Le démon de l'alcôve

« C'est le démon de l'alcôve qui tue, chaque jour, tant de nos écrivains les plus aimés, de nos capitaines les plus braves, de nos artistes les plus aimables ! »
Ayant pour cible favorite les jeunes artistes à la mode, Marianne, belle et séduisante courtisane sait parfaitement s'y prendre avec eux. Elle exploite aisément leur faiblesse, sachant pertinemment que le train de vie classique d'un ménage exècre au plus haut point celui qui prétend être un grand artiste :
«  Il me semble, qu'obligé de vivre comme tout le monde, je ne serais plus ce que je suis. J'ai besoin d'air, d'espace. Les fumées du pot-au-feu me donneraient des nausées »

Edouard Mansion, jeune pianiste et compositeur a pourtant à domicile une fidèle et adorable maîtresse qui, depuis une dizaine d'années n'a à attendre que le mariage en digne récompense de son dévouement hors normes … Mais c'est demander trop de gratitude à notre artiste : « Vous êtes dans cette situation singulière d'un homme qui, possédant des tableaux de Maître, relèguerait ces chefs-d'oeuvre au fond d'un grenier pour orner son salon d'une file de toiles plates et insignifiantes »

Et puis… Comment voir le mal quand il est si bien déguisé par Marianne, diplomate et habile : « vous n'abandonnez jamais votre Pauline (sa fidèle maîtresse), me dit-elle, vous ne pouvez pas l'abandonner. Pauline est votre femme de fait, si elle ne l'est encore de droit… et c‘est justice… car tout le monde apprécie son dévouement, sa fidélité. Eh bien ! J'entends que votre affection pour un objet si digne ne souffre en rien d'un amour qui s'éteindra pour votre part, au premier souffle d'orage. Je vous aime pourtant aussi de toute mon âme. Edouard, Oh je vous aime tout autant peut-être que vous aime votre Pauline - mais je ne m'illusionne pas sur ma valeur, sur ma position. C'est assez pour moi, courtisane, de quelques moments de félicité… Mon devoir, en échange de cette félicité, est de soumettre à certaines exigences. Ne craignez donc point que je veuille vous séparer de votre Maîtresse ! Craignez moins encore que je cherche à l'affliger en me posant comme sa rivale. Je suis le caprice, elle est l'amour sérieux ! le jour où vous me direz va-t'en - je partirai - et ce jour là dussé-je en mourir… personne … Ne me verra pleurer »

Rassurant n'est-ce pas ? Que peut-on craindre puisqu'il suffit d'un signe de main pour la révoquer quand bon semble.
Cependant, rien, ni les larmes d'une maîtresse adorable (Pauline), les reproches d'un père, ni les conseils de l'amitié ne pourront suffisamment détacher ces liens corrompus avec cette courtisane. Aussitôt chassée, expulsée, méprisée, injuriée, elle reviendra sans cesse à lui par quelques espionnages et des bons mots.
Ce qu'il lui fallait, plus expéditif et bien plus efficace, c'est atteindre l'orgueil de l'homme, l'amour propre outragé … Et il le sera deux fois, une fois pour l'amour-propre d'artiste en tant que tel et la seconde en tant qu'amant.
C'est à ce moment seul, que le bohème parisien parviendra à rompre définitivement avec ce maudit démon.

L'histoire, quoique drôle, est assez classique, mais Henry de Kock ajoute des dialogues étonnament vivants et des intrigues et sous-intrigues à n'en plus finir mais dont les transitions sont toutes naturelles et un lien entre toutes ces intrigues finement pensé.