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4,1

sur 1102 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
La rentrée littéraire ne m'enthousiasme que peu, avec sa pléthore de livres, qu'il nous sera impossible de lire avant qu'elle ne soit engloutie par la prochaine échéance. 

Pourtant, on y déniche des pépites, des coups de coeur. Madame Hayat rejoint indubitablement cette dernière catégorie. 

Intriguée par ce titre, par son auteur, Ahmet Altan, journaliste turque, qui fut emprisonné, condamné à la prison à perpétuité. Qui réussit, avec son talent, à s'ouvrir une porte en écrivant. Qui, heureusement, fut libéré récemment.

Ce livre écrit en prison, raconte l'histoire de Fazil, jeune étudiant dont la famille a brutalement sombré dans la pauvreté. Il continue ses études à l'université et va faire deux rencontres qui vont changer sa vie : Madame Hayat et Sila, une jeune étudiante. 

Il va nouer avec chacune des deux femmes une relation charnelle. Avec l'aînée, une passion lumineuse, basée sur l'instant présent. Avec la plus jeune, une autre passion, basée sur les goûts communs, le passé semblable.

Autour d'eux, la peur monte car des hommes barbus organisent des battus contre ceux qui sont trop libres. Les policiers répriment et les tribunaux condamnent à tour de bras. 

Ce roman est une vraie pépite. 
Difficile de le poser, la plume poétique de l'auteur nous embarque pour un voyage des sens. 

L'amour peut être multiples et hors des règles. Les femmes de ce récit sont fortes à leurs manières et, loin de blâmer Fazil pour son hésitation, nous ne pouvons que comprendre son incapacité à faire un choix.

Ce roman est une ode aux moments de joies et d'entraide grappillés alors que les ténèbres montent aux alentours. L'auberge espagnole dans laquelle vit Fazil résonne de différences, symbole d'une société qui tombe, victime de la politique.

Cette politique prend, peu à peu, plus de place dans le récit à mesure que le narrateur ouvre les yeux face au contexte de son pays. 

Et enfin, ce roman offre de belles pages d'hommage à la littérature, à sa place dans notre vie. 

Je pourrais en dire encore bien plus, mais j'espère vous avoir donné envie de découvrir ce roman pour que vous ressentiez le même éblouissement que moi.

