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Critiques de Élisabeth Vonarburg (148)
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Le silence de la cité

Un bon roman post-apocalyptique ....



Ce texte a été rédigé en 1981et il était dispo chez Denoël mais il a été refondu en 1998 et il est disponible sous cette forme chez alire ..

Il est crucial de privilégier cette dernière édition ...



C'est un excellent roman qui m'a apporté la fabuleuse satisfaction de découvrir un auteur et qui a suscité le désir ardent de parcourir sa bibliographie .



Le monde qui est le nôtre a sombré et c'est un autre monde qui commence alors que les legs du passé vont également trépasser...



Dans des cités de rares survivants explorent l'ingénierie sociale et la génétique dans but de rendre l'humanité survivante , extérieure à ces villes , plus fonctionnelle et plus viable ...



Une jeune fille qui est un prototype va devoir se connaître .. s'explorer et s'affranchir de son créateur .



L'humanité est affligée d'un déséquilibre : Il nait beaucoup plus de filles que de garçons .

Il en découle des troubles sociaux et la survie de l'espèce est peut-être compromise .



Mais la nature fait bien les choses et les espoirs sont permis à ceux qui espèrent et qui sauront dépasser leurs préjugés ..



Un superbe roman psychologique soigné et légèrement dérangeant qui mobilise la politique ... la génétique ... la sociologie ... l'ingénierie sociale , pour créer un univers passionnant que l'on a absolument pas envie de quitter ..



Effectivement il y a quelque chose de la main gauche de la nuit dans cet univers , il faut l’avouer . Il y a quelque chose sur le fond et dans l’atmosphère aussi .



Un roman de qualité .

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Chroniques du pays des mères

Un quasi coup de coeur ! Certes ce n'est pas une lecture fluide, c'est complexe, touffu, le lecteur a souvent l'impression qu'il ne se passe pas grand-chose, alors qu'en fait Lisbeï a grandi, évolué, et que la société qui l'entoure évolue, elle aussi.

Ce roman traite de thèmes intellectuellement très riches et soulève bien des questions. L'écriture utilise une féminisation de pas mal de mots (souvent en créant un nouveau mot comme la printane pour le printemps) et surtout grammaticalement le féminin l'emporte sur le masculin. D'habitude je n'aime pas trop ça, mais là c'est totalement justifié par l'histoire elle-même, car cette langue reflète les évolutions sociétales, et en plus, cela n'a guère gêné ma lecture. On suit Lisbeï depuis ses cinq ans et on découvre le fonctionnement de la société qui l'entoure, en même temps qu'elle, par ses yeux. Comme une sorte de roman d'apprentissage, mais avec des extraits de notes ou des lettres d'autres personnages qui apportent au lecteur d'autres points de vue, parfois en lui donnant une clé, parfois en l'emmenant à se poser de nouvelles questions. Il y a beaucoup de non-dits, beaucoup de questions trouvent réponse, mais pas toutes. le lecteur est comme Lisbeï, il cherche à comprendre mieux le pourquoi des traditions.

C'est un univers extrêmement riche et complexe, post-apocalyptique. Dans un passé lointain, il y a eu le Déclin, l'humanité a quasiment disparu et depuis il naît beaucoup plus de femmes que d'hommes. Qui plus est, une sorte de maladie infantile sévit. On découvre très vite qu'après le Déclin, la société a connu une période de patriarcat dur, le Harem, auquel a succédé une période de matriarcat tout aussi strict, les Ruches. Ensuite, une nouvelle religion est apparue et a donné naissance au pays des mères, encore un matriarcat, mais bien plus pacifié. Reste que les hommes sont réduits à des objets, ainsi que les femmes, quoi que socialement mieux valorisées, pendant leur période de reproduction. Tout cela interpelle Lisbeï et d'autres personnages.

A côté de la question des genres, c'est aussi, voire surtout, un roman sur le rapport au poids et à la vision de l'Histoire. Lisbeï s'interroge, cherche à percer les mystères de sa civilisation, à repousser les règles de la tradition et à connaître et révéler les vérités historiques. Elle veut comprendre sur quoi repose son univers, elle a soif de découvertes.

C'est d'autant plus riche et complexe que le Pays des Mères est constitué de régions très différentes avec de notables variantes de fonctionnement et une grande diversité des cultures.

C'est un roman-univers, sans l'ombre de manichéisme. Je sais déjà que je le relirai : il fait partie de ces romans qu'il faut lire et relire pour en apprécier les détails, les subtilités et les non-dits.
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Chroniques du pays des mères

Un "autre" monde advenu après le Déclin, vers 2120, au lendemain d’une catastrophe écologique ou du moins l'exploitation non réfléchie de la terre.

Un monde ultra féminisé. Les femmes sont bien plus nombreuses que les hommes : tout se lit, se dit au féminin comme une dominance, un besoin de nier la part masculine des vies.

Un monde qui semble avoir trouvé une paix relative au lendemain d’affrontements de pouvoirs.



Lisbeï va être notre guide dans cette société. De l'"enfante" qu'elle est jusqu'à la jeune femme, c'est par ses yeux et ses réactions, en tout cas en suivant ses pas et son esprit que nous allons découvrir Béthély, terre où elle vit et plus tard les autres régions-provinces qui finalement ont toutes une façon personnelle de vivre et ont leurs propres règles qui régissent la vie au sein du groupe.



Lisbeï, née pour devenir La Capte (celle qui prend les décisions pour tous) et éduquée à cette fin et qui devra fuir Béthély, au moment où il sera évident qu'elle ne peut porter d'enfant, période où elle découvre également des documents qui peuvent remettre en cause le dogme religieux sur lequel repose l'évolution des sociétés précédentes pour arriver à celle qui est la sienne...





C'est un récit lent, qui détaille la vie de Lisbeï, son mode d'éducation, ce qui est attendu de sa personne, quel sera son rôle et donc toute l’histoire de la société dans laquelle elle évolue Puis vient l'éloignement, la recherche pour essayer de trouver une "vérité" face aux documents qui viennent contredire une croyance jusque là inébranlable.



Ce qui est frappant à Béthély, par rapport aux autres provinces, c'est le peu de sentiments qui sont échangés : les enfants sont conçus sans amour, sont élevés en pouponnière, les mères sont absentes, les pères n’existent pour ainsi dire pas, on ne s'attache pas aux enfants parce qu'ils peuvent mourir très vite et le chagrin ne doit pas être.

Il faut toujours enfanter pour que la lignée perdure...

Et finalement, ce manque d'affection, j'ai eu l'impression qu'il contaminait tout le récit et toute la vie de Lisbeï. Elle éprouve, petite fille, une affection immense pour sa demi-sœur mais en sera éloignée et finalement, toute sa vie durant, elle n'aime que très peu et ne s'aperçoit pas qu'on peut l'aimer, l'apprécier... C'est terrifiant.

Aussi quand la remise en cause du dogme vient ébranler les croyances de chacune, il n'est pas très étonnant de voir le déni de la majorité : tout est si fragile et si peu étayé de valeurs humaines pour ne pas parler d'humanisme. Tout comme, l'exploration envisagée de terres encore jamais visitées ne provoque aucun enthousiasme : pourquoi aller vers d'autres peuples, d'autres Cultures ? Pourquoi tendre une main, espérer une rencontre alors que la société reste finalement source d'égoïsme. Même celles qui vivent en couple ne semblent pas conjuguer les mot "amour" au quotidien et dans le temps.



