Fille du destin

On reconnaît un grand écrivain à l'inventivité qu'il déploie pour façonner des personnages crédibles. Si la trame romanesque s'efface avec le temps de la mémoire du lecteur, il n'en va pas de même de certains protagonistes qui par leur parcours de vie et leur aura ne s'oublient pas de sitôt.

Mama Fresia, la cuisinière chilienne, et Tao Chi'en, le guérisseur chinois, imprègnent de leur gentillesse et de leur dévouement “Fille du destin”. Ils sont tour à tour les anges gardiens d'Éliza le personnage central de ce roman d'Isabel Allende publié en 1999. L'auteure chilienne a travaillé avec infiniment de soins ces deux figures hautes en couleur et la lecture de cette oeuvre se justifierait rien que pour le plaisir de les côtoyer.

Malgré l'éducation un peu stricte de Miss Rose sa mère adoptive, les seize premières années d'Éliza, fourrée la plupart du temps dans les jupes de Mama Fresia, révèlent une enfance heureuse dans cette grande demeure anglaise située à proximité du port de Valparaiso. Abandonnée à la naissance dans une caisse à savons, ses conditions de vie en cette première moitié du 19ème siècle pourraient être bien pires…
Songeuse devant son piano, la jeune fille se laisse bercer par la petite musique de la vie. Elle ne sait pas encore que les feux de l'amour bientôt la transporteront vers un autre hémisphère, vers San Francisco où paraît-il on trouve l'or au fond des ruisseaux.

Dans le sillage de dizaines de milliers d'aventuriers venus du monde entier, “Fille du destin” retrace admirablement la ruée vers l'or en Californie, la vie des immigrants prêts à s'entretuer pour une hypothétique fortune, le développement des villes-champignons où fleurissent les commerces en tous genres jusqu'aux bordels les plus sordides.
Un peu perdue au coeur de ce vaste Eldorado nord-américain, Éliza va son petit bonhomme de chemin progressant lentement vers la conscience de soi. Elle est maintenant guidée par une étoile du Céleste Empire, le génial acupuncteur et herboriste Tao Chi'en expatrié tout comme elle.

Cette fresque éblouissante est un bel hommage à la vie rarement conforme aux espérances de chacun mais qui parfois réserve à quelques-uns un bien curieux destin.

Isabel ALLENDE est véritablement une conteuse.

J'ai ADORE ce roman et à ma décharge j'avais commencé par « Portrait Sépia » aussi j'étais impatiente de connaître l'origine de certains personnages.

Je vous le conseille vivement.

Très différent du fantastique de "La maison aux esprits", c'est une fresque historique magistrale sur la Californie primitive des chercheurs d'or. On se souviendra longtemps du martyre des petites chinoises importées par bateaux entiers pour fournir les bordels de San Francisco et y crever. A côté de leurs souffrances anonymes, la triste vie des Japonaises de "Certaines n'avaient jamais vu la mer" (à lire aussi) semble paradisiaque !

Comme toujours chez Allende (Isabel, pas Salvador... quoi que...) l'amour est au centre de ce roman. Cet amour embarque littéralement Eliza qui part pour les États-Unis afin de retrouver celui qu'elle aime et dont elle attend un enfant.
Elle va être confrontée à une société en mutation, en côtoyer les bas-fonds et les splendeurs.

