La Seine. Ses couleurs, sa nonchalance, ses péniches engourdies et ses bateaux-mouches qui glissent leurs cohortes de touristes à fleur d'eau, le long de ses berges, parfois d'une plage éphémère.
Bijou d'argent au cou d'une capitale romantique, fleuve aristocrate habillé de ses lumières pour briller comme un diadème dans les rétines des amoureux, fleuve magique et rayonnant qui inspire le poète et le peintre, la Seine s'offre à Paris.
Mais aussi belle que puisse être la parure, celle ci peut aussi se transformer en un serpent d'eau capable d'enserrer la ville et d'avaler tout ce que celle ci porte en elle de plus sombre : Ces corps que l'on quitte et qu'on lui abandonne en refusant cette condamnation à vivre reçue à la naissance, ceux démembrés comme une poupée , vidés de cette humanité que des âmes malades exècrent.
La Seine avale, charrie et nettoie. Mais elle garde en elle, dans sa vase endormie, la mémoire des perversités humaines et la désespérance des Hommes.
Ce fleuve, Rémi Julian le connait bien. Il lui voue une affection toute particulière et en connait les moindres recoins. C'est là qu'il exerce ses fonctions. A la brigade fluviale. Là qu'inlassablement il sillonne les méandres de ce cours d'eau à la recherche de ce que les hommes cherchent à cacher, à celle de ce que d'autres offrent en sacrifice de leur mal être pour disparaître.
Mais ce que recèle ce fleuve capital reste souvent caché des vivants, et seuls les plongeurs de la fluviale peuvent faire le lien entre le monde des hommes et celui de l'oubli.
Et en cette période de Noël où l'hiver a pris ses quartiers dans la ville, Rémi et son équipe espèrent repousser chaque jour le moment fatidique où il faudra plonger dans l'eau glaciale pour récupérer un corps sans vie, gonflé comme une baudruche, qu'il faudra bien saisir à bras le corps pour le remonter à la surface ;l 'instant où il faudra surmonter sa peur quand le plongeur sentira contre sa peau celle des gardiens du lieu, imposants fantômes, silures magnifiques, dont on ne sait jamais s'ils vous frôlent pour vous mettre en garde ou vous attirer vers le fond de l'abîme.
Quand la patrouille est appelée à rejoindre la berge en face du 36 quais des orfèvres, la trêve semble bien terminée. En arrivant sur les lieux une barque attend d'offrir son macabre présent. Sous un linceul le corps d'une femme, figée dans la mort, atrocement mutilée.
Pour Rémi et ses collègues, la pire soirée qui soit. Malgré les outrages on devine la beauté qui fut celle de la victime.
Les collègues du 36 prennent la relève, sous la houlette de Jo Desprez, tandis que Rémi reste hanté par cette beauté assassinée.
L'enquête va emmener les policiers de la Crime à la suite d'un parfumeur avant de graviter autour du milieu de la mode et d'un artiste excentrique. Pour autant, la descente en eaux troubles ne fait que commencer, car très vite d'autres cadavres accostent sur les berges.
Ingrid ASTIER, signe là son tout premier roman noir. Et ce livre m'a plu, disons le d'entrée, mais pas sans quelques nuances.
On sent bien que l'auteur s'est appliquée, a fait un vrai travail de recherche et fignolé dans le moindre détail son récit. Respectant les codes du thriller, elle livre une histoire certes efficace, mais qui, à trop respecter les ficelles du genre, nous donne un roman à qui il manque un peu de souffle. le scénario pourra paraître classique à certain, et quelques uns des personnages auraient gagné à un peu plus d'épaisseur.
Pour autant ce premier roman ne manque pas d'intérêt.
Ingrid Astier nous offre des passages magnifiques sur cette Seine onirique et la capitale qu'elle traverse. le lecteur découvre des personnages originaux, vivants le long de ce fleuve, dont les touristes ne soupçonnent même pas l'existence.
Il n'y a pas véritablement de personnage principal dans ce roman. L'intérêt du lecteur se porte au grès du roulis de l'histoire, tantôt vers Rémi Julian de la fluviale, tantôt sur le commandant Desprez et ses hommes, laissant finalement le rôle principal à ce fleuve à la fois si attirant et si angoissant.
Pour un premier roman
Ingrid ASTIER atteint son objectif, réussissant à introduire dans ce thriller des saveurs et des odeurs dans un scénario qui tourne pourtant autour de situation particulièrement glauques, et ce n'est pas là, le moindre de ses mérites.
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