Un livre assez déstabilisant qui m’a mise mal à l'aise. Une lecture parfois laborieuse et quelques touches surprenantes comme la référence au "Petit Prince" de Saint-Exupéry, la mythe de Pénélope, l'évocation d'Ys, la cité engloutie et la description d’une religion qui reprend, au féminin, les grands traits du Christianisme…



Je m’attendais davantage à un récit sur la question d’un avenir face à un non respect de ce que nous possédons, ressources, nature et plus imaginatif…



J'aurais souhaité être plus enthousiaste pour terminer…





Mais je remercie Babélio et les éditions Folio qui m’ont permis de lire cette écrivaine !

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Le silence de la cité

Manipulations génétiques dans un proche futur

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Lecture commune faite avec @Witchblade (et @anne_the_boyz: non-membre)

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Un roman post-apocalyptique dans ma PAL depuis un bon moment.

L'auteure franco/canadienne est peu citée parmi les grands de la SF (c'est encore un petit milieu mais qui tend à s'étendre progressivement, tant mieux). Le livre a reçu le grand prix de l'imaginaire en 1982. Et puis il a été oublié jusqu'à ce qu'une maison d'édition le republie (refondu) en 1998.

*

Notre monde en train de sombrer dans le chaos . Non, pas de zombie, ne vous en déplaise! Mais plutôt un virus. Une drôle de maladie impliquant une naissance surnuméraire de bébés filles.

Une cité - cachée et isolée du reste de la civilisation - a pour but de redistribuer les cartes à sa manière. Entre génétique et robotique, elle projette de créer une nouvelle race d'humains (légèrement modifiés mais avec des capacités de régénération cellulaire). Dans cette ambiance surréaliste, une jeune fille, Elisa, sera la première prototype. Avec elle, le lecteur apprendra bien des secrets de cette cité mystérieuse.

Elisa se fera aider d'hommes-machines. Et c'est bien à ce moment-là qu'on se rendra compte de l'effroyable pouvoir des IA (intelligence artificielle).

*

Au début de ma lecture, j'ai eu la sensation de me perdre dans l'histoire. Je vous avoue que j'ai failli lâcher. Mais en sachant que mes 2 acolytes me suivaient tout le long, j'ai continué. Je me suis emmêlée dans les dates, les lieux, les actions des protagonistes. Je ne voyais pas vraiment où l'auteure m'emmenait. Il me fallait beaucoup d'imagination car les descriptions se faisaient rares. Entre passé et présent, le texte me semblait nébuleux.

Puis le déclic ! Au moment où Elisa débute son Projet, je me suis laissée emporter dans la complexité et très grande richesse du récit.

*

C'est dense, d'une écriture simple mais directe et des thèmes passionnants dans un univers élaboré.

En 1982 (parution), les IA n'étaient pas encore dans l'esprit des chercheurs. Prémonition? Aujourd'hui, ce livre est brulant d'actualité !

On entrevoit aussi la question du genre (question de libre-arbitre), le rapport de force homme-femme, la manipulation mentale, la génétique à outrance. Toutes ces questions traitées avec intelligence et finesse (sans parti pris, hormis peut-être le côté féministe, notamment dans la guerre des pouvoirs).

Quelques invraisemblances dans les dialogues entre Paul et Elisa, une apparition soudaine d'une "race" batarde (les Cesti), une guerre semi-avortée mal restituée dans l'intrigue).

*

On peut quand même dire que ce roman est inclassable. Par sa construction, ses thèmes, son avant-gardisme, le mélange entre questions philosophiques et scientifiques, c'est l'originalité avec un grand O.

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Je n'ai pas boudé mon plaisir et je vous le recommande très chaudement. Même pour certains qui seraient réfractaires au genre de la SF, voyez-le comme un essai d'anticipation. (Notre futur lointain?)
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Le silence de la cité

3 fois que je commence à écrire un avis, 3 fois que j'efface tout et que je recommence... C'est très difficile pour moi d'écrire une critique sur ce roman très riche, très profond. J'ai du mal à structurer ma pensée, à organiser mes idées et même à trouver mes mots. Il doit me manquer un truc dans le cerveau ou bien c'est un livre qui aura besoin d'être "digéré" par ma tête ou bien il est trop tôt...



"Le silence de la cité" est un roman brillant qui aborde de nombreux thèmes passionnants. C'est un roman assez exigeant qui demande une certaine implication du lecteur. Il ne faut pas s'attendre à un post-apo classique en commençant ce livre. Si le contexte est bien post-apo, le traitement est très original. Le début du roman est assez déroutant et il faut un certain temps au lecteur pour se faire une représentation du monde créé par l'auteure. Vonarburg ne prend pas son lecteur par la main. Et ça déjà, c'est quelque chose que j'aime, quand je sens qu'un auteur fait confiance à son lecteur pour appréhender son univers. Le contexte post-apo n'est pas vraiment au cœur du récit, il n'est pas moteur des événements, il sert plutôt de prétexte à l'auteure pour aborder des sujets complexes et très intéressants comme l'identité sexuelle, le libre-arbitre, la liberté, la justification du recours à la violence, le transhumanisme (je ne sais pas si le mot existait à l'époque mais le traitement qui est fiat de ce thème dans le roman est saisissant)... Des thèmes riches, passionnants, brûlants d'actualité pour certains, éternels pour d'autres, et traités de façon très intelligente et subtile par Vonarburg.



Pour autant, l'auteure n'oublie pas de se poser à hauteur d'humain et "le silence de la cité" a un côté roman d'apprentissage assez marqué qui m'a beaucoup plu. Tout au long du roman, Elisa apprend à connaître le monde qui l'entoure (d'abord la cité puis le monde "extérieur") mais aussi et surtout elle-même (son corps, ses désirs, ses choix...). Ce personnage est très beau, très attachant. On la suit tout au long du livre dans son évolution. On la voit grandir, se confronter au monde, aux autres et aussi à ce qu'elle est.



Certains passages m'ont moins convaincu et ne m'ont pas semblé apporter quelque chose au récit. Par exemple, je n'ai pas bien compris l'apport des Sesti au récit. Pour autant, même lors de ces passages dont je n'ai pas saisi la portée, je ne me suis pas ennuyée.



"Le silence de la cité" est vraiment un très bon roman qui fait appel à l'intelligence du lecteur, le stimule tout en n'oubliant pas de mettre de l'émotion dans son histoire. Une grande réussite qui m'a fait passer un excellent moment, ce que j'ai grand peine à transmettre ici.



Challenge Multi-défis 2017 - 45 (item 4 : un roman d'apprentissage)

Challenge Atout prix 2017 - 12 (Grand prix de l'imaginaire 82 - Prix Rosny aîné 82)

Challenge ABC 2017-2018 - 7/26
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Apocalypse Nord

Recueil collectif de sept nouvelles de science-fiction québécoise, centré sur la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, par des auteur·ices issu·es de la région.



(Note pour les non-Québécois·es : le Saguenay-Lac-Saint-Jean est la région québécoise la plus au nord encore densément peuplée et accessible par la route, mais si vous essayez de la situer sur une carte, vous constaterez qu'on est encore loin du Grand Nord...)



Habituellement, les collectifs me laissent une impression mitigée, parce qu'ils ont tendance à être inégaux en qualité. On n'y échappe pas complètement ici, mais même si certaines nouvelles sortent un peu moins du lot, la qualité de l'ensemble est bien meilleure que ce je retrouve généralement dans ce genre de recueil. J'avais peur également qu'on soit uniquement sur du post-apo bien plombant, mais non : même si les futurs décrits ne sont pas roses, on trouve une belle variété d'ambiances et de thèmes traités (avec une bonne place faite aux peuples autochtones).



