Citations sur Essai sur les données immédiates de la conscience (48)
Nous sommes libres quand nos actes émanent de notre personnalité entière, quand ils l'expriment, quand ils ont avec elle cette indéfinissable ressemblance qu'on trouve parfois entre l'œuvre et l'artiste.
Une vie intérieure aux moments bien distincts, aux états nettement caractérisés, répondra mieux aux exigences de la vie sociale. Même, une psychologie superficielle pourra se contenter de la décrire sans tomber pour cela dans l'erreur, à condition toutefois de se restreindre à l'étude des faits une fois produits, et d'en négliger le mode de formation. Mais si, passant de la statique à la dynamique, cette psychologie prétend raisonner sur les faits s'accomplissant comme elle a raisonné sur les faits accomplis, si elle nous présente le moi concret et vivant comme une association de termes qui, distincts les uns des autres, se juxtaposent dans un milieu homogène, elle verra se dresser devant elle d'insurmontables difficultés. Et ces difficultés se multiplieront à mesure qu'elle déploiera de plus grands efforts pour les résoudre, car tous ses efforts ne feront que dégager de mieux en mieux l'absurdité de l'hypothèse fondamentale par laquelle on a déroulé le temps dans l'espace, et placé la succession au sein même de la simultanéité.
C'est sur cette question de l'égale possibilité de deux actions ou de deux volitions contraires que nous nous arrêterons d'abord: peut-être recueillerons-nous ainsi quelque indication sur la nature de l'opération par laquelle la volonté choisit
On appelle liberté le rapport du moi concret à l’acte qu’il accomplit.
En un mot, si l’on convient d’appeler libre tout acte qui émane du moi, et du moi seulement, l’acte qui porte la marque de notre personne est véritablement libre, car notre moi seul en revendiquera la paternité.
Notre caractère, c’est encore nous; et parce qu’on s’est plu à scinder la personne en deux parties pour considérer tour à tour, par un effort d’abstraction, le moi qui sent ou pense et le moi qui agit, il y aurait quelque puérilité à conclure que l’un des deux moi pèse sur l’autre.
Quand nos amis les plus sûrs s’accordent à nous conseiller un acte important, les sentiments qu’ils expriment avec tant d’insistance viennent se poser à la surface de notre moi, et s’y solidifier à la manière des idées dont nous parlions tout à l’heure. Petit à petit ils formeront une croûte épaisse qui recouvrira nos sentiments personnels; nous croirons agir librement, et c’est seulement en y réfléchissant plus tard que nous reconnaîtrons notre erreur.
... si la durée proprement dite ne se mesure pas, qu’est-ce donc que les oscillations du pendule mesurent ?
Si les sons se dissocient, c’est qu’ils laissent entre eux des intervalles vides. Si on les compte, c’est que les intervalles demeurent entre les sons qui passent : comment ces intervalles demeureraient-ils, s’ils étaient durée pure, et non pas espace ?
Nous prétendons que plus un effort donné nous fait l’effet de croître, plus augmente le nombre des muscles qui se contractent sympathiquement, et que la conscience apparente d’une plus grande intensité d’effort sur un point donné de l’organisme se réduit, en réalité, à la perception d’une plus grande surface du corps s’intéressant à l’opération.