Merci M. Altan pour ce magnifique récit.
Lien : https://allylit.wordpress.co..
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Difficile de dire mieux que le quatrième de couverture si ce n'est que « Je ne reverrai plus le monde » me laissait déjà présager d'un prochain bonheur littéraire. Ce roman est une des rares histoires d'amour qui ne finira pas oubliée dans la caisse « brocante ».
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Superbe roman, très agréable à lire.
L'histoire se tresse autour de trois personnages, au sein d'un pays où le régime sombre progressivement et brutalement dans la dictature et la violence. le narrateur, jeune étudiant en littérature, nous raconte d'abord sa relation avec Madame Hayat, une femme bien plus âgée que lui, envoûtante, énigmatique, mystérieuse, sensuelle, profonde et légère à la fois. Puis vient se greffer une autre liaison, plus juvénile, mais également passionnelle, pulsionnelle, et intellectuelle, avec une jeune étudiante en littérature comme lui.
Les relations qu'il entretient avec ces deux femmes, très différentes, sont charnelles et très intenses. Chaque rencontre avec l'une d'elles sera l'occasion pour le jeune étudiant de plonger dans les mystères de l'existence, dans les questionnements de l'amour, dans les tourments des relations et des rapports entre les hommes et les femmes.
Cette découverte de l'exaltation des sens se déroule en marge de sa vie d'étudiant, dans une sorte d'auberge espagnole que constitue la résidence dans laquelle il occupe une chambre et au sein de laquelle il partage une cuisine commune, avec des personnages un peu fantasques, et qui forment un univers hétéroclite et troublant.
Une lecture enivrante, sensuelle, inquiétante. Un véritable questionnement sur l'amour et la passion, une réflexion sur le désir, mais aussi sur la société des êtres humains.
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Un livre découvert par hasard, peut-être grâce au Femina étranger qu'il a reçu en 2021, et qui m'a comblée.
Fazil, le narrateur est un jeune homme déchu de sa richesse suite à la ruine et à la mort de son père. Passionné de littérature, il poursuit ses études dans des conditions spartiates.
Très vite, il rencontre dans le cadre d'une mission de figuration une femme fascinante, Madame Hayat, puis une jeune femme, Sila. Tout semble opposer ces deux figures féminines : l'âge et la silhouette bien sûr, mais aussi les intérêts : à Madame Hayat les documentaires, qui l'absorbent entièrement, à Sila, la littérature... Elles ont en commun une forte personnalité, et imposent à Fazil le tempo de leur relation avec lui.
Fazil semble se laisser porter, organisant son existence entre ses études et ces deux femmes... mais peu à peu, la réalité extérieure s'impose : sans s'appesantir, l'auteur montre comment s'installe un climat policier, comment l'arbitraire envahit le quotidien. La situation du père de Sila illustre parfaitement cette dérive : il a tout perdu pour suspicion, dans son entourage, de "préparation de complot contre le gouvernement"; ensuite il est arrêté et ne sera libéré qu'après avoir signé qu'il renonçait à toute action judiciaire, enfin, on retrouve son ancien chauffeur devenu homme d'affaires! D'autres épisodes renforcent ce sentiment d'enfermement progressif : les arrestations, les passages à tabac...
Ce roman est également un exercice d'admiration à la littérature: Fazil partage avec nous les cours de ses professeurs préférés, Sila et lui se livrent à des joutes littéraires, prétextes à citer des auteurs connus et appréciés...
Bref, un roman riche et complexe, double magnifique histoire d'amours et pamphlet contre un régime turc de plus en plus autoritaire et intolérant.
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Pour qui aime la littérature et les romans qui permettent d'en mesurer les dimensions, "Madame Hayat" d'Ahmet Altan se présente comme un espace que le lecteur arpente en suivant des repères parfois connus, parfois brouillés, mais qui, toujours, conduisent à la conviction que c'est là, dans ces histoires ainsi racontées, que se cachent les plus beaux et les plus terribles secrets humains.

La famille de Fazil, le narrateur, est ruinée après le décès du père. Pour poursuivre ses études de lettres, Fazil partage une location avec des êtres marqués par leurs choix et par les aléas de l'existence. Afin de gagner un peu d'argent, il fait de la figuration dans une émission de télévision, où l'on chante et danse. Là il rencontre une femme extraordinaire, Madame Hayat, plus âgée que lui et dont il tombe amoureux. Avec elle il découvre l'amour généreux, une façon de vivre lucide et optimiste, sans assujettissement, alors que le pays s'enfonce dans la répression et la peur. Il fait également connaissance avec Sila, étudiante comme lui, issue d'une famille riche comme lui mais désormais menacée par le pouvoir politique.

Ces deux femmes, les compagnons de colocation et l'amour de la littérature sont autant de moyens pour Fazil d'apprendre à être, de se définir lui-même dans ce qu'il veut comme dans ce qu'il refuse. Initiation douloureuse dans une société à rebours de l'insouciance, sur laquelle planent les menaces policières et où la méfiance exacerbée devient un mode de vie.

Derrière Madame Hayat s'esquisse forcément l'image de Madame Arnoux et d'une autre éducation sentimentale. Rapprochements, reflets, ombres portées, contrastes et variations avec le roman de Flaubert offrent des clés, des chemins interprétatifs foisonnants de sens. Mais ici l'éducation sentimentale s'approfondit et se complète d'une initiation politique et sociale qui se dévoile dans le rapport à la littérature et au contexte d'écriture. En effet, écrit alors que l'auteur était en prison en Turquie, "Madame Hayat" est une véritable ode à l'imaginaire et à la liberté qu'il construit et étaye tout en se confrontant à la réalité du monde.