J'ai retrouvé avec plaisir Into White, ma nouvelle favorite du recueil d'Élisabeth Vonarburg, La femme aux semelles du temps. Mais la plus grande réussite de ce recueil, c'est la nouvelle de Dave Côté : l'auteur imagine qu'avec le réchauffement climatique, l'accent du Lac se met à fondre aussi, pour le plus grand malheur des habitant·es qui cherchent des solutions singulières afin de le récupérer... Un bel hymne à l'identité régionale porté par une narration ingénieuse, avec au passage un bon gros taquet dans la gueule des racistes de tout poil, jamais inutile par les temps qui courent. Génial!
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La femme aux semelles du temps

Sept nouvelles d’Élisabeth Vonarburg, écrites entre 1986 et 2023 : peut-être la formule idéale pour plonger dans ses univers si vous vous sentez découragé·es rien qu’à constater la longueur de Chroniques du pays des mères.



Contrairement à ce que le titre laisserait croire, il n’est pas tant question de voyage dans le temps mais plutôt de rapport au passé, au présent et au futur. Le ton général est à la nostalgie, un thème qui revient fréquemment, d’une façon plus subtile et singulière qu’on ne l’imaginerait au départ. Cela se remarque particulièrement dans les écrits les plus récents, centrés sur des univers « pas-si-désespérés » qui combinent espoirs et désillusions en empruntant quelques éléments au hopepunk. L’autrice, qui revient brièvement sur la genèse de chaque nouvelle, fait part de ses difficultés d’écrire depuis quelques années, alors que la dystopie rattrape de plus en plus la réalité.



Toutes les nouvelles ne se valent pas mais certaines sont de petites pépites. Petit aperçu :



Ailleurs et au Japon (1986) : Une nouvelle tellement cryptique que je ne suis pas sûre d’avoir compris de quoi elle parle. Je l’ai lue jusqu’au bout mais je conseillerais de passer directement à la suivante.



Le dormeur dans le cristal (1986) : Un vaisseau spatial protégé par un champ temporel trouve un homme endormi dans un bloc de cristal. Une histoire plutôt dans l’introspection que dans l’action, bien exécutée et juste assez courte pour nous mener là où elle le souhaite.



Les villes invisibles (2007) : Le début donne l’impression d’entrer dans une dystopie plutôt banale, pour mieux bifurquer ensuite dans une direction imprévue – le tout servi par une narration originale et absolument pas gratuite comme on pourrait le croire d’abord.



Amours de verre met en scène un « pays-qui-sera » où la musique gouverne les mœurs. Stylistiquement, l’autrice prend volontairement le contrepied des ateliers de creative writings. Si vous adhérez à son humour ironique, c’est un vrai régal à lire.



Into White (2022) : Un retour au pays et un périple vers le nord, là où la neige ne fond jamais. Cette nouvelle traite de nombreuses thématiques toujours de manière riche, originale et inattendue. Peut-être la plus émouvante du recueil et celle que j’ai préférée.



La Course de Minuit (2022) : Dans le même univers que la nouvelle précédente, mais cinquante ans plus tard. Les thèmes sont tout aussi forts et variés et ne font pas redite mais l’ensemble est plus nébuleux, moins percutant qu’Into White.



La Femme aux semelles de temps (2023) : Cette nouvelle éponyme, centrée sur une vieille femme qui use ses chaussures sur du bitume trop chaud, clôt joliment le recueil dans une quasi-ambiance de conte.
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Chroniques du pays des mères

En 1992, la française Élisabeth Vonarburg publie un énorme ouvrage rapidement récompensé par une multitude de prix, dont le prix spécial du Philip K. Dick Award et le prix Boréal.

Acclamé par Ursula K. Le Guin en personne (excusez du peu !), Chroniques du Pays des Mères acquiert rapidement le statut d’œuvre culte et devient l’un des univers de science-fiction les plus appréciés de tous les temps.

Près de 27 ans plus tard, les éditions Mnémos rééditent ce monument accompagné d’une préface de Jeanne A. Debats.

Une occasion en or pour les lecteurs de (re)découvrir ce chef d’oeuvre intemporel à l’intelligence acérée.



Au temps des Capteries

Bien des siècles après la fin de notre civilisation moderne, après ce que l’on considère comme Le Déclin (une ère de bouleversements climatiques majeurs), une nouvelle société s’est installée sur les ruines des échecs passés.

Dans un monde où la fertilité des femmes ne permet que rarement de mettre au monde des garçons, les hommes sont devenus une rareté…et les femmes gouvernent les Capteries du Pays des Mères, un ensemble de Citadelles-États réunies en fédération et régit par des Assemblées.

C’est dans l’une de ces Capteries, celle de Béthély, que naît Lisbeï, une petite fille parmi tant d’autres qui vit dans la Garderie, un endroit protégé où les mosta (les « non-personnes ») doivent faire leurs premiers pas et leurs premières armes loin du regard des autres.

Car dans ce monde dévasté, une étrange Maladie peut brutalement emporter les jeunes enfants. Ce n’est qu’après sept années de vie ou après avoir survécu à ladite maladie que la mosta devient une dotta (une jeune fille) avant d’intégrer pour de vrai une société divisée en castes de couleurs : les Vertes n’ont pas encore eu leurs règles, les Rouges sont en âge de procréer et doivent être régulièrement inséminées artificiellement pour perpétuer les Lignées, et les Bleues, celles qui sont incapables d’avoir des enfants du fait de leur âge ou d’une stérilité précoce.

Au Pays des Mères, les hommes n’ont pas les mêmes droits que les femmes. On les utilise pour inséminer les Rouges et quelques élus ont le droit de féconder directement la Mère (celle qui dirige la Capterie) après la Célébration, un étrange rite hérité des enseignements de Garde, sorte de Jésus féminin qui a également donnée le culte d’Elli à ses sœurs.

Lisbeï, alors qu’elle est encore très petite, comprend qu’elle n’est pas comme les autres, qu’elle voit plus loin et ressent les choses avec plus de force. Sortie de la Garderie, elle rencontre sa Mère, Selva, Capte de Béthély. Elle apprend qu’elle est la prochaine Mère de Béthély et que sa demi-sœur, Tula, encore dans la Garderie, sera sa Mémoire, celle qui se souvient de l’Histoire.

Mais les choses ne vont pas vraiment se passer ainsi…



Une société au féminin

Divisé en cinq parties, cet énorme pavé rassemble la vie et l’oeuvre de Lisbeï, petite fille promise à un destin extraordinaire dans une société tout bonnement fascinante où Élisabeth Vonarburg imagine un pouvoir matriarcal absolu…mais pas sanglant. On apprend rapidement que le Pays des Mères n’est pas la première restructuration sociale apparue depuis Le Déclin et que le monde a d’abord connu l’essor des Harems, société dictatoriale où les hommes survivants étaient devenus de terribles dictateurs avant d’être réduits eux-mêmes en esclavage par les femmes des Ruches, une variante féministe extrême caractérisée par sa violence et son hermétisme. Grâce aux enseignements de Garde, une prophétesse new-age, et à ses Compagnes, les Ruches sont tombées pour devenir ce Pays des Mères. Si l’on pourrait voir dans cette création littéraire une utopie féministe, Élisabeth Vonarburg nous détrompe rapidement et fait preuve d’une subtilité bien plus sidérante dans son approche. Le Pays des Mères explique la nécessaire évolution vers la stabilité d’un système matriarcal qui peut facilement tombé dans les mêmes travers de violence que celui des hommes. Mais ce système, pour aussi pacifique qu’il semble être, n’est pas parfait et Lisbeï en fera plusieurs fois l’expérience dans son épopée. La place des hommes fait ici écho à celle des femmes dans notre société et explique un point fondamental pour la réussite du roman : le féminisme n’est pas un nouvel extrémisme qui doit juste inverser les injustices mais un mouvement pour l’égalité entre les sexes. On notera d’ailleurs que les plus orthodoxes des Croyantes, les Juddites, sont toujours vues d’un mauvais œil tout du long de l’aventure et représentent de façon assez fabuleuse les travers d’une tradition matriarcale aveugle et, forcément, délétère.



