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[...] Paul et moi , nous sommes venus au monde le jour où l' Enola Gay a balancé sa cargaison sur une ville du Japon appelée Hiroshima .
Le 6 Août 1945 .
Un jour inoubliable .
Il n'y en a pas tant que ça .
C'est fou comme on apprend sur les gens en regardant de près ce qu'ils lisent.
Chaque Américain est capable de dire exactement où il se trouvait et ce qu'il faisait, le 22 novembre 1963, aux premières heures de l'après-midi.
La méchanceté d'un garçon de treize ans est inouïe. Son exigence, coupante. Son arrogance, sans limites. Son incapacité à abdiquer ses droits flagrante.
C'est là que j'ai appris à aimer les flots boueux, ces eaux ocre que le fleuve roule inlassablement. Nous nous sommes égarés quelquefois à suivre ses méandres : au long des bras morts, autour des lagunes, les magnolias embaumaient et de la mousse espagnole tombait des cyprès, elle ressemblait à une barbe argentée flottant mollement en l'air.
Je me demande parfois quelle femme elle est aujourd’hui. Oui, que deviennent ceux que nous avons aimés et perdus ?
A dix ans j’ai appris en une seule phrase, prononcée sur un ton désolé et néanmoins badin tout le racisme du sud.
Je me souviens parfaitement du visage et de l'allure de cet homme. C'est stupéfiant comme la photographie est nette. Il était blond, la peau claire, les traits fins. Il avait des épaules rondes. Il portait une chemise de lin beige. Je dois admettre qu'il était beau. Il est devenu d'une absolue laideur à l’instant où il a posé ses doigts sur la joue de ma mère.
Nous les trouvions sympathiques ces hommes à cheval qui défendaient l'honneur et ces jeunes femmes dont les poitrines pointaient sous des corsages étroits.
Si je m'allongeais sur le divan d'un psy, comme on le fait un peu partout dans ce pays, j'en découvrirais sans doute de bonnes. Mais je ne me couche pas : j'écris.