Véritable parcours implicite au sein des collections du musée, la thématique des masques offre au visiteur une promenade symbolique et visuelle d'une rare beauté. De l'archipel océanien à l'Afrique, sans oublier les masques Inuit et ceux du monde himalayen, une même obsession se devine : figer l'expression d'un visage humain pour mieux suggérer une apparition. "Le sculpteur n'y géométrise pas un fantôme qu'il ignore, il suscite celui-ci par sa géométrie. Son masque agit moins dans la mesure où il ressemble à l'homme que dans celle où il ne lui ressemble pas ; les masques-animaux ne sont pas des animaux : le masque antilope n'est pas une antilope, mais l'esprit antilope, et c'est son style qui le fait esprit", devait écrire à propos des masques africains André Malraux. Qui mieux que l'auteur de L'Intemporel pouvait exprimer la double nature du masque, vecteur de sacré en même temps qu'oeuvre d'art dont la beauté concourt à l'efficacité religieuse ? Si le continent noir a décliné à l'envi les noces poétiques et sauvages des règnes humain et animal (on ne compte plus les masques-buffles, masques-singes, masques-oiseaux, masques-gazelles ou ces fascinants "entre-deux" dotés de bec ou de cornes), le monde océanien a célébré davantage encore les vertus du dédoublement et de la métamorphose. Du Sépik à la Nouvelle-Calédonie, en passant par la Nouvelle-Bretagne et la Nouvelle-Irlande, tout n'est que déguisement et mascarade, sublimation du "soi" qui devient "autre". Points d'interrogation à la face des dieux, les masques chamaniques des monde polaire et himalayen rejoignent, quant à eux, la force brutale des premières icônes... (p. 48)
Masques et mascarades
"regarder ces cultures sans s'empêtrer dans les catégories que le XXe siècle nous a léguées", tel est le parti pris de la muséographie orchestrée par Jean Nouvel et Germain Viatte. Vaste espace dénué de cloisons, le plateau des collections qui abrite près de 35000 oeuvres réparties sur quatre continents - Afrique, Asie, Océanie et Amériques - propose aux visiteurs une déambulation poétique, baignée dans une pénombre propice au recueillement et au rêve. (p.23)
Une Forêt dans la ville.
L'art est une activité universelle et continue, sans séparation entre le passé et le présent.
Henry Moore (1941)
(p.11)
Les chefs-d'oeuvre du monde entier naissent libres et égaux.
Jacques Kerchache