De Mères en mères

Curieusement, au Pays des Mères, le lecteur découvre que les femmes n’ont pas totalement réussi à se débarrasser d’un vieux schéma masculin : celui de leur représentation en temps que reproductrices. Nourries par la crainte de la disparition de l’espèce et sans cesse préoccupées par un pool génétique trop étroit pour permettre à n’importe qui de se reproduire avec le premier venu, les Capteries ont instauré un système de Lignées pensé pour éviter la survenue d’aberrations génétiques condamnées aux Mauterres ou à la mort.

La principale caractéristique de cette hiérarchie induit une division des femmes entre celles qui sont en âge et en capacité de se reproduire. De même, il s’avère rapidement évident que le fait de ne pas pouvoir avoir d’enfant n’est pas une malédiction si terrible et que l’insémination à répétition devient une forme de terreur silencieuse qui condamne les femmes à avoir des enfants, programmées comme elles le sont dès leur plus jeune âge pour devenir des mères. Dans Chroniques du Pays des Mères, le lecteur trouve une réflexion fascinante sur cette obligation naturelle et sociale qui enferme les femmes dans des cases et qui, souvent, détruit des vies ou des aspirations. De façon méticuleuse, Lisbeï nous rend compte de cet énorme boulet qui va de pair ici avec le tabou amoureux : la reproduction oui, l’amour, non, surtout pas avec un homme. La liberté sexuelle prend dès lors un tout nouveau sens et les femmes du Pays des Mères deviennent autant de moteurs de réflexion pour le lecteur sur la condition féminine actuelle et la pression sociale qui pousse à avoir un enfant. Bien sûr, cela ne veut pas dire que le livre est contre l’enfantement mais, comme pour tout, chacune devrait avoir le choix.

Autre élément génial, la langue imaginée par Vonarburg s’est féminisée pour refléter une société majoritairement féminine. Et non seulement le féminin l’emporte mais, en plus, les lieux et adjectifs du passé ont lentement glissé dans leur orthographe pour refléter l’évolution inexorable de la langue. Le monde est donc bien mouvement.



Gnothi seauton

Autre axe de réflexion de ce monstrueux roman-univers, la place de l’Histoire, des histoires et de la tradition. À côté du voyage initiatique de Lisbeï à travers le Pays des Mères, Élisabeth Vonarburg se penche sur l’importance de notre Histoire et la pérennité des contes et légendes d’où le vrai peut toujours surgir quand on s’y attend le moins. Comprendre sur quoi nous sommes en train de nous tenir à l’heure actuelle, voilà une chose fondamentale, savoir qui nous sommes pour savoir où aller. Ce n’est pas un hasard si Lisbeï deviendra exploratrice et avant-gardiste, c’est aussi par besoin de découvrir encore et encore mais surtout de remettre en question les évidences, d’aller voir derrière le rideau de nos enseignements pour mettre en doute et déterrer de nouvelles choses. Ce personnage inoubliable qu’est Lisbeï ne se caractérise pas seulement par sa profonde humanité mais aussi, et surtout, par son refus d’accepter ce qu’on lui sert, sa volonté constante de découvrir d’autres horizons et d’apprendre insatiablement. Véritable déclaration d’amour au savoir, à la recherche, à l’enseignement, à l’exploration, Chroniques du Pays des Mères nous offre des horizons aussi multiples que passionnants, où l’on découvre les différentes Capteries et les différents modes de vies, sans jugement mais avec un esprit critique constant pour nous permettre de remonter les choses à l’endroit.



Vertige narratif

Mais ce qui fait la force de ce roman, c’est surtout son univers, incroyablement bien pensé et qui ne laisse pas la place à la catégorisation à l’emporte-pièce, qui triture ses personnages dans tous les sens pour dévoiler contradictions et secrets, amours et peines. L’écriture magnifique d’Élisabeth Vonarburg abolit nos préjugés et offre un voyage émouvant en diable, rythmé par les doutes et les peines de Lisbeï comme par ses joies, établissant la jeune fille comme une héroïne inoubliable. Il faut également dire un mot de la structure, alternant la forme épistolaire et la forme romanesque, qui met en relief l’entreprise de Lisbeï dans sa soif d’apprendre…pour se rendre finalement compte qu’une autre personne nous rapporte tout cela.

Un vertige saisi alors le lecteur lorsqu’il regarde en fin d’ouvrage la Tapisserie finement ouvragée par l’autrice, une malicieuse écrivaine capable de nous raconter l’histoire d’une femme à la recherche d’une légende et qui devient elle-même une légende…avant de nous être rapporté pendant ces centaines de pages d’une intelligence époustouflante. Chroniques du Pays des Mères n’est pas seulement exceptionnel par ses personnages ou par son univers mais aussi, et surtout, par le raffinement de l’ensemble et sa structure, beaucoup plus importante et plus forte qu’on ne l’aurait cru de prime abord.



Chroniques du Pays des Mères plonge dans une société matriarcale perfectible où l’extrémisme n’a pas sa place quelque soit votre genre ou vos croyances. Roman-univers unique emportée par une héroïne intemporelle, le roman d’Élisabeth Vonarburg mérite amplement sa place de chef d’oeuvre.

Un livre inoubliable pour une histoire inoubliable.
Lien : https://justaword.fr/chroniq..
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Le silence de la cité

Livre lu en lecture commune avec kateginger, cela aurait dû être fait précédemment avec un autre roman issu d’une pioche. Je ne sais plus du tout comment ce livre a atterri dans ma PAL, sans doute suite à la critique enthousiaste d’un ami de Babelio. Je ne me souviens plus du résumé mais ça fait un moment que j’avais envie de le ressortir de ma PAL. Je ne connais que de nom cette auteur.



L’histoire semble alterner entre passé et présent où on suit la jeune Elisa et son père Paul. Nous évoluons dans un monde post-apocalyptique où les hommes ont été remplacés par des machines ou des hommes-machines. Au début, l’histoire semble assez confuse. Différentes scénettes de vie s’enchaînent dans une Cité quasi vide sans qu’on sache vraiment où l’auteur veut nous mener. L’histoire se révèle intrigante même s’il ne se passe pas souvent grand-chose. Des scènes de sexe apparaissent de temps en temps. J’aime bien le personnage d’Elisa, elle est encore jeune, elle se cherche et elle essaye de comprendre ce qu’il se passe autour d’elle. Certaines notions ne sont pas toujours simples à comprendre. L’histoire finit par se complexifier avec l’apparition d’un ami d’Elisa qui lui apprend la vérité sur bien des choses du passé et de présent. Nous passons ainsi un cap dans le roman et nous retrouvons Elisa hors de la Cité 4 ans plus tard. Elle apprend ainsi à vivre à l’Extérieur. Cette histoire comporte plusieurs parties où nous retrouvons Elisa à différentes périodes de sa vie, ce n’est pas toujours simple à suivre. Elle continue à évoluer et à chercher qui elle est vraiment. Dans la troisième partie, le temps s’accélère, de longues périodes ne nous sont pas racontés, peut-être pour couper court à la monotonie qu’est devenue la vie d’Elisa avec son grand Projet. J’étais bien loin d’imaginer une histoire comme ça, l’auteur a vraiment créé quelque chose d’hors norme entre exploration du sexe et de l’identité, et expérimentation sur les gênes et les humains. Étrange comme concept, finalement il est normal que ce livre ait eu différents prix littéraires. Elisa passe son temps à se poser énormément de questions sur le Projet, sur ses enfants, sur le Dehors, sur ses émotions… C’est intéressant et finalement, ce n’est pas du tout lassant puisque ce roman est basé sur la recherche de l’identité. Heureusement, passé la moitié du roman, l’auteur choisit quand même de rajouter un peu d’action à son histoire. On y comprend enfin la raison de cette étrange couverture d’une jeune fille en compagnie d’un tigre blanc. Je n’aurais vraiment pas imaginé une histoire pareille, l’univers est riche et complexe, bourré de questionnement en tous genres. Où on essaye de comprendre en même temps qu’elle qui est Elisa...