Alors là on voyage…

Cette fille au destin plus que romanesque nous livre une histoire incroyable. Une destinée chaotique, disparition par amour, trahison, justice quand il y en a, amour caché et deux contrées. Voici tous les ingrédients à cette belle saga entre le Chili, de Valparaiso et la Californie de San Francisco.
Tout commence par l'arrivée d'un bébé adopté par une famille d'aristocrate anglaise les «  Sommers ». Nous sommes à Valparaiso en 1832 et nous terminerons cette aventure à San Francisco en 1853. L'héroïne Eliza grandira dans un foyer ouaté, complètement en dehors des dangers et de la pauvreté du pays du Chili. Éducation stricte de sa tante Rose et de sa nounou indienne qui sera sa confidente. Ses deux oncles, l'un grand voyageur et capitaine de bateau de transport et l'autre vit des rentes de la famille Sommers.
Eliza fit la rencontre en cachette à 16 ans d'un extravagant garçon Joaquim, pas riche mais un futur aventurier, ils seront amoureux transis et seront séparés par l'appât du gain et le départ pour beaucoup d'hommes à la conquête de l'or. Car on apprend que sur la côte Californienne, on trouve des montagnes d'or.
Le monde qui les sépare bouleverse le coeur brisé d'Eliza et prend la décision de s'enfuir pour retrouver son bien aimé car elle est enceinte. Aidée par sa nounou, elle recherche le moyen d'embarquer incognito.
Elle se retrouve dans un bateau caché par un médecin chinois Tao chi'en. Seuls les hommes et quelques prostituées peuvent prendre le large, les traversées sont longues, périlleuses car la maladie rôde, la saleté et la malnutrition commence à se faire sentir. Eliza ne verra pas le jour caché en fond de cale, sera nourrie par Tao et l'aidera à faire une fausse couche. Complètement lasse, amaigrie et faible, ils arriveront à destination sur la nouvelle contrée.
Et là commence tout un descriptif sur l'évolution d'un petit port qui deviendra une grande ville en à peine 2 ans.
Peu de femmes, mais des bordels. Des Chiliens, des indiens tués et retranchés dans les terres, des anglais, des chinois et des Yankees. A chacun sa propre image et le sens de la propriété, son territoire, ses richesses et sa manière de rester en vie.
Tout le monde garde une arme sur lui. Ils sont rustres, méchants et suivant les météos, la recherche de l'or dans les mines ne sera pas toujours fructueuse. Melle Rose et son frère sont anéantis par la disparition de la fille adoptive. On commence à connaître les secrets de famille. Toujours à la la recherche de son Joaquim, Eliza continu sa recherche seule et part vers Sacramento déguisé en homme. Elle se séparera de son compagnon presque intime Tao un moment pour aguerrir sa longue destinée. Elle sera cuisinière et vendra ses repas. Elle sera musicienne accompagné d'un piano dans un bordel et rencontrera une multitude de personnages noirs, sales et intriguants.

Une belle histoire que nous offre Isabel Allende, maître en récit historique et raconte aisément les pays qu'elle a côtoyé.
La ruée vers l'or, le monde asiatique des femmes soumises à la prostitution, comment toute une mécanique en peu de temps nous démontre, le pouvoir, la richesse et la répugnance envers son prochain. Et il n'y a pas de nationalité dans ces cas là. Portrait Sépia, livre la suite de cette intrigante et aventurière Eliza …

Challenge Plumes Féminines

Eliza n'a rien pour réussir dans la vie a priori : abandonnée, fille, amoureuse puis enceinte d'un homme sans le sou. Ce qui la sauve : avoir été abandonnée devant la maison de bourgeois anglais habitant le Chili, qui lui ont donné une bonne éducation. Pour le reste, ma foi...Elle fuit et se déguise en homme. Pour le bébé et l'amant ? Je vous laisse découvrir. Sachez juste qu'elle fuit en Californie au moment de la ruée vers l'or.
Allende campe une jeune femme que rien ne destinait à la vie aventureuse qu'elle va mener. Élevée comme une jeune anglaise, son but ultime devrait être de trouver un mari et de le mener à la baguette, mais discrètement. A la place elle vit habillée en homme, sur les traces d'une chimère. Même si cela peut sembler invraisemblable, j'ai eu très envie d'y croire, simplement parce que Eliza ne se pose pas en victime mais se prend en main, quelque soit les difficultés qu'elle rencontre. C'est une femme courageuse, tolérante, ouverte à d'autres cultures, qui possède une grande soif d'apprendre.
Une femme moderne, quelque part, qui n'attend pas tout de l'amour ni des hommes.
En plus des personnages, qui sont tous remarquablement incarnés, l'arrière-plan géographique et historique est tout à fait crédible et vraisemblable.
Nous sommes bien loin d'un western manichéen où seuls les hommes Blancs détiennent la vérité...

