Neuf récits pour ne pas oublier. La guerre toujours la guerre. Dès sa naissance,
Aliyeh Ataei ne connait que la guerre, la mort, la douleur. Née à la frontière entre l'Afghanistan et l'Iran en 1982, elle voit son père victime de crises d'épilepsie, après avoir combattu dans la guerre contre l'Irak. D'entrée, elle nous raconte le transport de son père pour se faire soigner à Téhéran, dans un pays meurtri, alors qu'il souffre, hurle de douleurs. Il meurt à 57 ans alors qu'elle n'en a même pas 5.
Les récits datés du calendrier persan se suivent dans une écriture douce, méticuleuse, pour ne pas omettre les moindres détails, les donner à lire. Elle mêle douceur et violence alors que les bourreaux se succèdent, eux qui portent le nom du communisme, de moudjahidin, de talibans, d'américains… Jeune, elle ne comprend pas les envolés dans les discours des adultes. On ne comprend jamais la guerre.
Aliyeh Ataei dit la douleur, dit ce que nos journaux d'informations ne peuvent nous dire, la réalité des opprimés.
Avec ses yeux d'enfants, elle nous parle de ces histoires de familles, ses secrets au milieu des querelles ethniques. Elle nous dit la douleur d'être femme au milieu des querelles ethniques. « C'est à la condition des femmes que l'on mesure la santé d'une nation. » Avec ses récits, elle donne à lire la condition des exilés et plus encore ces personnes nées à la frontière, sans patrie.
Ses récits sont beaux, touchants. Elle nous confie sa difficulté de vivre avec « une identité fragmentée ». Elle parle avec justesse de l'histoire de sa famille tourmentée, meurtrie de tous les côtés, de la difficulté de l'exil, de la vie loin des siens. La chasse aux scorpions devient un prétexte pour évoquer la guerre, toujours la guerre et l'invasion des Soviétiques face à « l'âme guerrière » des Afghans. Elle evoque l'amour, un amour beau et résistant, un amour brisé par la mort. « Si je n'étais pas trop jeune pour l'amour, je l'étais pour la mort. »
On ne peut qu'être touché par ses mots bouleversants.
Aliyeh Ataei offre un livre personnel et indispensable pour mieux voir les victimes et ne pas les oublier.
Avec ce premier livre traduit en français, l'écrivaine témoigne avec une écriture juste du tragique de la guerre. Son courage exemplaire démontre admirablement que la littérature n'a pas dit son dernier mot face à la monstruosité des hommes.