Comme vous l’aurez compris, ce roman a été une excellente découverte de cette auteur et de son style si particulier. Cette Elisa est un personnage atypique, que de questionnement en elle mais en même temps, vu comment elle a été élevée, elle était la dernière enfant de la Cité au milieu de vieillards et de machines. Elle apprend à vivre comme elle peut et à survivre dans un monde différent. J’étais loin d’imaginer une histoire pareille mais en même temps, l’auteur a réussi à me tenir en haleine tout au long du roman, même les questionnements n’étaient pas ennuyeux. Ils faisaient tout le personnage d’Elisa. Il me donne envie d’en découvrir d’autres de cet auteur, dont une série peu connue « Tyranaël ». Ce roman mérité totalement son Grand Prix de l’Imaginaire, dommage qu’il en soit pas si connu. Le seul hic concerne les quelques coquilles qui se baladent, des accents manquants ou des lettres.



Sur ce, bonnes lectures à vous :-)
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Le silence de la cité

Le silence de la cité… le titre prend tout sa signification à la fin. Un roman post-apocalyptique qui se construit progressivement : l’auteur présente ses personnages Elisa et Paul au centre d’un grand projet dans un futur très lointain. Elisa possède la faculté de se régénérer en cas de blessure et se découvre d’autres atouts par la suite et aussi les desseins de Paul. La départ d’Elisa de la Cité changera beaucoup de choses…

Difficile de critiquer ce roman de science-fiction… (déjà fini depuis un moment et assez complexe dans sa construction). Il aborde un certain nombre de thèmes : l’amour, la génétique, les rapports hommes-femmes, la question du genre. J’ai beaucoup aimé cette histoire surtout la partie avec les enfants, leur aptitude à changer, leurs interrogations sur leur personne, leurs désirs, l’autre. La guerre est passionnante à suivre mais m’a lassée vers la fin. Ce livre d’Elisabeth Vonarburg fait beaucoup réfléchir sur l’Homme. Une petite déception, j’ai trouvé la fin un peu étrange, trop convenue…

J’avais lu il y a très longtemps Chroniques au pays des mères que j’avais beaucoup aimé mais que je serai incapable de m’en rappeler dans le détail.

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Hôtel Olympia

Un petit coup de cœur pour ce roman de science-fiction alliant mythologie, technologie et émotions humaines !



Quand l’histoire commence, une femme qui rentre chez elle évite de justesse de se faire écraser par rien de moins qu’un piano à queue ! Et quand elle arrive à la maison, elle apprend que sa mère est disparue sans laisser de traces.



Ensuite… non, je ne dévoilerai pas l’intrigue, mais disons qu’après ce début mouvementé, la première partie se passe plutôt en émotions, souvenirs d’enfance, exil de l’adolescente dans un pensionnat où elle se sent étrangère, puis, réactions devant l’inexplicable : doute, suspicion de complot ou crainte de basculer dans la folie.



L’action s’intensifie dans les chapitres suivants, avec le déploiement des théories scientifiques et théologiques, des réseaux secrets, des meurtres et des quêtes dans d’étranges cavernes, jusqu’au moment des dénouements.



Un texte truffé d’humour et d’allusions subtiles. Une petite connaissance de la mythologie grecque sera un avantage pour le lecteur. Par exemple, quand la tante Cassie fera ses mornes prédictions, on y verra le parallèle avec la prophétesse grecque Cassandre, et, bien sûr, l’aventure se passe à l’hôtel Olympia…



S’agit-il du sentiment de complicité ressenti ou du mélange d’émotions et d’action ? Peu importe, j’ai adoré mon séjour dans cet Hôtel tout à fait particulier.

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Chroniques du pays des mères

il y a beaucoup d’idées dans ce roman. Elizabeth Vonarburg imagine une société post-apocalyptique où les hommes ont presque totalement disparus, les société sont dirigées, organisées par des femmes pour des femmes, les rares hommes n’ont qu’un statut de reproducteur. Elle décrit tout une organisation complexe, avec une culture propre, une religion, et elle joue même sur le langage, ou le féminin a remplacé le masculin.

Malheureusement, toutes ces idées ne suffisent pas à en faire un roman passionnant, je me suis souvent ennuyé. Le récit manque singulièrement de rythme, les bonnes idées du développement du récit en le ponctuant de passages épistolaires décalés de le temps, ne ressortent pas suffisamment, il y a beaucoup trop de non-dits et surtout, le style d’écriture est vraiment lassant, la syntaxe est très ordinaire pour ne pas dire maladroite, beaucoup de redites, pratiquement peu de descriptions qui auraient permis de mettre des images sur le récit, les sens sont peu mis en action, l’ensemble se contente des impressions des personnages, de questions sur ce qu’untel peut bien vouloir dire ou penser et le style interrogatif est d’ailleurs bien trop souvent utilisé.

J’ai bien failli abandonner définitivement ce livre à la fin de la première partie. J’ai bien voulu lui laisser une seconde chance, et quand le récit, par le biais de la recherche “archéologique”, s’est intéressé au passé, à l’Histoire, aux légendes et à ses interprétations, je l’ai trouvé beaucoup plus intéressant. Enfin, il y avait une histoire.

Le rapport au temps, à l’Histoire est de loin l’aspect le plus intéressant du récit. J’ai eu l’impression, à cause du style, du rythme et du découpage des chapitres, que L’Histoire avec un grand “H” n’était qu’un support pour faire valoir un propos féministe alors que tout l’intérêt du roman est l’inverse, l’orientation féministe du récit n’a d’intérêt que pour nous proposer un roman sur le poids et la vision de l’Histoire. C’est ce qu’il en ressort à la fin, c’est du moins ce que j’en retiens et que j'ai aimé, et du coup, j’ai l’impression que beaucoup de passages sont inutiles, en particulier cette première partie sur la jeunesse de Lisbeï.

Je n’ai pu m’empêcher de penser à Ursula Le Guin, mais sans la qualité d’écriture et de rythme, et 625 page comme ça, j’ai eu des gros moments d’ennui et de découragement.

Passionnant et ennuyeux à la fois...
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Chroniques du pays des mères

J'ai été ravie de gagner ce livre grâce à un concours organisé sur Twitter par l'éditeur Folio SF et le podcast C'est plus que de la SF, pour fêter la sortie en version poche ! En effet, j'avais beaucoup entendu parler de ce roman qui m'intriguait.



Plusieurs centaines d'années après « le Déclin », une société peu technologique s'est reconstruite autour des femmes, car à cause d'un mystérieux virus rares sont les garçons qui naissent. Cet univers très féminin, même dans le langage (le neutre est féminin et non plus masculin), met à l'écart les hommes et a réinventé une mythologie, une tradition et des préjugés. Dans un contexte où beaucoup d'enfants meurent jeunes de la Maladie, les femmes sont contraintes d'enfanter régulièrement, alors que nous sommes dans un matriarcat.



Lisbeï, élevée pour devenir Mère (cheffe d'une des Familles), se révèle stérile et voit sa vie bouleversée : contrairement à ses soeurs, elle a la liberté de partir et de se former dans une Famille accueillant un système universitaire. de nature curieuse et n'hésitant pas à se poser des questions, elle va très vite s'intéresser au passé qui la passionne.