J'ai retrouvé dans 'fille du destin' tout ce que j'avais aimé dans 'la maison aux esprits'. La plume d'Isabel ALLENDE, qui est une excellente conteuse, et des personnages féminins au caractère bien trempé qui ne se laissent pas corseter par la tradition et les convenances.

Allende nous parle tout à la fois de la colonisation, du racisme, de l'histoire de la Californie (indiens et mexicains chassés de leurs terres), de la vie en Chine au XIXème siècle à travers la vie de Tao Chi'en, de la médecine chinoise...Elle développe aussi très subtilement le thème de la condition de la femme. le corset revient comme un leitmotiv, comme un symbole qui prive les femmes de leur liberté. D'ailleurs, Eliza s'en débarrassera et promettra de ne plus jamais en porter.


"Roman d'amour, roman d'aventures, roman historique" dit la 4ème de couv'.

C'est vrai. Et aussi:
Un roman sur la Liberté
que je recommande vivement !



Lien : http://lesgridouillis.over-b..

Premier roman que je lis d'Isabel Allende, Fille du destin m'a entraîné dans un pays que je connais très mal, le Chili, à l'époque de la ruée vers l'or et à l'aube de transformations majeures dans le monde. On y découvre par le biais du personnage de Tao la culture chinoise et l'installation de la communauté chinoise à San Francisco, ville des USA qui accueille toujours l'une des plus importante communauté chinoise de nos jours, par le biais de Mama Frezia la culture chilienne traditionnelle, ses rites et ses mélanges d'épices et de saveurs, par le biais des Sommers la rigidité britannique et l'importance vitale donnée aux apparences et enfin, à travers Éliza, le destin d'une femme à l'heure de l'émancipation, des pionnières et des premières effluves de liberté.
Lien : http://croqlivres.canalblog...

Une fresque historique et humaine de toute beauté, malgré les moments de violence. La jeune Elisa est un exemple d'émancipation féminine avant l'heure, grâce à la belle personnalité que son éducation lui a donnée, et qui reste en filigrane tout au long de ses pérégrinations.
J'ai été séduite du début à la fin par l'histoire d'Elisa, racontée par une Isabel Allende dont la vie ne fut pas non plus un long fleuve tranquille, et qui plaça ses droits d'auteure dans une fondation internationale pour venir en aide aux femmes en difficulté.

"Fille du destin" d'Isabel Allende est purement et simplement un chef-d'oeuvre ! Un roman de voyages qui nous permet de découvrir des cultures opposées, des pays incroyables, des populations si différentes, mais l'ensemble finit par cohabiter et par nous faire ressentir des milliers d'émotions ! Ce roman initiatique fait grandir avec douleur et cruauté, une petite fille audacieuse, intrépide, aveuglée par un amour exclusif, qui arrachera des larmes au lecteur. Nous nous rendons alors compte que tout est vrai, des paysages que nous traversons, à cet amour passionnel, qui est l'exemple même de l'amour pur et véritable.

Enfin, magistralement servi par une écriture très riche et aussi documentée que des livres d'Histoire, Isabel Allende nous offre une histoire d'une beauté cruelle, mais toujours dans la justesse. L'émancipation d'une jeune fille devenue un homme, puis une vraie femme et qui, au-delà de tous ses kilomètres parcourus et de la quête de son amant, nous donne une claque et nous apprend - avec philosophie et poésie - ce qu'est véritablement la vie... Un roman à inscrire dans la série de l'auteure chilienne, qui nous donne envie de dévorer tous ses autres chefs-d'oeuvres !