté des années en arrière et ça a été un plaisir pour moi d'en découvrir plus sur la vie de ce village ariègeois apprécié des randonneurs...
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