Mr Skeffington

Fanny Skeffington va bientôt avoir 50 ans. Elle qui était une extrêmement belle femme, sur laquelle tous les hommes se retournaient, a perdu ses atours à la suite d'une maladie et du poids des années qui commence à se faire sentir. En outre, elle souffre depuis quelques temps d'apparitions dérangeantes : elle a l'impression de voir son ex-mari, dont elle a divorcé il y a de nombreuses années, réapparaître dans sa maison, assis à sa chaise comme autrefois. Voulant échapper à tout cela, elle fait une sorte de retour en arrière, retrouve d'anciens amants, espérant retrouver dans leurs yeux un semblant d'intérêt pour elle. Mais c'est tout le contraire qui se produit. Leur attitude lui renvoie ce qu'elle a perdu. Dans ce roman, Elizabeth von Arnim décrit extrêmement bien les sentiments de cette femme arrivée au déclin de sa beauté, et ses tentatives pour masquer les effets du temps qui passe et continuer de vivre malgré tout une vie satisfaisante. le récit des retrouvailles avec ses amants, bien qu'un peu long parfois, est assez amusant, et le dénouement du récit assez surprenant.

Le dernier roman d'Elisabeth von Arnim, décédée à l'âge de 75 ans, paru en 1940 et ceci explique cela. L'héroïne, si l'on peut dire, Fanny est une femme de 50 ans qui se relève d'une grave maladie. Autrefois l'épouse d'un richissime Mr Skeffington, Job, dont elle a divorcé pour cause d'infidélités innombrables,elle vit depuis, dans la demeure de son ex mari, sans aucun problème d'argent ni d'intendance, bien au contraire. Mais le sujet n'est pas là . Fanny est seule, hormis sa fidèle domestique Manby, Fanny a eu tous les hommes à ses pieds, une beauté légendaire. A présent, fausses mèches de cheveux, maquillages outranciers pour tenter d'effacer les marques du temps. Fanny retrouve ou cherche à retrouver ses amants, et c'est une catastrophe, chacun a fait son bonhomme de chemin, s'est rangé, en couple, dans la religion, ou court encore après sa fortune. Bref, 20 ans après, les rencontres sont pathétiques, lucides, chacun en voyant l'autre se dit mentalement "Le pauvre" ou "La pauvre". Brutal, cinglant, tellement vrai, ce qui nous attend tous. le style de l'écriture de von Arnim est extraordinaire de finesse, subtilité, et finalement quelque peu subversif.
Au final, concernant l'histoire, Fanny retrouve son mari, ruiné, persécuté entant que juif, aveugle, complètement décati, et comprend que l'empathie, l'amour, l'amitié, la tendresse sont au dessus de tout. Peu importe le reste.

Le livre devrait s'appeler Mrs Skeffington, car c'est elle que nous suivons tout au long de ce délicieux roman. Mrs Skeffington fut une femme exceptionnellement belle, habituée à avoir tous les hommes à ses pieds. Mais elle va avoir très bientôt cinquante, fut très malade, et sa beauté s'en est allée. Elle n'en est pas encore complètement consciente au début du livre, mais des rencontres, en particulier avec certains de ses ex-amants vont la mettre en face de la triste réalité. Et sans l'admiration et l'amour des hommes, la vie de Mrs Skeffington est terriblement vide, parce que c'est tout ce qui la remplissait jusque maintenant. Elle eu jadis un mari, Mr Skeffington, dont elle divorça assez rapidement, et qui la nanti confortablement en argent jusqu'à la fin de sa vie. Et ce mari qu'elle n'a jamais vraiment aimé, dont elle fut plutôt heureuse de se débarrasser, revient dans sa vie, sous forme d'un fantôme de plus en plus envahissant. Et elle apprend, qu'il est de retour à Londres….

J'ai encore plus aimé ce livre qu'Avril enchanté. Peut être parce qu'il est moins uniformément rose, quelques filets noirs apparaissent par moments. L'avenir de Fanny semble terriblement triste, et celui de ses anciens amours guerre plus reluisant. Ensuite, parce que le livre est franchement très drôle. En particulier la visite d'Edward, devenu chauve et que personne ne reconnaît, est hilarante. Mais d'autres scènes sont aussi d'une irrésistible drôlerie. J'ai juste trouvé la toute fin un peu trop chargée à mon goût, un peu artificielle. Mais ne boudons pas notre plaisir, ce livre est une petite merveille, à déguster sans modération. Une gourmandise qui ne risque pas de provoquer la moindre indigestion. Je la conseille très vivement à toutes celles qui ne l'on pas encore savourée. Quand à moi, je suis très heureuse de savoir que plusieurs autres livres d'Elisabeth von Arnim m'attendent encore.