Composé dans l'enfermement, là où seule l'imagination peut effacer les murs, le roman d'Ahmet Altan concrétise magnifiquement le pouvoir de la littérature et des mots. L'écriture qui dessine le personnage de Madame Hayat, son corps, ses attitudes amoureuses, est une merveille de sensualité et de volupté. Mais elle se fait sèche et factuelle pour évoquer la montée des dangers et l'impression d'étouffement qui progresse tout au long du récit.
Roman d'apprentissage, roman d'initiation, roman politique, roman d'amours fous, "Madame Hayat" est, pour moi, comme un diamant dont on ne finit pas de découvrir les facettes. Bien loin de ce qui ne pourrait être que stimulation intellectuelle (ce qui n'est déjà pas si mal !), le livre d'Ahmet Altan provoque des émotions indicibles, des bouffées de douce euphorie mêlée d'effroi. Tout ce que la littérature peut apporter d'enrichissements à chaque être.

Un livre reçu dans le cadre du Cercle Livresque de Lecteurs.com.
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Hayat, en langue turque, signifie la vie ; non pas la vie au sens du vivant par rapport à l'inerte, mais la période entre la naissance et la mort.

Fazil, jeune homme dont la famille est brutalement ruinée, loue une chambre dans un immeuble où il rencontre des personnages fortement typés : on fait rapidement un rapprochement avec "L'immeuble Yacoubian" d'Alaa al-Aswany. Fazil, fréquente assidûment deux femmes ; l'une, Madame Hayat, d'une vingtaine d'années son aînée, charnelle, mystérieuse et apparemment peu cultivée, affiche outre une sensualité pleinement assumée une sagesse envoûtante et déroutante à la fois ; l'autre, Sıla, étudiante, belle et brillante, partage la même fascination que Fazil pour la littérature. le jeune homme est ballotté entre ces deux femmes, toutes deux fascinantes ; chacune d'elles a eu l'intuition, puis la confirmation, de l'existence de l'autre dans la vie de Fazil. Elles s'inquiètent pour lui et, quand la menace policière devient trop menaçante, l'aînée encourage Fazil à s'expatrier avec la plus jeune. L'étudiant est sur le point d'obtempérer jusqu'à ce que ...

Cette histoire d'amour s'inscrit dans l'atmosphère d'une société oppressée où tout individu est perpétuellement menacé d'être tabassé et emprisonné sans sommation préalable. le lecteur ressent progressivement la montée de l'angoisse qui étreint les individus, même ceux qui sont "sans histoire" : la rue est de plus en plus vide, des voisins disparaissent, d'autres veulent se réfugier loin de la ville ou s'expatrier.

Des réflexions sur la littérature enrichissent le récit ; le romancier se fait professeur (on pense à Milan Kundera) et, prenant du recul par rapport à l'histoire qu'il raconte, range tous les sentiments sous l'unique désir de possession : "Quand vous voulez posséder quelqu'un, vous rendre maître de son coeur et de son âme, c'est l'amour. Quand vous voulez posséder le corps, c'est le désir, la volupté. Quand vous voulez faire peur aux gens et les contraindre de vous obéir, c'est le pouvoir. Quand c'est l'argent que vous désirez plus que tout, c'est l'avidité. Enfin, quand vous voulez l'immortalité, la vie après la mort, c'est la foi."

