Je checke volontiers cette masse critique à défaut de pouvoir lui serrer la poigne, virus oblige.
Plus qu'une théorie, en ces temps pandémiesques et hygiénistes, la poignée de main est devenue une vieille coutume tribale que nos descendants observeront avec écoeurement dans pas longtemps au musée du quai Branly ou dans un reportage en noir et blanc, sous-titré en écriture inclusive et interdit aux moins de 16 ans. Je ne parle même pas de la bise qui fera sans nul doute son entrée dans le Code pénal. Anthropologues, gardons nos distances.
Ce n'est pas le sujet de la thèse d'Antoine Cavallero qui travaille sur le concept des six degrés de séparation, idée selon laquelle tous les bipèdes de la planète sont reliés à travers un réseau de connaissances d'un maximum de 6 personnes. Ne vous en déplaise, selon ce postulat inventé par l'écrivain
Frigyes Karinthy en 1929, un lien ténu existerait entre vous et votre voisin du dessus amateur de claquettes, cette mamie qui mange quinze mandarines dans un wagon emboucané pendant tout le trajet de vos vacances ou ce gars pitoyable qui promène un détecteur de métaux sur la plage tous les soirs.
Lors de la présentation du fruit de ses recherches, un professeur conteste ses travaux et un défi est lancé. Antoine va devoir retrouver un individu choisi par son adversaire, puis prouver sa théorie des degrés de séparation. Comme le perfide confrère n'a pas désigné son voisin de palier, le jeune chercheur va parcourir le monde pour débusquer cet homme mystère.
Lecture divertissante idéale pour des vacances intramuros car elle nous fait voyager à Hô Chi Minh-Ville, Atlanta, Los Angeles, Corfou ou Genève. L'histoire est originale, l'intrigue prenante et notre héros est une sorte de Philéas Fogg sédentaire, plus proche du Professeur Tournesol que d'Indiana Jones.
L'auteure profite aussi de son récit pour décortiquer comme une crevette rétive au strip-tease le mécanisme sournois de la rumeur et de la fake news sur les réseaux sociaux.
Côté déceptions, les lieux communs qui s'enchaînent pour décrire les tourments d'Antoine, partie de yoyo qui alterne sans transition défaitisme et optimisme avec la mesure d'un nourrisson passant du rire aux larmes à la vitesse d'un changement de couches. J'ai donc senti
Fabienne Betting plus à l'aise dans le registre scientifique que dans celui des émotions.
Je pense aussi que le roman aurait gagné en épaisseur et perdu en mièvreries, s'il s'était davantage intéressé au professeur Metellet, seul personnage nauséabond, présenté sous des traits trop manichéens et qui n'a pas trop voix au chapitre… en dehors du premier. On trouverait presque plus de circonstances atténuantes au méchant d'un James Bond.
Sur le transat d'à côté, une bronzeuse lisait le même livre. le monde est petit.