Ce pavé est à la fois très dense et prend son temps : c'est toute la vie de Lisbeï qui nous est retracée, de son plus jeune âge à la garderie jusqu'à ses derniers instants. Ses interrogations et ses réflexions intimes nous en apprennent beaucoup sur un univers où L Histoire a été construite par des mythes, mais qui évolue lentement et parfois avec réticence. Plus on avance dans le livre, plus on a envie d'avoir les réponses à des énigmes sur la formation de la religion et des coutumes figées, comme dans un roman policier où la victime serait la vérité.



Société plus complexe qu'il n'y paraît au premier abord, le Pays des Mères se divise entre croyants plus ou moins extrémistes et progressistes parfois prudents, entre tradition et souhait de découvrir le passé et le monde, dans un contexte culturel où le désir de survie des Familles met la fertilité au-dessus de tout. La Maladie et ses variantes, l'obsession des Lignées, et la peur des zones polluées engendrent un environnement contraignant pour les êtres humains qui ont perdu la liberté de choisir leur destin s'ils sont fertiles. le passé — réinventé — et ses conséquences sont souvent un frein à l'avenir de cette humanité rescapée.



Ce roman foisonnant est une vraie expérience de lecture qui offre des sujets de réflexion nombreux.


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Chroniques du pays des mères

Je ne vais pas commenter un livre que j'ai abandonné à la moitié, ceci dit je pousse un petit coup de gueule envers les éditeurs qui déflorent leur livre sur la quatrième de couverture, alors qu'ils le savent, nous autres lecteurs, aimons les découvertes par nous-mêmes, et l'attrait d'un livre tient bien sûr -aussi- à ces découvertes... Alors qu'il y a tant à dire sur un livre, sans en parler de façon directe.

Cette réédition des renommées Chroniques du pays des mères, par les éditions Mnémos en format de poche, datée de 2021, dévoile une partie importante de l'intrigue, dont on ne prend vraiment connaissance qu'en page 218, autant dire que plus du premier quart du livre est révélé.

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Dommageable, même si cela n'a pas motivé un abandon. Ce livre était pourtant au sommet des curiosités pour moi, et c'est une grande déception d'avoir eu pour sa lecture une motivation si fluctuante que l'abandon s'est imposé. La proposition d'un univers où un matriarcat se serait imposé, exact pendant de notre patriarcat, après le Déclin de notre société actuelle, est foisonnant et recherché. Avec tout autant de soin, l'autrice pose aussi la question des fondements de nos sociétés, nés de traditions, de légendes qui ont traversé L'Histoire, la religion en fait partie. de grands bouleversements sont à attendre quand celles-ci sont confrontées à des éléments palpables surgis du passé.

Tant de thèmes susceptibles de me passionner, pourtant noyés dans de multiples ramifications, ont fait ressembler mon cheminement dans ce roman à un chemin de croix. Pour exemple, des réflexions théologiques interminables, parfois, mêlés à des éléments plus "fantasy" de description de castes et d'un "pouvoir surnaturel" que possèdent certains personnages, ont eu raison de ma patience. Je malaxais avec appréhension le pavé, et son épaisse deuxième moitié de plus de 380 pages, en sachant que seulement le tiers allait retenir mon attention.

Ca tombe mal, car j'ai une impatience en lecture en ce moment. Depuis quelques mois je multiplie ceux qui sont pour moi de mauvaises pioches. Peut-être, entre deux livres excellents, aurais-je laissé davantage de temps à ces chroniques pour me séduire.
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Le silence de la cité

Figure incontournable de la science-fiction francophone, la québécoise Élisabeth Vonarburg reste largement moins connue dans nos contrées qu’elle ne devrait légitimement l’être. Récemment, plusieurs rééditions bienvenues ont permis de jeter un coup de projecteur sur son œuvre avec les deux briques intégrales regroupant l’ensemble du cycle de Tyranaël chez Les Moutons Électriques et la reprise par Mnémos de son roman le plus connu, le splendide Chroniques du Pays des Mères.

Ce dernier roman, aussi intelligent que nuancé, permettait de visiter un futur dans lequel les femmes étaient devenus majoritaires et où elles avaient réorganisé la société en profondeur. Pourtant, point d’utopie naïve chez Élisabeth Vonarburg mais une véritable réflexion sur le savoir et le souvenir à travers l’inoubliable personnage de Lisbeï. Après cette réédition capitale, Mnémos s’attaque à l’avant-Chroniques du Pays des Mères avec sa préquelle écrite dix ans plus tôt : Le Silence de la Cité. Que nous réserve Élisabeth pour ce retour aux sources ?



Sous la Terre, une nouvelle vie

Nous sommes bien avant l’avènement des Capteries, les Citadelles-États du Pays des Mères, et même bien avant l’émergence des Harems et des Ruches.

Ce que l’on sait en commençant Le Silence de la Cité, c’est que le monde a pris fin et que les survivants, voyant la société s’écrouler sous le poids des guerres et du changement climatique, se sont réfugiés dans des Cités souterraines ultra-technologiques. Du moins, ceux qui en avaient les moyens.

Au sein de l’une d’entre elles, une poignée de scientifiques tente de résoudre la crise traversée par l’humanité. Des scientifiques vieux, très vieux, trop vieux. Grâce à des techniques médicales avancées, les derniers habitants de la Cité ont réussi à étendre leur vie de façon hallucinante, frôlant les deux cents ans d’existence voire davantage. Seulement voilà, le traitement miracle n’est pas éternel et, un jour, le corps ne suit plus. Il faut alors laisser la chair au repos et faire appel à des robots imitant l’homme pour paraître en public.

Mais quel public ? En effet, avec le temps, les survivants se font de plus en plus rares. Seul Paul, Richard et une poignée d’autres scientifiques poursuivent les recherches en prélevant des gênes à l’extérieur sur des populations humaines en pleine mutation (au sens littéral comme figuré) à la surface du globe.

Paul pense avoir une solution au mal qui ronge l’humanité et découvre un pouvoir autorégénératif qui permettrait aux prochaines générations de pérenniser l’espèce. Mais cela a un coût et il observe un autre phénomène dont il ne sait que faire : il naît beaucoup plus de femmes que d’hommes à la surface. Les mâles sont-ils voués à l’extinction ?

Pour parfaire ses expériences, il donne naissance à sa création la plus parfaite, une jeune femme du nom d’Elisa veillée par son Grand-Père, Richard, et qui va bientôt comprendre que le sort de l’humanité repose en grande partie sur ses épaules et celle de Paul. Mais si la chair finit invariablement par lâcher malgré les traitements régénérateurs…qu’en est-il de l’esprit ?

Et si Paul, bien plus vieux qu’il n’en a l’air, perdait pied petite à petit ?

Au départ, Le Silence de la Cité présente son univers de façon énigmatique, à la façon du futur Chroniques du Pays des Mères et l’on comprend progressivement que les deux fils narratifs représentent deux timelines différentes vouées à se rejoindre. Paul d’un côté, Elisa de l’autre. Élisabeth Vonarburg pose les bases d’un univers où l’humanité sur le déclin se cherche une nouvelle voie. Celle, ultra-technologique, envisagée par Paul et qui voudrait transformer le faible être humain en une chose bien plus résistante, et celle, archaïque, qui voit les clans s’affronter à la surface et les femmes réduites en esclavage par les hommes-tyrans. Pour visiter ces contrées, Paul utilise des androïdes appelés ommachs. Par leurs yeux, le lecteur et Elisa se rendent compte que la situation a largement régressé et qu’il faudra, un jour ou l’autre, s’en mêler. Les premiers temps du récit ne sont pourtant pas forcément axés sur cette dimension mais plutôt sur l’histoire amoureuse entretenue par Paul et Elisa ainsi que la découverte par cette dernière des véritables moyens employés par le scientifique pour parvenir à ses fins. La suite, elle, sera logiquement ailleurs, dans le monde réel, hors de cette Cité-cocon où la jeune femme se découvrira pourtant un pouvoir fantastique : celui de changer de sexe.