Ahmet Altan, libéré en avril 2021 après quatre années d'emprisonnement à Istanbul, sait de quoi il parle. Il recommande, plutôt que de tenter de "s'extirper" de la réalité vulgaire, de plonger dedans "toujours plus en profondeur" car c'est "là, seulement, que la littérature et l'existence pourront se rejoindre et ne faire plus qu'un". C'est précisément là que nous entraîne ce grand roman.
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J'avais été éblouie par le talent d'Ahmet Altan quand j'avais lu «  je ne reverrai plus ce monde », j'ai naturellement acheté ce roman au titre légèrement désuet, curieuse de découvrir le talent de romancier de cet auteur. le héros Fazul est un jeune turc qui subit un gros revers de fortune, il connait la grande pauvreté et essaye de survivre en faisant un petit boulot de figurant dans le public d'une émission de tv de série z. Là il rencontre madame Hayat une femme d'âge mûr et peu de temps plus tard rencontrera une très belle jeune fille de son âge aussi. L'histoire peut sembler banale et simple, mais Ahmet Altan la situe dans un contexte inhabituel, celui de la Turquie d'aujourd'hui. Son écriture très riche extrêmement subtile, m'a transportée et bouleversée. J'ai dévoré ce livre aux personnages attachants aux antipodes des romans froids que j'ai pu lire récemment. Tout est dans la nuance , sans doute le meilleur livre que j'ai lu pour le moment de la rentrée littéraire. Un prix fémina étranger largement mérité.
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l'auteur écrit en prison cette belle histoire d'initiation d'un jeune étudiant en lettres de milieu aisé et orphelin de père.
Devenu pauvre , il quitte son village , étudie la littérature tout en faisant un petit travail de figurant à la télévision et là , rencontre une dame qui pourrait être sa mère , dont il s'éprend. Un jour , elle l'invite à dîner et leur relation s'approfondit jusqu'à devenir charnelle mais finalement il ne sait pas grand chose d'elle.
Parallèlement il aime la jeune Sila , étudiante comme lui en littérature. Tous deux partagent la même passion , sont de milieu riche mais appauvri , bref , ils se comprennent à merveille...
Le jeune Fazil poursuit avec sincérité ces 2 amours , a une admiration sans pareille pour madame Fayat - elle qui n'a pas peur- et éprouve un attachement amoureux pour la superbe Sila. Pourtant quelle sera l'issue de ces 2 amours ? Il cache à chacune l'existence de l'autre ,ce n'est pas tenable.
Magnifique livre qui s'inscrit dans le contexte d'un régime répressif où les arrestations sont nombreuses dont des professeurs de littérature ou encore le père de Sila. Sont-ils contraints à partir ?

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Il est impossible de ne pas tomber sous le charme de Madame Hayat, le roman et le personnage. le roman est à la fois sentimental, sensuel, intelligent, il fait la part belle à la littérature, et fort car il se situe dans un pays qui n'est pas nommé, sous un gouvernement qui ne l'est pas non plus, mais dans lequel règne un régime autoritaire, la liberté d'expression, la liberté religieuse, la liberté sexuelle sont attaquées, bastonnées. La jeunesse est partagée entre le désir de le quitter et celui de rester et résister. Fazil, le narrateur, est étudiant, son père qui subvenait à ses besoins est décédé, pour poursuivre ces études de lettres, il fait des figurations dans des émissions de télévision. C'est là, qu'il rencontre Madame Hayat, une femme plus âgée que lui, elle pourrait être sa mère. Elle est joviale, sensuelle, voluptueuse, elle a la vivacité d'esprit d'une femme qui a vécue et cela enchante Fazil. Elle le fascine et il en tombe très amoureux. Ils s'attachent l'un à l'autre, malgré la différence d'âge, la sexualité est présente.. A l'université il rencontre une jeune étudiante Sila, avec elle, il parle littérature, mais pas que, ils ont également une relation. Fazil est passionné par les cours de deux professeurs : Mr Kaan et Mme Nermin. Il faut dire que les extraits de cours, qu'il nous fait partager sont merveilleux, (notamment celui sur la critique littéraire). Il vit dans une auberge collective, une sorte de phalanstère, dans laquelle logent, des étudiants, un journaliste dit le Poète, un travesti qui se prostitue, et plusieurs autres dont une enfant, Tehvide, qui en est un peu la mascotte. Lorsque la répression du pouvoir s'accentue, des drames touchent la communauté, c'est le moment de bascule du roman. Sila veut absolument quitter le pays, elle aspire à la liberté, Fazil est partagé entre sa passion pour Madame Hayat et son envie de suivre Sila. le livre est bouleversant, au début, on suit les amours de Fazil avec Madame Hayat et avec Sila, dans un climat paisible, on plonge avec lui dans la littérature, puis, soudain la réalité politique du pays vient renverser cet l'équilibre, Fazil s'engage, malgré la pression policière. Il résiste à l'oppression, Madame Hayat aussi à sa manière, tant qu'à Sila son départ est aussi une forme de résistance, elle avait soif d'une liberté absolue.. Tous les personnages sont touchants. Ahmet Altan force l'admiration car il a écrit ce beau, émouvant et puissant roman, en étant en prison.
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Magnifique roman! de la poésie, de la délicatesse, de l'intelligence dans les débats intérieurs du personnage, matérialisée par ses deux relations…bref, à lire et relire car c'est beau, actuel, vrai et riche! Dans son contexte d'écriture, ce livre est un trésor de liberté d'expression et d'initiation philosophique!
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