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Critique de Thyuig


« Chien rouge chien noir » commence par une disparition. Ici ce n'est pas le E qui manque à l'appel, mais bien Lou, qui n'est pas celle d'Apollinaire mais bel et bien un jeune homme. Tout comme dans « Archipel » Bézian montre une nouvelle fois qu'il est un auteur érudit, laquelle érudition se déverse naturellement et donc littérairement et littéralement dans ses oeuvres. Car ici il est question de littérature, enfin pour être exacte, de l'état d'âme du littérateur. Lou est un musicien qui brille dans ce récit par son absence. En somme on n'entend jamais sa musique, la bande dessinée est l'art du muet, du texte et de l'image sans son. D'où l'intérêt de Bézian d'interroger son média au travers de l'absence d'un musicien et donc de musique dans un univers littéralement littéraire.
L'autre invité de choix de ce roman est James Joyce et son Ulysse, oeuvre remarquable et incontournable, fondamentale et certainement à la base de la littérature du 20ème siècle. La marque du grand irlandais intervient dans les trous du récit que laisse volontairement Bézian. Il s'agit de cases vides, cerclées de rouge. Cette sorte de déconstruction du récit, lequel ne subsiste parfois que dans une seule case par planche, permet à l'auteur de concentrer sa plume sur l'action, sur sa densité. Mais que perd-on alors du récit ? Pourquoi ce vide ?
Sans doute parce qu'il se ne passe finalement pas toujours quelque chose d'essentiel dans une histoire, et qu'il faut bien que l'auteur taille au marqueur rouge dans son sujet.
Apollinaire est venu pour Lou, Perec pour sa disparition, Joyce pour Ulysse et sa construction elliptique, Nathalie Sarraute les rejoint alors que l'action se passe dans l'appartement d'un vieil écrivain. Sur ses étagères, parmi les rayonnages de livres, le lecteur distingue la clef de l'oeuvre « le portrait d'un inconnu », oeuvre qui voit son auteur Nathalie Sarraute parfaire avec systématisme sa maîtrise des oppositions.
« Chien rouge chien noir » recoupe tout cela en une véritable histoire, la quête d'une personne disparue mais qui ne l'est peut-être que pour les survivants. Ce qu'on remarque dans « la disparition » de Perec ce n'est pas le E, mais son absence. Tout comme l'être qui vous manque aura plus d'intérêt à vos yeux que celui qui vous entoure quotidiennement.
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