Changer le cours de l’histoire

Divisé en quatre parties, Le Silence de la Cité va petit à petit dévoiler sa véritable thématique centrale : le libre-arbitre. Alors qu’Elisa découvre ce qu’il reste des sociétés humaines en surface et le destin des femmes, Élisabeth Vonarburg s’interroge sur le rôle de son héroïne dans cet univers qu’il lui est à la fois étranger et si familier. Ici, Le Silence de la Cité préfigure déjà nombre des interrogations de Chroniques du Pays des Mères dans un monde où la femme, malgré son nombre, se retrouve réduite à l’état d’esclave par l’homme, toujours tout-puissant. Elisa, contrairement à Lisbei, devra choisir de défendre les siennes devant une société patriarcale qui n’en finit pas de crever et qui semble toujours plus brutal à mesure que la fin approche. Grâce à sa rencontre avec les Viételli, la jeune femme qui voulait en finir avec les Cités se rend compte qu’elle va devoir influer sur le monde, qu’elle le veuille ou non. Par le personnage de Judith, le lecteur comprend que la révolte gronde chez les femmes et qu’elles ne sont pas dupes de leur avantage numérique de plus en plus prégnant. Sauf que Judith, qui reviendra plus tard, devra composer avec la place qui est encore la sienne, une place remise en question par son idylle avec Hanse-Elisa et par ce qui en découlera.

Comme Elisa, Judith se voit offrir le choix. Et c’est de cela que parle Le Silence de la Cité : la possibilité de choisir et de modeler son destin. Le cœur du récit repose entre les mains de ses héroïnes mais Élisabeth Vonarburg n’aura de cesse de se demander si le libre-arbitre n’est qu’une illusion ou si, véritablement, l’on peut détricoter son destin.

Bien en avance sur son temps, Le Silence de sa Cité s’intéresse également à la question de genres dans une troisième partie qui voit Elisa mettre au monde une nouvelle génération capable de changer de sexe à volonté ou presque. La question de l’identité se tranche relativement rapidement et la conclusion est sans appel : homme ou femme, l’esprit reste le même, l’individu véritable ne change pas derrière les attributs sexuels secondaires. La plus intéressante piste explorée par cette partie, c’est ce que permet ce changement périodique de sexe et sur les répercussions qu’il a sur ceux qui resteront hommes par la suite. Pourrait-on mieux traiter les femmes en se mettant littéralement à leur place ? Malgré cette réflexion intéressante, cette troisième partie apparaît comme le ventre mou du roman qui patine sur les relations entre Elisa et ses enfants alors que l’Extérieur, un temps oublié, se montre vite bien plus passionnant. D’autant plus que la question centrale reviendra vite sur ce qui fait le sel du roman : le choix d’agir (ou pas).



Qui remplacera les monstres d’hier ?

Dans la dernière ligne droite, Le Silence de la Cité retrouve le génie d’avant et montre l’évolution de la société après l’intervention d’Elisa. Le retour de Judith et la lente montée en puissance des femmes permet à Élisabeth Vonarburg de triturer un thème qu’elle aime particulièrement : est-ce parce que le pouvoir échoie entre les mains des femmes que la société va en devenir meilleure pour autant ? Guidée par les plus mauvaises raisons, revanche et haine, Judith veut renverser la vapeur. Pourtant comme croire que réduire les hommes en esclavage et tuer tous les autres permettra de donner naissance à une société enfin juste et égalitaire ? En sous-main, c’est la question de la méthode et des courants de pensées féministes qui se posent. La violence va-t-elle résoudre tous les problèmes entre hommes et femmes ? Est-elle absolument nécessaire ? Et si elle l’est, inverser les rôles ne sera-t-il pas simplement le nouveau germe d’une future révolte ?

Comme pour Chroniques du Pays des Mères, Élisabeth Vonarburg navigue entre la rage qui saisit le lecteur lorsqu’il s’aperçoit du sort réservé aux femmes et la réflexion posée de ce qu’il sortira de la destitution des tyrans d’hier…pour des tyrans de demain qui n’auront rien à leur envier.

Nuancé, intelligent et émouvant, Le Silence de la Cité finit par là où il a commencé et repose la question du libre-arbitre, du choix de laisser le passé dans l’oubli et d’aller de l’avant pour une société plus juste où l’on étoufferait la rancœur pour regarder l’avenir. Mais le destin nous en laisse-t-il l’occasion ou sommes-nous tous manipulés dans l’ombre par une volonté supérieure et inhumaine ? Seul le futur nous le dira.



Roman-prophète et héroïne déjà sublime, Le Silence de la Cité préfigure déjà ce que sera le chef d’œuvre d’Élisabeth Vonarburg bien des années plus tard. Récit à la fois douloureux et plein d’espoir, l’œuvre de la québécoise s’interroge sur nos choix et notre capacité à défier l’injustice pour s’en libérer définitivement. Un livre forcément toujours d’actualité que l’on conseillera à tous les lecteurs qui désirent repenser le monde.
Lien : https://justaword.fr/le-sile..
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Le silence de la cité

Une petite fille qui vit dans une tour enterrée, non, ce n’est pas le dernier Silo, il s’agit plutôt d’un des premiers livres de Vonarburg, un roman qui date de 1981, mais avec une édition révisée chez Alire en 98.



Comme dans Silo, des hommes ont tenté d’être des dieux et de régir ce qui les entoure, travaillant pour « le bien de l’humanité », sans se soucier des êtres humains qui ne sont que des matériaux pour leurs grandes oeuvres.



Mais dans le monde post-apocalyptique de Vonarburg, la nature n’est pas totalement détruite. L’air est respirable, même si les radiations ont apporté des mutations chez les populations qui subsistent. Ces peuples disséminés à la surface ont cependant en commun la difficulté de procréer des garçons avec un potentiel de guerre des sexes au programme.



L’univers tissé par l’auteure est complexe, avec des personnages attachants, avec des inventions comme des « ommachs » (des hommes-machines!), des environnements virtuels, des engins volants et des manipulations génétiques, poussant toutefois plus loin l’imaginaire que l’aspect purement scientifique. Toutes les prouesses ne s’expliquent pas par la science, du moins celle de notre pauvre vingt-et-unième siècle…



Un excellent opus, mais un peu court, la fin me semble un rien précipitée. Un bon premier roman pour Vonarburg dont la plume inventive déploiera davantage son potentiel dans les grandes séries comme Tyranaël.

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Le silence de la cité

Plusieurs siècles avant Chroniques du Pays des Mères : une poignée de scientifiques vit dans une cité souterraine alors que le « Dehors » a été dévasté par des cataclysmes 350 ans plus tôt. Ils recherchent une solution génétique au déclin de l’humanité, marqué par un fort déséquilibre des naissances (beaucoup plus de filles que de garçons). Tandis qu’en surface les descendants des survivants sont retournés à une vie tribale et patriarcale, les femmes étant esclaves, dans les Cités les derniers gardiens du savoir scientifique manipulent les gènes pour offrir un nouveau départ à la race humaine.



L’un d’eux, Paul, a « créé » Élisa. Élisa sort d’un ventre artificiel et grandit avec « Grand-Père », qu’elle croit humain, et « Papa » Paul, qu’elle croit être son père. Elle est entourée de robots, et peu à peu le lecteur comprend que les derniers humains des Cités « s’incarnent » régulièrement dans des machines, ni tout à fait robots, ni tout à fait humains. Élisa atteint l’adolescence et découvre la sexualité dans une Cité où elle ne rencontre quasiment aucun humain, tandis que Paul la façonne pour qu’elle accomplisse le destin qui lui a été assigné… Mais lui-même sera rattrapé par sa propre finitude.



Roman intrigant démarrant dans un univers technologique et dépeuplé qui voit les derniers feux de la civilisation, du savoir et de la science, il s’achemine doucement vers ce qui est devenu le vrai monde, celui « du Dehors ». L’humanité y a recréé une société dure — notamment vis-à-vis des femmes — qui retourne lentement à un âge prétechnologique, mais garde des traces de son passé.



Les thématiques approfondies sont nombreuses et bien insérées dans le récit : le choix de son destin versus le conditionnement dès l’enfance, les sociétés patriarcales versus la tentation de certaines de sociétés matriarcales qui ne seraient pas plus justes, les relations familiales et particulièrement la difficulté de parents à considérer leurs enfants comme des êtres humains indépendants et non leur prolongement ou leur création.



Élisa se pose peu à peu des questions sur ce que signifie aimer (un autre adulte, ses propres enfants), sur les rapports entre les hommes et les femmes différents selon les contextes et les sociétés… Et ses interrogations sont amenées subtilement par l’auteure.



Ce roman n’est pas comparable des Chroniques du Pays des Mères, il est plus rythmé et plus mouvementé, et j’ai eu beaucoup de plaisir à le découvrir. Il apporte quelques explications à des éléments qui paraissaient étranges dans les Chroniques du Pays des Mères, mais il reste indépendant et peut se lire sans connaître l’autre œuvre.



Je remercie les éditions Mnemos pour l’envoi de ce livre, à l’occasion de la réédition du roman ce mois-ci.


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Le silence de la cité

Le genre post-apo riche en romans, images, films ou séries, inspire (et expire nos craintes) pas mal mais je pense que c'est la première fois que je lis un livre qui traite ce thème de cette façon, avec une telle réflexion en grande profondeur.



C'est la première fois que j'ai eu l'impression de lire un documentaire, un récit d'histoire presque, tant tout est analysé, réfléchi. Comme si je lisais un roman se situant dans le passé, comme si je connaissais déjà ces territoires qui tentent de revivre et ces villes, immenses, vides, sans âme, que la nature réinvestit peu à peu mais où on devine encore la grandeur du passé, dans ses lignes simples, majestueuses, désormais lézardées et souillées par les intempéries.

Dans le Silence de la cité se trouvent des humains qui sont restés à l'extérieur, ont muté, dégénéré, et survivent. Et d'autres qui, à l'abri de grandes et immenses monstres-villes technologiques, ont joué et tenté de muter, se régénérer et supervivre.

En quatre parties, l'auteur explore un grand éventail de possibles. Solitude : à vivre dans ce qui a été construit pour des temps plus glorieux et où presque plus personne n'existe. Dérangeant : entre les relations et les liens qui se créent, le culte de la jeunesse éternelle posé comme le montre le film Brazil. Féministe et intergenré : et si l'homme de demain n'avait pas qu'un sexe, quelle société pourrait il créer. Utopique : recréer ce que l'on a perdu sans tomber dans les écueils du passé.



Le livre n'est pas parfait. J'avoue avoir préféré la première partie et regretté de n'avoir pas plus longtemps pu errer dans des lieux similaires ou pouvoir lire ce qui n'a été que vaguement évoqué en deux lignes.J'ai un peu moins accroché les tensions entre peuples, là où la diversité de ces peuples m'aurait plus intéressée. Mais j'en ai beaucoup aimé l'intelligence, le questionnement et l'analyse.
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Reine de Mémoire, Tome 2 : Le Dragon de Feu

Les livres sont parfois comme un plat de croustilles qu’on ne peut s’empêcher de grignoter. À dire vrai, on n’a pas vraiment faim, ce n’est pas vraiment nourrissant ni exceptionnellement goûteux, mais sans y penser, on continue à en avaler, l’une après l’autre, et s’arrêter crée un état de manque.



C’est un peu l’effet de cette série de Vonarburg. Je la grignote simplement, mais j’ai du mal à en extraire les qualités qui créent la dépendance. C’est une uchronie touffue, avec un accent magico-religieux, des enfants qui deviennent des ados amoureux, un voyage au Pays des dragons, des histoires de famille, des rapports entre les hommes et les femmes, des relations entre les peuples, des tractations politiques et économiques. C’est tantôt méditatif et un peu lent, tantôt c’est la violence du naufrage; on y trouve parfois le réalisme d’un simple pique-nique estival et parfois l’apparition de magie et de créatures des légendes.



Voilà, je suis accro… Heureusement, seule ma bibliothèque prend des livres* en trop… 
(*livre = mesure de poids 0,45 kilo)

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Le silence de la cité

Un livre assez perturbant, à dire vrai...

L'auteur nous expose des problèmes de société, sous couvert de roman "post-apocalyptique", bien présents et bien prégnants dans le monde actuel, sur la "différence", c'est tout dire ! (mais pas assez pour spoiler, et toc !).



Je suis entrée dans cette lecture très facilement. Il y a peu de descriptions et l'imagination doit tourner à plein régime, et il faut un temps pour comprendre de quoi on parle, dans quel environnement, et quel est véritablement le sujet du livre. Car la première partie n'en dit pas grand chose, mais ce n'est qu'ensuite qu'on s'en rend compte ! Cela ne m'a posé aucun problème, mais je sais que c'est rédhibitoire pour certaines personnes, donc attention, la première partie n'est pas forcément "facile".



Le style est simple, direct, avec quelques néologismes qui n'expliquent pas forcément ce qu'ils sont.





C'est un univers très élaboré, aux personnages psychologiquement fouillés et cohérents (au delà des implications de ce qu'on apprend au fur et à mesure qu'on avance dans le livre). C'est un livre sur un sujet très à la mode aujourd'hui, le transhumanisme, traité d'une façon ultra originale et jamais vue ! A l'époque je pense que ça devait être un des premiers bouquins à aller aussi loin là-dessus. (Je vous l'ai dit et répété il faut toujours replacer un livre à son année de parution, sans quoi l'avis est forcément biaisé. 1981 ici, donc, c'est pour ça que j'ai mis 4,5 étoiles, sinon je n'en aurais mis que 4...).



Dans l'univers en question, les problèmes sont liés au fait qu'outre des mutations diverses, les femmes sont 5 fois plus nombreuses que les hommes. du coup les soucis de société, esclavage, domination et leurs raisons, objective ou pas, les différentes façons d'aborder le sujet par les différentes communautés sont exposés. (certaines sont outrancières, d'autres plus "douces", mais dans celles-ci, justement les femmes ont la possibilité de se révolter, ha ! Bonne question que celle-ci, n'a-t-on la possibilité psychologique de réaliser ce qu'est la liberté que dès lors qu'on est déjà assez libre pour savoir à quoi ça a goût ? Si on naît esclave dans une société d'esclave à répression forcenée, peut-on avoir l'esprit libre et l'envie de se rebeller ? C'est une foutument bonne question ça, non ?)



A côté de cela il y a les questions personnelles, sur, en vrac, le mensonge, l'aveuglement volontaire sur ses propres motivations, qu'est-ce que la vérité, la manipulation, la bonté, la responsabilité, et j'en oublie sans doute...



C'est un excellent livre, d'une richesse inouïe, une très bonne découverte qui donne effectivement envie d'en lire plus de l'auteure !

Aïe ma pal, lol !



J'ai un peu tiqué sur la fin et sur quelques points :







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